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Poëmes choisis de Marbode, évêque de Rennes

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Société archéologique du département d’Ille-et-Vilaine

POËMES CHOISIS

DE

MARBODE, ÉVÊQUE DE RENNES

1040 — 1123

TRADUITS EN VERS FRANÇAIS, AVEC LE TEXTE EN REGARD.



INTRODUCTION


Dans les derniers mois de l’année 1123, un messager envoyé par l’abbé et les moines de Saint-Aubin d’Angers parcourait les villes épiscopales, les abbayes, les grands prieurés de Bretagne. Il portait au cou un grand rouleau écrit, et pendant qu’il se reposait et réparait ses forces[1], les évêques, les chanoines et les moines lisaient avec attention le parchemin et y inscrivaient à leur tour quelques lignes[2]. Or, voici ce qu’on lisait sur la lettre du messager angevin :

« À tous les fils de l’Église une et sainte, l’humble congrégation du bienheureux Aubin, évêque d’Angers : pleine victoire sur l’ennemi, et pour cette victoire, la couronne.

« L’autorité apostolique nous enseigne que prier les uns pour les autres, porter les fardeaux l’un de l’autre, c’est accomplir la loi du Christ.

« C’est pourquoi, nous, serviteurs du Christ, nous efforçant avec une pieuse sollicitude d’accomplir cette loi chrétienne, nous vous annonçons la mort du seigneur Marbode, vénérable évêque dont la mémoire sera toujours honorée : sa parole était charmante, sa religion éclatante, ses mœurs pleines d’honnêteté et de distinction ; il était profondément érudit dans la science des belles-lettres, sa conversation était remplie de sel, et ses discours coulaient de ses lèvres plus doux que le miel, et bien que de son temps il ne fut bruit, en Gaule, que d’études et de travaux de toutes sortes, il était sans conteste au sommet et proclamé par tous roi des lettres et de l’éloquence gallicanes. Or, le trois des ides de septembre, malade de corps, mais l’esprit plein de force, mourant a ce monde, pour vivre dans Jésus-Christ, il nous a quittés, il nous a laissés accablés d’une intolérable douleur, nous qu’il avait habitués à l’aimer par dessus tout.

« Après s’être longtemps adonné à l’étude et à la pratique des belles-lettres, qui florissaient de tout côté ; après s’être rendu célèbre à juste titre et s’être acquis une immense renommée comme maître des écoles de la ville d’Angers, il fut élu évêque du siège de Rennes et sacré par le très-révérend pape Urbain, durant le concile de Tours. Armé du glaive de l’Esprit-Saint, il porta pendant vingt-huit années cette dignité ou plutôt ce fardeau, au milieu d’un peuple barbare, dont la férocité ne connaissait que les armes. Gouverneur fidèle et prudent, il courba des fronts orgueilleux sous ses justes censures, et à force de raisons, de prières, de sollicitations, il rétablit la paix. Enfin, arrivé au terme de la vieillesse, plein de jours consommés dans la sainte vie que nous avons racontée, il se reposa dans le Seigneur. Entré dans la voie où toute chair aboutit, pressentant sa mort prochaine, il déposa le fardeau de l’épiscopat, fit les vœux monastiques et revêtit l’habit de saint Benoît, en se donnant à Saint-Aubin. Ainsi lui aussi, dépouillé de tout, il se fit pauvre pour mieux suivre le Christ pauvre. Autrefois, comme Marthe, il avait pris souci et peine de beaucoup de choses ; désormais, comme une autre Marie, reconnaissant qu’une seule chose est nécessaire, il avait choisi la meilleure part, et elle ne lui sera point ôtée. »

C’est dans ces termes que les moines d’Angers annonçaient au monde religieux et lettré la mort d’un homme qui fut à la fois un pieux et saint évêque, un littérateur illustre, et sans contestation possible le plus grand poëte du xie siècle.

Ses contemporains furent unanimes à lui décerner ce titre, et il le méritait.

Cela prouve peu en faveur de son mérite, pensera quelqu’un, qui ne connait les siècles réputés barbares que par les abrégés et manuels soi-disant classiques d’histoire littéraire. Je reconnais que le xie siècle brille peu ; mais c’était cependant un siècle de renaissance, et l’homme qui se met à la tête dans un pareil siècle ne peut pas être sans valeur.

Et ce qui constitue la valeur supérieure de Marbode, c’est qu’il ne se contenta pas, comme ses contemporains, d’employer la forme du vers à des épitaphes, à de pieuses chroniques, à des imitations plus ou moins heureuses des récits bibliques ou évangéliques ; il accueillit souvent la muse profane. Il ne se contenta pas, à un autre point de vue, du vers carlovingien, où la rime, doublée, triplée, quintuplée, embrouillé, enchevêtre, coupe et rompt à chaque pas et la période et la pensée elle-même ; il employa, et employa en maître, le vieux vers latin, le vers classique de Virgile et d’Ovide. Non pas que, suivant le goût et dans la forme de ses contemporains, il n’ait écrit de longs poëmes, ou plutôt de longues chroniques rimées, sur le miracle de Théophile, auquel la Sainte Vierge rendit le traité par lequel il s’était vendu à Satan ; sur les sept Machabées, sur le martyre de saint Laurent, de saint Victor, de saint Maurice, de sainte Thaïs, des saints Félix et Adaucte, et sur la vie pleine de miracles de saint Maurille, l’un des plus illustres évêques d’Angers. Non pas même que ces poèmes ne soient, et de beaucoup, la part la plus volumineuse de son œuvre ; mais il est manifeste qu’il a, dans ces rimes, donné beaucoup plutôt satisfaction à sa piété, au dessein d’édifier ses lecteurs, qu’à sa verve poétique. Bien plus, il confesse lui-même que c’est une sorte d’expiation des poèmes profanes, œuvres de sa jeunesse, qu’il eût voulu n’avoir pas publiés, et qui constituent, sinon aux yeux de ses contemporains, au moins aux yeux de la postérité, son titre réel a la primauté poétique de son siècle.

Pour peu qu’un poëte soit personnel, le meilleur commentaire de son œuvre est la notice de sa vie.

Marbode naquit vers l’année 1040, à Angers[3]. Sa famille y tenait un rang fort élevé à tout le moins comme fortune, et figure au nombre des plus insignes bienfaiteurs de l’abbaye de Saint-Aubin. C’est par le Cartulaire de cette abbaye qu’on sait que son père s’appelait Robert Le Pelletier, et qu’il avait au moins trois frères, Hugues, Salomon et Paganel. Dupaz et Albert Le Grand nomment sa mère Hildeburge. Quelques-uns veulent que ce fut une famille de grande noblesse ; le surnom du père ne l’indique pas. D’autres ont prétendu rattacher Marbode a la famille parlementaire de Marbœuf ; c’est une flatterie qui ne tiendrait pas au plus léger examen, uniquement fondée sur la consonnance du nom.

Quoi qu’il en soit, Marbode, destiné à l’Église, reçut une éducation aussi complète qu’il se pouvait, et il en profita si bien, que ses talents littéraires le mirent en relief dès sa première jeunesse.

L’école épiscopale d’Angers, qui datait du ve siècle et de saint Maurille, était alors la plus célèbre de la France occidentale. On y voyait accourir, comme à Paris, à Chartres, à Reims, non-seulement tous les jeunes hommes des pays voisins, mais encore des Allemands, des Anglais, etc.

Marbode fut d’abord chargé d’enseigner l’éloquence sacrée, et cet enseignement eut bientôt tant d’éclat que Eusèbe Brunon, évêque, d’Angers, l’éleva à la dignité de maître-école, c’est-à-dire à la dignité de chef suprême et de directeur de tout l’enseignement. Jamais la réputation des écoles angevines ne fut telle : tous les contemporains le constatent, et leurs éloges sont si unanimes que beaucoup, parmi les historiens postérieurs, pensent que ce fut sous, la maîtrise de Marbode que les écoles d’Angers prirent le titre et le rang d’Université. Marbode eut surtout le talent d’exciter et d’entretenir une grande émulation entre ses élèves en leur proposant à traiter, dans une sorte de concours, une thèse commune, scientifique ou littéraire. Il y a dans le recueil de ses poésies un certain nombre de lieux-communs poétiques qui pourraient bien être un souvenir de ces concours : le thème de l’écolier revu et corrigé par le maître. C’est sans doute encore de cette époque qu’il faut dater ces jolies épigrammes, ces petits poëmes qui ne dépareraient pas une anthologie classique ; le Forgeron, le Vase brisé, vrais camées antiques d’autant plus séduisants qu’on s’attendait moins à les trouver dans un écrin du xie siècle.

Mais c’est très-certainement le zèle pédagogique qui lui dicta ses traités de rhétorique, et notamment l’Art Poétique, qu’il a dédié à l’un de ses disciples sous le titre : De ornamentis verborum. Je n’oserais pas être aussi affirmatif sur le poëme le plus important de Marbode, celui qui a le mieux conservé sa renommée, puisqu’il fut traduit en vers français dès le xiie siècle, et qu’il était encore classique dans les écoles de pharmacie à la fin du xvie siècle : je veux parler du Lapidaire. Ce n’est point là, je le crois, un manuel auquel on ait donné la forme du vers comme pure mnémotechnie ; c’est un poème écrit avec amour pour résumer et célébrer une science véritablement aimée, et c’est pour cela que ce poème descriptif est resté un des chefs-d’œuvre de la poésie didactique au moyen âge ; c’est une œuvre d’âge mûr, peut-être de première vieillesse. Du reste, le poëte ne le dit-il pas dans son prologue ?

Ce livre est réservé pour mes amis d’élite.
Ce que sait le vulgaire a perdu son mérite.
N’allons point profaner les mystères trahis !

Marbode aimait ces curiosités. Nous avons de lui un autre poëme écrit lorsqu’il avait atteint l’âge de soixante ans, dans lequel il combat les erreurs de l’astrologie, et qui montre jusqu’à quel point il avait étudié les grimoires cabalistiques.

Brunon, le vieil évêque d’Angers, lui-même fort instruit, élève des écoles de Chartres, où il avait eu pour maîtres et le vénérable Fulbert et l’hérésiarque Béranger, admirait avec une affection vraiment paternelle les succès de Marbode. Il ajouta à son titre d’écolâtre celui d’archidiacre, et l’éleva ainsi aux plus hautes dignités ecclésiastiques.

Marbode conserva sa double charge jusqu’à la mort de Brunon (1081). Mais après avoir perdu cet excellent homme, dont il a célébré, dans une épitaphe qui nous a été conservée, les rares vertus, et principalement la bonté et la mansuétude, il se démit de son titre d’écolâtre. On ignore le motif de cette démarche. Craignait-il — car, malgré son esprit satirique, il était véritablement amoureux de la paix — craignait-il d’exciter la jalousie des autres chanoines ? Était-ce, au contraire, le désir de se soustraire lui-même aux applaudissements et d’obéir pleinement aux entraînements de sa piété et de sa modestie ? Il n’avait pas eu de jeunesse. Dès ses plus tendres années, il s’était tellement distingué de ses condisciples par la gravité religieuse de sa vie, qu’il avait été parfois l’objet de leurs sarcasmes.

Quoi qu’il ensuit, en quittant l’école, il y laissa son cœur, et la preuve s’en rencontre dans ses relations ultérieures avec les plus célèbres de ses élèves : Samson, devenu plus tard évêque de Winchester ; Ulger, qui montai sur le siège épiscopal d’Angers ; Geoffroy, abbé de Vendôme, etc.

« L’archidiaconat, que Marbode conserva, n’était pas un titre simplement honorifique ; au moyen âge, l’archidiacre était, disent les vieux canonistes, l’œil et la main de l’évêque, son ministre et son vicaire-général pour toute la juridiction contentieuse et pour l’administration du temporel.

C’est pour-cela que les chartres contemporaines, analysées par D. Chamard dans la notice excellente qu’il a consacrée à Marbode dans son livre des Vies des saints personnages de l’Anjou, nous montrent qu’il « était sans cesse consulté sur des causes litigieuses, assistait à des assemblées ecclésiastiques, à des fondations de monastères, par exemple celui de la Roë ; confirmait des contrats de donations importantes, comme celles de l’église de Saint-Martin de Vertou, du Lion-d’Angers, à l’abbaye de Saint-Aubin ; siégeait comme juge dans tous les graves procès qui surgirent a cette époque en Anjou. »

Les lettres n’étaient pas délaissées ; mais c’est surtout a des œuvres de piété et d’édification que le dévot archidiacre consacta désormais sa plume. Les nombreuses biographies de saints dont il fut l’auteur, datent pour la plupart de cette époque. Les invasions normandes, la destruction (les monastères avaient anéanti un trop grand nombre de légendes contemporaines des premiers évangélisateurs et des premiers civilisateurs de nos contrées. De retour dans leurs cloîtres profanés et ruinés, les plus vieux moines, même avant de réparer les ruines matérielles ; refirent de mémoire l’histoire des saints patrons ; mais trop souvent ces pieux souvenirs avaient pour interprète des plumes malhabiles et peu exercées ; et quand vint la renaissance littéraire qui fut la fleur du pontificat de saint Grégoire VII, comme la renaissance sociale en fut le fruit, les abbés voulurent avoir des Vies des fondateurs de leurs monastères écrites en latin plus élégant et plus correct. C’est ainsi que plusieurs abbés, je dirais mieux, plusieurs abbayes, plusieurs chapitres et plusieurs collégiales, s’adressèrent à Marbode comme à l’écrivain le plus capable de bien répondre a leurs désirs. Il lui vint d’instantes prières jusque du fond du Limousin, ainsi qu’il nous l’apprend dans la préface de la Vie de saint Gauthier.

Quant au salaire qu’il stipulait pour ce genre de travail, il paraîtrait maigre pour un homme de lettres de nos jours.

« Moi, Marbode, est-il écrit à la fin de la Vie de saint Lezin, moi, Marbode, archidiacre indigne de l’église d’Angers, j’ai rédigé et collationné cette Vie du bienheureux Liezin à la prière des chanoines de l’église dédiée à ce saint pontife, lesquels m’ont formellement promis qu’en récompense de mon travail ils me feraient entrer en participation et en communion de toutes les prières et de toutes les bonnes œuvres qu’ils accomplissent dans leur église, en tout temps et chaque jour ; que de plus, ma vie durante, à la messe du matin, ils réciteraient pour moi l’oraison Deus, qui justificat impium, etc. ; qu’après ma mort, ils célèbreraient l’office complet des fidèles défunts avec les oraisons et messes. accoutumées, ainsi que le service anniversaire comme pour l’un (les leurs ; enfin qu’à perpétuité, tous les jours, excepté les jours de fête, après prime, en se rendant au chapitre, ils chanteraient pour moi, le psaume De Profundis avec le capitule Requiem æternam et la collecte Absolve, Domine, etc. Que monseigneur saint Lezin soit le témoin, le médiateur et le garant de cette convention entre les susdite chanoines et moi. »

Cette même formule, identiquement reproduite, termine la Vie de saint Magnobode, qu’il écrivit, étant évêque de Rennes, à la prière des chanoines de Saint-Magnobode.

Ce n’était pas seulement sa plume, c’était aussi sa parole qu’il consacrait à la glorification des saints de son pays. Nous avons encore le texte d’un grand panégyrique en l’honneur de l’illustre thaumaturge angevin, saint Florent Le Vieil.

Dom Chamard analyse fort bien ce curieux monument : « L’orateur, dit-il, y montre un amour si tendre, une confiance si filiale entiers saint Florent, que l’on dirait un enfant faisant l’éloge de son père. Le fondateur de l’abbaye du Mont-Glonne est à ses yeux le protecteur et le père de la patrie. Tous les ressorts de l’éloquence sont mis en jeu pour faire ressortir l’éclat des vertus et le nombre des miracles du grand serviteur de Dieu. »

Au commencement de l’année 1096, Marbode fut enlevé à ses graves et calmes fonctions l’archidiacre, à son pays d’Anjou, à ses amis et à ses proches, pour être porté au dernier sommet de la hiérarchie ecclésiastique, ou l’appelaient sa haute réputation littéraire, la sainteté de sa vie, l’orthodoxie de sa doctrine et sa grande expérience des affaires.

Sylvestre de La Guerche, évêque de Rennes, auquel il succédait, était mort en 1093. Soit qu’il ne fut pas procédé immédiatement aux élections qui, a cette époque, étaient faites par les évêques de la province et par le clergé et le peuple de l’église qu’il s’agissait de pourvoir d’un premier pasteur ; soit, comme le disent d’autres historiens, qu’une partie du clergé rennais se soit évertué à multiplier les obstacles pour empêcher l’accès d’un étranger dont l’austérité égalait la douceur, et dont il n’avait à attendre aucune faiblesse ; toujours est-il que trois années s’écoulèrent entre la mort de Sylvestre et l’intronisation de Marbode, qui ne fut sacré qu’au mois de février 1096, par le pape Urbain II lui-même, au milieu du concile de Tours.

L’élection de Marbode à l’évêché de Rennes eût été impossible quelques années plus tôt ; alors l’Anjou et la Bretagne étaient en guerre continuelle. Alors, Marbode était amené, par les passions générales de son pays, à écrire de sa main, et contre ses futures ouailles, cette chanson sanglante et bizarre, qui a en le singulier privilège de rester la plus populaire comme la plus médiocre de ses, poésies, et qui est trop souvent offerte comme un spécimen assez peu flatteur de son talent. Mais, en 1092, la paix s’était faite entre les deux nations par le mariage de la bienheureuse Ermengarde, fille de Foulques, avec Alain Fergent, et c’est manifestement par l’influence de cette princesse, pieuse, sage, lettrée, l’amie de Robert d’Arbrissel et de saint Bernard, que Marbode fut élevé sur le siégé de Rennes.

Ce fut, certes, par des motifs de foi et de soumission que Marbode accepta ce poste, et non par des motifs d’ambition personnelle et toute humaine. Il était jeté au milieu d’un pays qu’un autre prélat angevin, son contemporain, lettré comme lui, Baldric, évêque de Dol, n’hésitait pas[4] à qualifier de « nid de scorpions et de repaire de bêtes doublement féroces. » Et de fait, la Bretagne était en retard de se lever au réveil de la civilisation dont Grégoire VII avait donné le signal. Après les invasions normandes, elle n’avait trouvé que ruines ; tout un siècle s’usa en guerres, en luttes entre les barons descendants des anciens petits rois émigrants, parmi lesquels la maison des comtes de Rennes acquérant une prépondérance chaque jour moins contestée, assurait les bases du prochain établissement de la monarchie ducale de Bretagne. Tout Breton vivait de la guerre et par la guerre. Guerre au dedans, entre le duc et les grands vassaux, quand ce n’est pas des grands vassaux entre eux : au dehors, guerre sans trêve contre l’Anjou et la Normandie jusqu’au jour où l’immense puissance des Plantagenet, maîtres à la fois de l’Anjou et de la Normandie, rendit toute résistance impossible. Tels sont les seuls actes de la politique bretonne durant le xie siècle. L’abus de la force et du fer, l’anarchie féodale dominaient également l’Église. Sur les ruines des sanctuaires et des cloîtres, amoncelées par les Normands, vivait scandaleusement un clergé ignorant et simoniaque ; les seigneurs laïques s’étaient emparés des paroisses et des dîmes et en trafiquaient ; les prêtres, les évêques eux-mêmes se mariaient publiquement afin de transmettre héréditairement à leurs enfants les bénéfices dont ils faisaient un fief de famille. C’est ainsi qu’on vit une dynastie épiscopale de plusieurs générations sur le siège épiscopal de Quimper et sur celui de Dol. Le grand homme et le grand saint qui s’éleva le premier et le-plus énergique pour lutter, contre ces désordres sacrilèges, Robert d’Arbrissel, était lui-même fils d’un prêtre.

