Réflexions sur l’usage présent de la langue française/C

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C

Calvitie, Chauveté.


Ces mots sont si peu en usage que le mieux est de les éviter toûjours.


ça haut, cy haut.

Les Lyonnois disent ça haut, venez ça haut, descendez ça bas, ce qui est tres-mal dit ; & un certain Traducteur de ce pays-là, qui s’est mêlé, où plûtost qui a tâché de tourner en François l’Aristée de Virgile dit : « Orphée déja échapé de tous les périls delà bas, s’en retournoit ça haut dans ce monde. » Cette faute est grossiere.


Candeur, candide.

Candeur & candide sont du bel usage. Ils signifient bonne foy, sincerité, franchise. La simplicité & la candeur sont l’objet de l’amour de Dieu[1].

« Dieu qui est le juste Dispensateur des récompenses en donne mesme aux paroles qui sont accompagnées de verité & de candeur[2]. » C’estoit un homme d’une simplicité & d’une candeur des prémiers siécles[3]. « Il faut oster au cœur humain le masque de vertu, de candeur & de sincerité, dont il se sert pour les rafinemens de sa dissimulation. »

Candide se dit de mesme avec beaucoup de grace, mais il faut prendre garde à ne pas le dire non plus que candeur, sans mettre auparavant quelque autre mot, qui en détermine le sens & la signification ; comme nous l’avons veu dans les exemples précédens, & comme on le voit dans celuy-cy. Une intention droite & sincere, un procedé simple & candide gagnent les ames les plus barbares. Morale du Sage.


Capacité.

Ce mot se dit dans des sens bien différens, on dit la capacité d’un Vaisseau pour la largeur & la grandeur ; & l’on dit la capacité d’un homme, pour la science.


Caporal, corporal.

On dit caporal, ordinairement. Il demanda fiérement au caporal d’où venoit cette nouveauté[4]. On appelle corporal le linge dont les Prestres se servent à la Messe sous le Calice ; la raison de cela est que caporal vient de caput, & que le caporal est un chef de milice ; & l’on dit corporal, à cause du Corps de Nôtre-Seigneur qui repose dessus.


Capriole, cabriole.

Il faut dire capriole sans trop prononcer le P. C’est un certain saut qu’on nomme ainsi dans la danse ; On peut voir là-dessus le Révérend Pere Ménestrier Jésuite, dans son Livre des Ballets, ce sçavant Religieux y explique doctement ce que c’est que capriole, aussi bien que courbettes, voltes, demi-voltes & autres termes de maneige.


Carolus.

Le peuple dit un Carolus, pour dire dix deniers, mais cette maniere de parler ne vaut rien ; au moins ce n’est point ainsi que les honnestes gens parlent. Ce mot ne se dit que par les Crocheteurs & les Harangeres.


Carnaval, carneval.

On dit carnaval, & on prétend que ce mot vient de ce qu’en ce temps-là on se traite mieux qu’à l’ordinaire, & que c’est comme si l’on disoit carne avale. D’autres qui veulent qu’on dise carneval, font venir ce mot de carnivale, parce qu’alors il faut dire adieu à la chair ; Mais carnaval vient, ce me semble, de ce qu’autrefois on disoit avaler pour finir ; carnaval est comme si l’on disoit la fin de l’usage de la chair ; ainsi on peut croire que l’usage de la viande estant prest de finir, on a employé autrefois ce terme. Voila le temps qui s’avale, d’où peut estre venu carnaval.


Casemate, casmate.

L’un & l’autre sont bons, mais de quelque maniere qu’on l’écrive, il est certain qu’on doit prononcer casmate. Ce mot n’est que du stile familier, il signifie une petite fosse, ou un creux dans la terre ; les Grecs ont aussi leur χάσματα, qui veut dire une ouverture de terre, & les Italiens leurs casamatta, qui veut dire une caverne pour les fous, comme qui diroit casa à matti, case à mettre les fous.


Caze, cabane.

Caze se dit quelquefois pour cabane. « Figurons-nous ces grandes fermes, qui comprenoient le logement du maistre, la basse-cour, les granges, les estables, & les cazes des esclaves[5]. »


Cécité, Aveuglement.

J’ay veu des personnes tres-habiles dans la Langue qui croyent que cécité est un beau & bon mot en parlant de la privation de la veuë. Je déférerois assez à leur jugement, si je le voyois autorisé par l’usage, mais il ne me semble pas que cela soit, quoyque ce fust une chose à souhaiter ; car enfin il est constant qu’aveuglement ne se dit guéres bien dans le propre. On dit bien l’aveuglement du cœur, l’aveuglement de l’esprit ; mais il me semble qu’on ne dira pas bien d’un aveugle, qu’il est dans l’aveuglement.


Celuy, au lieu de personne.

Celuy se met quelquefois au lieu de personne, & mesme avec beaucoup de grace. En voicy un exemple de M. de Vaugelas. « Comme ils vinrent à s’écrier tous ensemble, qu’enfin Jupiter vangeur de la Gréce avoit ouvert les yeux, il n’y eust celuy qui ne s’interessast dans leurs maux[6]. » C’est comme s’il y avoit, il n’y eust personne qui ne s’interessast dans leurs maux.


