Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 4, 1838.djvu/54

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avait supporté tout le choc, devinrent alors, à leur tour, le seul objet de l’attaque des Gallois. Mais voyant cette troupe innombrable se précipiter vers eux comme une mer en furie, ils abandonnèrent la colline qu’ils avaient jusqu’alors bravement défendue, et commencèrent à effectuer, vers le château, une retraite régulière, observant dans leur marche l’ordre le plus parfait, seul moyen d’échapper à la mort. Pendant cette prudente manœuvre, quelques troupes légères tentèrent de les couper, et se jetèrent dans le chemin couvert conduisant au château. Mais le sang-froid des archers anglais, accoutumés aux dangers de toute espèce, les sauva dans cette occasion. Une partie des leurs, armés de glaives et de lances, chassèrent les Gallois du chemin creux ; d’autres firent face à l’ennemi ; et divisés en corps qui s’arrêtaient et se retiraient alternativement, ils opposèrent une telle résistance qu’ils arrêtèrent les vainqueurs en échangeant avec eux une innombrable quantité de flèches et de dards qui mirent de part et d’autre beaucoup de soldats hors de combat.

Enfin, après avoir laissé sur le champ de bataille plus des deux tiers de leurs braves compagnons, ils atteignirent un point du château qui, étant commandé par les flèches et les machines de guerre, pouvait leur offrir un abri sûr. Une volée d’énormes pierres et de javelines à tête carrée, d’une forme longue et épaisse, arrêtèrent enfin les poursuites de l’ennemi ; les chefs gallois rappelèrent alors leurs troupes légères et les reconduisirent vers la plaine, où, au milieu des cris d’allégresse et de triomphe, leurs compagnons étaient occupés à mettre en lieu sûr le butin conquis sur l’ennemi ; tandis que quelques-uns, poussés par un sentiment de haine et de vengeance, déchiraient et mutilaient les cadavres des Normands ; action indigne de la cause qu’ils défendaient et du courage qui les animait. Les cris horribles qu’ils poussaient en consommant cette exécrable vengeance frappèrent d’horreur la petite garnison de Garde-Douloureuse, et lui inspirèrent aussi la résolution inébranlable de défendre la forteresse jusqu’à la dernière extrémité, plutôt que de se soumettre à la merci d’un si cruel ennemi.