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L ART PARNASSIEN 51

avec le cri des flèches qui fusent dans l'azur des cieux.

Enfin le musicien déploie librement tout son rêve. 11 atteint, comme l'a montré Schopenhauer, 1rs sources profondes de l'être et de la vie. Le vague même des sons soutient l'expansion illi- mitée de nos songes. Quand nous entendons retentir la sonate Clair de Lune comme un bruit de cloches sur les glaciers, toutes nos puissances de sentiment sont déchaînées par l'âme nostal- gique de Beethoven. L'hymne qui sort de nous est. le chant d'allégresse de nos aspirations enfin libérées, et le délice que nous ressentons est si intense qu'il nous fait éprouver le ravissement de l'extase.

Ainsi les Beaux-Arts se classent d'après l'inten- tensité des sentiments qu'ils provoquent dans nos âmes. L'évocation du passé ou la représentation des formes de la vie donne un plaisir qui a sa noblesse, mais la poésie, qui se définit par l'aspi- ration, aboutit aux elfets les plus émouvants. Si elle est capable d'exprimer la grande rêverie phi- losophique où l'univers joue un rôle, elle peut unir, à tous les prestiges de l'art la force de la pensée et l'expression des aspirations.