Mais tout le monde sait que c’est à Rennes même que Robert exerça d’abord son zèle de réformateur ; archidiacre de son diocèse natal sous le pontificat du prédécesseur immédiat de Marhode ; il laissait à celui-ci le soin de recueillir les prémiers fruits de ses ardents travaux. Marbode trouvait donc tout vivant l’écho de la parole incomparable de Robert ; il pouvait suivre la trace toute fraîche de ses pas apostoliques ; et pour moi, je suis de ceux qui répugnant absolument à admettre que la lettre anonyme de reproches, quelque dubitative qu’elle soit, adressée par le dernier des évêques à Robert, et qui a été l’objet de tant de controverses au xviie siècle, soit réellement tombée de la plume de Marbode. Il me paraît impossible que dans l’âme si bienveillante de l’évêque le soupçon ait pu trouver place contre l’archidiacre, dont il avait dû mieux que tout autre apprécier les œuvres[5].

Marbode eut la fortune de prendre le bâton pastoral au début d’une période de renaissance et de réparation. Il eut un épiscopat laborieux, mais fructueux. Il vit sans doute les choses saintes dans des mains profanes, et il put écrire la sanglante satire Des Prévôts ; mais il vit plus d’une fois des seigneurs repentants remettre entre ses mains les bénéfices par eux usurpés, afin qu’il en opérât la restitution canonique aux monastères ; sans doute il vit chez plus d’un bandit féodal des repentirs hypocrites trop tôt suivis de retours scandaleux à des habitudes de forban, et il put écrire son chef-d’œuvre, le fabliau Du Loup qui se fait Moine ; mais, d’un autre côté, il vit aussi le zèle de l’aristocratie bretonne à suivre son duc aux croisades, et l’émulation de tous dans la fondation des prieurés et des monastères ; il vit la Bretagne se couvrir d’abbayes et de prieurés, et le clergé régulier réparer en tout lieu les scandales d’un clergé simoniaque et honteusement ignorant. Lui-même, quand il fut obligé de sévir contre les chanoines indignes de la collégiale de Vitré, il trouva dans les seigneurs du lieu un appui énergique pour substituer à ces misérables les édifiants religieux de Saint-Melaine. L’influence que le prélat devait à son caractère, à ses talents, à ses vertus, se doublait de selle que lui donna sur le duc Alain Fergent, et plus tard sur le duc Conan, la haute estime et la confiance sans limites de la bienheureuse Ermengarde, dont il fut toujours le conseiller fidèle et dévoué.

L’épiscopat de Marbode ne fut donc ni stérile pour son diocèse, ni sans consolations pour lui ; et à vrai dire, le grand déboire de sa vie lui vint, non de Rennes, mais d’Angeus. Il nous l’a raconté lui-même dans une lettre vraiment-éloquente de tristesse et d’amertume.

Geoffroy de Mayenne, déposé par le Souverain-Pontife, était docilement descendu du siège episcopal d’Angers, et s’était retiré dans le cloître de Cluny. On procéda au choix de son successeur, et durant ces élections, où les influences diverses se combattaient, le peuple, sans attendre les résultats du vote ecclésiastique, proclama tumultueusement un jeune seigneur angevin, qui n’était pas encore entré dans le clergé, mais dont la famille était influente et bien posée, et qui passait lui-même et à bon droit, il le prouva plus tard, pour un homme de haute valeur ; il se nommait Rainaud de Martigné. Ce choix fut vivement combattu par le chapitre, et surtout pas le doyen Guillaume et l’archidiacre Étienne, qui paraissent avoir été mus par des sentiments moins avouables que le pur zèle de la discipline ecclésiastique. Mais ce zèle seul animait des adversaires bien autrement redoutables de Rainaud. C’étaient les evêques et les abbés de la province de Tours, véritables électeurs au point de vue canonique, et parmi lesquels on comptait des hommes tels qu’Hildebert, évêque du Mans, Guillaume, abbé de Saint-Florient, et Geoffroy, abbé de Vendôme.

En face de cette opposition redoutable, Rainaud sut profiter des circonstances et se fit agréer par le duc et par la noblesse d’Anjou, et surtout il gagna un patron dont l’influence devait aplanir tous les obstacles. C’était Marbode. Rainaud avait été son élève. Marbode se jeta dans la lutte avec l’ardeur d’un père. Il part pour Tours, change les dispositions hostiles de l’archevêque Raoul (1101) ; il se rend de la à Rome, et, après avoir triomphé de tous les obstacles, il revenait à Angers, nanti de la confirmation régulière de l’élection de Rainaud par le Souverain-Pontife.

Mais, pendant son voyage, une réaction, dont l’histoire politique et l’histoire ecclésiastique elle-même n’offrent que trop et de trop scandaleux exemples, s’était opérée à Angers. L’opposition, convaincue de son échec, s’était rapprochéé de l’élu, et l’élu, flatté outre mesure de ce retour, s’était livré tout entier à ses adversaires de la veille, devenus ses adulateurs du jour. La victime de cette transaction, ce fut le vieil ami qui n’avait pas reculé devant les fatigues et les ennuis d’une négociation délicate et d’un long voyage, A son retour à Angers, Marbode se vit dépouillé par Rainaud de Martigné de tous les bénéfices qui lui avaient été concédés dans ce diocèse, dont il avait été la gloire la moins contestable ; bien plus, il se vit ignominieusement chassé de la ville où s’étaient écoulées les premières années de sa vie studieuse et où il avait conquis ses titres à la renommée littéraire, et obligé de repartir pour Rome, pour se défendre lui-même contre les accusations de ce nouvel évêque dont il avait seul obtenu la difficile intronisation. C’est alors que l’évêque de Rennes écrivit et publia sans aucun doute sa lettre à Raynaud, dans laquelle il énumère, avec une éloquente et juste indignation, tout ce qu’il a fait et tout ce qu’il a souffert pour cet ingrat pupille. Cette lettre, nous dirions aujourd’hui cette brochure, est pleine de valeur littéraire en même temps que de curiosité historique, et obtint à l’heure même un résultat trop peu souvent constaté en pareille matière : elle fit reconnaître au jeune évêque d’Angers l’indignité de sa conduite. Il voulut aller lui-même à Rome pour solliciter l’absolution de sa double infraction à la discipline ecclésiastique ; et pour que nul ne se méprit sur la sincérité et la portée de son repentir, il supplia Marbode de prendre en mains l’administration du diocèse d’Angers pendant son absence.

C’est pendant cette administration intérimaire que Marbode approuva la fondation de l’abbaye de Nyoiseau, témoignage indiscutable de ses relations avec Robert d’Arbrissel et ses disciples. Un autre témoignage non moins irrécusable, c’est la lettre écrite par lui au B. Vital pour solliciter l’admisision à l’abbaye de Savigny d’une pauvre jeune fille dont les parents ne pouvaient pas payer la dot : « Faites droit à ma demande, très-doux frère, écrit-il à Vital, je vous en supplie, je ne dirai point pour l’amour de moi, mais pour l’amour de Celui qui est le père des orphelins et le juge des veuves, à la condition que si jamais vous avez besoin de mes services, je vous rendrai celui-ci avec le zèle qui sera en mon pouvoir. » Quand on rapproche cette lettre de celle écrite à Robert d’Arbrissel lui-même, et dont nous ayons déjà parlé, est-impossible d’admettre que les deux soient écrites par la même main et par le même cœur ? Un troisième témoignage peut être joint aux deux premiers. Ce fut Marbode qui bénit et consacra la première abbesse de Saint-Sulpice.

Nous avons dit comment, à propos de Raynaud de Martigné, Marbode s’était trouvé en contradiction avec Geoffroi de Vendôme et avec le vénérable Hildebert, évêque du Mans. Entre ces âmes élevées et ces nobles cœurs, un dissentiment de principes ne pouvait pas dégénérer en une querelle de personnes ; Udabbé de Vendôme se rapproche sans arrière-pensée de l’évêque de Rennes ; et comme Hubert, grand chantre de la cathédrale d’Angers, en témoignait son étonnement : « Vous me reprochez, dit Geoffrey dans la sixième lettre du livre V de ses Épître, vous me reprochez la bonne intelligence qui règne publiquement entre l’évêque de Rennes et moi. Certes, un fait de cette nature, pour quiconque n’est pas privé de l’amour de Dieu, ne doit pas être un objet de scandale, et si votre cœur éprouvait quelque émotion à ce sujet, ce devrait être un sentiment de joie, et non de regret. »

Quant à Hildebert du Mans, il renoua bien vite aussi les liens d’une amitié fondée sur une mutuelle estime, et qui dura autant que la vie des deux illustres prélats.

C’est à Hildehert que Marhode dédia son poème philosophique Des dix Chapitres, écrit, nous apprend-il lui-même, alors que le poëte avait atteint sa soixante-septième l’année. Et Hildebert répondait Marbode : « O vous, mon cœur, ma gloire, les délices des rois, la grâce des princes, l’ornement du clergé, l’amour des peuples, le modèle de la vertu, le miroir de la grâce divine, le type de la foi ferme et sincère, l’Orphée de notre temps, prenez notre lyre et faites résonner les plus doux accords. »

Telle fut, en réalité, la vie toute pieuse et toute littéraire de Marbode. Si les chartes contemporaines nous le montrent, comme évêque, mêlé à toutes les grandes affaires de son temps, le lettré prédomine toujours, et c’est le lettré qui nous attire et qui nous retient. Lui-même, il voulut mourir dans un sanctuaire où la piété et les lettres occuperaient seules toutes ses pensées, et déposant volontairement la charge de l’épiscopat, il vint se retirer dans le monastère de Saint-Aubin d’Angers, où il vécut pendant trois ans, sous le froc bénédictin.

Le 11 septembre 1123, il expirait sur un lit de cendres, au milieu du chœur de la basilique abbatiale. Il fut inhumé dans cette dévote église, qu’un artiste nommé Foulques venait de décorer de magnifiques fresques, dont on peut encore admirer aujourdfhtii quelques débris. Ainsi, la peinture entourait de splendeurs la tombe du poëte qui passait à bon droit pour le premier de son temps et de son pays.

La gloire littéraire de Marbode ne fut pas ensevelie avec lui. Son succès était si incontesté, que moins d’un siècle après sa mort, un poëte français traduisait en cette langue le poème populaire des Pierres Précieuses. Les manuscrits de ses œuvres se multipliaient, au point que la seule bibliothèque du roi à Paris, en compte sept : trois du xiiie siècle, trois du xive, et un de l’an 1467[6].

La première édition imprimée est de Rennes, 1524, chez Jean Macé. Yves Mayeuc, évêque de Rennes et confesseur de la duchesse Aune, l’une des plus grandes gloires du clergé breton par sa science et par sa vertu, fut lui-même l’éditeur des œuvres de son illustre prédécesseur. Cette édition est à peu près introuvable aujourd’hui. Dom Beaugendre en publia une plus ample et plus correcte à la suite des œuvres d’Hildebert ; Paris, 1708, in-folio. Enfin, l’abbé Migne a reproduit l’édition de D. Beaugendre, revue et augmentée de plusieurs pièces inédites par M. l’abbé Bourassé, dans le tome 171 de la Patrologie. Je ne parle pas des éditions fort, nombreuses du poëme des Pierres Précieuses, publié séparément.

J’ai dit que ce poème avait été traduit en vers français au xiie siècle. C’est, je crois, la seule des œuvres de Marbode qui ait été jusqu’ici interprétée dans notre langue.

J’ai voulu aller plus loin. J’ai trié dans les in-folio qui renferment les œuvres du poëte ceux de ses poèmes qui me paraissaient de nature à faire comprendre à des lecteurs français la gloire dont leurs aïeux avaient entouré l’auteur. Le latin, il faut bien le reconnaître, est véritablement pour nous une langue morte. J’ai essayé, par une traduction qui ne fût pas une trahison, de ressusciter au milieu des Bretons cette grande figure littéraire, de laquelle je me suis personnellement épris ; et si mes vers ne sont pas trop infidèles, on connaîtra désormais, autrement que de nom seulement, le poëte le plus justement célèbre de la Bretagne et de l’Anjou au xie siècle.

CARMINA VARIA


POÉSIES DIVERSES

LIVRE PREMIER

ÉPÎTRES


I.

A la duchesse Ermengarde.


Fille de Foulque, honneur du pays Armorique,
Belle, candide, illustre, ingénue et pudique,
Si vous n’aviez pas pris le fardeau de l’hymen,
Si des fils n’étaient pas sortis de votre sein,
J’aurais cru voir en vous la déesse du Cynthe.
Mais, rien ne remplaçant la virginité sainte,
Princesse par l’hymen, princesse par le sang,
Je puis, à tout le moins, vous mettre au premier rang
Des déesses qu’on vit unir leurs destinées
Aux dieux, et contracter d’immortels hyménées.


I. — M. episcopus E. comitissæ.


Filia Fulconis, decus Armoricæ regionis,
  Pulchra, pudica, decens, candida, clara, recens,
Si non passa fores thalamos, partusque labores ;
  Posses esse meo Cynthia judicio.
Sed quia juncta mari castæ nequit æquiparari,
  Est etiam potior virginitatis honor :
In grege nuptarum credi potes una dearum,
  Prima vel in primis, o speciosa nimis !

Parlant d’elles ici, et peignent leur beauté,
Je tracerais de vous un portrait non flatté.
Mais toutes ces splendeurs, dont la femme est si fière,
Passeront comme l’ombre et deviendront poussière,
Ou si votre destin doit prolonger son cours,
Si vous devez compter sur d’innombrables jours,
Subissant des horreurs, presqu’à la mort pareilles,
Vous-même vous serez mise au nombre des vieilles.
Ce visage royal, qu’on vante avec transport,
Qu’on vante avec raison, la vieillesse ou la mort
Le flétriront ; ces yeux, au regard vif et tendre,
Et ces longs cheveux blonds se réduiront en cendre.
On dit que votre esprit, éloquent et subtil,
Ne connaît point d’égal. Et qu’en restera-t-il ?
Ce qui peut en rester de mieux : la renommée ;
C’est-à-dire, du son, du vent, de la fumée.
La mite sait ronger les tissus de drap d’or
Et le voleur ravir diamants et trésor ;

Sed tuus iste decor, sata principe, principis uxor,
  Transiet ut fumus, et cito fret humus.
Aut si dilate current tua tempore fato,
  Heu dirum facinus ! efficieris anus.
Vultus formosus laudatur, et est pretiosus,
  Sed mors vel senium destruet hoc pretium.
Luce micans acies, quæ vulnerat aspicientes,
  Et flavus crinis, fiet utrumque cinis.
Fama refert de te quod non sit femina præ te
  Pollens eloquio, callida consilio.
Hæe quoque deficient, et tantum fabula fient ;
  Narrat et antiquos fabula doctiloquos.
Stragula blattarum, vestis cibus ac tincarun,
  Et mettuens, fures aurea congeries :
Omni prudenti sic sunt quasi flamina venti,
  Flamina prætereunt, nec minus hoc pereunt.
Mollities lecti quid confert murice tecti ?

Le sage prise peu ces choses périssables.
Vos rideaux empourprés font-ils plus délectables
Des nuits que vient troubler la crainte du trépas ?
Les vers prennent leur part de vos riches repas.
Valets, femmes, châteaux, donjons et forteresses,
À la mort il faudra, de toutes ces richesses,
Se séparer. Comtesse, au-delà du tombeau
Que vaudront votre titre, et le royal bandeau,
Et le manteau ducal, fourré de blanche hermine,
Et vos gardes d’honneur, gens de si haute mine ?
Faut-il énumérer tous les trésors divers
Qu’accumulent, pour vous, et la terre et les mers ?
À tous ces biens, Madame, il manque la durée.
Mais votre âme dévote, à Jésus consacrée,
Des pauvres vous faisant le pain, le vêtement,
Voilà, pour l’œil de Dieu, votre bel ornement ;
Voilà votre trésor, voilà votre richesse,
Que ne détruiront point la mort, ni la vieillesse.

  Aufert quippe tori gaudia posse mori.
Delicias mensæ quasi vila fercula cense,
  Charum eum vili vertitur in nihili.
Servos, ancillas, cum turribus, oppida, villas
  Quisquis habet vivens, deseret et moriens,
Arminiæ pelles, exornatusque satelles.
  Quem laudis titulum dant tibi post tumulum ?
Quid maris et terras properem bona cuncta referre,
  Quæ quasi te ditant, et tibi suppeditant ?
Divitiæ tales sunt nulli perpetuales,
  Cum mundo vadunt, cumque cadente cadunt.
At quod amas Christum, quod mundum despicis istum
  Et quod pauperibus vestis es atque cibus,
Hoc te formosam facit et Domino pretiosam ;
  Nec mors, nec senium destruet hoc pretium.

II.

A la reine d’Angleterre.


Me voilà bien récompensé
D’avoir bravement traversé
La mer ménaçante et fatale ;
Car mon courage a mérité
De voir la Reine de beauté,
Qu’aucune autre femme n’égale.
Les plis onduleux et flottants
Des longs et larges vêtements
Dont, par une pudeur nouvelle,
Elle veut toute se voiler,
Ne peuvent pas dissimuler
A quel point Dieu l’a faite belle.
Tel le rayon, doux et vermeil,
Émané du brillant soleil,
Apparaît vibrant sous la nue.
Je devrais parler encor mieux
De son esprit ingénieux.


