Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/52

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vraiment devenu populaire parmi ses compatriotes. Aujourd’hui encore, tout glorieux qu’il soit, il aime à venir parmi eux, à s’asseoir dans leurs réunions, à la table de l’auberge ; il aime à les entendre parler du temps et de la récolte, des mille petits soucis qui composent tout leur univers. Il est des leurs, et eux-mêmes se sentent près de lui.

Il aime vraiment la vie des humbles ; il prend part à leurs peines comme à leurs travaux. Toute cette contrée septentrionale lui est chère, avec ses tempêtes, ses rafales de grêle et de neige, sa mer coléreuse et ses nuages menaçants : il a l’orgueil de cette parenté avec cette terre. On retrouverait parfois, dans sa démarche et dans ses mouvements, l’allure du paysan qui marche derrière la charrue, le pas lourd et le genou raide. Ses yeux sont comme la mer de son pays, ses cheveux d’or comme les blés de ses champs. Dans tout son être et dans toute son œuvre apparaît ce caractère élémentaire, primordial. On sent que jamais il n’a rompu le lien qui l’attachait à la nature. Il reste en une sorte de communion organique et directe avec les champs, la mer, le grand air ; car le printemps lui apporte une sensation douloureuse, la dou-