Ce que, pour si.

M. de Vaugelas prétend que, ce que, se peut mettre élégamment au lieu de si ; Il cite mesme cét exemple de Malherbe, il ne faut pas penser que ce que Mercure est peint en la compagnie des Graces, soit pour signifier, &c. mais aujourd’huy on ne parle plus ainsi. M. d’Ablancourt aime cette maniere de parler ; « Quelqu’un, dit-il, qu’on accusoit d’avoir empoisonné son Pere dans un festin, venant à ménacer Ciceron ; j’aime mieux encore, répondit-il, que tu me menaces, que ce que tu me traites[7]. »

Diogénes estant blâmé d’avoir versé du vin de son verre, j’aime mieux le verser, dit-il, que ce qu’il me verse. Toutes ces autoritez ne peuvent rien contre l’usage qui a changé depuis ce temps-là.


Cercle, Assemblée.

Il ne faut pas confondre ces deux mots ; cercle ne se dit parmy nous que des assemblées des Dames. On dit dans un autre sens les Cercles de l’Empire ; « Cercles de l’Empire unissez toutes vos forces, vous serez vaincus, il ne vous restera que des malheureux débris de vos armées[8]. »


C’est eux, ce sont eux.

Ce sont eux paroît meilleur ; néanmoins de bons Auteurs ont quelquefois parlé autrement, c’est eux qui ont bâti ce superbe labyrinthe[9].


C’est pourquoy, ce fut pourquoy.

Quoyqu’il s’agisse d’une chose passée, on met toûjours c’est pourquoy, & non ce fut pourquoy. C’est pourquoy les Romains perdirent la bataille, & non ce fut pourquoy les Romains perdirent la bataille. Il faut remarquer en passant que la conjonction & n’est point élegante devant c’est pourquoy.


C’est, c’estoit.

Il y a des occasions où l’on se trouve en peine pour sçavoir lequel des deux il faut mettre, c’est ou c’estoit ; par exemple, s’il faut dire : « Aristote disoit que le meilleur moyen de faire progrés dans les Sciences, c’estoit de jetter l’œil sur ceux qui nous devancent » ; ou bien, c’est de jetter l’œil sur ceux qui nous devancent. Il faut dire c’estoit, & la régle qu’il y a à suivre en cela, c’est que lors qu’il y a un prétérit devant, comme en cét exemple, Aristote disoit, il faut mettre l’imparfait pour le present ; ce qui est si vray que M. d’Ablancourt dans son Livre des Apophtégmes ; ayant écrit, Aristote disoit qu’il ne falloit ny loüer ny blâmer, parce que c’est estre fou, ou présomptueux, s’en corrige comme d’une faute, & met dans l’errata, qu’il faut lire c’estoit. Cette régle peut s’appliquer à tous les autres verbes. L’on peut juger par là de cét autre exemple d’un Auteur moderne ; « On a veu de nos jours, dans les troubles qui sont maintenant appaisez, que mille gens appelloient ceux-cy Jansenistes, & mille autres ceux-là Molinistes, sans que ny les uns ny les autres pussent dire quelle est la doctrine de Jansénius, ou de Molina[10]. » Il est visible qu’il falloit dire : quelle estoit, au lieu de quelle est. Et il est facile de le voir, si l’on veut se donner la peine de l’examiner soy-mesme, en répétant la phrase avec c’estoit. Mais on sçait bien que cét Auteur ne se pique pas tant de parler purement, que clairement.

J’ay veu des gens qui consultant un peu plus la raison que l’usage, prétendoient qu’on ne devoit pas dire, c’estoit, dans les exemples citez, & que cette phrase, par exemple : « Aristote disoit que le meilleur moyen de faire progrés dans les sciences, c’estoit de jetter l’œil sur ceux qui nous dévancent », étoit tres-mauvaise ; parce, disoient-ils, que le moyen dont il s’agit là, dure toûjours ; & qu’en disant c’estoit, il semble que ce moyen n’estoit bon que du temps d’Aristote ; on dira bien, ajoûtent-ils, il disoit que le meilleur moyen de rendre la liberté à la République, c’estoit de réprimer la puissance de César ; ce moyen ne pouvant avoir de rapport qu’à ce temps-là.

Mais ces personnes là ne prennent pas garde qu’il ne faut point raisonner en matiere d’usage ; & je voudrois bien sçavoir si eux-mesmes observent cette régle, & s’ils ne disent pas tous les jours, quand l’occasion s’en présente, il m’a dit qu’il avoit un procés. Il m’a dit qu’on luy devoit cent pistoles. Vous me disiez que vostre frere estoit venu ; & il est certain que c’estoit, est mis là pour c’est, ce qui paroist par la réponse qu’on peut faire ; je vous ay dit que mon frere estoit venu, parce qu’en effet il est venu.

Cét imparfait tient lieu d’un présent, & nous avons des expressions où cela paroist encore ; comme : s’il entroit maintenant. Si cela estoit. Si le ciel tomboit. D’où vient que le Latin exprime ordinairement ces phrases là par le présent du subjonctif, si cælum ruat, dit Térence, pour, si le ciel venoit à tomber, & ce qui est remarquable, c’est que quand nous nous servons du présent dans ces sortes d’expressions, nous marquons ordinairement le futur, comme : s’il vient, faites-le attendre ; s’il fait demain beau temps, j’iray à la campagne, &c.


