Racine et Shakespeare (édition Martineau, 1928)/Préface de l’Éditeur

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Texte établi par Henri MartineauLe Divan (p. i-xxx).
Préface de l’Éditeur

PRÉFACE DE L’ÉDITEUR



Aucun livre ne fit tant à Paris pour la célébrité de Stendhal que celui-ci qui lui valut d’être traité par Sainte-Beuve de hussard du romantisme. Pour qui sait le lire il demeure la plus importante des œuvres où il ait exprimé, les idées littéraires de sa maturité.

Beyle avait reçu à Grenoble une bonne éducation classique. De longues années il lut La Harpe avec passion, et d’autres années non moins longues lui furent nécessaires pour arriver à délaharpiser son goût. Son admiration pour Racine et Molière avait été particulièrement vive et ne diminua qu’à mesure que croissait son culte pour Shakspeare.

Car il ne faudrait pas croire, — ainsi qu’il voulut, en nous le disant dans la suite, se le persuader à lui-même, — que Beyle ait été dès les bancs du collège un admirateur du grand Will. Il le lut toutefois fort jeune, mais ne le comprit et ne l’aima pleinement qu’en sa maturité. Son goût pour Racine suivit une évolution parallèle mais inverse.

En 1803 il conseillait à sa sœur Pauline de lire un acte de Racine chaque jour, et il ajoutait : « C’est le seul moyen de parler français. » Quelques mois plus tard il notait en sortant de Bajazet : « J’ai bien admiré Racine ce soir. Il a une vérité élégante qui charme. Ce n’est pas le dessin de Michel-Ange ; c’est la fraîcheur de Rubens. » Et dans le même temps il jetait sur le papier ces quelques Remarques sur le stile de l’immortel Racine qui se trouvent parmi ses manuscrits de Grenoble.

En 1807, si nous voyons poindre une nuance de mépris dans son jugement, c’est qu’il ne s’agit déjà plus tant de théories littéraires que de politique. Le jeune partisan laisse parler son aversion pour la cour de Louis XIV.

En 1818 à Milan, il applaudit avec passion les ballets de Vigano et les comparant aux tragédies héroïques de Shakspeare, il ajoute : « Ce n’est pas Racine ou Voltaire qui peuvent faire cela. »

À fréquenter assidûment le théâtre, sitôt son arrivée à Paris et durant tout le temps qu’il y séjourna, Beyle renouvela sa connaissance de la littérature, — j’entends cette connaissance approfondie, réfléchie, qui seule peut projeter quelque lumière neuve sur l’œuvre en discussion. Aussi se trouva-t-il bien armé pour les querelles littéraires à une heure où la doctrine classique partout combattue se réduisait, ou à peu près, à une théorie du théâtre. Pendant plus de dix ans il s’était acharné à écrire des tragédies classiques ou des comédies à l’imitation de Molière. Et pour renoncer à ces essais, il lui fallut comprendre enfin que ce n’était vraiment pas là sa nature : qu’on ne fait pas des œuvres d’art en accumulant des recherches sur les lois du comique.

Il semblait alors avoir renoncé à écrire. Il voyageait et était entre tant devenu réellement amoureux. Mais la chute de l’Empire lui avait occasionné de grands soucis ; et quand, pour se procurer des ressources, il reprit sa plume, il songea que s’il n’avait rien d’un auteur dramatique il pourrait bien au contraire posséder de réelles qualités critiques. Ayant beaucoup lu, beaucoup retenu, beaucoup observé, il ne manquait point d’idées générales malgré ce qu’en ait voulu prétendre Émile Faguet en un long jour de hargne. Ce sont ces idées générales qu’il glisse avec adresse et opportunité dans ses premiers écrits, imprimant à des faits et des jugements nettement démarqués, un ton tout à fait personnel. Ses premiers livres, les Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, comme l’Histoire de la Peinture en Italie et Rome, Naples et Florence en 1817 contiennent ainsi à l’état d’ébauche l’essentiel de ce qui va constituer sa doctrine romantique.

