Réflexions préliminaires des vrais principes politiques/De la flatterie
I.
De la Flatterie
La flatterie, dans tout gouvernement, est un signe de servitude ; elle est incompatible avec la liberté, qui produit l’égalité. La flatterie est fausse et égoïste ; elle découle de la peur ou de la fureur ; n’ayant que soi en vue, elle n’observe aucune règle de mérite ou d’équité. La flatterie est d’autant plus exaltée et plus honteuse que ceux qui la patronisent sont plus méprisables ; aussi Pline observe-t-il que les empereurs qui furent les plus haïs, furent aussi les plus flattés ; car, dit-il, la dissimulation est plus ingénieuse et plus artificieuse que la liberté, et la peur l’est plus que l’amour.
C’est un vice en inimitié continuelle avec la vérité : il est calomniateur, et souvent cruel : tout mot qui lui déplait est un libelle ; toute action qu’il n’aime pas est une trahison ou une sédition.
Avec un gouvernement libre, cet être hideux, qu’accompagnent toujours la bassesse et le déshonneur, craint de se montrer, et se cache.
La tyrannie fait les flatteurs, comme les flatteurs font les tyrans. Ces êtres dégradés doivent être voués au mépris de tous les citoyens d’une société bien constituée.