Panthéon égyptien/43
HATHÔR-PTÉROPHORE.
La planche 17 (C) ci-jointe complétera la série des principales formes de la Vénus égyptienne, que l’on se proposait de faire connaître dans ce recueil mythologique. Les deux longues plumes surmontant la tête de la déesse, et placées au-dessus de la coiffure, formée du vautour, commune à toutes les déesses mères, distinguent spécialement Hathôr de toutes les autres grandes divinités-mères dans les différentes triades égyptiennes. Cette image a été copiée, ainsi que tous ses détails de couleur, dans le grand temple d’Isis, à Philæ[1], et je l’ai retrouvée sur les édifices sacrés de l’Égypte et de la Nubie appartenant à toutes les époques.
La déesse Hathôr tenait en effet un rang si distingué dans la théogonie égyptienne, qu’un grand nombre de nomes lui rendaient un culte particulier et l’adoraient sous la forme que nous venons de décrire.
Le petit temple hypèthre, élevé dans l’île de Philæ par le pharaon Nectanèbe en l’honneur d’Isis, était aussi consacré à Hathôr. La grande galerie qui joint ce petit édifice au grand temple d’Isis, nous montre Hathôr-Stérophore adorée par l’empereur Auguste, et l’empereur Tibère faisant des libations devant trois images de la même déesse, surnommée Dame de la maison d’Enfantement, grande Dame de l’île de Sénem et Dame de la maison des Offrandes.
Cette déesse fut principalement honorée dans les nomes Ombite, Apollonopolite et Tentyrite.
Dans l’île de Béghèh, voisine de Philæ, et nommée Sénem par les anciens Égyptiens, existait un temple consacré à Hathôr, compagne de Chnouphis, le dieu de la première cataracte. Le grand temple d’Ombos était dédié en premier lieu à une triade composée du dieu Sévék-Ra (le père), d’Hathôr (la mère) et de Chons-Har-Schiai-hêt[2] (le fils).
À Edfou (Apollonopolis magna) on adorait la triade formée du dieu Hath, de la déesse Hathôr et de leur fils Har-Sont-Tho[3]. À Tentyris, enfin, on reconnaissait pour membres de la triade qui domine dans le grand temple, particulièrement dédié à Hathôr (ce que démontrent toutes les décorations architecturales), le dieu Har-Hath, comme père, Hathôr, comme mère, et leur fils, le jeune dieu Ohi.
Considérée ainsi comme déesse-mère dans ces diverses préfectures, Hathôr devait naturellement être confondue avec les deux grandes génératrices des dieux, la déesse Mouth et la déesse Natphé. Les preuves de cette double assimilation existent dans des tableaux religieux du grand temple d’Ombos et du petit temple d’Ibsamboul en Nubie.
Il y a plus, dans les temples de l’Égypte où Hathôr ne joue point le rôle de mère, ou de seconde personne de la triade, cette déesse s’y trouve tout au moins honorée comme nourrice du jeune dieu, le fils de la triade locale. À Hermonthis, Hathôr nourrice présente le jeune Harphré à son père Month ou Manthon. À Philæ, c’est aussi la déesse Hathôr qui préside à l’éducation d’Horus, fils d’Isis et d’Osiris, le nourrit de son lait, et reçoit, dans les légendes hiéroglyphiques du bas-relief, les titres de Très-aimable, Nourrice-Épouse, remplissant le ciel et le monde terrestre de ses bienfaits ou de ses beautés[4].
La flatterie, en Égypte comme ailleurs, compara constamment les reines et les princesses du sang royal à la déesse de la beauté, à Hathôr, la Vénus égyptienne. Mais parmi toutes les formes de la déesse, on choisit de préférence celle que présente la planche ci-jointe, pour l’approprier à la représentation habituelle des épouses ou des filles chéries des pharaons ou des rois de la dynastie grecque : chaque grand édifice de l’Égypte en offre de nombreuses preuves, et le Musée royal du Louvre possède des statuettes, soit en bois peint, soit en bronze, incrustées en argent ou en or, et représentant, par exemple, la reine Ahmosis, Nofré-Atari, femme d’Amenophis Ier, chef de la XVIIIe dynastie, la reine, épouse du pharaon Takellothis de la XXIIe dynastie, et la reine Cléopâtre-Cocce, femme d’Évergète II, et mère de Soter II et d’Alexandre Ier. Ces princesses portent la coiffure formée du vautour et surmontée des insignes d’Hathôr, le disque, les cornes et les deux longues plumes.
- ↑ Dans l’intérieur du pronaos, sur le mur de la cella.
- ↑ C’est-à-dire Chons l’Horus qui dilate le cœur.
- ↑ C’est-à-dire l’Horus soutien du monde terrestre.
- ↑ Philæ, temple d’Hathôr, côté gauche intérieur du pronaos.