II. — Ad reginam Anglorum.


Est operæ pretium tentasse pericula Ponti,
  Et dubiæ sortis pertimuisse minas.
Reginam vidisse juvat, quam nulle decore
  Corporis ac vultus æquiparare queat.
Quem tamen occultans laxæ velamine vestis
  Sola pudore novo dissimulare cupit ;
Sed naquit abscondi propria quod luce coruscat,
  Et vibrat radios nubila sol penetrans.
Egregios mores, ac molle fluentia verbe,

De son âme pure, ingénue ;
Mais de tout cela je me tais,
Car je n’en pourrais dire assez.
Le silence est chose plus sûre.
Tant d’autres, à pétrir le fard
Habiles, demandent à l’art
De refaire en mieux la nature !
On a des crèmes pour le teint,
Le visage peint et repeint
Est un arsenal de mensonge.
Un embonpoint trop indiscret
S’enferme en un étroit corset ;
Le flanc court se cambre et s’allonge,
Comme les plis du vêtement,
Qui se prolonge habilement.
En rejetant la chevelure,
On semble avoir un large front,
Où des mains adroites feront
De vrais miracles de frisure.
Que votre cœur est différent !
Madame, vous avez vraiment
Les beautés que d’autres simulent ;
Et, bien loin de les étaler,

  Plus reticere juvat, quam minus inde loqui.
Affectant aliæ quod eis nature negavit,
  Purpureas niveo pingere lacte genas ;
Fucatosque trahit facies medicata colores,
  Distinguendo notas artis adulterio.
Comprimit exstantes quarumdam fascia mammas,
  Et longum fingit vestis adacta latus.
Hæ partim retegunt laxosa fronte capillos,
  Et calamistrait crine placere volunt.
Tu, regina, quod es, metuis formosa videri,
  Quæ coemunt aliæ munera gratis habens.
Præstat habere palam quo te nature beavit,

Vous voulez à tous les céler
Et tous vos soins les dissimulent !
Laissez, laissez paraître aux yeux
Les dons que vous tenez des cieux ;
Pour Dieu, ne soyez pas ingrate.
Sans altérer la chasteté,
Les vierges aiment leur beauté
Et soignent sa fleur délicate.
Et vous, en qui tout est grandeur,
Vous l’enfant, l’épouse et la sœur
Des plus grands rois, reine vous-même,
Vous voulez voiler votre front !
Non, ces voiles sont un affront,
Pour un front ceint du diadème.
Et puis, vous cacheriez en vain,
Madame, ce trésor divin
Qui, de toute part, se révèle :
Désormais, dans tout l’univers,
Partout où l’on lira mes vers,
On saura que vous êtes belle.

  Sis ingrata Deo si sua dona neges.
Accensam modio vis occultais Iucernam,
  Non tua, sed Domini munera dantis habes.
Virgo, pudica licet, tanien optat pulchra videri,
  Et castam mentem candide forma decet.
O regis conjux proavis ex regibus orta !
  Magna tegi nequeunt, parva latere solent.
Vivet fama tui quantum mea cagiua vivent,
  Et te cantabit, qui mea scripte leget.

III.

A Odon, évêque et comte.

A Monseigneur Odon, je souhaite tout bien.
Et d’évêque et de comte ayant le double titre,
A votre double emploi vous convenez si bien,
Que l’on vous obéit au camp comme au chapitre.
A chaque fonction vous êtes tout entier,
Et vos subordonnés, en vous voyant paraître,
Trouvent en vous le chef qui marche le premier,
Comte pour le soldat, et prélat pour le prêtre.
Le sort vous a donné ce qu’on peut souhaiter,
La jeunesse, un grand nom et l’immense richesse,
L’éloquence, un esprit propre à tout méditer,
Des mœurs, et la faveur de peuple et de noblesse.
Je Vous écris ces mots, c’est comme un cri du cœur,


III. — Ad Odonem episcopum simul et comitem.


Veri luera boni Domino Marbodus Odoni.
Præsulis et comitis gemino cum nomine sitis,
Insignis cumque te perficiaris utrumque,
Præbentes æque vos clero militiæque,
Cum communi, sed utrique tamen velut uni,
Nam se quisque coli tantum putat, ut sibi soli
Munera præstari, nec quæ velit ulla negari,
Cum vobis dederit sors quidquid homo sibi quærit,
Gazas, ætatem, personaque nobilitatem,
Linguam quæ fari, mentem quæ scit meditari,
Morum candorem, plebis patrumque favorem,
Audeo pause tamen vobis, velut ad renovamen,
Scribere, ne sitis qui non meminisse velitis,

Pour empêcher aussi que votre cœur n’oublie
Un ami spécial. Non pas, mon cher Seigneur,
Que j’attende pour moi la fortune inouïe
D’un rang tout spécial entre tous vos amis ;
C’est moi qui, plus que tous, vous estime et vous aime ;
Non pas pour les trésors qui vous sont départis,
Et dont je ne veux rien ; mais pour vous, pour vous-même.
Je suis et serai pauvre, et pour tout don je veux
Qu’une même amitié nous unisse tous deux.

Si fus est dici, nostri speciales amici ;
Non quia sim talis, qui vobis sim specialis,
Sed quia vos talem scio, quem faciam specialem.
Nec mihi quid detis, plus vos amo quam quod habetis ;
Et quod habetis amo, sed nou ea bona reclamo.
Munera nolo dari mihi, sod volo pauper amari.
Sufficit ad munus, si nos amer alliget anus.

IV.

À Hildebert, évêque du Mans.

Lorsque, ayant lu vos vers, je repasse les miens,
Il semble, en vérité, que, du ciel, je reviens
  Aux humbles plaines de la terre.
Vous planez dans la nue, et, soutenant son vol,
Votre Muse jamais ne vient toucher le sol.
  Souvent, sous votre phrase austère,
Se cache un sens subtil, aux seuls doctes s’ouvrant,
comme, en un anneau d’or, se cache un diamant.
  coulant d’une veine vulgaire,
Au contraire, mes vers, à peine dégrossis,
Du peuple et des savants, facilement compris,
  Dans leur cours ne s’élèvent guère.
Votre style sachant d’antithèses s’orner,
On vous voit savamment tourner et retourner

IV. — M. Redonensis episcopus H. Cenoman, episcopo.

Dum tua scripta legens oculos ad nostra reduco,
E cœlo terras videor spectare jacentes ;
Sublimi nubes excedunt illa volatu,
Nec terris hærent humili replanta gressu.
Sæpe relecta patent solis sapientiaux illa,
Arcanos sensus brevibus stringentia verbis,
Gemma velut modico vix maxima clanditur auro.
Hæc aditu faeili rudibus doctisque patescunt,
Scilicet artifices minus accurata paratu,
Et de communi Iéviter manantia vena.
Vestra per antithesim flectit se musa frequenter
Exercens refluos sinuoso schemate gyros ;

   Comme en un cercle sans issue.
Moi, je suis trop heureux d’aller au but tout droit,
Et je n’imite point la toile qu’à mon toit
   L’habile araignée a tissue.

Nobis directo satis est procedere calle,
Quamlibet et crassa contexere verba Minerva,
Ne cum subtili radio feriamur aragne.

V.

A Samson, évêque de Wincester.

De mon antique ami, le flot, un flot jaloux,
Me sépare, et la mer se fait large entre nous.
Ce Pont n’a point de pont ; point de radeau tranquille
Qu’aux rives du Liger hale un cheval docile.
Moi, je trouve imprudence à confier aux vents,
Aux flots souvent trompeurs, mes destins chancelants :
Dieu, pour chaque élément, a fait diverses races :
A la mer, les poissons ; aux immenses espaces
De l’air, l’oiseau léger ; nous, au sol montueux ;
Les étoiles, la lune et le soleil, aux cieux.
Neptune règne en roi sur une race unique ;
Envahir son royaume est une chose inique
Pour nous. J’hésite donc, et vraiment je ne sais

V. — Marbodus Samsoni episcopo.

Invidet atiquum pelagi mihi fluctus amicum ;
   Oceani limes séparat unanimes.
Nec pons in Ponte, nec sunt vada pervia conte,
   Ut solet in Ligeri navis adacta geri.
Sed neque prudentis reor aut se tradere ventis,
   Aut sua, se spreto, credere fatu freto.
Æquora sunt tantum generi concessa natantum,
   Tellus gressilibus, aura volatilibus ;
Ut chorus astrorum servait convexe polorum :
   Quadrupla materies fert todidem species.
Regnum Neptuni generi sic competit uni,
   Nostra sed improbitas res it in illicitas.
Inde fit ut dubitem cautus ne pericula vitem,

Si je dois rester coi, comme les gens sensés,
Ou par vive amitié prendre un parti moins sage.
Je désire pourtant voir votre cher visage,
Embrasser le vieillard que jeune j’aimais tant,
À votre front blanchi coller mon front tout blanc,
Serrer dans mes deux mains vos deux mains consacrées,
Et goûter, doux ami, vos paroles sacrées.
Pour vous remercier de vos charmants présents,
Ma plume ne peut pas rendre ce que je sens :
Maître, ne doutez point de ma reconnaissance ;
Je sais trop bien sur moi quelle est votre créance ;
Me donnant tout entier, je ne la paierais pas.
Mais mon cœur est glace, mon corps est vieux et las,
Je ne puis de le mer affronter les tempêtes.
Si je pouvais me rendre en ces lieux où vous êtes,
Par un sentier ouvert aux simples piétons,
Tout aussitôt j’irais à vos chères maisons.
Mais vous, ami chéri, vous avez l’habitude
De le mer et des vents ; et, sans inquiétude,
Vous savez naviguer sur les flots indomptés,
Dont est votre pays cerné de tous côtés :

   An stultus fiam propter amicitiam.
Opto tuum vultum, mi præsul, cornere multum,
   Amplectique senem quem colui juvenem.
Sacratasque manus cano conjungere canus,
   Colloquiumque tui, dulcis amice, frui.
Hospitiique fidem, collataque munera pridem,
   Quæ labor est scribi cemmemerare tibi
Ne pater ingratus cui sum servira paratus,
   Cui si me dedero, non tamen æquus ero.
Sed gelidum pectus, sed fessa labore senectus
   Obstat ne faciam per maris alta viam.
Si fines vestri peterentur celle pedestri,
   Ad charas ædes ferrent, amice, pedes.
At tu qui vegetus, qui ventes spernere suetus,

Vous pouvez aisément visiter notre terre, Si vous le voulez bien. Autrefois, trofre père Véeut dans ce pays ; et vous-même êtes né Tout près d’ici. Voici ce berceau fortuné, Voici votre manoir, vos champs, votre prairie ! Là-bas, c’est seulement la seconde patrie ; Ici, c’est la première. Ici, vous avez pris Le savoir dont lai-bas nous recueillez le prix. Pour revenir. chez vous, hravez l’océan même, Vous êtes exilé dans votre poste extrême ; Revenez, vous aurez ici mêmes honneurs.

Un des vôtres régit, au siège des pasteurs, Votre ville natale, et cet autre moinméme

Vous placera toujours, évêque, au rang suprême ; Et, maître souverain de votre cher séjour, Vous-même fixerez le moment du retour. Veillez-vous qu’à Bayeux nous nous trouvions ensemble ? Ce banc porterait bien trois prélats, ce me semble. Préférez-vous quand même un autre rendez-vous ?

— æ

Undis circumagi nonmetuis pelagi,

More tuæ gentis grave quidlibel : aggredientis, Visere, quando voles, littora nbstra valles. u

Hac tu parte salus, tuus est pater l1inc généra tus, Ad natale solum fas sit inire salum.

Hic domus, hic fendus ; prior hic locus, ille secundus ; Te locushie doeuit, quo loeus ille elu-it.

Ut patriam repetas, maris aude rumpereï metas ; Illis namque plagis præsul et exsul agis.

Est et in his oris æquum tibi cuhnen honoris, Urbem, quæ genuit te, tuus ohtinuit.

Hic stas autistes, lieet istinc eorpore distes, Urbem quippe rego, quam regit alter ego.

Huc igittlr poteris, nisi nos non visera quæris, Bloliri reditum, cuin fuerit lihitum.

Quo si forte vocas, eitus oceuram Bajocas, Vous me verrez de suité accourir près de vous. Mais, en me déclarant votre ordre indiscutable, Songez que de mès jours vous êtes responsable.

Sedes pfesulibus suffièit illa tribus. Aut si displîcet hoc, ’si entrera (lespicis istoc, Dicl quo jussus çam, sed cave 51e percam.

VI.

Allîvallon, archidiacre de Nana-as.

Oui, j’embrasse de cœur, ô mon fils bien-aimé, Ce poème charmant que VOUS avez rime ;

J’embrasse votre Muse, en tous lieux acclamée, Dont le jeu-ne talent fixe la renom-niée.

Vous allez répandant Podeur des bonnes mœurs : Le Christ, qui les Sema, cueille ces chères fleurs. Vous voila bien entre dans le camp (le l’Église : Vous ne pleurerez pas cette sainte entreprise. Naguères vous portiez et casque et bouclier,

Du prince, notre duc, rouspétiez chevalier :

Mais craignant du péché d’iufluonce fatale,

Vous courhates le front sous la main pastorale, Vous vous fîtes petit ; et le Christ, satisfait

VI. — M. episcapus In’. erclzidiacano.

Amplector missos a te, charissime fili, Versus ingenii signa benigna tui.

Amplector landes faune vulgante relates, Indolis acquiruxit quas documente tuæ.

Gratulor auspieiis “vitae nwrumque bonorum, Quos in te Christus, qui dederat, reeipit.

Ecelesiæ castris te gratulor associatunl,

Qui modo su !) mundi principe miles eras ’

Nec te pœniteat, quasi sis pejora secutus, Cito rudis factus milite de veteri.

Scilieet abjeetus magis eligis esse proplieta Quam peeeatoruin eastre nefauda sequi.

Passa tamen non est de te dignatio Christi * De votre sacrifice, en a hâte l’effet. Sans travail, et d’un bond vous atteignez les cimes. Uarchidiaconat aux fonctions sublimes Vous est d’abord donné par le choix des pasteurs, Qui, (l’usage, n7appelle à ce comble (Thonneurs Que les prêtres mûris par un labeur intense ;

Non pas que les canons en portent la défense ;

A leurs yeux, la vertu peut suppléeras temps,

Et permet de cueillir des’fruits mûrs au printemps.

Vous en êtes vraiment un exemple suprême, Et vos mœurs font briller votre fonction même. Juste, chaste, disert, toujours obséquieux, Vous montrez clairement a quel sang précieux Votre âme généreuse emprunte sa noblesse. O mon fils bien-aimé, le Roi, dans sa tendresse, Friomphant du démon, prend notre âme pour lui. Le Christ, divin époux, la caresse aujourd’hui, Ut vilis fieres inferiorc loco. Archidiaconii Inox suhlimatus honore Absque labore capis quod lahor assequltur. Sed non displiceat rectoribus Ecclesarium Accepisse ruïlenyquod forêt emeriti. Censuræ canommi res non præjudicat ista’, Quandoquidem, claudi legc, naquit probitas. Consummata brevi compensât tempora multa Virtus, et merito quod petit anticipât. Altum quippe locum datis tu dotibus impies, Ornas susecptum moribus officium.

Te perhibet justum, perhibet te lama pudicum ; r

Tu bonus alloquio, promptus et ohsequio, x Ut non sit duhium générosi germinis esse,

Queni sicd-commendat nobilitas animi. Rcx te concupüt‘, roi dilectissime fili,

Ut David Uriæ conjugis ohsequium. Dœmone prostate, sociavit te sihi Christus, Et veut créer en elle une race bénie : Ainsi David ravit la compagne (PUrie. Seul, devenu saint Paul, au chemin de Damas, La mitre vous attend. Je ne me trompe pas, Généreux Rivallon ; c’est là mon espérance. Pour ne la point frustrer, acquérez la science. Moi, vous me trouverez toujours là, toujours prêt À vous aider en tout, selon votre souhait. Je suis, dans le Seigneur, votre ami, votre frère, Donc, demandez de moi tout ce que je puis faire.

Ut perte crescat regja orogénies. Saulus eras, nunc Paulus eris, Christoque jubente ï Postmodo pontifiais suscites apicem. Hœe nobis de te spes, générose Riallon, Hue ne frustre mur, nocte dieque stude. Me vero facilem, me promptum semper habebis, Ut tibi non desit quidquid habere queanl. Conservus Domini tibi sim, patronus, amicus, Et quidquid juste plusve minusve potes.

VII.

À son ami Gaultîer.

Quand je veux envoyer vers’vous, à la campagne, Ma Muse accoutumée aux bruits de la cité,

Elle regimbe fort, etmà chère compagne. I Ne croirait pas chez vous être en sécurité.

Vous habitez lai-bas un séjour délectable ; "

Votre lyre a trouvé de lÎéeho dans vos bois,

Et quand vous. réeitËz un poëme admirable,

La verdure tressaille au son de votre voix.

Elle a vraiment grand peur, nia Muse épouvantC-‘e, Si mal ello traduit pour vous mes mandements,

lÿotre dans votre feu toute vive jetée,

Ou de voir déchirés par vous ses vêtements. a Ce n’est point un vilain, me dit-elle bien vite, Ce poëte vers qui vous voulez n’envoyer,

VII. — M. Gaulterio sue salutem.

Assuetàm turbis et luxu (livitis urhis,

Et sic obtusam cum rusfvolo mittere inusam‘, llla retrocedit, sibi 11cc tutum fore crédit

A te, Gaulteri, metuende poeta, videri. A Quippe loco frueris, «quo ; sicut et ipse fateris, Te vacuum curis invitat grsatia ruris, Respondente-lyra, cantante poemata mira.

, Hoe illam terrét ; ne simule jussa referret,

Aut sibi flagra dates, aut se feras igne cremares, Aut tuuica scissa, turpis forêt inde remissa. Est, inquit, villœ nequaquam deditus ille,

Ad queñi neseiolan} me vis mode nvizttere solam : Il n’a point pris pour lui, dans ces champs qu’il habite,

Ce qu’ils peuvent avoir de simple et de grossier. Sous ses yeux, tout le jour, il tient ouvert un livre ; Et quand, après souper, les autres vont dormir, Sans souci, tout entier à sa Muse, il se livre» Et dicte ces beaux vers que lira Pavenjr. Si je ne parle pas comme on parle à la ville, Mes rustiques discours seront bien’censurés ; Et si je n’use pas duplus élégant style, Mes pauvres parchemins seront tous ratures. Eussé-je été longtemps presque irrépréhensible, Pour une simple faute, il me déchirera. Envoyez avec moi, vers ce juge terrible, Le voisin, son ami, qui pour vous saluera. » Et moi je répondais au discours de ma Wuse : « Déesse, ne crains rien : je ne te trahis pas ; Rien ne Ifarrivora de triste, ou je nÿabuse,

Quamvismus habitat, tamen omnia rustica vitat. Nain liber adstat ei magna pro parte diei, Quin et post coenam solet ipse Vocare camœnaln, Et vacuus euris, dietare legenda futuris. Si quid inurbane,.si quid non dixero plane, Judicio vatis fiam rea rusticitatis. Ejus censure dabitur mihi multa litura, Quem mea non temere potuerunt errata latere. Aut etiam certe si dixero plura diserte,

Propter pouce. tamen faeiet mihi grande foramen. Mitte Coturnieum qui voce salutet amicum, Unum de vernis, non est via longe paternis. His verbis usæ respondi talia musœ ; Ne timeas, inquam, nec enim te, musa, relinquam, Si tibi quid triste (quod non pute), fecerit iste. lino libenter ces, ruris visura napæas, Et visura ehorum (quod dehes velle) sororum, — Causa voluptatis fiet tibi visio nati. Les Nymphes de ces lieux, Musc, tu les verras ; Dans leur chœur fiwiternel tu seras bien venue : Tu. verras leur enfant et l’entendras parler. n Ma Muse obéissante arrive et vous salue-z « Vivez aussi longtemps que l’on verra couler De la Maine les îlots dans Phërhe- fine e ; drue. n

Quenndignmn-laudis, cum nunquam vifleris, audîs. Paruit imperio mihi non’incrcdazla Clio,. Et quidquid mittat, sic te tatnen ecce salutat : Totnviyas annis, quot- Minis labitur amnis.

