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Pendant l’Exil Tome II La guerre en Europe 1870

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Actes et paroles volume 4J Hetzel (p. 225-226).

IX

LA GUERRE EN EUROPE

En juillet 1870, la guerre éclate. Le piége Hohenzollern est tendu par la Prusse à la France, et la France y tombe. Victor Hugo croyait la France armée, et, par conséquent, d’avance il la croyait victorieuse. Il déplorait pourtant cette guerre, et il songeait au sang qu’elle allait répandre.

Il écrivit aux femmes de Guernesey la lettre qu’on va lire et qui fut reproduite par les journaux anglais comme adressée à toutes les femmes d’Angleterre.

Pendant le siége de Paris, des ballots de charpie, expédiés d’Angleterre à Victor Hugo, furent partagés par lui, comme il s’y était engagé dans sa lettre, en deux parts égales, l’une pour les blessés français, l’autre pour les blessés allemands. M. de Flavigny, président de la commission internationale, se chargea de transmettre au quartier général de Versailles les ballots de charpie destinés par Victor Hugo aux ambulances allemandes.

aux femmes de guernesey
Hauteville-House, 22 juillet 1870.
Mesdames,

Il a plu à quelques hommes de condamner à mort une partie du genre humain, et une guerre à outrance se prépare. Cette guerre n’est ni une guerre de liberté, ni une guerre de devoir, c’est une guerre de caprice. Deux peuples vont s’entre-tuer pour le plaisir de deux princes. Pendant que les penseurs perfectionnent la civilisation, les rois perfectionnent la guerre. Celle-ci sera affreuse.

On annonce des chefs-d’œuvre. Un fusil tuera douze hommes, un canon en tuera mille. Ce qui va couler à flots dans le Rhin, ce n’est plus l’eau pure et libre des grandes Alpes, c’est le sang des hommes.

Des mères, des sœurs, des filles, des femmes vont pleurer. Vous allez toutes être en deuil, celles-ci à cause de leur malheur, celles-là à cause du malheur des autres.

Mesdames, quel carnage ! quel choc de tous ces infortunés combattants ! Permettez-moi de vous adresser une prière. Puisque ces aveugles oublient qu’ils sont frères, soyez leurs sœurs, venez-leur en aide, faites de la charpie. Tout le vieux linge de nos maisons, qui ici ne sert à rien, peut là-bas sauver la vie à des blessés. Toutes les femmes de ce pays s’employant à cette œuvre fraternelle, ce sera beau ; ce sera un grand exemple et un grand bienfait. Les hommes font le mal, vous femmes, faites le remède ; et puisque sur cette terre il y a de mauvais anges, soyez les bons.

Si vous le voulez, et vous le voudrez en peu de temps on peut avoir une quantité considérable de charpie. Nous en ferons deux parts égales, et nous enverrons l’une à la France et l’autre à la Prusse.

Je mets à vos pieds mon respect.

Victor Hugo.