M. Pierre Martino, dans la Préface qu’il a mise en tête de sa parfaite édition critique de Racine et Shakspeare chez Champion, a très clairement analysé comment, à partir de 1805, les théories littéraires de Beyle ont évolué peu à peu et comment son étude constante du théâtre l’amena aux côtés des romantiques avec lesquels au début il n’avait de commun qu’une seule idée : il faut faire du nouveau et non plus copier les siècles qui nous ont précédés.

Voilà le fruit de ses méditations. Il y revient sans cesse et, si la formule en varie suivant les circonstances, le fonds en demeure à peu près toujours identique : ce qui plaisait autrefois ne nous plaît plus, ce qui paraissait comique ne nous fait plus rire. Chaque auteur travaille pour la société de son temps. Les mœurs changent sans cesse et il faut s’adapter aux mœurs de l’époque où l’on écrit.

Stendhal était à Milan quand en 1816 il découvrit l’Edinburgh-Review qui devint dès lors sa lecture favorite. Il y retrouvait ses propres aspirations et y puisait abondamment de quoi alimenter ses propos et ses livres. À la même époque il rencontrait en Italie un courant d’idées qui cadraient exactement aux siennes propres. Il ne pouvait au surplus lui déplaire que le grand mouvement qui entraînait alors toute la jeunesse de la péninsule fût autant politique que littéraire. Il se sentait poussé vers le clan des novateurs tant par ses sympathies libérales que par ses revendications artistiques.

Les principaux promoteurs du romanticisme italien étaient Monti, Cesarotti, Silvio Pellico, Ermès Visconti, Foscolo, G. Berchet, Leopardi et surtout Manzoni dont la thèse essentielle fut exposée dans la préface du Comte de Carmagnola et dans les Lettres de M. Chauvet sur les unités. Stendhal, dans la loge de Louis de Brème, où il fut présenté à Byron, approcha quelques-uns de ces hommes. Il lisait leurs écrits et dès son apparition se montrait particulièrement enthousiaste de leur journal Le Conciliatore. Il y renvoyait dans sa conversation et sa correspondance, et si nous ne sommes point assurés qu’il combattit dans les rangs des romanticistes italiens ni qu’il participa à leurs campagnes, du moins le voyons-nous se familiariser à leur contact avec ces sortes d’escarmouches littéraires qu’un des premiers il devait introduire en France.

Déjà son âme passionnée et sa manie écrivante le poussent en pleine mêlée. Un certain M. Londonio ayant publié à la fin de 1817 des critiques sur la poésie romantique, Stendhal projette aussitôt de lui opposer ses arguments. Il se hâte de noircir quelques feuillets qui, dans sa pensée, devront être traduits en italien pour paraître en brochure. En fait, ce premier plaidoyer romantique ne fut publié que dans son texte français et seulement trente-cinq ans plus tard comme appendice de l’édition de Racine et Shakspeare, que Romain Colomb prépara. C’est là que je l’ai repris pour le faire figurer dans mon édition.

Environ le temps où Stendhal songeait à répondre à M. Londonio, l’Italie se demandait si elle aurait jamais une langue nationale. L’Académie della Crusca, à Florence, qui datait de 1582, préparait une nouvelle édition de son dictionnaire, en se préoccupant des aspirations nouvelles. Stendhal avait déjà dit son mot sur ce sujet dès la première édition de Rome, Naples et Florence en 1817. Il devait revenir d’autant plus volontiers sur la question de l’enrichissement de la langue qu’elle passionnait au premier chef ses amis milanais opposés à la Crusca, et qu’elle se rattachait directement suivant lui à la querelle du romantisme. Il ne craignit pas, à son ordinaire, de simplifier hardiment le problème : « Les Florentins partisans des vieux mots, disait-il, sont les classiques ; les Lombards tiennent pour le romantisme[1]. »