C’est dommage.

On dit c’est dommage, & non il est dommage, c’est une régle incontestable. C’est dommage, dit le Pere Bouhours en parlant du mot de sagacité, que ce terme ne soit bien estably en nostre Langue.


C’est, pour est.

Quand est, est un peu éloigné du commencement de la phrase, on dit c’est, comme : ce que vous estes obligé de faire en cette occasion pour apporter quelque réméde à tous ces mots c’est de, &c. mais si le verbe est tout proche, on peut dire est, comme : ce que je puis faire, est de, &c. J’ay remarqué néanmoins que nos meilleurs Auteurs ne s’attachent guéres à cette régle, & qu’ils mettent quelquefois indifféremment c’est, ou est, soit qu’il soit prés ou loin. Comme, « une des plus importantes leçons que la sagesse nous donne c’est, de ne point prétendre corriger les défauts d’un homme qui ne reçoit les conseils qu’avec mépris[11] ».

La prémiere fonction des Rois, & la partie la plus essentielle de la Royauté, c’est la justice[12].

M. Charpentier dit de Socrate, la plus excellente richesse à son avis, c’estoit la justice.

Et en un autre endroit il dit, estoit. « Le motif de tous les discours & de toutes les controverses de Socrate, estoit la recherche de la verité[13]. »

La plus cruelle avanture qu’un honneste homme puisse avoir est d’estre jaloux d’un amy[14].

J’ay remarqué aussi qu’au plurier nos meilleurs Auteurs mettent souvent le pronom ce devant le verbe estre, aussi bien que dans le singulier. Les plus solides biens dont l’homme se puisse enrichir, ce sont ceux qu’il a amassez avec justice, Morale du Sage.

Il semble néanmoins à quelques-uns que ce seroit mieux de dire, les plus solides biens dont l’homme se puisse enrichir sont ceux qu’il a amassez avec justice. Je crois cela assez indifférent.


Cet, cette.

Cét se prononce ouvert, cette se prononce muet, c’est à dire que le prémier E de cette se prononce comme le dernier, par exemple, on prononce à cette heure, comme s’il y avoit, à ce t’heure ou astheure. C’est ainsi que tout le monde parle, excepté ceux qui sont nouvellement venus de Province, lesquels ont beaucoup de peine à s’empescher de prononcer l’E ouvert dans ce mot.


Cettuy-cy, celuy-cy.

Cettuy-cy ne se dit plus, & il est constant qu’on dit, celuy-cy. M. de Vaugelas dit que de son temps ce mot commençoit à n’être plus gueres en usage, mais aujourd’huy nous pouvons dire qu’il n’y est plus.


Celuy-la qui, celuy qui.

On ne met celuy-là que lorsque le qui est éloignée de deux ou trois mots, comme : ceux-là se trompent qui croyent la Comédie un divertissement innocent. Ceux-là se perdent qui s’adonnent à la lecture des Romans. Et M. de Malherbe n’est pas à imiter d’avoir dit, seroit-il possible que celuy-là voulust qui peut dévouloir en un moment. Mais on ne dira pas ceux-là qui, il faut toûjours qu’il y ait quelque mot entre-deux, quelquefois on met qui auparavant, & celuy-là, apres ; comme : qui perseverera jusqu’à la fin, celuy-là sera sauvé. M. Fléchier Orais. Funéb. de la Reyne.


Champion.

Ce mot ne se dit plus en Prose, à moins qu’on ne veüille badiner & railler. On le souffre un peu plus en Poësie ; je sçay d’habiles gens qui s’en sont servis dans leurs Vers. Mais neanmoins je croy qu’il seroit mieux de ne le plus dire, j’entens dans un discours sérieux, car le stile burlesque reçoit presque tout.


Chanceux, heureux.

C’est une maniere de parler familiere, qui n’entre point dans le discours un peu relevé, elle est bonne dans le burlesque. Chance est encore un mot de cette nature ; on ne le dit point en parlant sérieusement.


Chandelle de cire.

Chandelle de cire n’est point bien dit, il faut dire bougie. Les Provinciaux y manquent souvent.


Chargeant, pesant.

Chargeant ne se dit que dans le figuré, on ne dira point d’un fardeau qu’un Crocheteur portera, qu’il est fort chargeant, mais on dira qu’il est fort pésant, au lieu que dans le figuré chargeant est un bon mot. Il disoit que cette dignité estoit tres chargeante pendant les troubles de ce siècle. Flech. Hist. de Comm.


Chatié.
Un discours Chatié.

Ce mot est tres-élegant dans cette occasion, & nos meilleurs Ecrivains s’en servent, sa Prose est ce qu’il y a de plus chatié & de plus exact[15].


Chaire, chaise.

On dit Chaire de Prédicateur, Chaire de Droit, la Chaire de Saint Pierre, on dit aussi, la Chaire de Moyse ; & jamais on ne dit chaize que lors qu’on parle de ces siéges à s’asseoir, ou à se faire porter, loüer des chaizes, se faire porter en chaize. Le Traducteur des Lettres de S. Augustin dit, les Scribes & les Pharisiens sont assis sur la Chaize de Moyse. Mais il s’est éloigné en cela de l’usage.