VIII.

Méditation.

Au fond de la forêt mon oncle a son manoir ;

J’y cours aussi souvent que j’en ai le pouvoir, Pour tâcher d’oublier des intérêts sordides,

Des travaux écœurants, des soucis homicides. Prés toujours verdoyants, silencieux bosquet, Doux zéphir, tour-à-tour babillard ou discret, Ruisselet enchanteur, qui chante et qui murmure Dans son lit tout rempli de fleurs et de verdure ; Tout cela qui respire et qui peint le bonheur, Tout me rend à moi-même et me» refait le cœur. Qui pourrait vivre en soi, patient et tranquille», Au milieu du tunmlte enivrant de la ville ? Entraîné hors de soi, »qui ne remplirait pas

Le Vain écho du bruit de ses propres ébats ?

l

VIII. — Sermo de viiiäs et virtutibus. «- Petendant esse solitudmevÿz..

!

Rus habet in silva patruus meus ; hue mihi sæpe Mes est abjectis curarum sordibus, et quæ Exeruciaait homincm, secedere ruris amœna ; Herba virons, et silva silens, et spiritus aurœ Lenis et festivus, et fons in gramme vivus Defessam mentem recreant, et me mihireddunt, Et faciunt in me consistera : nain quisin urbe Sollicite, et variis fervente tumultihus exstat, Qui non extra se rapiatur, et expers

Ipse sui vanis impendattempora rebus i ?‘

Hinc amor, inde odium, timor hinc prenait, inde cupide ;

f C’est la haine, l’amour ; l'ambition, la crainte, Dont sans cesse subit la trompeuse contrainte ; Les vices à leur suite accourent se grouper, À peine un homme est-il qui voudrait échapper. Il veut fuir, et la foule aussitôt le ramène Dans le flot vicieux, qui le couvre et l'entraîne. Il faut, fuyant toujours et la foule et le flot, Trouver, pour prendre pied un solitaire îlot ; Il faut, si le salut occupe la pensée, Chercher sur les hauteurs la vertu délaissée. Peut-être dites-vous : Quelle difficulté De remonter ce fleuve où le sort m’a jeté ! Dites-vous qu'il serait plus difficile encore, Si vous vous, rapprochez du gouffre qui dévore, Si vous allez vous-même à l'abime profond, De regagner le bord : ayant touché le fond. tentons donc le salut, si la fuite est facile,

Inter se diverse quidem, sed lege sub une Ignaras veri falso subdentia meutes. Quatuor hæc sequitur vitioriun exercitus omnis ; Vix adeo est aliquis qui non putet ista sequenda, Vel fugienda putans, qui non tamen ista sequatur ; Quippe renitentem trahit impetus ipse ruentun. Et promit a tergo velut indevexa malorum.

Est igitur primum, turhis elabicr, et sic, Praecipitem fixissc gradnm, cursiumque tenere. Tum demum reditum festinct ad alta relictæ Præmia virtutis, eniîänra est ulla snlutis ;

Scd grave forte putat, q-noilinnl prærnpta secutus Ardua moliri rnrsum neqnit ahsque labore ;

Esse putet gravius in præruptissima mergi Unde referre pedem, vel ibi sine fine manere ; Maximus hoc labor ; illud sors pessima rerum. Ergo quod levius prius aggrediamur oportet, Si leve nil restat, quod restat id aggrediamur. Tontons-le, quand bien même elle est’plus difficile. Si vous êtes mauvais, pour Dieu ! Ifempirez pas ; p Relevez-vous un peu, si vous êtes à bas.

Même lepœur gâte peut se guérir encore.

Plus le combat est dur, et plus il nous honore : i Et si vous méprisez la victoire et son prix,

C’est vous qlfen ce moment vous avez en mépris. Or, comprenez-vous bien l’impiété suprême

De cet insensé qui se méprise soi-même,

Pour donner to’11s ses soins aux biens extérieurs ? Gagnez tous "les trésors par de si durs labours,

Que sera-ce vraiment, si votre âme est perdue ?’ Celui qui, poursuivant cette reeheriehc ardue p Des seuls biens corporels, met son âme en oubli, Et pour elle, ici-bas, ne prend aucun souci, Ressemble au moribond zïson heure dernière :

Il n’a plus rien Œhumain, dçst un peu de poussière ; OlIJDÎGUX, c’est une brute engourdie au soleil

Si malus es, noli pejor, vel pessimus esse ; Quod si sis etiam de terri mus, ad meliorem Paulatim cor rape statum : nam maxima laus est Rem perdifficilem summo superare labore.

Si te contemnis, potes banc contemnere laudem. Sed nimis impius est et homo præpostertis ille Qui sua sollieitus curat, se despieit ipsum. Frustra quippe Iucris inhias, frustre colis agrum Incultæ mentis damno si deficis ipse.

Nam si non sentis luera vel distendra mentis Deditus his solis quæ corporis indicat usus ; Cum sensu careas (lesperatissimus æger, Non homo jam, sed humus veI bestia jure Voearis’. Hic de pestiféra fiteonsuetudine morbus À Lethargo similis ; sedet hinc evadere quosdam Contigit exeeptos mortis de faueibus ipsis ; Stiscitat hos aliquante quidam fortune sinistra

l Dans les rêves malsains d’un morbide sommeil. Et pourtant, quelques-uns par un effort suprême l Échappentsà l’effort de 1a mort elle-même : (Test souvent le malheur qui les a réveilles, Car rien ne frappe plus nos regards dessillés ; z Rien ne démontre mieux à notre indifférenctx Du terrestre bonheur la. fatale inconstance. La douleur que nous fait la perte de ces biens. Prouve que le bonheur ne gît pas dans ces riens. N’est-ce pas être heureux, nnvoir plus rien à craindre ? Et neïroyez-wous pas Combien ilspsont à plaindre Ceux qui ne savent point secouer leur langueur, Etdans de tels soucis "emprisonnant leur cœur ! 4 -Aimer ce qu’on peut perdre, on perdre ce qu’on ïzime, C’est craindre ou c’est pleurer ; et c’est le malheur même. Jamais la volupté ne nous rendit heureux. Si nous avons beaucoup, nous sommes anxieux’ : Riches, nous souhaitons nous enrichir encore ;

Pulsans atque moyens socordie peetora ; quippe

Casibus adÿersis patet inconstantio, rerunn,. Nec fieri quemquarfii fugitives posse heutum Indicatipse (lolor qui de fugientihus exstat. Nunc uno prosper rerum sue ces sus, et ipsa. De non perdendis jem p-ertlita sollicitude Suscitet ostendens etiam hane, impense luborem Exeitnt ; ut videant quanta languere graventur, Sed non ut veleant langue ris pellere causes.


p Qui dolet, aut metuit, patet hune non esse boatum ;

Qui perdit quod omet, vel amat quod perdere possit, Hic dolet aut metuit ; sed non est ulle voluptas Rebus in extremis, quam non cite perderc possis. Ergo voluptatum nullum facit ulla beatum,

lndicat hoe ipsi duplex fortune fruenti,

Tristis in amissis, aut anxizLde retinentlis.

Sors cadem cupidos cannes infestat, et illum

I Pauvres, la jalousie amère nous, dévore,

Comprends’cela, mon âme, éveille ta torpeur ;

Pour guérir, prends [la fuite. À coup sur, un docîeur Ne guérira jamais’un fiévreux volontaire.

Hâte-toi Œappliquer la cure salutaire ;

Si le mal se prolonge, ilion traîne la mort.

L’heure ne fut jemais plus propre cet effort :

Au milieu-des soucis et des labeurs sans trêve, q contemple et réfléchis combien la vie est brève !

Le passé, n’és’t-ce pas l’image de la uïort ?’ ’ Havenir est rempli de cette image encol’. 1

Le présent seul nous reste, et ce moment à peine Est né, que ’Ie passé ss’en empare et l’entraîne.

Et voilà les peusers qui müehsorbent le soir, Lorsque de mon parent j’hah ite le manoir. Qui cum nil habeat, multum tameu optat hahere ; Et qui plura cupit, cum jam sihi multa superstar. His ita compertis, mentis que sopore fugato,

Morbi quære fugam : nem qsponte sua febrieniem Damnat apud medicum pereuñdi prava volantes, Nec tibi differopem, quoniam dilatio curée

Morte repentira noununqixam iuterfioit ægrun}.

Ad resipiscendum præsens est aptior bora, A Intra tot auras infinitosque labores.

Aspice quam breve sit quod vivimus ; omnia vitae i Tempora præteritæ mortfs consumpsit imago. Mortis imago tenet nihilominus omue futurum. Illud tàntillum spatii brevis, atque pusillum Quod vivis præsens, jam præteritum fit et abseus. Hæc et plura mihi lioet, atque lîbet nieditari, Fronde sub agresti d-‘um rure moror patrueli.

l

IX.

Éloge de la vie monastique.

Bienheureux sectateurs du pur dogme-chrétien,

De propre à’chacun dieux, ils ne réservent rien. Soumis à leurubbé, dont la règle est letitïe, Nul ne voudrait agir suîvaîît son propre arbitre. Tous n’ont qu’un cœur‘, tous ont le même sefitîmente, Pareille nourrïtttro et paîeil vêtenïént ;

A moins- que le besËoi-n, ou dïîge ou de faiblesse, Nïautraîne à concéder Lino dispense expresse.

Le luxe est Încolïilll g ràrenferrt du p-ë-ché Uoccasion peut naître. À tous rien. n’es’t caché. Chacun, ’s’il voit Te mai, doit le Tain : connaître ; Et le mal est détruit même avant que de naître. Fuyant Poisiveté qui flous cbrrüfilfrt le cœur,

I

21X. — Lmus vitae monasticœ.

Felix grex honñinmn, qui Christi dogme. sequeiltes Contemptîs opibus, 1111 proprium retinent.

Unius arbitrio quos regula sancta coercet, Quorum quisque vsuo nii agit arbitrio ; f

Cor qui buse est unùnn ; quibus "Îlldîscl-‘üta v-oluutas, Par cunctis habitus, et CÜJUS est tsimilîs ;

Sic tamen ut cap-iatequo ïquisÿque videtul : agora,

Ætas ut fragiljsdebitlitasve juhet.

Luxus ahesfl : dmïris, zpecoandi rara facultas, Cuncti eunctorunl cum «tinreaut oculos.

Lex communis äiabot visasmox -pr-odére culpas, V Ut nascens v-itium pœua seqùens resecet.

Desiglialn fugiusltt 1.211301 Litîliäs occupat omues,

I x Tous poursuivent gaiement queiquïxtile labeur. Pas de confusion. Tout est réglé devance :

Le lever, le coucher, le travail, le silence, l La conversation. Pas un détail menu

Qu’à côté des grands faits la règle n’ait prévu. La nuit comme le jour, ils versent leurs prières

Dans le temple sacré pour eux et pour leurs frères.

Mais pourquoi ce détail ? Tout est gain et profit Dans chaque acte ordonné du corps ou de l’esprit. Le monastère est seul un vaste sanctuaire.

Si l’on a pu bâtir en la forme ordinaire,

. Autour d’un grand préau, quatre corps de logis ouvrent un porche égal sur le même parvis. Trois sont prédestinés auxpsages vulgaires,

Le dernier est le temple, asile des prières. Les moines réunis vivent en cet enclos, Comme dans leur bercail s’abritent les troupeaux.

Noxia tordantes ne suheant animes. Confnsum nihil est ubi fiunt ordine cuneta, Q Curatur totum négligiturque nihil. a, Nee solum vitae, sed constat et ordo loquendi, Dispensant æque maxima cum minimis. Nonnisi præseripto quisquam loquiturve, siletve, V Stat, sedet, incedit ordine quisque suo. Ecclesiæ limen noetesque diesque fréquentant, Et sanctis preeibus seque suosque juvant. Quid moror, et verbis evolvere singula tente ?

Quidquid agunt opus est corporis aut animæ.

Qniquod sic habitant ut sit saeer ipse ïdomorum, ’

Et situs et numerus, sufficiensque sibi.

Quadratam speciem structure domestiqua præfert Atria bis binis inclyta. port ici bus. a Quæ tribus inclusæ domibus ; quas corporis usus Postulat, et quarta quæ domus est Domini, Discursum monachis, vitam dant, et stationner,. C’est d’abord la cuisiné, avec le réfectoire ;

Puis’le dortoir conlmun, puis le laboratoire ;

Enfin, le temple saint, au ÿrai Dieu consacré, Dont-le flanc se prolonge et ferme le carré.

Tel est Pasile chaste et digne de louanges,

ou ces humbles-(l’esprit vivent comme des anges. Je les, comparerais aux soigneuses fourmis,

Qui, pour édifier leur merveilleux logis,

Entraînent des fardeaux quatre fois plus gros quelles, Et remplissent de grain ces cellules nouvelles, Pour’manger en commun durant Phiver brumeux. Je les comparerais, tout aussi bien et mieux,

Aux abeilles du ciel qui, de corps si clietixres,

Sont pour le saint travail si constamment actives. Leur cellule à six pans s’emplit d’un miel épais ; Elles-mêmes ont fait l’admirable palais ’

Où toutes vont, suivañt les mêmes disciplines.

r

Que. velut in caulis contineantur oves. Quarum primajdomus servat potumque cihumque, Ex quibus hos refieit juncta secunda domus ; ’ -Tertia membre fovet lassata laborc diurne ; Quarto. Dei landes assidue resonat. Plilrima prætereo simili condigna relatu, Sed bréviter dicam, nil superest, vel abest. Hos igitur proceres, huflc dignumklaude senatum Exiguum specie, moribus cximium, Compare formîcis qtiarum studlosalaberum Turmula connectât corpore majus onus ; Quæ ne non possint communem ducere vitam Iisdem suh laribus horreaparva locant. Compare divinisl apibus, quæ corpore parvo Ingentes animes egregiasque gerunt. Hcxagonis cellis, quæ mella Iiquentia coudunt, Utile mirifique quocl fahrienntur opus ; Quæ disciplinas, cjitæ jura domestiqua servant,

4s Je les comparerais eaux astres, fleurs divines, Qui brillent chaque nuit à la voûte des cieux, Et décrivent sans fin leur cercle harmonieux. ÿ Blais j’ai parlé des cieux z n’est-ce pas aux archanges Qu’il faudrait comparer ces modestes phalanges ?

Les moines Sur la terre, et les anges aux cieux, Disent le même chant, simple et mélodieux ;

Les chérubins là-haut, les moines iei même,

servent du même Dieu la majesté suprême“

Quasque simul reficit ingeniosa domus. Compare sideribus quîbus aula superna refu-lget, Aera quæ furvum noctizbus irradiant. Quwsemel impositam servant par sæcula legem, Quæ solitos cursus et numeros peragunt. Compara gyranti solemnÿter omnia cœlo ; Insuper angelicis compare virtutiibus. Qui semper Sanctus triplicata voce résultant : In terris monachi qudd modulantm“ idem, Sic cheruhim cœlo, moïraehi tell-ure maneñtest, ’ » l Uni dent unum serlvîtium Domino. V

X.

Éloge de la Chasteté.

Comme une fleur dans la prairie,

La grâce de virginité.

Brille en cette fille aguerrie

Contre lflinfäine volupté.

’ '1‘ont près de lia. vierge est là "veuve Qui, cherchant un suprême bien, Après une première épreuve i, ”a pas voulu ("l’outre lien.

Bien loin, sans doute, bien, loin (Pelles,

Mais au chemin du Paradis, :.

lilaircheilt encore à pas fidèles Les voluptueux convertis.

o fils de la ViergeiMnrie,

Quel bonheur (l’entendre ta voix,

X. — Cammendatio äastitaiis.

Ut Ilos in pratis, sic gratin virginitatis In mulière bona, maribus quoque prima corona.

Ad- rus oontiptäs qiios non trahit ulla voluptas, Proxima castoruin 1ans est virtutiis eofum

Qui semel elïpërti Iwlunt 2rd fonda reverti.

Tertio. non talis’, prior estelæproxima qualis,

Sed pars virtutis tamen est, et causa szilutis Scilicet illorum qui post. grave. fiegitiorunl Assuetumque malum retrahnnt a crinfine talum. O houe Nlessia, de virgino natt ; Bilaria ! Ta douce voix, toujours chérie, Dire à ces vierges de ton choix :

a Vous avez suivi mon exemple. 0 vous, qui m’avez imité, c Venez vous asseoir dans le tenlple De la sainte virginité. n’.

Puis séparant des boucs infâmes, Voués au brasier «éternel,

Les chastes veuves, nobles âmes, Tu leur fais place dans le ciel.‘

0 Christ, que ta miséricorde,

Vers nous, pécheurs, sïncline enfin, Et que notre humble nef aborde Au port, au céleste jardin ! ’

s

Si dans ce gazon diaphane

Je ne suis pas la rose (For, Que je sois le Valériane. Dont le parfum te plaît encor !

Quam sunt felices quibus hoc mitissinme dicos ; Inter virginies sit portio vestra choræas,

Cum quibus est aequum me, quas et pergere mecum. À «

Hos quoque mercedis ratio seceruct ab hædis Quorum vita manda. deeor est in sorte secunda,

Ultimus o Lltinam nostram regat ordo carinam Ad vitæ portum, paradisi scilicet hortum ! Quem colis æterno gaudexls per gramina ver-no

’ Gens felix, cum qua, si non rosa, sim saliunea.

XI.

La Volupté.

Les philosophes grecs ont chacun leur système, Et chacun, obstiné, tout épris de soi-même, Condamne sans pitié les dogmes du eÿoisin. Les principes du monde et le bonheur humain Ont été le sujet de mille commentaires Plus habiles que vrais. La foule, des sectaires, Pipée aux mots subtils, a suivi les erreurs. A Épieure n’est pas le dernier des docteurs Aux yeux de bien des gens. Le sÿstème atomique ’ A du bon, et surtout le système pratique, Qui pour bien souverain prêche, la Voltipté, Tuant Pâme et niant son immortalité,

Disant que rien ne reste au-delà de la vie».