Dès la fin de février 1818, avant même que d’avoir achevé sa réponse à M. Londonio, Stendhal dans le feu de l’improvisation écrivit en quelques jours un petit ouvrage qu’il intitula : Des périls de la langue italienne ou Mémoire à un ami incertain dans ses idées sur la langue. L’ouvrage était terminé le 15 mars. On trouve à la Bibliothèque de Grenoble les pages du brouillon, et M. Édouard Champion en possède une copie presque entière corrigée de la main même de Stendhal. Avec l’amicale autorisation de son possesseur, j’ai pu, après M. Pierre Martino, utiliser les précieuses variantes de cette copie en reproduisant en appendice le mémoire sur la langue italienne.

Des mouvements tels que ceux qui poussent si violemment Stendhal à se porter en toute occasion au vif des querelles littéraires, jettent un jour singulier sur sa véritable nature. On voit à leur lumière qu’il était né pour écrire. Il ne se mettait pas à sa table uniquement pour donner quelque pâture à un éditeur, mais parce qu’il ne pouvait penser profondément que la plume à la main.

Il vient ainsi d’improviser deux brochures ; elles sont prêtes, ou presque. Pour des raisons d’opportunité, par suite de la difficulté de trouver un éditeur ou pour tout autre motif, il renonce, momentanément à les publier. Mais son esprit toujours pétillant, toujours en éveil, le lance aussitôt sur une autre piste. L’agitation romantique continue de plus belle à Milan. Il n’y a pas une seule manifestation artistique, de quelque ordre qu’elle soit, qui ne reçoive des critiques ou des approbations au nom des doctrines en vogue. Stendhal en conçoit aussitôt l’idée d’un nouveau travail.

Tous les stendhaliens qui ont tenu entre leurs mains la très rare brochure originale de Racine et Shakspeare (1re partie, 1823) ou la première édition de la Vie de Rossini (1824) ont été intrigués par une singulière annonce. Ils y ont vu figurer, au revers du faux-titre, parmi les ouvrages du même auteur, un livre inconnu : « Del Romanticismo nelle arti, Firenze, 1819, 6 francs ». En vain MM. Alessandro, d’Ancona, Stryienski, Lumbroso, Pietro-Paolo Trompeo, Paul Arbelet et Paul Hasard ont-ils fouillé les bibliothèques de Paris, Rome, Florence ou Milan ; ce livre est demeuré introuvable. Pas plus que ses prédécesseurs, M. Pierre Martino, au cours de recherches récentes, n’en a repéré la trace. Il n’est fait nulle mention de cette œuvre dans les catalogues de librairie, dans les journaux italiens ou les revues de l’époque, M. Martino a pourtant tout dépouillé avec la plus extrême minutie. Aussi en vient-il à conclure, avec beaucoup de vraisemblance, que cet ouvrage n’a dû exister que dans les projets de Stendhal. Peut-être l’avait-il proposé à un éditeur de Florence et crut-il un jour pouvoir inscrire sur la liste de ses œuvres et dater de sa chère Italie un livre qu’il avait rêvé d’y publier.

Si M. Martino n’a pas trouvé trace de l’opuscule de Beyle dans la presse italienne du temps, il a pu en revanche y suivre pas à pas la querelle du romanticisme et mesurer ce qu’était alors cette « sorte de modernisme teinté d’idées libérales ». Il a pu voir comment les mots romantique et classique s’affrontaient à chaque instant dans toutes les controverses suscitées quotidiennement par les petits événements de la vie milanaise. Or il existe précisément dans les manuscrits de Stendhal à la Bibliothèque de Grenoble, quelques brefs chapitres sur les beaux-arts qui sont tout pleins de ces mêmes préoccupations, de ces mêmes allusions aux monuments de la ville, et aux discussions en cours, dont les journaux de Milan nous conservent la trace.

Trois de ces chapitres ont été recueillis abusivement dans la Correspondance par le zèle bien intentionné de Romain Colomb. Un autre a paru depuis lors dans la Revue napoléonienne : il traite de la déclamation dramatique et est en italien. Un cinquième et dernier demeurait ignoré dans les papiers de Grenoble.