Chenu, blanc de vieillesse.

Chenu ne se dit plus guéres aujourd’huy. Ce mot néanmoins peut avoir sa place dans la Poësie, & sur tout dans le Burlesque.


Chifonner.

Dans quelques Provinces on dit froisser, pour chifonner. Froisser un rabat, pour chifonner un rabat, mais c’est mal parler. Les Lionnois font souvent cette faute.


Des ciel de lit, des cieux de lit.

On ne dit point des cieux de lit, il faut dire des ciel de lit ; Ciel de lit doit estre regardé comme un seul mot.


Chose.

La paresse de l’esprit qui d’ordinaire ne veut pas se donner la peine de chercher les termes convenables qu’il sçait, & l’ignorance où l’on est de la plûpart des mots de la Langue, est ce qui a donné une si grande étenduë au mot de chose. On appele presque tout de ce nom là ; & il se trouve des Livres où il est plus de huit ou dix fois dans une mesme page. L’ignorance de ces choses, par exemple, est cause de plusieurs abus. C’est à ces choses que nous devons avoir égard. Il faut examiner cette chose à fonds, &c. Il en est de même, de cecy & de cela. La raison de cecy ; dit-on souvent, la raison de cela, c’est que. Si les hommes consideroient attentivement cela. Dans la conversation ce langage se souffre, mais dans un discours qui demande un stile un peu chatié, ce seroit une faute de parler de la sorte, sur tout dans une harangue & autre piéce d’éloquence ; par exemple, s’il s’agit de quelque maxime Chrestienne, & que je blâme la négligence que les hommes ont d’y penser ; je ne dois pas dire que c’est une chose étrange qu’ils ne fassent point de réflexions sur ces choses, qu’ils ne pensent point à ces choses, qu’ils ne s’occupent point de cela, mais il faut trouver quelque nom à mettre en place ; on peut dire, qu’il est étonnant qu’ils ne s’occupent point de ces grandes veritez, qu’ils traitent avec tant de négligence des maximes si pures, qu’ils abandonnent des régles si sûres, &c. car rien n’énerve tant la force d’une expression que ce miserable mot de chose, qui marque une grande disette de paroles.

Ce défaut est d’autant plus difficile à éviter, que ce terme vient presque se placer de soy-mesme sur les lévres sans qu’on y pense, à cause de l’habitude que sa commodité nous a fait prendre de le dire, car il convient à tout ; il n’y a rien qu’on ne puisse appeler du nom de chose aussi bien que de cecy & de cela. Quoy que ce vice ne soit pas considerable dans la conversation, à cause du peu de temps qu’on y a d’examiner toutes les expressions dont on se sert ; il est vray néanmoins qu’il le devient beaucoup, lors qu’on voit qu’il part non pas de la précipitation que l’on a de s’exprimer, mais de l’ignorance véritable où l’on est d’un mot. Ce qui arrive assez souvent dans ce qui regarde les Arts. Combien de gens, par exemple, en parlant de ces grosses séparations de pierre qui se voyent dans les croisées des vieux bâtimens ont coûtume de dire, ces choses de pierre sont bien vilaines, ne sçachant pas le nom de meneaux que les Architectes y donnent ; c’est pourquoy il seroit important qu’on apprist les noms de tout ce qui peut tomber ordinairement sous nos sens, afin que quand on en voudroit parler, on ne fust pas contraint de recourir à ce pauvre mot de chose, l’azile de l’ignorance ; c’est à quoy on ne s’attache pas assez aujourd’huy ; jusques-là même qu’à tout bien considerer, il est vray de dire que la plûpart ne sçavent pas la moindre partie de la langue de leur païs ; car enfin il ne faut pas s’imaginer que les termes de chaque art soient comme barbares, & ne tiennent pas rang parmy les mots de la Langue. Un Architecte, comme dit M. Furetiere, parle aussi bon François en parlant de modules, de plaintes, de stilobates, &c. & un homme de guerre en parlant de casemates, de merlons, & de sarrasines, qu’un Courtisan en parlant d’alcoves, d’estrades & de lustre ; un Avocat avec ses termes de pratique, ne laisse pas de mesme de parler bon François ; & quand le Roy veut faire des Ordonnances & des Réglemens sur ces matieres, il se sert des termes de cét Art, sans qu’on puisse l’accuser de parler un langage barbare ; comme on ne peut pas accuser Ciceron d’avoir parlé mal Latin, lors que dans ses Oraisons, il s’est servy des termes propres à la Jurisprudence Romaine. Il ne faut donc pas croire que sous ombre que nous avons apris nôtre langue maternelle de nos nourrices, nous sçachions pour cela toute la Langue Françoise, & que nous ayions droit de rejetter tous les mots que nous n’entendons point pour y substituer à la place le mot de chose. Pour ce qui est de cecy & de cela, il est plus permis dans le discours ordinaire, comme : remarquez cecy. Je vous dis cecy parce que, &c. J’ay veu cela. Il m’a dit cela. Mais ce terme n’estant pas noble il ne doit point entrer souvent dans le discours oratoire.