XI. ’— De Voluplate. t.

I

Græeia philosophes hàbuifdiversa sequentes, Dum sibi quîsqite placens alîortnn (Iogmntærdamnat, Ut semel assumptam pudor est deponere partem. Hi de principiis mundi Vitaque beata

Millia verborum studuerunt texere multa,

In quihus ingenio, non re, subtiliser usi

Plura probabilités quam vere composuertlnt, Errorisque sui multosghabuere sequaces "i Artifici captes dicendi commoditate.

Inter quos habitus non ultimus est Epicurus’

Ex atomis perhilaens muudi consister-e molem.

o Iste voluptatem summum deternriiïat esse

Pcrfectumque honum, que quisque fruendo beatus, D’Épicure en ce point la Doctrine est suivie Plus que celle, à coup sûr, «Taucun autre docteur ; Pythagore et Soerate CUL-lis un sectateur ?

îllais qui pourrait compter les régions, les villes, Les gros bourgs, les hameaux et les maisons, dociles, En morale siwtout, au dogme épicurien ?

Et moi-même, à mon tour, je le confesse bien,

Je serais du troupeau, si la volupté même, chassant tout noir souci, jouissance suprême, Pouvait durer toujours. Par contre, s’il est dit Que le plaisir fatigue et le corps et l’esprit,

Ma raison me fait fuir la volupté, qui tue.

Tout (Tabord, il faut bien que l’homme s’évertue Atrouver le plaisir, qui tout seul ne vient pas ; Blais supposons qu’un autre ait pris tout Pemîiarras De ces préparatifs, et voyons, dans l’espèce,

Si le bonheur gît bien parmi cette liesse.

N’ayous pas seulement des mets délicieux, Congaudensque sibi sine sollicitudine Vivat, Seilicet aut animes cum eorporihus périturas,

Aut nullum eredens meritum post fata manere. Ilujus diseipuli plures sunt Pythagoreis, Socraticis plures, nec quisquam philosophorum. Tot propriæ seetæ potuit reperire sequaces.

Quis numerare queat regiones, oppida, vices, Urbcs atque domos Epicuri dogma sequentes ?

Sed nee ego dubitem si corporis 111121 voluptas

Hoc przèstare potest, ut sollieitudine pulsa Perpetno gaudens ætatemsducere possim,

Inter delicias præbçre manus Epieuro.

At si constituoit quod pernioiosa libido

Corpus débiliter, mentis que retundat acumen, Obtiueat ratio quod sit fugiendavoluptas. h Prinium delieias Epieuro efficientes

Nonnisi sollicitus queat ipse parare magister. Que la peinture et 1’or- réjouissent les yeux, i > ’ Queue tous les autres sens trouvent aussi pâture. Dans ce salon, garni d’u ne riche tenture,

Dresse les lits, esclave, et fais-les assez mous

Pour qu’Qn ÿretende à trois cil seraient quatre époux ; » C’est la largeur qu’il faut à de bons lits de table ; Recouvrez bien (le fleurs ce parquet délectable :

’ Puis que vienne le Roi, de perles couronne,

Et tout vêtu derpouupre, au lit de pourpre orné.

Que la laineet le fin mêlent leurs. couleurs vives, Au manteau comme au lit de chacun des convives ; Qu’uvn vêtement paÎreil couvre les serviteurs ; h Que serviettes et nappe étalent leurs bleu-clients. Donne le pain léger, brillant comme le neige ;

Des galettes au miel, aligne le cortège.

Les coupes de cristal, les hassilms éclatants, Les plats divers rempli-s (le mets appétissants,

Rentre-les. Le bétail n’à Potable on en rraisse ; a.7 I. à

Sed, verbi causa, nos illi cunctanparemus

Commodé sollieiti, gratis quibus ipsc fruuttir,

Et videumus utrtlm sil ; luxuriance heatus ;

Nec Vcro tantum demus sibi dulcie gustu,

Sed paseenl : oculos etiam pulcherrimzi visu, Sensibus et ceteris. nrlsit sua- etiique voluptas z, Sterne, puer, lectos, lace terne perato quateru.is., — v Hunc poscit mnnerugp genialis forma triclinium, Cortinisque (lem-um pectique tapetibus orne,

Porque pavimentuigï redelentes spnrgite flores.

, Ipse mieans gemmis princeps, patère-que superbus

Accubet in lecto pretioso muriee tecto, Stragula convives, sen byssine vest-is ztdornet, l Turba mjnistïroruin cul-tu slt amicta decenti ; Poneiflehine neensas, mznlti-lia candide, mappas, Confeetum nivca profer similaginc penem,

liiellitas crieur solemnivter acide placentas, Le gibier, qu’en forêt la même ardente presse ; Les oiseaux, réservés pour les banquets royaux ; Les poissons délicats que nourrit en ses eaux Le fleuve ou l’océan ; les fruits de toute sorte Qu’un jardin cultivé pendant l’automne apporte, Tout ce que ce bas monde à notre goût fournit, Offre-le : des blasés réveille l’appétit.

Use bien tout ainsi de chacun, des liquides ; D’un Falerne de choix laisse les entres vides ; Mélange à la liqueur le miel et le parfum.

Au poste des valets qu’il ne manque pas un ;

Pannetier, échanson, cuisinier, majordome,

Du même pas que tous marchent comme un seul. homme ;.

Car si quelqu’un tardait seulement d’un moment, Le roi souffrirait plus de la faim, que vraiment Il rfaurait de plaisir à manger. Pas de trêve,

Et que chacun des sens par le plaisir s’enIève, Flûte, clairon, guitare, histrions et danseurs,

Fulgentes calices, nitidos appone catinos, Fercula. diversis condita saporibus infer ; L Quadrupedum carnes quas dura domestiqua-nutrit,

Quasque canum si’lvis solet exagitare Iatratus,

Omne genus volncrum quod regia mensa fréquentât, Æquoreos pisces et de Iluvialibus undis Affer, et electos de qualihet arbore fructus, Et quidquid tellus homini producit édile,

De Vilis ut’stomachi dapibus fastidia vincas ; Utque voluptatem capiat subtile palatum, Nec minus et variis distendit potibus utres, Cæcnba non desint, nec desint vina Falerna,

Pocula pigmentis et melle sapora propina,

Bis pister, pincerna, coquus, d api fer que parândus Insistent opus est, et turba miner famulorum, Ne si forte moras protraxerit actio segnis

Sit miser ante l’ame rex quam comédendo beatus.

/ —» lflîä, —

Ciznbales, tambourin, lyre, Ilùtmtzhanteurs,

Et s’il est d’autr e engin que la musique emploie, A l’œuvre ! remplissez les oreilles (le joie ! Que le nard précieux parfume la maison ;

Qu’on répande le baume et l’encens à. foison !

Et puis quand ; l’estomac rassasié digère, Barbier, tiens’prêt le bain où 1’on va se refaire ; Brosses, peignes, onguent, queitout soit sous la main ! Ainsi tout est flatte dans ce royal lestin.

I.es couleurs et les sons, et les senteurs choisies, Avec les mets divers, alarmantes ambroisies, Tout enivre les sens. Est-ce là le bonheur ?

— Non, car tout cela passe, et voilà le malheur. Le bonheur ne gît point aux choses périssables, ’ La crainte et le regret nous rendent misérables, Et nous ne pouvons pas un seul moment jouir,

Ilnterea ne qua lraudetur parte voluptas, Pibicen, tubicen, citharistria, saltriagnima, Cymbale, psalterium, lyre, tympana, fistula, Voces ; Et si quod genus est quod musica dulcius aptet, Singula deleetentfestivis cantibns aures.

Nardi læta clomus pretiosi fragret odore,

Balsama respirent, nec desint galbana, nee thus. Post hæe cum fuerint jam viscera plena heàti, Balnea, tonsores, strigiles, unguenta, silotrum, Queis niteat curata cutis, sint-rite parata.

j Sic color atque sonus, sic et saper omnis, oçlorque,

Sensusäcorporei quibus ail momenta fruuutur, si quos objectant usu præsente beatos

Efficient, miseros cite discedendo relinquùnt ;

Sed neque qui fruitur re quain cito scit péridural Securus. gaudet‘, nee sollicitude beatum Ulla de cet, sine que 11eme fruitur périturis,

Nam cum defuerint, eupit insistitque fruendis ;. ’, n ’ 1mm fruitur meturt ne se lugmva reluquant,

vm 30 Sans penser quï : l’instant ce plaisir va finir.

Ainsi, si nous veillons, le noir souci nous presse. Trouverons-nous an moins le bonheur dans Pivresse ? Le souci, le désir en nous s’est endormi,

(Yest vrai ; mais le bonheur ne (lort-il pas aussi ?

Si le réveil nous rend tout aussi misérable,

Le sommeil éternel serait seul enviable. k Mais contemplez ce corps immobile et, honteux, Dont les mets et le vin ont rempli tout le creux ; Uestomac ne les’peut (ligércr qu’a grand’peine ;

Le poumon oppressé semble être hors (Fhaleinet ;

Le front ne contient plus le cerveau palpitant" ; Hivrogne rote et ronfle. Est-il heureux pourtant ?

— Et de combien de maux tous ces excès sont cause ! Énervé, les canaux remplis (Vun sang morose,

Notre ivrogne est en proie à des fièvres sans fin.

Les membres agités d’un tremblement soudain,

lnque vices nüserum carpunt timor atque cilpiilo. Ergo neqnit vigilans non sollicitndinc pungi, Ailsatur, et multo vino somnoque sepultus

Nil cupiens. et nil metiiens fortasse beatus.-Esse potest, cum se non sentiat esse beatuni.

An siquidem miser est, nisi tempore dormiat omni, Dormiet æternzim, ne sil : miser evigilando. Ridiculum niniis hoc, illndque videtur ineptum Quid quod et cbrietas et crapule corpus onustum Interius vexant, in fla taque viscera rumpunt,

Dum gravis immodicas stomachns non digerit escas, Et male latentes exhalat copia ructus,

Vixque sub hac massa pijilmo respirat anhclus, Lymphatunaque 1ncro cercbrum cava tempora pulsat. Quae poterit, precor, esse quies in turbine tante ? Quin etiam morbos parit immoderata volnpta-s Neuves dis sol vit, venarum cursibæus obstat,

Et générat nimias vitiaito sanguine fcbres, ’ I

46"

A pas précipités il roule vers In tombe.

Rien ne peut relever ni son esprit qui tombe, i Ni ses sens engourdis. Combien est différent

Le sort toujours promis à Phomme temp-érailt !

Il est sobre, et son corps garde son énergie, Son sommeil est léger, son réveil plein de vie, Son esprit excité garde bien son entrain ;

Et ses jours prolongés sont sûrs d’un lendemain. — Où placer le Vertu, quand lu volupté prune ? Quand de la passion nous sonnmes la victime, Que deviennent prudence, ’ordre, justice, honneur ?

Cet homme. est étrangle par les Inains (1’un Voleur ;

(Test que la voluptereelatne sa flepouille ! (Ïest ÏELVO-Ïllplë même, infâme, qui se pouillc

Dans la succession d’un père, dont les voeux

l)’un enfant ont hâte le trépas monstrueux ! p infâme volupté, de tous les maux artiste,

Ac reddit tremulos eonsumptis viribus artns. Denique præcipitätt bpvioris tempora. vitae ; Postremo nihil estfquod sic exstinguere nientis Scintillam queat et vigiles deznergere sensus. Contra sobriétés, mensura quo parce eiborum, Luxuri/æquet modus sensus conserva} ; alaeres, Et natnrali confirmât robore corpus. Et sornnos (litlees, et euneta salubria præstat, Excitat ingenitun, montais custodit ocumen, K nltlltiplicatqile (lies, ac vitae prorogat annos. Quis, rogo, virtuti locus est, ubi terra voluptas Regnat ? N um quisquam dominante libidine prudents,

V Aut justes nuoderansvc potest, seu fertis haberi ? Cul’hominem jugulat manus importuna latronum ?v Scilicet ut spoliis redinmtur infiqua voluptas. Cur frater frntrenï, cur nonnina saneta parentes in nïortem nati votis propernntibus urgent ? Ut SIICCGSSUTÎS contingat i-Iliqua voluptas. Non, tu n’es pas, ainsi que le dit le sopliiste,

Un bien, le plus grand bien ; mais contraire à tout bien, Détruisant la vertu, tu ne nous donnes rien,

Rien, si ce n’est le vice et sa séquelle impure ! Rejetezælone le dogme insensé d-’Épieure,

Si vous voulez vraiment arriver au bonheur ;

Rejetez du plaisir le système menteur.

Si vous ne voulez pas aller aux porcheries ;

Que (liment (le Satan les grandes boucheries !

Denique cunctorum scelernm fit causa voluptas.

Ergo voluptateizi nee summuln constat habendam

Nee medioere bonum, minimum negat ipse sophista. Qui summum prohibet ; sed nos utrumqtie negumus, Quippe bonum tiatura boni neqüit esse repugnans ;

U t vitiunl vitio confligere sæpe videmus,

At eunctis inimica bonis solet esse VOÎUQIIIS,

Quam stunmum iaatel : esse malum, quia destruit emnem Virtutis speciezn ; vitium parit et fovet omne. Quaproptei stultos Epicuri respue sen-sus, -Qui cupis ad vitam quandoque venirebeatam ; Sperme voluptntes iñimieas philosophie, i

In grege poreorzun nisi mavis pinguis haberi

lllisa rigidam passurus {rente seeurizn. LIVRE 11


FABLIAUX E.T SATIREAS-


Le Loup qui se fait Moine.

Au’milieu d’un nofnbrcux troupeau,

Qui se prélassait, gras et beau,

Dans un plzznturemt eärturage,

Un sire Îoup faisàît ràvage.

Le berger, devenu cîîassetlr,

Poursuit én vain le ravisseur.

Bientôt la patience s’us c,

Et, [urenant un plus sur moyen, Il sait fie courir à le ruse, «

Quand le courage ne peut rien :

Au centre de le vaste plaine « - v Sbleÿäit, svelte et droit’, un chêne. l. — Ëwrabola (le fraude a lupo ogyilioni fada.

x

Sæpe lupus quidam per paseua latevagantefs Arripuit multas opinions oves’. e ’ ’

Lædere raptolÿenl postquam virtute nequivit, Illaquearc dolo p-{ISÈOP eum studuit..

Nqmrigiduam {leetit tznjto concubine quereuln,. Ut caput illius tangete passer, lutmuny ; Le pasteur, de son bras nerveux, Courbe au s01 le tronc vigoureux : Il attache au sommet flexible Un nœud coulant, engin terrible, on s’étranglera Pimprudent

Qui viendra toucher seulement

Un bâton léger et mobile,

Disposé par sa main habile.

Sur le milieu de ce bâton,

’ Qui retient la corde homicide, Il dépose, amorce perfide", La tête ÎTun jeune mouton ; , Et ÿéloigne. Bientôt arrive

Notre loup, de loin attiré

Par le fumet de la chair vive.

Il court au piège préparé,

D’un bond sur la proie il sïälance ; Le ressort part : le col pressé‘ Comme un voleur à la potence, Dans Pair le pendu se balance,

An haut du ehene redressé. i

Le berger, tout joyeux, devance, Prend des cailloux et les lui lance :

Et eapiti flexo laqueus sic neetitur unus, lilobilis ut laqueum detineat baculus ;

Sed laqueum terræ baeuluè sic applicat ille,

Ut laqueo pereàt qui baeulum moveat ;

Et medio laquei sie inseritur caput agni, Ut baçulum moveat qui caput arripiat.

Tune abit epilio, lupus ingenium pèfitiillud, Et rapit egninum protinus oie capot. Sed baculo moto, laqueus ligat illico eollum,

Atque rigor quereus tollit in faite lupuni. Ut videt opilio eaptum pandore làtronéni, Mittit illuc lapidès, accelerando necem. Le drôle à peine en est blessé, Cur les méchants ont là ; peau dure. changeant le mode de torture,

Le pasteur saisit son bâton

Pour les sommer ; le loup, d’u11 ton ’ Bien piteux, dit : — à Je vous en prie, Doux berger, oyez mon propos,

Je ne veux dire que deux mots. Faites-moi grâce (iela vie,

Je vous paierai cent fois le prix

Des moutons que je vous ai pris.

Mais je n’ai pas même une obole

lei. Lâchez-moi sur parole, Laissez-moi retourner chez moi.

Je puis vous donner un bon gage,

Car je vous offre comme otage,

Et comme garantde ma. foi,

Mon louveteau : je vous le livre. v Vous-même, décidez du jour

Que vous fixez pour mon retour.

Si vous daignez me laisser vivre,

Tout serait bien’profit pour vous ;

Vulnera mille faeit, lupus ut pereat Iapid-atus ;

Sed nequit expelli z-zipiritns ille malus. Ut magis hurne crueiet tandem «deponip u !) illtû, Atque levaus fustem, protulit «istalup-o : Nil faciunl ; lapides, cerelntuiai jam fuste relidam, Atqile mais agnis inferias faciaux. Mox lupus oxelzrmat : Mieerere, piissimepusrtor, Et tihi-quæ referam pereipe pouce precor. Si mihi dignatus îueris COHCC(1CI’C=VitaID,. "Ofnuia quœ rapui oentupla restituem. ’ Set] nihil hic hubeo ; si mepatiaris alaire,.. Ne tibi sim fallux, utile pignus hebe.

Congruus obses erit lupulusemeus, huno tibi traduira, Que je manquasse au rendez-vous, Car mon fils, à la fleur de Pâgc,

Pourrait vous Lire un grancldommage, Grandis qu’iun vieillard édenté

Ne peut rien. D’un autre côté, Quels fruits pouvez-vous donc prétendre

De ma mort ? na chair n’est plus tendre,

Ce serait un triste ragoût z Vous ne viendriez pas à bout

De tirer même une pantoufle

De ma vieille peau. n — Le marouflc

Se tut enfin. Et le pasteur,

En cela se montrant peu sage, Prit le louveteau pour otage

Et relâche le vieux voleur. Celui-ci poursuivait sa route, D’un pied juvénile et léger,

En secret ruminant, sans doute, Quel tour il jouerait au berger ; Quand, au bout de la vaste plaine, .. Il fait la rencontre soudaine

l)’un moine que suit à pas lent L’humble et discret frère servant.