Ce fut donc une véritable trouvaille de réunir ces pages éparses, dans un ordre tel qu’on y reconnût sans peine l’esquisse parfaitement cohérente du petit traité que Beyle eut certainement l’intention de présenter autrefois au public italien. M. Pierre Martino, — d’abord dans la Revue de littérature comparée, puis en appendice de son édition de Racine et Shakspeare, — a donc publié intégralement ces ébauches tracées du 21 février au 15 avril 1819, et où Stendhal traite de l’architecture, de la sculpture, de la musique et de l’art au théâtre en fonction du romantisme, à une heure où les écrivains français ne se souciaient pas encore de ces brûlantes questions. Le lecteur de l’édition du Divan trouvera plus loin ces pages trop longtemps méconnues. Il y pourra mesurer toute la distance qui sépare les opinions littéraires et politiques de Manzoni et de Silvio Pellico aux environs de 1818, de celles de Hugo et de Lamartine dix ans plus tard. Il éprouvera également la piquante surprise de voir Stendhal demander au nom du romantisme que les statues des contemporains soient demi-nues ou drapées à l’antique, mais non habillées du costume moderne, tandis qu’à Paris, au nom des mêmes principes, il allait réclamer bientôt tout le contraire.

Stendhal n’avait donc pu donner en Italie la publicité qu’il souhaitait à ses opinions romantiques. Aucun des innombrables libelles de cette guérilla n’avait paru sous son nom. Il allait avoir plus de chance à Paris. Dès 1821, en arrivant, il s’y était trouvé avec un bagage sur ces questions nouvelles et une connaissance des littératures étrangères qui manquaient encore à tous les membres du cénacle. Il apparaissait comme une sorte de précurseur.

Avant de fixer ses idées sur le papier, il commença par exposer de vive voix dans un petit cercle d’intimes les théories qui avaient cours en ce temps-là à Milan. Devant le succès qu’elles obtinrent il songea à les formuler par écrit. Il n’attendait qu’une occasion ; elle ne tarda pas à se présenter.

Une troupe de comédiens anglais, les 31 juillet et 2 août 1822, avait tenté d’acclimater Shakspeare sur la scène de la Porte-Saint-Martin. Mais les libéraux, par haine de l’Angleterre, menèrent une telle cabale que les représentations publiques durent être interrompues et furent remplacées par une série de représentations par souscription au théâtre de la rue Chantereine.

L’amour de Macbeth et de la constitution anglaise l’emporta chez Beyle sur son libéralisme. Il exhala son indignation dans un article intitulé Racine et Shakspeare que donna en octobre la Paris-Monthly-Review of British and Continental Literature, périodique publié à Paris et qui, depuis son premier numéro (janvier 1822), avait déjà fréquemment compté Stendhal au nombre de ses collaborateurs anonymes.

Dans cet article, paru exceptionnellement en français, Stendhal se souvient à la fois des écrits didactiques de Manzoni et surtout de ces Idées élémentaires sur la poésie romantique d’Ermès Visconti qu’il avait autrefois signalées avec insistance à ses correspondants de Paris et qu’il démarque maintenant avec tranquillité, portant fort à propos des armes italiennes au secours de ses admirations britanniques.

Cet article, cinq mois plus tard, devint le premier chapitre du petit opuscule auquel il donnait son titre, et dont le chapitre second, Le Rire, avait également paru, toujours en français, en janvier 1823, dans le même périodique. Le troisième et dernier était donc seul inédit, ainsi que la préface. Au total l’ensemble formait une brochure de 55 pages. Elle parut dans les premiers jours de mars chez Bossange, rue de Richelieu, Delaunay au Palais-Royal et Mongie, boulevard Poissonnière. Il va sans dire que Beyle en avait assumé tous les frais. Colomb affirme que pour s’assurer de l’acuité de son pamphlet Beyle en avait soumis le manuscrit à Paul-Louis Courier.

