Pausanias, Béotie-1, chapitre I

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Traduction par M. Clavier.
J.-M. Eberhart (5p. 11-16).

CHAPITRE Ι


La Béotie. Les Platéens et leurs exploits contre Xerxès.

LA Béotie est en partie limitrophe de l'Attique, sur tout du côté de Platées qui touche à Eleuthères. Le peuple Béotien a pris son nom de Baeotus ; on dit que Baeotus était fils d'Itonus et de la nymphe Mélanippe, et qu'Itonus était fils d'Amphictyon. Les villes de la Béotie ont pris quelques-unes des noms d'hommes, et la plupart des noms de femmes. Les Platéens qui sont, à ce que je crois, Autochtones, disent que le leur vient de Platée qui était, suivant eux, fille du fleuve Asopus.

Il est évident qu'ils étaient anciennement gouvernés par des rois ; car il n'y avait alors que des monarchies dans la Grèce , et point du tout de démocraties. Les Platéens ne connaissent aucun de leurs anciens rois, excepté Asopus et Cithaeron qui avait régné avant lui ; ils ont donné leur nom, l'un au fleuve, l'autre à la montagne ; et je crois que Platée qui avait donné le sien à la ville, était fille du roi Asopus, et non du fleuve.

On ne connaît aucune action mémorable des Platéens avant la bataille de Marathon où ils se trouvèrent avec les Athéniens. Plus tard Xerxès étant venu dans la Grèce, ils eurent le courage de s'embarquer avec les Athéniens, et combattirent dans leur propre pays contre Mardonius, fils de Gobryas et général de Xerxès. Il leur arriva deux fois d'être chassés de la Béotie et d'y revenir de nouveau.

Les Lacédémoniens assiégèrent leur ville et la prirent pendant la guerre du Péloponnèse contre les Athéniens ; elle fut rétablie à l'époque de la paix qu'Antalcidas, Spartiate, fit au nom des Grecs avec le roi des Perses, et les Platéens y revinrent d'Athènes où ils s'étaient réfugiés ; mais ils ne devaient pas tarder à éprouver un second malheur. La guerre n'était pas ouvertement déclarée entre eux et les Thébains, les Platéens disaient même que la paix subsistait toujours, parce qu'ils n'avaient eu aucune part ni au projet ni à l'exécution de la prise de la Cadmée par les Lacédémoniens ; mais les Thébains prétendaient que la paix, étant l'ouvrage des Lacédémoniens, était rompue pour tout le monde, dès l'instant qu'ils l'avaient violée eux-mêmes. Les Platéens d'après cela, n'étant pas sans inquiétude du côté des Thébains, veillaient avec le plus grand soin à la sûreté de leur ville ; et ceux qui avaient des terres à quelque distance, n'y allaient pas tous les jours ; mais sachant que les Thébains s'assemblaient assez souvent pour délibérer en commun, ils remarquaient ces jours d'assemblées, et ils allaient alors tranquillement visiter leurs biens, même ceux qui étaient les plus éloignés.

Néoclès qui se trouvait alors Béotarque à Thèbes, n'ignorant pas cette manœuvre des Platéens, ordonna un jour aux Thébains de se rendre tous à l'assemblée avec leurs armes ; il les conduisit sur-le-champ à Platées, non par le chemin le plus court à travers la plaine, mais par le chemin d'Hysies qui va à Eleuthères et dans l'Attique, sur lequel il n'y avait point de sentinelles, et par où il devait se trouver sous les murs de Platées, au plus tard vers le milieu de la journée.

Les Platéens croyant les Thébains à leur assemblée, restaient dans leurs champs, et cependant l'entrée de la ville leur était fermée ; ceux qui furent pris dedans capitulèrent avec les Thébains qui leur permirent de s'en aller avant le coucher du soleil ; les hommes chacun avec une tunique et les femmes avec deux. Il arriva alors aux Platéens le contraire de ce qui s'était passé, lorsqu'ils avaient été pris précédemment par Archidamus et les Lacédémoniens ; car ceux-ci en les assiégeant les avaient enfermés d'un double mur pour les empêcher de sortir de la ville ; les Thébains, au contraire, s'en emparèrent en les empêchant d'y entrer.

Platées fut prise pour la seconde fois trois ans avant la bataille de Leuctres, sous l'Archontat d'Astius à Athènes ; la ville fut entièrement rasée par les Thébains à l'exception des temples ; la manière dont elle avait été prise, fut la cause du salut de tous les Platéens ; les Athéniens les reçurent de nouveau chez eux. Après la bataille de Chéronée, Philippe mit garnison à Thèbes, et entre autres choses qu'il fit pour l'affaiblir, il rétablit les Platéens dans leur ville.