Parcs et Boudoirs/26
Belle soirée donnée par le riche et vieux marquis de R…, en l’honneur de Louisette, sa nouvelle maîtresse[1].
Louisette a déjà causé bien des ravages dans les cœurs sensibles qui soupirèrent après elle.
Les merveilles de l’ameublement, le luxe des lumières et des fleurs, surprennent les invités. Ils croient traverser un palais de féerie.
Ils défilent devant le marquis et sa jolie compagne, — tous deux debouts sur leur trône. — Un orchestre d’instruments à cordes, au fond de la scène, accompagne en cadence le mouvement de va et vient des invités.
La toile du fond se lève et laisse voir une petite scène sur laquelle dix Pierrots et dix Pierrettes dansent un quadrille et miment.
Différents invités, un peu gris, troublent la représentation de temps en temps et cela égaie les autres.
Le marquis de R… également dans la fumée des vins, se met à danser aux applaudissements de tous.
La toile du fond s’abaisse. On soupe aux petites tables. Souper fort animé. Jeux de scène : les deux enfants négrillons qui portent la traîne de Louisette, se mettent à danser une gavotte avec les musiciens en cercle.
Les Pierrots déguisés en domestiques et ivres, font tomber les plateaux chargés ; ils embrassent les femmes. Tohu-bohu général. Pierrot Ier assidu auprès de Louisette ; les autres, pressants vis-à-vis des grandes dames.
La toile du fond se relève et les Pierrettes dansent plusieurs figures.
Le marquis de R… traverse les groupes comme un fou, enjambe l’orchestre, s’agenouille devant Pierrette Ire.
Celle-ci s’amuse du caduc amoureux, le fait tourner, courir…
Les Seigneurs, les Pierrots, les grandes Dames et les danseuses fredonnent une valse, en chœur. Monsieur de R… chancelle, tombe dans un coin, après avoir bu une dernière coupe de champagne en l’honneur de la jolie danseuse.
Elles quittent la petite scène, prennent les bras des Seigneurs, les invitées ceux des Pierrots.
Pierrot Ier traverse lentement le théâtre avec Louisette. Ils regardent le corps du vieux marquis étendu, immobile. Ils lui font des révérences, les petits négrillons également. Et les deux amoureux rentrent dans les coulisses, enlacés…
- ↑ Au lever du rideau, tous sont assis. On cause, on change de place ; quelques-uns jouent aux cartes, à gauche. Une femme est au clavecin, à droite, entourée de Seigneurs qui la complimentent.