L’ouvrage passa presque inaperçu et ne fit guère que rappeler l’attention dans les milieux littéraires sur le nom, encore énigmatique pour beaucoup, de Stendhal.

Cependant de Mareste, le compagnon de tous les instants d’Henri Beyle, avait fait lire à Lamartine la brochure de son ami. Le poète des Méditations n’avait pu demeurer indifférent à ce manifeste, et il datait du 19 mars une lettre où il ne marchandait pas son éloge au pamphlétaire mais élevait également quelques objections aux théories de l’auteur. Il se faisait notamment le défenseur du vers français, et concluait ainsi : « Classique pour l’expression, romantique dans la pensée, à mon avis c’est ce qu’il faut être. » De Mareste ne manqua pas de remettre cette lettre à son véritable destinataire. Et celui-ci d’improviser à son tour, suivant sa méthode toute d’impulsion, une réponse au poète.

Cette réponse jamais envoyée, ni imprimée du vivant de Beyle, lui donne du moins l’idée de remanier et d’augmenter son petit ouvrage. Et le jour même, 21 mars, où il répond à Lamartine, il écrit une sorte d’avertissement pour cette nouvelle édition qu’il vient de décider. Il sent bien qu’il la faut étoffer : il a déjà achevé, le 15 février précédent, un second essai sur le rire où par de nouveaux exemples il éclaire sa théorie. Il songe encore à la développer et il écrit longuement sur Molière, ce qui le mène à parler également de Regnard et à établir une sorte de parallèle entre les deux comiques. Ces pages, commencées vraisemblablement dès mars 1823, reçoivent de nouvelles additions jusqu’en 1825, et finalement abandonnées, ne paraissent, ainsi que la réponse aux objections de Lamartine, que par les soins de Colomb, en 1854. C’est que Stendhal tout à coup s’aperçoit qu’il a des choses plus pressantes à dire.

Alors, en effet, on commence vraiment en France à parler un peu partout du romantisme. Le cénacle s’agite et publie des manifestes. Les classiques ripostent en prose ou en vers : l’Académie elle-même va officiellement prendre part à la querelle. Le 24 avril 1824, Auger, directeur en exercice de l’auguste compagnie, profite d’une séance solennelle pour se prononcer avec force contre les tenants de la nouvelle secte. Son discours obtient un grand retentissement. Tous les journaux gouvernementaux lui font écho et l’approuvent. L’Université, par la bouche de son grand-maître, met à son tour la jeunesse « en garde contre les invasions du mauvais goût », et condamne « les mauvaises doctrines », et Stendhal sent immédiatement ce qu’il va gagner à ce revirement d’opinion.

Le romantisme, quand il l’avait embrassé en Italie avec tant de fougue, était, autant qu’une doctrine de modernisme artistique, une sorte de nationalisme politique et de libéralisme. Aussi Stendhal avait-il été assez désorienté, à son arrivée en France, de rencontrer sous la même étiquette un mouvement conservateur et religieux fort éloigné de ce qu’il aimait.

Ç’avait donc été une chose assez paradoxale que son enrôlement dans les rangs des romantiques français : il détestait Chateaubriand, plus encore Mme de Staël, et il n’avait grand goût, au fond, ni pour Hugo et Vigny, ni pour Nodier. À peine mentionnait-il, et toujours presque dédaigneusement, leurs œuvres dans le courrier littéraire que pendant sept ou huit ans il envoya régulièrement aux journaux anglais, particulièrement au New-Monthly Magazine et au London Magazine. Il n’y ménageait en réalité pas plus les romantiques que les classiques. Et le lecteur qui ne se laissait point piper par une question de vocabulaire ne découvrait pas toujours facilement quels étaient les alliés naturels de cet écrivain.

