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16 SULLY PRUDHOMME

On A'oit que Musset suit, à travers le monde, l'ardeur de sa sensibilité que l'amour exalte. Il semble se détacher de lui-même : en réalité, il impose sa vie passionnelle à la vie de la nature. Il aime, et la force d'amour qui le brûle se pro- page en ondes de flamme sur l'univers.

Hugo est un grand philosophe, dans le Satyre de la Légende des Siècles, parce que ce mythe antique est à la fois chargé de pensée et singuliè- rement approprié à la sensibilité du poète. Il tra- duit avec plénitude la puissance de renouvelle- ment qui meut l'univers, et il symbolise avec opulence la vie intérieure de Victor Hugo et son besoin d'absorber le monde. Le poète, en s'expri- mant lui-même, semble se détacher de lui-même, et son poème a deux faces, car son lyrisme, qui se déroule avec éclat sur la tige ardente des mots, plonge ici dans le fond même des choses, à la source des énergies de la vie et des fortes pensées.

Sachons goûter le mérite de ces rencontres et de ces trouvailles, mais reconnaissons qu'elles sont brèves. Ces pensées, qui sont les parties maîtresses de ce lyrisme indiscipliné, sont des souvenirs qui s'épanouissent avec le consente- ment de l'univers, et des rêves qui se prolongent