Pausanias, Elide-1, chapitre VI

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Traduction par M. Clavier.
J.-M. Eberhart (3p. 46-53).

CHAPITRE VI


Samia et Samicum. Aréné. Ruines de Scilionte. Mont Typaeus. Phérénice.

EN prenant la route directe d'Olympie, peu après avoir traversé l'Anigrus, vous trouvez à droite du chemin un endroit élevé et la ville Samia qui est au-dessus de Samicum même. On dit que Samicum servait de citadelle à Polysperchon Ætolien, pour tenir les Arcadiens dans sa dépendance.

Aucun Messénien ni aucun Éléen n'a su m'indiquer d'une manière précise les ruines d'Aréné : la situation de cette ville peut fournir matière à des conjectures très diverses. Ceux qui croient qu'anciennement, dans les temps héroïques, Samicum portait le nom d'Aréné, me paraissent avoir l'opinion la plus vraisemblable : ils citent pour la soutenir ce que dit Homère dans l'Iliade : Le fleuve Minyéus qui se jette dans la mer tout auprès d'Aréné.

Ces ruines sont effectivement fort voisines de l'Agrinus. On peut douter que Samicum se soit jamais appelé Aréné, mais les Arcadiens conviennent eux-mêmes que l'Anigrus se nommait anciennement Minyéus ; et il est à présumer que la Néda ne devint du côté de la mer la limite entre la Messénie et le pays des Éléens qu'à l'époque du retour des Héraclides dans le Péloponnèse.

Après avoir traversé l'Anigrus, et marché assez longtemps à travers un pays presque tout couvert de sable et planté de pins sauvages ; vous verrez derrière vous sur la gauche, les ruines de Scillonte ; c'était autrefois une des villes de la Triphylie. Ses habitants prirent le parti des Pisaeates qui faisaient la guerre aux Éléens, et se déclarèrent ouvertement contre ceux-ci, qui, pour cette raison, les chassèrent du pays.

Les Lacédémoniens ôtèrent dans la suite Scillonte aux Éléens, et la donnèrent à Xénophon, fils de Grillus, qui était déjà exilé d'Athènes. Son crime était d'avoir porté les armes pour Cyrus, le plus grand ennemi des Athéniens, dans son expédition contre le roi de Perse, qui était bien disposé en leur faveur. Cyrus, en effet, faisant sa résidence à Sardes, fournissait à Lysandre, fils d' Aristocritus et aux Lacédémoniens, de l'argent pour leurs vaisseaux. C'est pour cela qu'on exila Xénophon. Il s'établit à Scillonte, où il consacra une enceinte et bâtit un temple à Diane d'Éphèse.

Scillonte est un pays de chasse, on y trouve surtout beaucoup de sangliers et de cerfs ; le fleuve Sélinus traverse le pays. Les exégètes Éléens disent que Scillonte fut rendue aux Éléens, et que Xénophon fut poursuivi devant le tribunal Olympiaque, pour avoir accepté le don que les Lacédémoniens lui en avaient fait; mais les Éléens lui pardonnèrent, et il continua paisiblement sa résidence à Scillonte ; ils montrent en effet à peu de distance du temple un tombeau sur lequel il y a une statue de marbre Pentélique, et les gens du pays disent que c'est le tombeau de Xénophon.

On trouve sur la route d'Olympie, avant de traverser l'Alphée, une montagne qui, du côté de Scillonte, a des rochers très hauts et très escarpés ; on la nomme le mont Typaeus. La loi veut chez les Éléens, qu'on précipite du haut de cette montagne les femmes qu'on surprend aux jeux Olympiques, ou qui osent seulement traverser l'Alphée pendant les jours où cela leur est défendu. Callipatira est, disent-ils, la seule femme qui s'y soit laissé prendre ; d'autres la nomment Phérénice, et non Callipatira.


Son mari étant mort avant elle, elle prit tout l'ajustement d'un maître de gymnastique, et conduisit son fils à Olympie pour combattre dans les jeux. Pisirodus (c'était le nom du jeune homme) ayant remporté le prix, Callipatira, en franchissant la barrière qui tient renfermés les maîtres de gymnastique, laissa reconnaître son sexe. On la renvoya cependant sans la punir, par considération pour son père, ses frères et son fils, qui avaient tous été couronnés aux jeux Olympiques; mais on rendit une loi portant que désormais les maîtres de gymnastique ne se présentassent que nus à ces exercices.