Le discours d’Auger change tout à coup la position des adversaires. Le romantisme, devenu suspect au trône et à l’autel, tend comme en Italie et en Allemagne à se fondre avec le libéralisme. En combattant pour lui on va donc pouvoir faire de l’opposition au gouvernement et se réclamer de la liberté. Une aussi brusque volte-face enchante Stendhal qui décide aussitôt d’écrire une nouvelle brochure pour répondre à Auger. Il pourra non seulement y soutenir ses théories littéraires mais encore laisser entendre à mots couverts quelles sont ses préoccupations politiques. Il ne s’en fera pas faute.

Quarante-huit heures après le discours d’Auger, Stendhal a résolu de lui répondre et il s’inquiète d’un éditeur. Il charge son ami de Mareste de s’entremettre pour lui et il lui adresse cette intéressante lettre :


Paris (minuit), samedi 26 avril 1824.


Je désire, mon cher ami, que vous trouviez le temps de passer chez Ladvocat ; ce sera une nouvelle obligeance de votre part.

L’Académie française vient de lancer un manifeste contre le romantisme ; j’aurais désiré qu’il fût moins bête ; mais enfin, tel qu’il est, tous les journaux le répètent. Je m’attache à cette dernière circonstance. Pour un libraire tel que Ladvocat, voilà une question palpitante de l’intérêt du moment ; d’autant plus que le dit Ladvocat a fait une espèce de fortune pour Schiller et Shakspeare. Fort de ces grandes raisons et de mille autres, que l’art que vous avez de traiter avec ces gens-là vous suggérera, je voudrais que vous entrassiez chez le dit Ladvocat avec l’air grave et pourtant sans gêne d’un homme à argent. Voici la base de votre discours :

« Monsieur, je viens vous proposer une réponse au manifeste de M. Auger contre le romantisme. Tout Paris parle de l’attaque faite par l’Académie française ; mon ami, M. de Stendhal, l’auteur de la Vie de Rossini et de Racine et Shakspeare, que bien vous connaissez, fait une réponse à M. Auger ; cette réponse peut vous être livrée dans trois jours : elle aura de deux à quatre feuilles. Je vous en demande trois cents francs, bien entendu pour une première édition, qui n’excédera pas cinq cents exemplaires. »

Sauf à se réduire à deux cents francs pour mille, ou à cent francs, ou à rien. Hier, j’ai envoyé au copiste la fin de cette brochure. Je viens de faire une préface qui en fait une réponse au manifeste de M. Auger.

Il faudrait voir Ladvocat le plus tôt que vous pourrez. J’écris au Diable boîteux pour le prier d’annoncer ma réponse.


On a dit, et l’hypothèse jusqu’à un certain point est vraisemblable, que Stendhal pensait alors réunir des pages déjà écrites en y joignant simplement pour répondre à Auger une préface nouvelle. Peut-être même n’avait-il en vue que cette réédition profondément modifiée de la brochure de 1823, à laquelle il n’a cessé de travailler depuis qu’il l’a décidée, c’est-à-dire dès le lendemain de sa publication. En tous cas ce projet fut abandonné, peut-être parce qu’on ne put trouver à temps aucun éditeur, et c’est un ouvrage entièrement nouveau, écrit à loisir ou tout au moins revu et poli durant dix mois, que Beyle lut un jour chez Delécluze où il fréquentait chaque dimanche et où il disputait âprement de ces problèmes nouveaux.

Ce second pamphlet affectait la forme d’une correspondance entre un classique et un romantique. Il est possible que les lettres du classique, ou du moins certaines d’entre elles, soient authentiques. Un passage de la correspondance de Beyle semble le prouver :


Je ne suis point l’auteur des lettres du classique. La petite poste a réellement porté ces lettres à la fin d’avril 1824. Je l’ai indiqué dans la note[2] de la p. 50. Je me suis fait un devoir de ne rien changer aux lettres de l’homme de fort bonne compagnie qui voulut bien m’écrire. J’avoue que je ne me serais point exprimé comme lui sur le compte de M. de Lamartine. Je trouve un vrai talent non pas dans la prose, mais dans les vers de M. Hugo. Mon correspondant classique étant un homme de l’ancien Régime, j’ai respecté son goût dans tout ce qui a rapport à la plaisanterie. J’en suis fâché aujourd’hui, car je tiens beaucoup à être poli.


