Petit Manuel d’harmonie/Du rhythme musical et de ses différentes espèces
§ 13.
DU RHYTHME MUSICAL. — NOMENCLATURE DE SES SIX DIFFÉRENTES
ESPÈCES APPLIQUÉES A L’ACCOMPAGNEMENT DE LA MÉLODIE,
PRINCIPALEMENT PAR LE PIANO.
Si le rhythme est l’ame de la musique, et peut même, par la seule force de son action sur l’organisme humain produire un très grand effet[1], on ne peut nier qu’appliqué sous différentes formes à l’harmonie accompagnatrice du chant il ne double encore les effets de ce principal moteur de tout plaisir musical.
Ce n’est donc pas du rhythme de la mélodie dont nous allons nous occuper, mais plutôt de celui qui peut être donné à l’accompagnement de piano d’un motif quelconque. Le rhythme, appliqué à l’accompagnement de piano, et même d’orchestre petit ou complet, est subdivisé en six espèces dont voici la nomenclature :
- 1° — Rhythme passif.
- 2° — actif.
- 3° — divisionnaire.
- 4° — temps fort
- 5° — temps faible.
- 6° — arpège.
La plupart de ces différents rhythmes peuvent être réunis soit par deux ou par trois ; mais, dans une sage pratique, on ne fait ordinairement usage que de deux rhythmes simultanés.
1° Le rhythme passif se produit en imitant dans toutes les parties les différentes valeurs de notes qui forment la mélodie accompagnée. Exemple :
2° Le rhythme actif est celui qui a une physionomie particulière et plus mouvementée que celui du chant lui-même, quoique pourtant il imite ce dernier au moins dans une des parties accompagnatrices.
Exemple :
3° Le rhythme divisionnaire se produit en divisant la note la plus longue de la mesure dans laquelle la mélodie est écrite. Cette division se continue sans relâche, tandis que la mélodie accompagnée suit une marche plus calme ; et vice versa, si la chant est dans un rhythme animé. Exemple :
4° Le rhythme temps-fort est celui qui se frappe sur chaque temps fort de la mesure. Exemple :
5° Le rhythme temps faible se frappe sur chaque temps faible de la mesure. Il est assez rare d’employer ce dernier rhythme dans toutes les parties. Ordinairement on l’emploie simultanément avec la rhythme temps fort. Exemple :
6° Le rhythme arpège se produit en faisant entendre, soit à partir du temps fort, soit à partir du temps faible, et l’une après l’autre, les notes que forment les accords de l’harmonie accompagnatrice. Ce rhythme, quoique jetant un peu d’indécision dans la mesure, cause souvent un très bel et très solennel effet ; surtout lorsque la mélodie supérieure a un caractère religieux ou affectueux.
L’on a dû remarquer que la basse, dans l’un ou l’autre rhythme, frappe presque toujours le premier temps fort. C’est afin de maintenir la régularité de la mesure que la plus grave partie de l’harmonie divise ainsi les temps en espaces égaux.
Enfin, c’est par la lecture et l’audition suivies de morceaux accompagnés, soit par l’orchestre ou le piano, que le lecteur se mettra à même de savoir choisir bientôt avec discernement quelle espèce de rhythme il doit employer de préférence lorsqu’il veut accompagner n’importe quel genre de mélodie que ce soit.
- ↑ Témoin le tambour battant la générale un jour de danger. Et, qui n’a pas éprouvé que, par l’effet seul du rhythme d’un air populaire répercuté contre un corps dur, on le reconnait très facilement, quoique pourtant il soit privé de toute espèce de son musical remémoratif ?