Christophe, Chretophle,
Philippe, Phelippe.

Je ne me serois pas avisé de faire cette remarque, si M. Ménage n’avoit écrit dans ses observations, qu’on pouvoit dire Phelippe, au lieu de Philippe dans la conversation ; il dit le mesme de Chretophle : Il faut donc remarquer que Phelippe ny Chretophle ne se doivent dire ny dans les discours relevé, ny dans les entretiens, & qu’il n’y a que le petit peuple qui prononce de la sorte.


Chypre, Cypre.

On dit la Déesse Cypris ; & les Habitans de cette Ville on les appele Cypriots, & non Chypriots ; ce qui favorise fort la prononciation de Cypre. Cependant les sentimens sont fort partagez là-dessus. M. Charpentier dit Cypre. Il conquit l’Isle de Cypre & l’Egypte. L’Auteur qui a traduit les trois premiéres Comédies de Térence dit Cypre, aussi ; J’ay acheté plusieurs choses pour emmener en Cypre. M. Fléchier au contraire dit toûjours Chypre : il a laissé l’histoire de la guerre de Chypre[16].

Mademoiselle de Scudery dit toûjours Chypre ; Ce Prince apprenant la perte du Royaume de Chypre[17]. Enfin quoy qu’il y ait de grands suffrages de part & d’autre ; Je crois néanmoins que la prononciation de Chypre est la meilleure, je la vois dans plus d’Auteurs que l’autre. Le Pere Bouhours ne prononce point autrement. Il s’embarqua dans un Navire qui retournoit dans l’Isle de Chypre[18]. Le Traducteur des Lettres de Saint Augustin prononce de mesme ; Il est Evesque dans l’Isle de Chypre. Je pourrois citer en faveur de cette prononciation une infinité d’autres excellens Auteurs que j’omets à dessein.


Cime.

Ce mot est d’usage ; je sçay bien que quelques personnes font difficulté de s’en servir, mais nos meilleurs Auteurs, & mesme les plus nouveaux n’en font pas difficulté. « Un jour Astolphe se trouva dans le Paradis Terrestre, qui estoit sur la cime d’une montagne tres-haute où son hypogrife l’avoit porté[19]. »


Clameurs.

C’est un mot élégant, & qui mis à propos a beaucoup de grace. Ils le demanderent plusieurs fois en plein théatre avec de grandes clameurs pour l’exposer aux Lions[20]. Ce mot ne se dit pas au singulier. « Je m’imagine entendre les mugissemens de la mer Toscane, tant sont effroyables les clameurs qui s’élevent à la veuë de cette pompe étrangere qu’étalent nos Comédiens. » Le Pere Tarteron dans sa Traduction d’Horace.


Cocq d’inde, dinde.

Il n’y a que le vulgaire qui dise un dinde pour dire un cocq d’inde. Les Provinciaux sont sujets à cette faute, & mesme à Paris le petit peuple parle de la sorte.


Combustion.

On n’employe ce mot que dans le figuré ; On ne dira pas d’une maison qui brûle, qu’elle est en combustion ; ny de celuy qui y a mis le feu, qu’il la mis en combustion. Mais dans le sens figuré, on dira fort bien, d’un homme qui met la dissention & le désordre par tout, qu’il met tout en combustion.


Complimens.

Les Complimens demandent beaucoup de délicatesse. Ils doivent estre naturels, simples & intelligibles, & non guindez, obscurs & outrez, comme ils le sont d’ordinaire. Ce n’est pas qu’il ne soit à propos quelquefois d’estre mystérieux dans ses complimens, mais il ne faut pas que le mystere soit difficile à déveloper, autrement c’est galimatias. Il y faut fuir aussi ces termes communs si fréquens dans la populace, comme sont : cela vous plaist à dire. Il n’y a pas de quoy. Vous vous mocquez. Vos mépris vous servent de loüanges, &c. ce sont des ornemens si vulgaires & si vieux, que de s’en servir, c’est plûtost une marque de rusticité que de politesse ; Et comme dit fort bien M. de Balzac, on prend les modes au Village quand on les a quittées à la Ville ; & il n’y a que la pauvre Noblesse qui se pare de clinquant usé, & de peluche pelée ; l’un & l’autre ont esté de saison, mais à présent ils ne le sont plus : ce furent autrefois des nouveautez, & ce sont maintenant des restes. La premiére comparaison qui fust prise de l’embrasement du Temple de Diane, estoit extrémement bonne : les autres depuis n’ont pas esté supportables, & il ne suffit pas que les sources où l’on puise, ayent esté claires, il faut pour y puiser nettement que les passans ne les ayent point troublées ; c’est à dire, que dés qu’une chose est devenuë triviale, elle n’est plus de bon goust ; c’est pour cela que les honnestes gens fuyent les proverbes, les quolibets, & les équivoques, dont la populace aujourd’huy a coûtume de parer son langage. Une autre condition requise dans les complimens, est d’en user rarement ; Les Provinciaux ont besoin de cét avis ; eux qui s’imaginent qu’il est du bel air de toûjours complimenter, c’est peut estre le plus ridicule de leurs défauts. Ce n’est point ainsi qu’on se conduit dans le grand monde, & un faiseur de compliment y fait une pauvre figure.