La question serait donc résolue, si nous ne savions qu’avec Stendhal il est toujours prudent de se méfier. M. Louis Royer a pourtant découvert depuis peu sur un exemplaire annoté de la main de Stendhal le nom de ce classique : M. de Béranger-Labaume, de Marseille.

Racine et Shakspeare II parut en mars 1825 chez Dupont et Rorel, libraires, quai des Augustins. Il eut une excellente presse : toutefois ce succès d’estime n’aurait point été suivi par un égal succès de vente si nous admettons qu’une annonce parue dans le National du 29 mai 1830 avait pour but d’en faire vendre les derniers exemplaires. Mais c’est une hypothèse que contredit l’opinion de M. Paul Arbelet. D’après lui certaine brochure rare offerte un jour à Pierre Daru au prix de quarante francs et présentée comme épuisée, serait un exemplaire de Racine et Shakspeare. Or, Daru était mort en 1829. Et si l’ouvrage en question était quasi introuvable avant cette date, il ne paraîtra pas absurde de supposer que Stendhal songeait plutôt, en faisant annoncer à nouveau dans la presse son ouvrage en 1830, à cette nouvelle édition revue, augmentée, complète, à laquelle il avait tant travaillé autrefois. Celle nouvelle édition ne devait paraître qu’en 1854 par les soins de Romain Colomb, dans les Œuvres Complètes de Stendhal, chez Michel-Lévy frères. Colomb y avait judicieusement joint tous les fragments trouvés sur le même sujet et que Stendhal, il le savait bien, avait pensé un moment adjoindre à sa première brochure. Il réunit aussi en appendice d’autres morceaux qui n’ont pas tous trait à Racine et Shakspeare et dont la véritable place serait dans un volume, de mélanges.

L’édition préparée par Colomb a toujours été réimprimée textuellement chez Calmann-Lévy, et il n’en parut aucune autre en librairie jusqu’aux travaux de M. Pierre Martino qui ont véritablement renouvelé la question. Rien de plus parfait que son édition critique de Racine et Shakspeare, chez Champion, à laquelle j’ai fait déjà de fréquents renvois, et qui s’ouvre sur une préface extrêmement érudite et précise dont j’ai moi-même beaucoup profité. Il est indispensable de recourir encore à cette édition et à ses notes substantielles pour bien comprendre toutes les allusions de Stendhal et tout ce qui touche l’histoire politique et l’histoire littéraire du romantisme.

La célébrité de Stendhal dans les milieux littéraires de Paris date de la publication de Racine et Shakspeare. Beaucoup des idées exprimées dans ces deux pamphlets furent vite en honneur. Si depuis elles semblèrent un peu oubliées, du moins savons-nous que ce qu’elles avaient alors de plus neuf et de meilleur est aujourd’hui devenu lieu-commun, après qu’elles furent reprises, généralisées, clarifiées par un Sainte-Beuve, un Baudelaire, ou un Taine[3].

Tout d’abord Stendhal a donné une des premières définitions du romantisme. Et celle-ci n’a pas qu’un intérêt rétrospectif. D’excellents esprits, qui n’iraient pas jusqu’à dire avec l’auteur de Racine et Shakspeare que le romantisme est ce qui donne le plus de plaisir, tandis que le classicisme est ce qui ennuie, — admettent néanmoins que « le romantisme, c’est ce qui nous est contemporain ». Et ils accordent encore que « tous les grands écrivains ont été romantiques de leur temps ».

