Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/313

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D’autres sentiments l’exaltent. L’amour se dépouille, pour lui, de toute signification sexuelle : il se confond avec l’enthousiasme, le dévoument, l’extase. Il ne voit pas, dans la différence des sexes, la manifestation primordiale, mais l’une des mille manifestations du combat vital. Le désir de la femme, l’instinct sexuel ne représente qu’une force dans le jeu des autres forces : ce n’est pas la puissance suprême, comme pour Dehmel, à qui toutes les grandes énergies cosmiques ne se révèlent qu’à travers le conflit de l’homme et de la femme.

Ce n’est pas le flambeau de l’amour qui éclaire les horizons de sa poésie, mais la flamme ardente d’un pur instinct intellectuel. Alors que la plupart des poètes débutent par des œuvres amoureuses, on ne rencontre dans ses premiers ouvrages que des paysages, des moines, des travailleurs. Ses drames ne traitent que des conflits masculins. Cette particularité contribue à isoler son œuvre, par elle-même si différente déjà de celle des autres lyriques. L’amour n’est pour lui qu’une feuille de l’arbre du monde, et ce n’est ni la dernière, ni la première. Trop de forces diverses et la synthèse de toutes ces forces ont inspiré à ce poète une passion, une extase trop