Il faut observer outre cela qu’il y a des termes qui sont bons dans les complimens, mais qu’il est facile de mal appliquer. Avoir l’honneur, par exemple, est un terme de respect fort usité dans le monde. J’auray l’honneur de vous voir, j’auray l’honneur de vous écrire, mais on en abuse quelquefois, on dit souvent j’ay eu l’honneur, où il faut dire, j’ay eu le plaisir. Avez-vous veu mes chevaux, disoit un homme de qualité à un Provincial ; oüy, Monsieur, répondit le Provincial, j’ay eu cét honneur-là. On fait tous les jours de ces sortes de fautes sans y prendre garde, c’est pourquoy il est important de s’observer là-dessus. On dit souvent aussi, avoir le plaisir, avoir l’avantage, pour avoir l’honneur, comme : j’auray demain l’avantage de vous voir partir, dit-on quelquefois, j’auray le bien de vous aller dire adieu, ces termes-là ne valent rien en pareille occasion, il semble qu’on regarde comme un bonheur pour soy le départ de la personne à qui on fait un tel compliment ; il faut dire : j’auray l’honneur de vous voir avant vostre départ, j’auray l’honneur d’aller recevoir vos ordres ; ou quelque chose de semblable.


Comporter.

Ce verbe s’employe quelquefois dans un certain sens où tout le monde ne convient pas qu’il soit bon : Le Traducteur des Lettres de S. Augustin l’a employé dans ce sens, lors qu’il a dit : l’ame de l’homme est immortelle, mais elle l’est comme sa nature le comporte. Plusieurs personnes néanmoins fort délicates dans la Langue approuvent cette expression ; Et le Pere Bouhours mesme (qui l’appelle vieille dans ses Remarques, & qui ajoûte qu’il ne voit pas qu’elle soit en usage dans les Livres, & qu’il ne sçache pas un de nos bons Ecrivains qui se servent de ce verbe en une signification active,) s’est néanmoins declaré depuis peu en faveur de comporter, en le mettant luy-mesme dans le Livre qu’il vient de donner au Public, touchant la maniere de bien penser dans les ouvrages d’esprit : « Le Poëme de Ronsard, dit-il, sur les miseres du temps souffre des idées & des expressions, qu’une Stance spirituelle sur la vanité des grandeurs du monde ne comporte pas. » 1. Dialogue.


Concept.

Concept est un mot particulier aux Philosophes, & qui est fort en usage, comme[21] : « La Philosophie devint pointilleuse sous les Arabes par ces précisions & ces concepts abstraits qu’elle introduisit dans l’Ecole. »


Connivence, Dissimulation.

L’usage a receu ce mot. Je crains bien que ce silence ne soit une connivence veritable[22].


Conquester.

Plusieurs personnes condamnent ce mot comme vieux ; mais il y a des occasions où il se dit mesme avec grace. Alexandre tout vaillant qu’il estoit, n’avoit pas encore conquester la moitié du monde[23].


Consentir.

Ce verbe veut le datif, consentir à une chose ; M. Patru néanmoins a dit pour contracter une societé toutes les parties doivent la consentir[24].


Avoir de la consideration. Estre en consideration.

Plusieurs personnes disent avoir de la consideration, pour, estre estimé, estre consideré ; Et des Ecrivains fameux ont mesme parlé de la sorte. Aman qui avoit une grande consideration dans le Royaume[25]. Je crois néanmoins que cette phrase est peu Françoise. Car enfin avoir de la consideration signifie plûtost considerer qu’estre consideré, comme : c’est un homme qui n’a point de consideration qui ne garde aucunes mesures, qui ne considere rien. C’est une personne qui a de la considération, & qui observe ce qu’il fait. Ainsi estre en considération, pour, estre estimé & consideré, est beaucoup meilleur que avoir de la consideration. C’est un homme qui est en grande consideration dans le monde.


Consommer, consumer.

Consommer marque la perfection, & consumer la destruction. Un homme consommé dans les sciences ; le bois est consumé ; le feu consume tout.


Conster, estre certain.

Il conste, au lieu de il est certain, ne se dit point ; il faut dire, il est constant, c’est une chose constante.


Compter, conter.

Compter signifie nombrer, & conter signifie raconter, faire un récit.


Conteste, contestation.

En bien des Provinces on dit conteste au lieu de contestation, & sur tout à Lyon, mais ce terme est peu François. Les Lyonnois disent aussi consulte, pour, consultation ; impresse, pour, impression, ce qui est grossierement parler. On dit consultation & non consulte. Il est vray que si l’on vouloit raisonner, il sembleroit que puisqu’on dit une insulte, on peut bien dire une consulte, ou que si l’on dit consultation, on peut donc dire insultation ; mais l’usage ne veut pas qu’on philosophe tant.


Contravention, contrevention.

On dit contravention. « Le Roy se tourna vers les quatre Secretaires d’Estat, comme pour leur en demander acte ; & afin d’avoir une preuve suffisante pour faire le procés au Connestable en cas de contravention[26]. »


Contrition, repentir.

