Paris ou les sciences, les institutions et les mœurs au XIXe siècle/Histoire naturelle de l’homme

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Comptoir des Imprimeurs unis (tome 1p. 286-287).

LE
MUSÉE D’ANTHROPOLOGIE.

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1. — Histoire naturelle de l’homme.


Nous avons au Muséum tout l’univers et toute la création sous nos yeux : les mollusques, les insectes, les crustacés, les reptiles, les oiseaux, les mammifères, s’y montrent avec presque toutes leurs variétés : que manque-t-il donc à cette grande convocation des êtres ? Ce qu’il y manque, peu de chose en vérité, l’homme. Cherchez-le dans ces galeries où abondent tous les animaux : il n’y est pas. Faut-il attribuer, avec un savant professeur, cette lacune si grave à l’espèce de terreur que nous inspirent le mystère de notre nature et la connaissance de nous-mêmes ? Nous ne le croyons pas. Il y a une autre raison, qui motive au Muséum d’histoire naturelle l’absence physiologique de l’homme. Le génie humain répète, sans le savoir, dans toutes ses créations l’ordre ancien que la nature a suivi dans l’enchaînement de ses œuvres. Le Jardin des Plantes a commencé par donner asile au règne minéral et végétal. La vie ne se montra que beaucoup plus tard dans cet établissement qui était destiné à reproduire, comme malgré lui, la marche des formations du globe, et encore ce fut la vie en image. Des animaux empaillés se hasardèrent d’abord en petit nombre. Les apprêts que l’art avait donnés à leur cadavre rappellent l’ancien travail de la nature pour ravir à la destruction la forme des êtres qui ne sont plus. Grâce à l’établissement de la ménagerie et au perfectionnement des collections, tout le règne animal fut successivement représenté dans ce jardin qui ne s’ouvrait autrefois qu’à la botanique. L’absence unique du dernier né de la création trace aujourd’hui pour le Muséum une situation analogue à celle qui précéda dans l’univers l’avénement de l’homme. C’est par l’apparition de ce nouveau venu dans le temple de la science, que le Jardin des Plantes recevra son achèvement. L’histoire naturelle de l’homme doit couronner un jour l’histoire des animaux.

Un ossuaire anthropologique, plutôt ébauche qu’entrepris, figure tristement dans les salles du musée d’Anatomie comparée. Il sera temps d’y revenir tout-à l’heure, lorsque nous aurons porté suffisamment notre souvenir et notre intérêt sur un système, qui mérite d’être étudié. Les travaux du docteur Gall ont servi d’assise à la plupart des travaux modernes sur la physiologie du cerveau. Sans rien préjuger sur une doctrine qui ne paraît pas devoir survivre tout entière à son auteur, nous allons d’abord retracer le portrait de l’homme.