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Poèmes et Paysages/« Vois-tu, de sa blanche lumière »

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LXVII


 
Vois-tu, de sa blanche lumière
L’aube au loin baigne l’horizon ;
L’hirondelle a fui la chaumière,
Les ailes rasent le gazon ;
Par les blés murs s’en va l’abeille ;
Tout vole et murmure et s’éveille ;
Et toi, tu dors, ô poète ! Pourquoi ?
— Ma bien-aimée est loin de moi !

Le ruisseau dans son lit de mousse,
Le vent sous le dôme des bois,
L’oiseau dans son nid d’herbe douce
Mêlent leurs souffles et leurs voix.
L’onde, l’oiseau, la fleur penchante,
Pour fêter le soleil, tout chante :
Et tu te tais, ô poète ! Pourquoi ?
— Ma bien-aimée est loin de moi !


Le bouvreuil s’échappant des roses,
L’alouette au chant vif et clair,
La fleur de ses lèvres décloses
Embaumant les souffles de l’air,
L’abeille que son miel enivre,
Tout vit, tout semble heureux de vivre :
Toi seul es triste, ô poète ! Pourquoi ?
— Ma bien-aimée est loin de moi !

Elle est bien loin, ma douce belle,
Bien loin dans la grande cité !
Bonheur, chansons, Muse, avec elle,
Las, tout a fui, tout m’a quitté.
Aube, fleurs, brises embaumées,
Bruits d’ailes et bruits de ramées,
Rien ne me plaît !… Ne me dis plus : « Pourquoi ? »
— Ma bien-aimée est loin de moi !