Contrition n’est proprement en usage que pour signifier cette douleur, qui est nécessaire dans le Sacrement de Pénitence.


Contumace.

C’est un terme de droit. Le Parlement le condamna par contumace : mais on ne dira pas d’un homme opiniâtre, que c’est un homme qui a beaucoup de contumace.


Conversable.

Conversable est un mot élégant. Il me semble, dit M. de Voiture, écrivant à Mademoiselle de Ramboüillet, qu’il n’y a plus dans le monde de personnes conversables.


Convoiter.

On ne se sert plus de ce verbe. Il a vieilly. Convoitise dure encore, mais il le faut mettre sans regime ; comme on met cupidité & concupiscence. M. de Vaugelas néanmoins témoigne dans ses Remarques que c’est bien parler que de dire la convoitise de regner. Tous les bons Ecrivains de son temps parloient ainsi, à ce qu’il dit ; mais nous pouvons bien dire que tous ceux du nostre ne parlent pas de mesme.


Corner.

L’usage ne reçoit ce mot qu’en cette maniére de parler, les oreilles luy cornent. Ce terme est bas & populaire, il est venu de ce que le bruit qu’on entend alors, est semblable à celuy d’un cors.


Correction.
Sauf correction.

Cette maniére de parler n’est que du menu peuple, aussi bien que, sauf vostre respect. Les personnes polies disent le plus honnestement qu’elles peuvent ce qu’elles ont à dire, sans recourir à cette sorte de civilité basse & populaire.


Cordial.

Ce mot se dit quelquefois. « Ils servent Dieu tous ensemble, & sont unis par les liens d’une amitié si cordiale & si constante, qu’elle ne reçoit jamais d’atteinte. » Eclairc. sur le Liv. de la vie Monast.


A cors, & a cris.

Demander une chose à cors & à cris. C’est une métaphore usitée, & qui est tirée de la chasse, où l’on poursuit la beste en sonnant du cors & en criant.


Cotterie.

M. Ménage dit que cotterie est un mot Bourgeois, & que les habiles gens disent societé, mais il se trompe un peu en cela ; cotterie n’est pas plus un mot Bourgeois que batterie, crierie & une infinité d’autres, qui se disent dans le discours familier. Pour ce qui est de ce qu’il ajoûte, que les habiles gens disent societé, il se trompe encore ; les habiles gens n’auront garde d’aller dire, il est de sa societé, en parlant d’une affaire de néant ; il est de sa cotterie, sera bien meilleur alors. Ce qu’il devoit donc remarquer, est que cotterie, est plus propre au stile ordinaire & familier ; & que mesme il est beaucoup meilleur que societé, pour exprimer ces cabales qui ne regardent que de petites choses, & qui n’ont pour motif & pour fin que des bagatelles : Et que societé au contraire estant plus noble, ne doit estre employé que pour signifier quelque chose de plus considerable.


Courre, courir.

On dit courre le cerf, courre ou courir la poste, mais on dira il ne fait que courir tout le jour, & non courre. M. de Voiture néanmoins prétend que courre est toûjours meilleur que courir ; mais comme le langage a un peu changé depuis ce temps-là, on ne doit pas s’en tenir tout-à-fait à son sentiment. Voicy ce qu’il dit de ce mot, écrivant à M. Costar sur des doutes qu’il luy avoit proposez, « courre est plus en usage que courir & plus de la cour. Mais courir n’est pas mauvais, & la rime de mourir & de secourir, fera que les Poëtes le maintiendront le plus qu’ils pourront ; on en peut user trois fois la semaine ». On dit ordinairement courre le hazard, mieux que courir, c’est aussi comme parle M. d’Ablancourt, ils aimoient mieux remporter une victoire certaine sans mettre l’épée à la main, que de courre le hazard d’une bataille[27].


Courtisan, courtisanne.

Courtisan signifie un homme de Cour, mais courtisanne signifie une femme qui méne à la Cour une mauvaise vie.


Couroux.

Ce mot est meilleur en Poësie qu’en Prose. On ne laisse pas néanmoins de s’en servir en Prose, quelquefois mesme avec grace. Comme fait M. de Vaugelas lors qu’il dit : Toutes nos passions nous entraînent avec violence, nous sommes touchez de pitié ou enstâmez de couroux, selon les divers objets qui nous emportent[28].


Crainte que, de crainte que.

On dit de crainte que, & l’Auteur des Réflexions sur la Philosophie, tout poly qu’il est, n’est pas à imiter, quand parlant de l’obscurité d’Aristote, il dit que « Diogene Laërce compare ce Philosophe à un poisson qui trouble l’eau crainte d’estre pris. » Il falloit dire, de crainte d’estre pris. Et un peu plus bas, que « l’orgueilleux n’approuve rien crainte de se soumettre ». Il falloit, de crainte de se soumettre.


Credibilité.

Crédibilité se dit dans le stile dogmatique. « Jesus-Christ dit luy-mesme qu’il est Dieu, il le prouve en faisant des miracles, cela n’ajoûte-t’il pas un degré de crédibilité, qui oste toute la liberté d’en douter[29]. »


Criailleries, crieries.