Ut veniente (lie quam dederis redeam. Ut redeam Illlllqllîtll] minimum clamnum tibi gestat, Pro scne confeeto si juvenis percet. llle nocere potest, ego nec vivondo nocebo, Et tibi si perce, commode nulla dabo. 1 "folle meam pellem, tibi non erit apte cothurno. Tollc meam surnom, non erit opta cibo. Ncscio cur miserum corpus (lispergere qnzeris, Cum tibi (le neutre parte sit ntilitus. Ut bréviter narrem, (piantocius obsièlc smnpto, Dut remeare lupum credultis opilio. lllc par uns artem quu fnllcret opilionom, — à Salut, ô père vénérable, Ditle loup, tombante genoux, ’ Ne repoussez pas un coupable Qui veut se confesser à vous. Je pleure mes erreurs passées, w ’ Mes convoitises insensées ; Je meurs de honte au souvenir 1 Des agneaux que j’ai fait périr. Je quitte ce chemin’funeste, Et, pour tout le temps qui me reste, Je ne veux pas un autre but Que de mériter mon salut. Employer ; le fer et la flamme, Commandez cilice et fouet, Et jeûne et veilles, s’il vous plaît, Homme de Dieu, sauvez mon âme ! Faites un moine du bandit z Coupez, rasez ma chevelure, Ëlargissez bien la tonsure, . Et donnez-moi le saint habit. Ifoute peinturent son salaire. Ne pensez pas, Réverengl Père, Que je vous demande pour rien ’ Un service. J’ai pour tout bien Une brebis, de provenance Un peu suspecte - : la voilà…

’ ÇDum renaeat, Jnonachum repent et faniulum. Mi Pater, inquit, ave, ne flespieeverba preïzantis,

Nee quin peecavi, me reprobare Velis., -Poenitet erroris, boue mundi sumere tædet lnnoeuumque pecus me jugulasse ; pudetu Jugibtts illecebris nil prodest membre foirere, Si sit habeudn mihi nulle salus venige. z Pereute me virgau-vel quovis tundeilagelle ; liane enimam tantum, nvir pie, redde Dee. Si votre règle Œabstinenee

Vous défend la chair, donnez-la.

À ce bon frère ; il restera. Pour-vous, mon Révérend, la laine. n Le moine prend la riche aubaine En homme fait aux gros cadeaux. Il choisit ses meilleurs ciseaux Pour raser, d’une oreille à. l’autre, Le chef crépu du bon apôtre,

Fait un discours en quatre mots Sur la règleménobitique,

Et lui met enfin sur le dos,

Tout Puniforme monastique.. Cependant arrive le jour

Où les loup doit, par son retour, Délivrer sa progéniture.

11 vient, Pair modeste et pieux, l’étude sa robe de bure.

Le berger n’en croit pas ses yeux.

Cæsariem tundeus, latam, rogo, rade eorouam, Et mihi sic raso da monaehi tunieanl. Neve putes frustra tantum perferrelzæborem, a Dum mihi non data sir, de tibi munus ovem.

. Si tibi non placeant. date fercula Garnis oviuæ,

Da famulo carnem, tu tibi vellus habe.

U t recipit monaehus nimis accepta bile donmn, Forficibus sumptis, illico tondet eum ;

Atque caput radens, tantam studet esse coronam, Ut sit ah aurieula eircus ad auricules :

Et docet ulteritis qualis forêt ordo tenendus. 1nde cucullatum præcipit ire lupum.

Venerat ille dies quo reddi dehuit obses, Quo lupus ut redeat pollicitus fiterat. l.‘une redit : at pastel’cognoscere vix valet illum ; Nana mode fulvus erabquem vidaet esse nigruln. — « Quelle est, dit-il, cetteeventure ? ’ Je vois noir ce que j’ai vu gçis ; s Est-ce toi, voleur de brebis ? u L’œil fvlein (Tune larme factice,. Le loup répond : —=— a Dieu vous bénisse ! lC’est bien moi. Lo1’sq’ue, tout meurtri Des innombrables coups de pierres.. Que vous me donneaiïtes neguères, Je nÿen allai mourant (Pici, Le médecin, tàtant ma veine, Me trouvant le poiils fort iiiatrvais, Dit que ce Iÿétait pas la peint : De me traiter, que j’en montrais. , Vient un Inoine plus ëharitæhlc, Qui nfexliorte à me reÿentir ’ De ma conduite àbonlinabl-e, ’ Me rappelant que bien mourir — Silflit pour racheter la Vie,

Et que c’est l’heure (le la mort

’ Qui décide de notre sort. j Il irfinspire enfin Acette cnævie De laisser un, monde maudit Et de revêtir cet habit.

Qualis cras, 111quit ? nhnis es mutatus al) illo Qui pecuïltiïn’räptoïÿräptus eras laqueo. llle caputflectens, Ifostqualnv benezliciäe (IÎXÎË, Ora rigans läzerÿtnîis, talia vçerlaa (ledit :. Vulneribus lapidum mihi quäe (Ioderas maceratus,

Nuper eram lämguens, atlftlit et méditätis.

111e prenions venam, pttlssi1m iñäle currere sensit, Et mihi : Non ÿives, sed morieris, æiit ; lntereamonaôhtis venîtqui viseret œgmm, Et monet ut tandem pœniteam SÔEÏCFIÏÏII} ; Spemqtie (lacet szinïitaln, quia llïlllïllS/Püïdlilÿlls esset, Gui mafia Vitüfuit, si hona mors fieret. Œuvre (le-grâce ou de nature ! V’ ’, À peine avais-je ainsi changé s Etile mœurs et de nourriture, ’ p ’ l Que je me sentis soulagé. p ’ , Pour 11101, quel immense avantage !

Puisqu’au joi1rcl’hui je puis venir, Délivrant mon fils, mont otage,

l’rendre sa place pour mourir !

Je irai point la rançon promise,

Ayant fait vœu de pauvreté. Œïaitez-moi donc à. votre guise ;

Ou pardonnez avec bonté,

Ou que mon trépas soit hâte,

Si je dois périr zil me tarde

D’en finir. n —‘- r : Que le ciel me garde De mettre encor la. main sur vous." Combien je regrette les coups

Que vous porta ce bras rapide ! Pardonnez à mon humble aveu/i

C’est être deux fois homicide

De frapper un homme de Dieu.

Votre fils est libre, et vous, Père : ’ Allez en paix‘. n — C’est le pasteur

Qui fit ce discours dehomaairc.

Denique persuasif penitus contemnere mumliiiii, p "

Et mihi sic rase tradidit huile habifuizi. Ut veteres mores alimenta que prisca reliqui, Qui fileram langueus, illico convalui. Nunc quia (lchebâtimeus obses perdere vitqm, Ne pereat imtus, poncre quæro meam. Hue rcdiens, sieut me iproposui rediturum, Quoi ! tibi restituas, nil hubeo proprium. Fallere nolo fidem, si vis mihi pgtreere, parce.‘ Si placet ut peream, me citius perime. Hæe mea, pastor, ait, te lærlel : ilextera uimquam ; Les loups en tirent (le bon cœur, S’en allant, libres, par la plaine. j Puis le loup dit’au louveteau : 4 à Plus de craintes, mon fils, tout beau !

Arrêtons-nous. pour’prendre haleine.

Je me sens une faim de loup. "Les llêrrttlnes Ifoilt pas degofu,

J’esti.mc..aiçssi peu le fromage,

Que je meure, si je nÿengegc A pratiquer jusques au bout , Cette abstinence, dontÿenrage ! ’ n. Rien n’est véritablement bon, Enfant, que In chair de 11191112011. i» 11 dit, » et d’un seul bonçl sïlailce Sur le bercail épouvante, Q Et de plus belle il rccommeilcc Son brigandage (ÏÔÜOÏIÈÔ. Deux joins après qu’il eut fait grâce, Le berger crédule et bonnaéseljrouve son pénitent nouveæiu —Qui déjeunait (Yen tendre agneau. I Le brave homme se sczmdelise : — u Mon frère, Illelle gourmandise !

Sed quoniam læsit, postule, de veniam.

lnterimens’monachiùn, fierem Onplex homicide,

Obses erit liber, toque domum rennea. lfunc rclncant hilares, tùtique morontilr in aigre, Cnm lupus esuriens rctulit l-nec lupulo : ’

Crcde mihi, fili, nimis est caro dulcis ovine, Et cibus asper crit cziscus et que loba. ’l

Non onus assumam quod noirpossim tolerare Dixit, et ut dudmn eœpit oves rapere.

Sed breve poste tfilnplïls duni raptoi vescitnr agno, Aspicit hune, et sic argnit opilie :

Sonos cs et nmnaclnis, non tlebes carne cibari ;

7 Vous êtes moine et bien PQIÜIZËIl-llt, Me paraît-il, et cependant,

Malgré la loi de saint Basfllc,

Vous oubliez jeûne et vigile. n

— à Il est, répmad le loup pervers, Dans le bien des degrés divers ; Avant-hier, si jüâtais nwiue,

Pour le momexit je suis chanoine. n Et, sautillant d’un air nnrqubis,

Il s’enfuit au fond des grands bois.

Non ira saucta jubet regula Basilii,

Inde lupus : Non est simples, ait, Ordo bdhorumg :

Et 1110110 sum Inonachus, canon-icus modo sum. Et sic in silvis luflus ivit subsilienglo. Se male delpsun} colnperit epilio.

II.

Rimes canoniales.

Oui, le temps est venu de dire en vers sévères De quoi souffrent, de quoi se lamentent nies frères. Saints pasteuçs de l’Église et. du peuple chrétien, Pontife juste et droit, et qui voulez le bien,

Et vous, ses conseillers, princes de la clergie, Ouvrez Pâme et les yeux, oyez çe que je GBÎO. Les fidèles aussi, qnïils soient jeunes ou vieux, Doivent prêter l-‘oreille à me voire quand je-veux Du malheureux clergé traduire iei la plainte.

Je jure de parler sans nlensojage et sans crainte ; Et si quelqu’un pouvait douter de mes propos, Quïl voie autour de lui les actes des prévôtsl Par le venin l’on peut connaître la vipère.

N

Nos règles, lllesseigneurs, ne se ressemblent guère ;

La balance nlest pas équitable pour tous ; u


Il. — Versets canoniales.

Res menet et tennpus fratrnm descrihere quäestlus. Ecelesiae preeeres, præsznl, eleriqtne priores,

’ Qui sapitis recte, qui viverè vultis honestc,

Hue ocnlos cordis, hue auresflectlte. mentis. Andine munis homo, juvenis puer, innuba virgîî, Atqlne senes trelnuli, quæ slt querimonia. eleri. ’ Quidquid penne natal, veri de (lamine Inanat. Qui duhitat verum, seiat actes plæepositornm.

Ex fruetupoterit cognoseere vipera quid sit.

Inter præposltos et nos fil : regula discors.

Res mule pensatur, clum lanx, non æqua tenetur.

l Autre pour les prévôts, autre est la loi pour nous. Ils peuvent sans danger commettre tous les crimes ; Pour complices ils ont les témoins, leurs victimes. Qnïls pillent les autels, chacun de nous se tait ;

’ Qu’ils dépouillent les saints, le gardien e st muet ; Quïls brisent un calice et vendent nue chappe, Ou tout autre ornement, aucun mot ne äéctialppe "De notre bouche. Et qui serait donc insensé Au point de dénoncer ce voleur haut place ? Eurichis par le vol, ils sont une puissance ’

Qu’ancun homme prudent, craintif des coups, Ifoflgensef

Évitant le scandale, il faut taire le mal ; C’est péché que parler même d’un fait banal, x Si ce fait esthbnteux. Cette règle bénie. LaisseTiniquité désormais impunie. Voulez-vous être riche ? I-Iouofez les’bandits ; Si je suis pauvre, c’est que je les ai honnis.

Nlais être pauvre, avec la conscience pure,

Altera præpositis, est altéra regula nohis.

Bis licet impune fascinus quodeunque patrare. Excoriant aras, placet exsecranda potestas ;

Et spoliant sanctos, mntus tacet omnia custos., Si calices fiangant, cortiuas, pallié vendant,

Non mutire licet. Quis demens talia culpet ?

Quis temerct tales nunc diffa mare latroncs ?

Qui reus est furti, donetur munere grandi.

Ne reprobes furtum, metuis si verberis ictum. Qui eulpant fures, hos damnat regula vindex. Non modieum peccat, qui publica criminanarrat. Omne genus scelertttn sine judice vivet Îllllitlllll. Vivere vis (lives ? laudare niemento Iatrones.

Est mihi panperies, quia sæpe redarguo fures

In re. Sed melius volo vivere semper egenus, Quam socius fui-nm sim, servus divitiarnm, Optima paumeras quam ditat mentis honestas. Vaut milieux qEŸÔtlÎC enrichi par le vol, le parjure, La fraude et les moyens dont usent les’filous. Autre pour les prevôts, autre est la loi pour nous. Nous, peuple pauvre et vil, obscure populace, Digne au plus de manger, si nous avons Faudaee De demander ou va la grosse part du bien Consacré (le tout temps au commun entretien Des clercs ; on voit surgir un fantôme effroyable De fraude et de mensonge, artisan détestable, nlaître delïlornieide et du vol protecteur ; Il pousse un beuglement (Yhypoerite douceur : — ce Directeurs du clergé, voyez-vous ce scandale ? Quel orgueil ! quelle audace ! et quelle est la cabale‘ Que vent ourdir enfin ce téméraire auteur ? Punissez, punissez le turbulent docteur,


Non mihi sunt gazæ, quas augent furta, rapinæ, Fraus, præjudicium, perjrtria, factio, lucrum. Altera præpositis, est altéra regula nobis.

Nos vills populus, et non mémorable vuslgus, lllcrcenaria plebs, cui "victus tota supellenä,

Si querilïlul’rite cur sic Aviwramus inepte ; z

Quo bona nestra ruent, car non communia fiant ? Hostis potestatis, frauda ter religionis, r Fous et origo mali, saneti violator asyli, Legum destructeur, fraudis non fictils amator, Testis nequitiæ, eui sunt perjuria curæ,

Qui subito mille mendaeia rilétat ab ore,

Ûnx homicidarum, spes et protection filrum.

Vox asini dulcis hæc rudit cantica nobis.‘

Dicite, rectores, cleri-"censere priores. 4

Quis furorhie subites’ ? Quis tam temerarius ausus alac in plebevenit ! Qnænam vesanîa simgit ? ’

Quo strepitu sævit ? Cur sic furibunda superbit ?

Non innplnaittls erit auctor murmuris’hujus.

vul 31 Il faut faire un exemple et garder qu’on irimite Ce fol. v Tout un troupeau, que ce discours excité, Applauclit Pointeur. Ces valets du démon

Tienuent de lui chacun et son rôle et son nom..

Burburus, sphynx sanglant, monstre aux instincts immondes, Que le Styx a vomi de ses infectes ondes,

D’un ivrogne imitent les ignobles baquets,

Exhale sa fureur en ces termes coquets :

. a — Bien fol serait celui qui vouti-rait tenir tête

À qui fait les déerets, à qui les interprète !

Si je vole, je veux qu’on se taise. Le Roi

De chaque (lésir fait un article de loi.

Les prévôts, tous les jours, valent le Roi lin-même, Et leurs désirs aussi sont 1a règle suprême.

Puisqweux seuls sont chargés entre eux de se juger,

Dénoncer leurs larcins c’est en Pair aboyer.

Devant un vol royal, la loi reste muette ; Elle est pour les prévôts encore plus discrète.

Vivet in exemple Inultis pro erimine tante. Prosequitur totus doctoris dicte muniplius. lmperio larvæ sua stet sententia cuique, Burburus immitis, sphynx semper amicn cruoris, v Bestia crudelis, ferus arhiter, impie. pestis, Quem nobis Stygiis Pluto transmise ah undis, Ilis primum ÿerbis rueta documentalfuroris : Est stulto similis qui vult contendere dietis. A Nos leges regimus, nos jura tenenda docemus, Si faeimus furtum, volumus sit sempei innltum. Pro voto regis pendet sententia legis.

Incassum latrat, qui furum crinaina culpat.

Pro merito furti petiit fur ardue eœli,

Fas estipræpositis propriis ignoscere culpis, " Nec quamvis vere, licet norum furta notare. Re) : et prépositif nulle sunt lege premendi.

Si rex furatur, lex indiscussa tenetur.

o. x Voleurs ou non, il l’eut honorer les puissants,

Et qui les contredit est sirop digie, à mon sens, Du bâton. n Burburus arrête là sa langue.

Son plus} proche voisin trouve que «la harangue Est admirable.’ C’est un maître fort connu

Pour mettré de nos saints les reliques à nu. — à Les maledes entre eux font de lu médecine ; Un sacrilège/doit applaudir la rapine ;

Il faut que les Voleurs se soutiennent entre eux Comme la proxénète, en ses marchés bouton-x, Soutient la courtisane. En vous louant, je loue

Mon fait ; en vous blâment, je me couvre de boue." n — « Voilà, dit Radaniante, un fort sage propos.

Le nombre nous rend forts. Nous sommes tous égaux Dans le crime. Gardons la puissance attachée i À Punion. s Gatulle, et Clade, et itlaniehîâe ; Adhérent à Penvisveilà, "de compte fait,

Pro Cllipa regis dormitat pagina legis. Quamvis sint fures, venerantur llbique patentes.. Palliat infâmenp sua præposituru latronem. Scutum nequitiæ mihi fit fallacia lingnæ.

Qui loquitm verum, flot hostis præpositorum.

Sic censure. petit, sic Iex et reguiu promit.

Qui contradieit, ferularum flagra suhibit., Burhureis dictis favet excoriutor heriiis, Sanctorum costas qui denudavit et ares.

Qui morbnm pvatitnr, ægris persæpc ntedetur. Sacrilego furi lieet optima testifieari. Fur foveät furem, fouet ut meretrix meretricem. Laudando furem, propriam sic augeo Iaudem.

Si furem reprobo, simili nie pollue furto. Prosilit in medio Radamentus gutture crasse : Censes egregie ; numerus facil : arma tîmere.

Store sinïul lieezit, faeinus quos inquinat, æqtlat. Laudat et hoe Catulus, Clodos simul et Mauichæus.

x Que de ces gros bandits, j’ai rlépeint jusque sept. Hais, puisqu’en les comptant, j’ai parlé de Catulle, Je rem conter ici, sans fraude et sans scrupule,

Ce quittait autrefois cet illustre brigand.

Vous souvient-il encor d’un petit mendiant « q Qui demandait du pain aucoin de chaque rue ?

À travers les haillons, ulcérant sa peau nue, Le soleil le brûlait, et, sous Pardent rayon,

Çll était (levenu noir comme un négrillon.

Eh bien ! ce vagabond, dont s’écartait la foule, Cïitait Catulle, alors ; ce Catulle qui roule

Sur l’or, et qui rigide et fier comme un Caton l’ornant au trilmiial, gouverne ce canton.

Le sort a quelquefois des caprices insignes !

C’est Pane qui commande aux lions, l’oie aux cygnes ! Et petit-être demain, par un brusque retour,

Il faudra que notre âne ohéisse à son tour.

De ces revirements, la fortune est peu chiche :

Hic numerus» furum bis ternes complet et unum. Sed quia de Catulo nune eœpit surgere sermo, Quis fuit in puero, quis venit et unde notabo. llunc Inendicantem, nudum, VÎCÈlllnqllG petentem, Solibus æstivis cessit rota fervida solis.

