Poésies de Madame Deshoulières/14

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Théophile Berquet, Libraire (p. 43-45).

STANCES.



Agréables transports qu’un tendre amour inspire,
Désirs impatiens, qu’êtes-vous devenus ?
Dans le cœur du berger pour qui le mien soupire,
Je vous cherche, je vous désire,
Et je ne vous retrouve plus.

Son rival est absent, et la nuit, qui s’avance,
Pour la troisième fois a triomphé du jour
Sans qu’il ait profité de cette heureuse absence.
Avec si peu d’impatience,
Hélas ! on n’a guère d’amour.

Il ne sent plus pour moi ce qu’on sent quand on aime ;
L’infidèle a passé sous de nouvelles lois.
Il me dit bien encor que son mal est extrême ;
Mais il ne le dit plus de même
Qu’il me le disait autrefois.

Revenez dans mon cœur, paisible indifférence

Que l’amour a changée en de cuisans soucis.
Je ne reconnais plus sa fatale puissance,
Et, grâce à tant de négligence,
Je ne veux plus aimer Tircis.

Je ne veux plus l’aimer ! ah ! discours téméraire !
Voudrais-je éteindre un feu qui fait tout mon bonheur ?
Amour, redonnez-lui le dessein de me plaire :
Mais, quoi que l’ingrat puisse faire,
Ne sortez jamais de mon cœur.