Ce mot ne se dit qu’au plurier, des criailleries, & se dit élegamment dans le discours familier. Crieries est encore fort bon dans le mesme stile ; & le Traducteur de Phedre s’en est servy fort à propos dans la Fable des Grenoüilles. « Le Soleil voulant un jour se marier, les grenoüilles firent un grand cris qui monta jusqu’au ciel. Jupiter émeu de ces crieries importunes, leur ayant demandé le sujet de leurs plaintes, &c. »


Cris des animaux.

L’abeille bourdonne, l’âne brait, le bœuf meugle ou mugit, la brebis besle, le chat miole, le cheval hennit, le chien jappe ou abboye, le cochon grogne ou gronde, le corbeau & la grenoüille croassent, le lapin clapit, le lyon rugit, l’ours hurle, le serpent sifle, &c.


Croyez-vous qu’il le fera.
Croyez-vous qu’il le fasse.

Ces deux expressions, selon l’exactitude de nôtre Langue sont tres-differentes, quoyque le peuple ait coûtume de les confondre. Quand je dis, croyez-vous qu’il le fera, je témoigne par là que je suis persuadé qu’il ne le fera pas ; c’est comme si je disois, est-il possible que vous soyez assez bon pour croire qu’il le fera, estes-vous assez simple pour vous persuader d’une telle chose.

Quand je dis au contraire, croyez-vous qu’il le fasse, je marque par là que je doute véritablement s’il le fera. Et c’est comme si je disois : je ne sçay s’il le fera, qu’en pensez-vous, dites-moy là-dessus ce que vous en croyez. Voilà en quoy consiste la différence de ces deux expressions. Il est inutile d’avertir que ce que j’ay dit du verbe faire dans cet exemple, se doit entendre de tous les autres.


Cueillir, cueiller.

C’est une chose constante qu’il faut dire, cueillir. Mais cependant on dit, je cueille, tu cueilles, il cueille, je cueilleray, tu cueilleras, il cueillera. Il est bon de remarquer encore, qu’on dit, je cueillois, tu cueillois, il cueilloit, & non je cueillissois, comme le prétendent certaines personnes qui apportent pour raison que, comme : vieillir fait, vieillissoit ; cueillir, doit faire aussi, cueillissoit : en quoy ils se trompent grossiérement, car il y a plusieurs verbes en ir qui ne se terminent point ainsi au présent. Si vieillir fait vieillissoit, défaillir fait défailloit. Si jaillir fait jaillissoit, tressaillir fait tressailloit. Si bannir fait bannissoit, venir fait venoit, & ainsi de plusieurs autres.


Culture.

Ce mot ne se dit guéres aujourd’huy que dans le propre, la culture de la terre, la culture des fleurs. Mais on ne dira pas la culture de la raison, ny la culture de l’esprit, quoy qu’on dise cultiver sa raison, & cultiver son esprit. On dit néanmoins, la culture des Lettres, comme : c’est à la culture des lettres, que les hommes doivent une partie des avantages dont ils joüissent. Et c’est ainsi que parle M. Patru dans un Plaidoyer, le peu de connoissance que j’ay, dit-il, je le dois à la culture des bonnes Lettres.


Cupidité.

Cupidité ne se prend que pour la concupiscence, dont parle Saint Paul ; & ce ne seroit pas parler avec exactitude que de dire, la cupidité de regner, la cupidité de s’enrichir, pour le desir ou la passion.


Cy, icy.

On demande s’il faut dire, cét homme cy, ce temps cy ; ou cét homme icy. Le Pere Bouhours prétend qu’il faut dire ce temps-cy. Et il est certain qu’en Prose c’est ainsi qu’on doit parler, quoy qu’en Vers l’un & l’autre se puisse dire, ainsi je ne crois pas que le Traducteur des Lettres de S. Augustin ait parlé avec assez d’éxactitude, quand il a dit : Il ne restera aucune excuse aux infideles de ce temps icy. C’est une faute qu’il fait en plusieurs endroits.


  1. Morale du Sage.
  2. Morale du Sage.
  3. Vie de S. Ignace.
  4. Histoire de Charles IX.
  5. Mœurs des Israëlites.
  6. Quinte-curse.
  7. Apophtegm. des Anciens.
  8. M. Mascaron Oraison Funébre de M. de Turenne.
  9. Discours de M. de Condon sur l’Histoire universelle.
  10. Pontificat de S. Gregoire le Grand.
  11. Morale du Sage.
  12. M. Flechier, Oraison Funébre de feu M. le Tellier.
  13. Vie de Socrate.
  14. Morale du monde, conversation sur la jalousie.
  15. Histoire de l’Académie Françoise.
  16. Histoire de Commendon. Préface.
  17. Conversation sur la colere.
  18. Vie de S. Ignace.
  19. Entretien sur la pluralité des mondes.
  20. Traduction des œuvres de Saint Cyprien. Préface.
  21. Reflexions sur la Philosophie.
  22. Lettres de S. Augustin.
  23. Réflexions sur la Philosophie.
  24. Dans le sixiéme Plaidoyer.
  25. Essays de Morale.
  26. Histoire de Charles IX.
  27. Commentaire de César.
  28. Quinte-curse.
  29. Mémoires sur la Religion.