Hinc tremefacta cutis, et nigri plena cruoris : Rumpitur, et foedo (leturpat membre veneno. Æthiopi sinfilis, venit sine tegmine pellis, Pauper, inops, nudus, tifiarnlm cortice CÎnCtllS.1‘alis erat primo qui nunc se proluit auro.‘ Quem rota fortunæ transvcxit ad astra repente, Nunc rigidus Cato, (lat nobis jura tonando. Mirautur proceres, morum prostate vigeutes. Nunc asinus pardis, nuneimperat upupa cygnis. Si tamen in præceps volvatttr cutinus anceps, d’une licct invites, pardis se subdet asellirs

Et nimis elatus salict de rupc Catellus. Cntulle peut eneor redevenir Caniche,

Pour les honnêtes gens de ses succès jaloux. Autre pour les prevôts, autre est la-loi pour nous. Dès que sonne au clochers la, cloche du chapitre, “ Nous devons secourir, simple plèbe, au pupitre..

Les prevôts sont assis et.les chantres debout. v

Ils badinent entre eux ; nous chantons jusqtÿau bout Lïtltttia qui elot un graduel énorme.

Ils descendent au choeur, ce n’est que pour la forme ; Ils sont comme un aveugle, ouvrant un œil vermeil, Et ne percevant pas un rayon du soleil.

De la religionyils Ifiont pas même l’ombre ; Dans leurs stalles eoïichés ; souriant, ils font nombre Et sont charmants à VOÎI‘, plus tlodus que dévots. Autre est la loi pour nous, autre pour les prevôts. Nous IIÏIVOIIS certes pàsune même cuisine.

ll "faut nous contenter (Pou plat de triste mine ;

z

Qui stat sæpe enclit, cnrrens Vestigin lzedit. Dlotibus incertis sic sic, fortune, jocaris. Altera præpositis, est alteru regtrla nohis.

Res vilis populns, ad pulpita Sœpe leganms. Præpositi sedeant, non stoutes psallerc cognnt. Ilos risus pascet, ’nos cantiovlotign fatigot. (“n’es solito more cantat Alleltlin Gradunlo. Præpositi verhis contentant atque cnehinnis. Hoc illis studium, hæc utilitas seniorum.

Ac velut oppansosteneat sieæeus ocellos,

Nil de luce videns, sed aperto lnmine vivons. Haud aliter tales, vultu, non mente nitentes, » Store choro pulchrum, sed non est utile multum. Altera prtepositis est altera, régule nobis.

Non est fas coque partiri fercula mensze.

Sufficiat victus moissine murmure parvus Præpositis pullule, n1il-1i sit tenuissinta costa.

Os dabitur nudum, si costze respno (lonum ;

a Les autres en ont trois, tous des plus délicats. On voit les petits pieds sïätaler sur leurs plots ; On nous srertseulement une côte bien maigre,

’ Etsi nous réclamons, avec un reproche aigre,

On nous envoie un os, de tous points decharné. Si quelquefois poui ; nous le jeûne est ordonné,

Nous avons pour menu (les œufs et du fromage,

Ou des fèves : des fruits, nous ignorons Pusago. Une fois chaque mois, si l’on sert du poisson,

Le crabe que fournit le riÿage, à foison

Uanguilie que nourrit notre mare bourbeuse, chargent insolemment notre table boiteuse :

La iner donne aux prévôts ses poissons ronds ou plats. Pour les prévois, pour nous ; tout autres sembles plats.

Si nous sentons le vin, c’est quand il tourne à Paigrc. Aux uns le pur nectar, aux autres le vinaigre !

Aussi, quand nous disons le D420 gratins,

Tous les coeurs sont aigris, et Dieu n’y gagne pas.

Si mutire V010, depuscar verbere crebro. Præpositis triplex, nobis sit portio simplex. Post tenuem costam carnem non suminlus assznn. Præpositi teneris triplicata sua fercula pullis.

Si jejunamus paueis quaudoque diebus, Suffieiut nobis permistis easeus ovis,

Aut faba, quæ ealidos cogit revireseere ficus. Si semel in nîaenso pisses contingat habefe, (Eammarus, anguillæ, tiberintrs, venin, cloue-æ Commaculant mensas, quosobyivit longs ; VGIJLISÈQS. Præpositi soli satientur pisce receti.

Altera præpositis, datur altéra partie nobis. Nos infliges vini ueseimus adores.

Præpositi vinum, nos degustumus acetuizn. Surgimus a nmeusa, sed non sine lHHPlnllPÎS i-ru. Huile quatitxægru silzis, irllumpxnolestia vontris. Longa failles stomaehi rare fit amica qiiieti. Les nus souffrent de soif, les autres de coliques ;

La faim Ifa. pas pour tous des conseils pacifiques, Quand elle entend un goinfre accumuler les ro-ts. Autre est lolo-i pour nous, autre pour les prévôts. Nous ne pouvons franchir Penclos du monastère ; Hors des murs, nos seigneurs ont leur maison austère, Le feu brille toujours (lans leurs foyers joyeux,

Dans les coupes toujours fume un vin écumeux.

Au choc stridentrlu ve-rre, un docteur qui chancelle, Dicte à Paréopage une règle nouvelle.

Loi de prescription, qui nous opprim-e tous.

Autre pour les piuîvôts, outre est la. loi pour nous. Celui-ci vend nos bois ou. fauche nos prairies ; ’ ’

Cet autre, à son profil, dîme nos métairies ; ’l

Ce troisième, en sonlot, a pris tous nos moulins ; Loutre fraude les droits que doivent les vilains. Tous de nos revenus nous enlèvent l’usage,

Pour en faire, sans doute, un plus juste partage ;

Hoc Domini culpunt, qui tenso gutturc ructant. Altera præpositis, est altéra regula nobis. Nos extra claustrunrprohihemu-r figere gressum : Al : dominis- cameræ lice : ud-suu testa redire.

Fit rogus in medio, celebrantùr et orgie Baccho. Siccantur cuppæ spumanti nectare pleure.

Tune récitant Ieges, illjic prescribiznur omnes. Sub cauda vilis titubat seritentia logis.

Altera prœpositis, est altora regula nobis.

Ille molendinos, hic nosfros subripit agros.

Hic villas deciinat, hie vèctigaliav fraudat.

Hic silvas vendit, hic pratu virentia tollit’. W Nee totus census nostros transferts ; ad usus. Iusuper ceclesias cogunt sibi vendere nostras. i ’ Hoc facit improbités, non paupertatis honestus. Burburus hoc douum Ïe-eit siné luurle houorum. Extranoi mures sic sic bona- nosÎtm furantes Enfin, tant ils sont forts, tant ils peuvent oser, De nos églises même, on les voit disposer ! 1 Ces’rongeurs étrangers grugent les monastères,

, Comme les rats, le grain. On donne aux pzmvres frères,

La paille, et le froment fait crever leurs greniers.

Eu percevant la dîme, ils gardent, les premiers,

La moitié pour le quart : les agneaux’et leurs mères, Les poules, les poussins, trésor des ménagères,

La laine des brebis, et ; le chanvre, et le lin,

Les fèves et les pois, tout grossit leur butin.

Et contre ces abus, si les frères réclament,

Tous les prévôts en chœur ripostent et sexelaïnent : a Quoi donc ! Sevres-vous tondre et savez-vous filer ? Ne faut-il pas pour vous de ces soins se mêler ?

. (Yest nous qui le faisons ou qui Je faisons faire,

Et nous prenons la «lime en guise de salaire.

Si nous allons aux plaids, pour ce qui vous est dû, Nous gardons tout : comment partager un écu ? Que vous faut-il de plus que votre nourriture ?

Ut sures granum, corrodunt omnia fratrimi.

Dant paleas nobis, complent sua tecta medullis. Nec pudor est decimas, cum quartis tollere quartas. Gallinæ, puili, teneri cum matribus agni,

Vcllera vervecnm, faba, lentes, cannuba, linum, Et deeimæ pecudum sunt omnes præpositorum. Stulta nimis res est,.si clament talia Fratres.

Ad respondendum surgit grex præposîtornm. Carpere nec lanam, tenuem nec texerc telam,

Aut fuso tortum sapitis devolverevlinum ;

Talia prépositif faciant, operumve magistri

Pro mereede sua sit eis décimation nostra. Dieite : Quid pecco, mihi si inca commode quæro ? Qui sibimet nequam, eni fiet, die, bonus unquam ? Si teneo plaeitum pro qnæstn denariorum,

Pars mea sit totum, partiri nescio nunnnuin. Le superflu rendrait votre vertu moins pure Ce reste est eux- prévôts, ’suivant les saints canons Et selon les vieux us. l’ailleurs, nous le voulons ;

Notre volonté fait le règle irrévocable. n

O misère ! ô douleur ! et quel temps détestable !

C’est le temps des voleurs ! Et que fait donc le Roi,

Et les juges vengeurs, et le droit, et la loi ?

Le fraude a triomphé d e la loi qui sommeille ; A lÿadroits et gros présents du Roi ferment Pareille,

Et les magistrats sont les premiers à voler.

Dans l’abîme, à coup sur, l’Église va erouler.

Nous voyons rcsîenir les grands brigands antiques, Et Verres, et Simon, et leurs frères cyniques. Pour lancer votre foudre, ô Dieu, qu’atténuez-vous ? Vos temples ravegéspar (Piiffâmes filous,

Des bandits investis de la toute-puissance,

Les bons persécutés ; tout réclame vengeance.

C’est l’ignorant neveu d’un conducteur (P5111011 Snffieiat vieurs vobis et portio eensus.

Omne quod est reliquum fit fiSCuS {iräepositorun}. Sic censent canones, sic traetavere priôres. Sic volumes, sic laudamus, sic esse jubemus. Heu dolor ! heu lueurs ! o Lletestaihile tempes’ ? Heu facinus mirusm ! eur tenta potentia furent ? Dia ubi rex, ubi lex, ubijus, uhi regule vimlex ?-

Fruus superat loges, exeæeunt animera reges.

Regula eum jure (lormitat, judice fu-re

Pro eepitis’vitio membrorum pellet imago.

Principe funeste ruit eeelesiustieus ordo.

ls finem fecit ; sed eur sua larve remlunsit ?

Crudelis Verres, frater que Simonis (libres, lnfamis cleptes, quid vivit in orbe superstes ?

Proh Dee ! quidi cesses ? e111 ; non liune fulmiiie quassus ? Omne deeus templi perii-t sul) jutiice tali.

Quotl tuerat lirmunl ruit hou luetanto revuisum.

l Qui régente aujourcPhni les docteurs de tenant ; O toi, qui d’un seul bond as gravi le Parnasse, Que des Muses le chœur accueillit avec grâce, Devant qui nous courbons notre front abaisse, Savant fils de Pànier, sais-tu ton A B C ?

Sais-tu ce qu’est un clerc, un prévôt, un vidame ? La réponse est aisée ; en vain je la Ijéeiame,

Et je nbbtiens qu’un sourd et grossief grognement. Et c’est là’le docteur qu’on porte au firmament, sQue l’on met au-dessns de-nos docteurs célèbres ! Sa lanterne vraiment ne produit que ténèbres ;

S’il est docteur, ce n’est que pour les’ignorants. Cependant il commande aux prieurs, aux savants.

Il règne. Ce n’est pas pour longtemps, que je pense. a

Satan le veut. Sa place est choisie à l’avance : Bien digne assurément de cet excès (d’honneurs, En enfer il sera le prévôt des voleurs !

Omnia turbavit, nec adhue purgare quiescit ;

Cur tenet imperium ? cm se vult esse magistraux ? Et cur doctores sub se premitvatque priores,

Quem de cet ex atavis asinum deducere silÿis Pegaseo Inonte si suxit meila sophiæ.

Permistus musis dicat mihi littern quid sit ?

Vel quid præpositns, quid/elerieus, aut vice dam nus ? Hæc mihi non tsolvet, nisi quis mnssando susurret ; Tale decus vitæ, tem splendide. gemme sophiæ, Ecclésiæ lampes, qnæ dat pro luce tenebras, Insulsus douter] fatuorum stultus amator -

lmperat hic bréviter, rapiet quem Plnto patienter, Et sibi præpositum faeiet super egmina furum.

lllic sceptre regat, sic et hic erjuria frangat.

III.

Le Messager de Mort.

Les hiboux, nom hideux et (Ïallglllïä funeste, -N’ont jamais fait leur cri, Vi-rgile nous Yattostc, Que pour prophétiser des malheurs et des Inaux. Alpominant ee. cri, {tous les autres oisaux Ont ptoscrit pourîoujours eeàprophètes funèbres, Et c’est là la raison -qu’ils hantent les ténèbres Et qu’ils n’osent bouger quï} la faveur des nuits. S’ils voyaient en plein jour un seul de ces nnautîits, Les habitants de Pair‘, du bec et de la seiro, Le déchirant, bientôt auraient jonché la terre Des restes nmtîltés de lhugure fatal, ’ Justement condamné pouf Œainwr que le ma]. Tu mérites] trop bien aussi -qu’on te hem-lisse, « ’ 0 toi qui du hibou rempîis le triste oftloc,

a

III. — Atl n-untinm mortis.

j » ’- * ’ ä ’ t — -Bubo

forum nomen, dirllflî mortaïlibusvt olnen, z Ut hîuro testatur, «du-m cantatufata minntiur. Illius cantum damnet genus (mm-e V-Dlallttl-fil, Atque pari voto seelns 110c fu-gat acre toto. Noctes êrgo colit, eum lu-cizs tempora nolit ; Noetibtls apparct, qnoniam si" 111cc voler-ct, Ïam caput invis-nm nmlto forêt ungtte rocislæan ’ nleunbraqtle cum plumis divisa quo sparszrqucæïltttnfis, Æarpere pennatiqcttpientibus onnnia vatis, Vatis täçm diräe, dignæ mnla fata sivltairo. Huic volucri foedæ nsimul, proeul ergo rocade, Chartæ funobris letoif, damnänäe tenehris, Exécrable porteur des messages de deuil, Funèbre visiteur, qui ne franchis un seuil Que pour jeter partout l’alarme et la tristesse.

vEt pourtant, comme si, messager de liesse,

Tu portais le bonheur, tu demandes paiement ; Ton importune voix réclame insolemment,

Ici des souliers neufs spart out ta nourriture.

»— Ami du mort, je Veux remplacer ta chaussure. Tiens ces hottes, et tiens encore ce saindoux

Pour les graisser. Blais pars, maintenant laisse-nous, Scélérat, trafiquant de ce commerce infâme,

Qui pilles notre bien et désoles notre âme.

Tu souilles Pair, enfant adoptif de Pluton ;

Rentre dans les enfers, rentre dans ta maison.

— Mais toi, sans t’émouvoir de mon amère plztintc ; Tu répètes toujours ta lugubre complainte :

« Venez à. mon appel, pleurez et gémissez,

Tous ensemble entonnez le chant des trépassés ; Dans les airs attristés que Pairain retentisse !

Notez l’heure et le lieu du funèbre service…..

Qui vice bubonis non unquam læta reponis, Semper moesta canis non’diseessurus inanis ; Nam cum nil portes, nisi tristitiam, nisi mortes, Ceu bene regesta petis es cum pvocc molesta,

Et ne lacescas soccos petis, exigis escas, Propter defunctum soleas Jamus, addimus unctum. Bis nos centristes, mala dans res accipis pistes ; Sic importunus vendis mihi munere funus. lmprobe, vade feras, superas quid polluis oras ? Quid tibi cum vivis, barathri teterrimc civis, Vernula Plutonis, legatio perditions ?

Qnid nos infestas voces iterando molestas ? Conveniat coetus, gemitus date, fundite fletus, Æraque pulsant es clamate velut Gorybantes, Cantica funereis lugubria ferte choræis, Mais si morts sont morts, les survivants ont Falun ; Faites-moi préparer un plantureux festin. »

— Gouffre toujours béant, gourmand’insatiable, Entendrons-nous toujours cette voiaedétestable ? Pleure donc, toi qui viens pour exciter nos pleurs, r Îät tes larmes, bois-les ; Fumer pain des douleurs, Mange-le ; ce paiement convient à ton office.

Le n1alv te réjouit ; que le mal te pu-nisse ! Cependant laisse-nais, tout, à notre chagrin"

Prier le Père Dieudle Christ, son Fils divin, lfiEsprit, qui les unit, ’de nous donner la vie…..

Si tu ne t’en vas pas, j :1i vraiment trop envie

De te faire dîner à grands coups de bâton,

Esclave de ton ventre, insipide bouffon.

Carmina mœsta. date, loea vestra diemque notate, ÎDantes expensam, largam mihi ponite mensam. Escarun} gorges, quid nos tot talibus nrgesï‘

Fle qui flore jubes, plue (listillans quasi nubes, Potuimmœroris bibe, vescere pane doloris,

Qncm mala delectänt, anale te simul omnia. plectant ; Nos sine lætari, Christumque Patremque precari Ut vitæ munus detnobis trinus et unus.

His nisi parueris, dum ventris commode quæris, Fustibus et ferre saturable, pessinie gerro.

Ql La ville de Rennes.

La ville des Redons, Que désertent les bons, Est pleine de fripons.

Ville chère à l’enfer, Où la fraude est dans l’air ; On n’y voit jamais clair.

Amante de la nuit‘, Dans Ponlbre elle poursuit Quelque infâme (léduit.

Là, le plus insensé

1V. — De ciritlMc Redbazis.

Urbs Bedonis, Spoliata bonis, Viduata colonisf

Plena dolîs, Odiosa polis, Sine lamine solis, . In tenehris Vacat illecehris, {îaudetqtle latebris.

Desidiàln Du peuple est encensé ; Le sage est méprisé.

0 (Îannnable cité Où le droit est d’aité Comme une iniquité.

Des avocats Inentcttlfs, Et "retors et rhéteurs, mfendent les voleurs.

Les hommes droits et vrais,

Amoureux de la paix, Perdent tous leurs procès.

L51, fe bon citoyen N’est jugé propre à rien : On le lui nwntre bien.

Putat egregiam, ’ Spernitque sophiäm.

Jus atrmn Vocat omne patrum, hîeritura barathrtm).

9.

Causidicos Per falsidicos

Ahsolvit iniquos.

Veridicos — Et pacifiços Condemnat anlicos.

Qtiisque bonus Reputatur onus, Nequit esse patronus. -’ Là, toujours des débats, Des guerres, des connbats, Qui ne finissent pas.

oh ! que voir je voudrais Ce quîozn ne, vit janmis, Un honnête Rennais !

En quels traits plus hiäenx Te dépeindrais-jc mieux, ûlégèrc aux traits affreux ? Tes soldats, vrais brigands, Pillent lcspaysans

Et sèment dans leurs chanlps

La mort et ses horreurs,

Balla ciet, Neqtle (leficict, Quia pessima fiat.

Nemo quidam Soi" ; habere fidem Nutritus ibidenn.

l Qllld referanl, l Gentemque feram, Sævamque Dlcgæram ?

Ilnricolis Fit ab zlrmicolis

Oppressio solis.

