Poésies complètes (Le Goffic)/Printemps de Bretagne

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Poésies complètesLibrairie Plon (p. 107-108).
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PRINTEMPS DE BRETAGNE[1]


À Armand Dayot.


Une aube de douceur s’éveille sur la lande :
Le printemps de Bretagne a fleuri les talus.
Les cloches de Ker-Is l’ont dit jusqu’en Islande
Aux pâles « En-Allés » qui ne reviendront plus.
 
Nous aussi qui vivons et qui mourrons loin d’elle,
Loin de la douce fée aux cheveux de genêt,
Que notre cœur au moins lui demeure fidèle :
Renaissons avec elle à l’heure où tout renaît.


Ô printemps de Bretagne, enchantement du monde !
Sourire virginal de la terre et des eaux !
C’est comme un miel épars dans la lumière blonde :
Viviane éveillée a repris ses fuseaux.

File, file l’argent des aubes aprilines !
File pour les landiers ta quenouille d’or fin !
De tes rubis, Charmeuse, habille les collines ;
Ne fais qu’une émeraude avec la mer sans fin.

C’est assez qu’un reflet pris à tes doigts de flamme,
Une lueur ravie à ton ciel enchanté,
Descende jusqu’à nous pour rattacher notre âme
À l’âme du pays qu’a fleuri ta beauté !

  1. Pièce dite au premier dîner des Bretons de Paris.