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Poème de la prison/Ballade XII

La bibliothèque libre.
Poésies complètes, Texte établi par Charles d’HéricaultErnest Flammarion (p. 26-27).

BALLADE XII.

     Puisqu’ainsi est que loingtain de vous suis,
Ma Maistresse, dont Dieu scet s’il m’ennuie,
Si chierement vous requier que je puis
Qu’il vous plaise de vostre courtoisie,
Quant vous estes seule, sans compaignie,
Me souhaidier un baisier amoureux
Venant du cueur et de pensée lie,
Pour alegier mes griefs maulx doloreux.
     Quant en mon lit doy reposer de nuis,
Penser m’assault et Desir me guerrye ;
Et en pensant maintesfois m’est advis
Que je vous tiens entre mes bras, m’amye ;
Lors acolle mon oreillier et crie :
Mercy Amours, faictes moy si eureux
Qu’avenir puist mon penser en ma vie.
Pour alegier mes griefs maulx doloreux.
    Espoir m’a dit et par sa foy promis
Qu’il m’aidera et que ne m’en soussie ;
Mais tant y met qu’un an me semble dix.
Et non pourtant, soit ou sens ou folie,
Je m’y attens et en lui je m’afie
Qu’il fera tant que Dangier le crueux,
N’aura briefment plus sur moy seigneurie,
Pour alegier mes griefs maulx doloreux.


ENVOI

     À Loyauté de plus en plus m’alye,
Et à Amours humblement je supplie
Que de mon fait vueillent estre piteux,
En me donnant de mes vouloirs partie,
Pour alegier mes griefs maulx doloreux.