Nlors cnrrit, Le vol et ses fureurs, Ifincendie et les pleurs.

Brigandagc sans frein, Qui brave avec dédain Le châtiment ; (divin !

l’étranger mal venu,

Est bientôt reconnu,

l’épouillé, puis battu.

Aux Incnrliants, enfin, Qui périssent dé faim, Les coups sèrvent de pain.

Quia prædo fufit ;

Villasqznopertarit.

1m Dei Non obstat ci " ’ x Pîcna rabiçi.

Qui gr-aditur Miser exuitur, Pugnisquc feriturÿ

Pauperilnxs lmest inde cilius, Î Sunt vnlnera gibbnsi.

VIII

32

LIVRE III


ÉPIGRAMMES


I.

Le Vase brisé.

À Rome, un jour, je 111’011 allais cherchent Des curiosités, lorsque, sous un portique, A Pétal d’un petit marchand,

Je découvris un vase magnifique.

Il était de saphir ; on Pavait tout renlpli Dïzncens. Le brocanteur en vendait. Mon ami Acquit le contenu pour neuf deniers de France, Et n1oi, comme un prodigue en veine de dépense, J’acquis le contenant pour trois sols et demi.

Il fallait, sans encombre, emporter la merveille ; Jktehetai tout exprès, fort cher, une corbeille. Pour Pemballage, on ne négligea rien.

I. 4- Vas firctctuæn.

Porticus est Roma, quo dum spatiando fero me Bas quæreiido novas, inveni- de saphyro vas. lnstitor ignotus, vendchat cum saphyro thus ; Ïïhus socius noster tres emit deuarios, ter

Vas tribus et semi-solidis ego prodigus en 1i. Hoc 111co11cussun1 dum tollere sollicitus sum, Le vase était intact, je m’en souviens trop 131m1 ! Et voilà qu’on l’extrait brisé, ” Sort lamentable ! (îmnmc cette belle urne eût Iaien orné ma table ! des ; la faute du mèssager, Qui, sous quelque ballot, vécrasa ma patère. Puisse-t-il ne jamais compter un jour prospère ; Et puissé son guignbn, à la finfine vepger !

I. Pro cofino mundo de viæninilæus pretium do. Ponitul’introrsuln sanum vas, inde, memor sum,

Extrahitur fissum : 11’ist’is, ’mÎiser inde, nimis sum. "Inter convivas magni forelï 110c pretii vas

Si forêt allatum, sicut positnlit fuerat tum, " Lator at hoc pressit, cuiprospera nulla. (lies sit.

II.

Le Forgeron.

Le jour et même la nuit, Le Cyclope bat Penclume : La Sicile- en retentit. Toujours Pardent fourneau faune, biais le monstre cède enfin ; Quelquefois il fait relâche, Et le sommeil ou la faim Lu-i font déserte ; sa tâche. J’ai nlaintenanl : pour Voisin Un forgeron plus étrange : Son travail 1’121 pas de fin ; Ilhommo ne dort, ni ne mange ; Les retentissants nmrteaux Jour et nuit sont sans repos : Et partant, nùsère extrême ! Toussses voisins sont de même. Mon Dieu ! que je voudrais bien, Faut devient grande ma gêne !

Il. — Ad inquietmn fabrunz.

Cyclopun} Liparis memoratur habere tabernas, Quos labor excreot nocte dicque gravis ; w Sic tamen ut copiant partem somnique cibique,

"Et recreet fessas tantula pausa menus.

Te, fugiende faber, nec opus, net ; flamma fatigat, QllOmÎnuS incudenn fervida massa premat. Nulla tiubi requies, nullanævicinia sentit, Cum tous infestet proxima quæque Iabor. Que notre mur mitoyen Ne fût autre que la. chaîne

Des Alpes E ou siPEtua, inextinguible fournaise,

Était sa- forge g voilà‘

Ce dont je serais trop aise ! Détestable forgeron,

Tu n’es pas né dîme femme ;‘ Jïmagine qu’un dragon

A fécondé Pœuf i infâme ’

Dont tu sers pourmou tourment. Cependant tout dégénère ;

Car le vigilant’serpent

Que je suppose tonwpère

Était gardiendïin trésor

flou Pou ne voyait rien ’qu’or ;

Diamants, riches merveilles ;

Toi, son lits, d’un cœur moins fier,

Tu travailles et tu veilles,. Pour un vil moreeztu de fer. Un lourd sommeil a du père Autrefois clos les cent yeux ; Que la mort, encore mieux, Du fils, ferme là paupière. -

Communis paries utinam par iflpihus esset, Aut fieret fornax ignihns Ætna tuisn !

Non âreor humana qui sis de stirpeerçatus, lnsopor ac potnit te genuissc draco.

Tu tamen ad ferrum’, cum sis démisstis a !) auro, Pejorilistudio dègénér invaginas.

Aurea pompatpatrem, te fcijrea massa retentnt. Hnie oculos somnus, mors promet atra tuos.

III.

A Faustin.

Ton livre, que je feuillette, Présente souvent, Faustin, Plus d’une page lunette, Dont l’éclatant parchemin Est vierge. Or, pour moi, j’estime Ces pages-là tout autant Que les pages où ta rime Étale complaisamment Son bavardage insipide. Car, bien franchement, je tiens Tout un livre pour tout vide, Qui n’offre que rien ou riens.

III. — Ad Faustinuvn.

Dum partem, Faustine, tni perpendo lihelli, Qna vacuæ pellis pagina mute, jacot,

d’artem quæ loquittlr vaeuana nuagis æstimo, quam te ; Plena superväeuis" pagina namque vacat.

Unde Iibrunl totum vacuum sic colligo, cujus

Altera pars nugas, altéra nil retinet.

IV.

À Robert, évêque de Lincoln.

Nonjil ne fallait pas, ni pour moi, ni pour vous, Dunnen ainsi votre grave parole.

Tromÿer, être trompé, c’est honteux entre nous. biais le trompeur a le plus’mauvais rôlcÿ

Celui-là qui reçoit, vous le savez fort bien, E51 ; àlln-(IOSSOLIS. de celui-là qui donc ; v

Blais celui qui promet, et qui ne donne rien, Ne saurait être excusé par personne.

1V. — M. Redonensis épiscopes, Ihüncolniensi cpiscäpo.

s

Nec milii verba dari, nec te daräverba decehat ; Titrpednihi Iälli, sed plus tibi fallerc turpe 1 Num sicqt qui data‘, uaagis ac/cipiente piflbüttll’, Sic qui promittit, uisi dot, plus vilis hubetur.

—.

V.

À mon Hôte,

En revenant céans, après cinq longs hiveifis,

Vous voulez que pour vous j’ëçrivo quelques vers ; Sur un sujet bien doux, un tout petit poème, Comme en un vase étroit se sert la bonne crème. Or, je veux vous servir selon votre souhait, Carÿaiine autant que vous un poème discret, Courant à. pas pressés dans une éproite voie.

Ce qui vous réjouit me (lonnc aussi la joie.

Donc, que votre sailté chasse bien loin la mort, Et vous permette ici de revenir encor.

V ; 4- Ad amicum hospitem. in partes istas post quinque roveifsus aristas, Vis a me scribi canninznpouoa tibi. Carmina pauca quidam, scd dulcia concupis idem.’ Misti more cibi poscis utijunlq-uo tibi. Quod petis ecce damus, quia quod petis hoc et amamus, Ut carmen brévitel’par love currat iter. Quod vis cunque vole, quod non vis, hoc quoque nolo. Et quod ego nolo, te quoque nolle volo.. Dilato lctho, pèr tempora longs. valeto,. Coneedailtqtie citum fataiibi roditum.

VI.

Des "AbbéS."p./rtal)t les insignes de Plîîpiscopat.

Un simple abbé, — portant les insignes sacrés

Quätux seuls prélats l’Église a con-sucrés, L’anneau, les gants, les sandales ; lamitre, Se met plus bas et plus haut que son tïtru. D’un double personnage, assemblage confus, Évêque, il ne lïest pas ; abbé, ne Pest-il plus ? Je le comparerais volontiers au Centaure, Monstre difformai, homme et cheval. Encore, C’est Peine mvêtü de la peau du lion. Sur les tréteaux, c’est le vil histrion Des enlpercurs qui ccint le diadème, -Et l’empereur reste histrion quand même.


Vl. — De Abbata usa-quanta pontiflcalilz.

Abbas sola gercns’insignin pontificats, Scilicetlannclluiïï, guanlôs, sandalia, mitruni ; Cum super abbatem sit et in-fra. poiltllicalum, Esse potest nentruïn, vol si (li-catul’utiunïque, Centaure simile monslärunl 1’001 esse hÎÎOTmC ; « Quod si -ponl ; ificen 1 simulàt, scd pernmnet alabäs,

Pcrmànct ergo latuns su} ; pelle leonis asellus,

n

Aut valut iu scena personam ferl ; atlicnçun.

VII.

Contre un Jaloux.

Je connais m} homme

Qui, parce qu’à Rame

Le Pape me lit,

Crève de (lépit ;

Il crève d’envie,

Parce qu’aux repas

Où l’on me convie

On ne le voit pas.

Qué j’aie en la ville

Une humble maison,

Jïächauffe sa bile ;.

Et qu’à la saison,

’ Tous les ans ÿhabite

Ma villa des champs,

J Réveille et jfirrite

Ses instincts méchants.

Mais si, dans la rue, i -Chacun me salue ; i l Si j’ai mérigé

La célébrité ;

V11. — Contra inviduzza :

Rumpitur invidia quidam, charissime Juli. Quod me Rama legit, rumpitur invidia. Bunnpitur invidia, qtiod sim j.ocosus amicus. Quod convive. fréquens, rumpîtur invidia. Rumpitur invidia, qûod rus mihidulce sub urhe est. Parvaque in urbe domus, rumpitu-r invidia Si je suis un homme Qu’on aime et renomme, C’est pour l’achever ! — S’il faut qu’il en crève, Min fo’i, ’qü’i1 achève ’ Vite d’en crever !

Rlîlllpilîlll’invjdia, âuod turha semper in ? omni

hlonstrainur digito, rumpitur invidiafl.’ Rumpitur invidia, quo d anaemur atqtle. prolmmur. Ptlllllpalîlll’quisquis rumpimr invidia.

VIII. » Pour un Éventail.

Bel éventail, chasse Pessahn Ilîalldi/t, Chasse la mouche bourdonnante Qui pendant le repas fgruit,

Qui trouble le repos du lit,

Qqi persécute quand on lit,

Quand on pense ouquand on écrit, -Et de toute façon tourmente.

VIII. — Versus in Flabello inscripti. lmproba terretur muscarine turba Ilabello, Quæ gratis mensis esse moles-ta solçt. Essewnolcsÿa solet, eum cylmltur membre quieti, Et quando legimus, esse nmlesta solet. Esse molesta solet, éufil scribinnus, aut nlechtenltxr, Atque nmdis aliis csseinolesta solet. A Sur une Maison en- bois.

La maison, en bois construite,

Peut être du feu détruite ;

Et si, par l’aide de Dieu,

Elle se garde du feu, "

Le temps seul ne tarde guère

À la réduire en poussière.

Si de fer étaient les murs,

En seraient-ils bien plus sûrs ? «

Non. La mort, plus forte encore,

Rouge, mord, use et perfore

blême le fer. En ceci,

L’homme prend un fol souci.

Quïmporte, s’il faut qu’il meure,

Combien dure sa demeure ? l

lllalgré sa peine et ses soins,

Lui-même il durera moins.

l-X. — Epigramma de domo Zignea

Condita de lignis domus esse potest ci bus ignis, Quem si non paseit, tamen it cito : nain veteruseit. Sed quid professer, si murus ferreus esset,

Cui mors dura tamen forêt inventera foramen ? Ergo non curet quantum sua mansio duret,

Qui modieum durat, etiam si talia carat.

X.

La Maison paternelle.

À La maisonnette oiLÿhabite,

Qui me vient de mon aïeul,

Est modeste et si petite,

Que je la remplis tout seul.

Et pourtant on la renomme, » Qirla naontre, aurloin, du doigt, En disant : Joilà letoit

Où vécut un honnête honlme.

æ

X. — Donna patema.

Ærcta domus gouda 4 h i Pou avos porta ? tibi lande.

XI.

Tumultes Populaîres.

Dès le jour qu’à. Pallas, ilotre austère déesse, Symbole non créé de paix et (le sagesse,

Divinement conçu dans un divin cerveau,

Jupiter a donné le céleste escabeau :

Bacchusjtout transporté d’envie et de colère,

À la sage ltlinerve a déclaré la guerre.

Dans Polympe entrepris, ces éclatants débats

ont aisément-trouvé des échos ici-bas.

Les uns sont à Bacehus, les autres à Nlinerve :

Mais quelle différence entre les camps s’observe !

Ici la plèbe inepte, etlà. les gens (l’honneur ;

lei la volupté, là Paustère labeur.

Et certes, les soldats autour du camp baehique

Sont beaucoup plus zlombreux qu’au bivouac pacifique De Pallas. Au prernier courent tous les buveurs,

Et, le vin contrevenus allumant leurs fureurs,

Ils nous voient différents (Peux, et, dans sa méprise, Leur foule méprisable à son tour nous méprise.

Xl. — Contra sechttosgtzn valgus.

Ex quo cœlestenæ meruit Sapientia sedem,

J uncta Jovis lari Pax summo nata parenti,

lnvidja nwtus pugnat eum Pallade Baeehus. Deeidit in terras a eoolo eœiptavsimultas,

Nec nato Semele, "nee desunt castra lllinervæ’ :

Quæ diverse sequi res est non ponderis æqui. Altera quisque probus ; at iners petit altéra Vulgus : Illa. voluptati ; sunt ista dicata labori.

Plures sunt igitur qui Bacchica eastra tuentur ;

Hoc est, Vina liquant, quam qui pro Pallade pugnant. Unde non est mirum si plebs fremit ebria dirum

lu sibi dissimules, rata nos vilissinna viles.

w

XII.

Le Coq volé

Une veuve avait un coq :.. (Ïétait toute sa richesse. La nuit, un lmbile eScrocA Le soustrait avec adresse, . Et le mange. Au magistrat,

lit-énoncé par notre veuve,

Handiment le scélérat Nie : et Fon n’a pas de preuve. Le juge n1et à serment Le damnàblè garnement. Celui-ci, «sans épouvante, Levait sà [Ïarjure main, 0 prodige ! quand, soudain, Dans son ventre, le coq cha-nte !

, XII. — Galli furium a gallo probatum.


Gallus crat cuidam viduæ, gallumque comédit Fur. Furi furtum hæc obicit, ille ncgat.

Dum Sacramento se purgat, gallus in a-lvo ÿ Perjuri- cecinit, rcsque prohata fuit.

XIII.

Règlement pour un Écolier.

Si vous gardez, mon fils, souci de mes leçons, lîant que je passe aux champs la sztison des moissons, Ne vous dissipez pas. Voici la règle sage

Que je veux vous tracer, qui convient à votre âge.

Si vous la transgressez, vous aurez, au retour, n Affaire à moiÎLexrez-vous (l’es le [Joint du jour ; l Quäi la quatrième heure atteigne la lecture.

Une heure après, allez prendre la nourriture

Et buvez peu de vin. Ensuite, allez dormir,

Ou, si vous Paimez mieux, allez vous (livertir

Un temps très-court. Et puis, que votre esprit médite, Et que chaque pensée à l’instant soit écrite. I Je veux,.sur ce carnet, juger de vos progrès, Et vous me Peuverrez par fidèles extraits.

Xlvli. — [nstitutio puer-z tleïseipzeli.

Si præceptorum superest tibi cura meorum, Parce puer uugia-dum rus colo tempore frugis, Præfigam metas, quales tua postulat ætas,2, Quas si trausgrederis, male (le monitore mereris., Contempto strate, silmmo te mane levato,

’ Facque legendo moraux, quartam dum tardat ail horam.

Quinta sume cibum, xïinum bibe, sedi modérateur, Et pransus, bréviter dormi, vel lude parumper. Postquam dormirais, sit mos tuus ut médite ris. Quæ médita tus eris tabulis dare ne pigriteris. Quœ dediseere spero quandoque videre.

Miseris hue quedam faeies, ut eætera eredam." Lisez cncor, jnsqnh : la fin de la journée. (Allez sottper/gaicment. Et sixPhcurre est sonnée, Regagnez votre lit ; sinon jouez un peu. Et voilà tout le jour réglé, sous l’œil de Dieu.

Post hæc, i lectum : cnm legeris, ito comestum. Pnst snmptas escas, si jam nmnet 116m, quiescas. Si tenxppzzs silpbrest, poät »cœn : m1 lnilcre proqesç. Snb tali mcta constat tibïtottffiïiœta. n



wXlVn.

Épîtaphe de Brunnn, évêque clfAngevs.

Brunon, channantfsiîcillarrl, (101px prélat, —tendre père,

Ton cœur était [fleuret ta langue de miel.

Si jamais tu péchas, juge ÿrop débonnaire,

Ce fut pour ménager l’intérêt-fraternel,

Pour ne blesser en rien lännour-propre Œun frère. Pèche-t-on gravement en’se montrant trop doux ?

Ton lmtnple et ton clergé disent dans lèur prière :

« Le Seigneur soit pour toi ce que tu fus 130m nous. n

a ’ ’…

xlv. çiÿpiugphzæaozz.

Brune Pater, jucunde senex,.millésime pœesul, Cujus cor pietas, lingua me ! cf lacprat ;,

Si tibi culpa fait ; quoi ! nullunn Iœderc vèllcs, Qnïale tuum Inèritulïx cum hona ctnlpa fuit. Quid tibi, chars Pater, clerns, popjnlusque preccmur ? Ut quod tu nobis, hnc tibi. sil ; Dominus.

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Notes

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  1. Voyez ci-après la satire de Marbode sur la rapacité des porte-rouleaux.
  2. Cette sorte de réponse à la lettre encyclique était tantôt en prose, tantôt en vers ; elle enchérissait sur les louanges données au défunt et contenait des expressions de condoléance. L’œuvre poétique de Baldric, évêque de Dol, est presque exclusivement composée de ces réponses aux rotuli. Voyez sur cet usage le travail spécial et complet de M. L. Delisle, de l’Institut. (Bibliothèque de l’École des Chartes, 2o série, t. III.)
  3. D’autres disent au bourg de Sorges. Du moins, les biens dont sa famille dota l’abbaye de Saint-Aubin étaient situés à Sorges.
  4. Préface de la Vie de Robert d’Arbrissel.
  5. Voir Dissertation apologétique pour le bienheureux Robert d’Arbrissel. — Anvers, 1701, — in-12.
  6. Voyez le très-intéressant article que M. Douët d’Arcq a bien voulu consacrer à notre traduction du Lapidaire, dans la Revue des Sociétés savantes, tome II, p. 336 et suiv.