Beyle croit en outre que pour être vraiment romantique et se passionner à fond pour la littérature de son temps, il faut avoir moins de quarante ans. Pour lui, quand en France il descendit dans la lice et rompit en faveur de Shakspeare une lance assez fameuse, il n’avait que depuis peu dépassé la quarantaine, étant né, comme on sait, en janvier 1783. Expliquerons-nous ainsi qu’il ne fut jamais lui-même qu’un demi-romantique ? Sainte-Beuve, nous l’avons vu, le peint comme un hussard, un chevau-léger des idées d’avant-garde. Mais un hussard doit être jeune, ardent, pour être prompt à la riposte et excellent dans l’escarmouche. Déjà Beyle sentait le poids de l’âge et cet éternel amoureux craignait de voir bientôt close l’ère de sa jeunesse. Mais précisément parce qu’il avait atteint ces quarante ans fatidiques après quoi, de son propre avis, on n’a plus l’âme susceptible d’impressions vives, il fut moins ardent dans son dénigrement des idées anciennes, plus juste vis-à-vis de ses adversaires.

S’il s’en prend à Racine, c’est affaire de mode et il lui faut bien suivre le mot d’ordre. Il n’en parle néanmoins qu’avec mesure, parfois même avec sagesse. Il attaque bien plus les principes poétiques du xviie siècle que l’homme ou le poète comme Victor Hugo par exemple ne se gênera pas de le faire. Racine, explique-t-il, a écrit en son temps les œuvres qui donnaient le plus de plaisir à ses contemporains. Maintenant ses tragédies nous ennuient, mais, s’il eût vécu en 1820, il eût écrit tout autre chose. Stendhal ne proscrit donc pas Racine au nom de la vérité, mais parce que son genre de tragédie ne peut plus exprimer la vivacité et la complexité de nos sentiments, ainsi que le rythme de notre vie mouvementée. D’autre part il proscrit les longues tirades à la scène, aimant à répéter : c’est du poème épique, ce n’est pas du théâtre. Il se plaît cependant à ajouter : « Un grand homme, dans quelque forme qu’il ait laissé une empreinte de son âme à la postérité, rend celle forme immortelle. » En réalité, ce n’est pas Racine dont la « gloire est impérissable » que Stendhal entend critiquer. Il sait trop bien que les pièces romantiques « ne tueront pas Phèdre » : il n’en veut qu’à ses pâles successeurs. Il combat l’imitation et aussi bien de Shakspeare que de Racine. De Shakspeare notamment « pour lequel sa passion ne croît pas, uniquement parce qu’elle ne peut plus croître », il conseille de ne prendre que « la manière d’étudier le monde au milieu duquel nous vivons ».

Quand, en se relisant, Stendhal comprit qu’il avait trop oublié Molière, il répara cet oubli au cours de chapitres nouveaux. Le titre de l’édition remaniée eût tout aussi bien pu devenir : Racine, Molière et Shakspeare. Soyons certains qu’il ne l’eût point pris et eût conservé son premier cri de guerre, plus bref, plus claquant : Racine et Shakspeare. Ce vif accouplement de noms était fréquent au temps où il écrivait. C’était comme un symbole et, comme lui-même, le dit dans l’Amour : « La dispute entre Shakspeare et Racine n’est qu’une des formes de la dispute entre Louis XIV et la Charte. » Déjà une brochure anonyme intitulée Lettres à Milady Morgan sur Racine et Shakspeare, avait paru en 1818 chez Bachelier à Paris[4]. Les libelles littéraires autant que les libelles politiques étaient alors en vogue.

Stendhal n’a donc inventé ni son titre ni son arme. Il le reconnaît de bonne grâce : « Le pamphlet est la comédie de l’époque. » Nous savons également qu’il n’a point davantage inventé ses idées. Mais il sut les vulgariser et ce sont ses ouvrages qui ont survécu alors que tous les autres opuscules, contemporains des siens, sont oubliés.

Le bruit fait par Racine et Shakspeare fut d’emblée assez grand pour qu’environ le temps où le second pamphlet venait de paraître un personnage de Scribe fit en scène allusion aux « brochures de M. de Stendhal sur le romantisme ». Aussi Sainte-Beuve ne fut-il que juste en écrivant trente années plus tard : « Quoi qu’il en soit, l’honneur d’avoir détruit quelques-unes des préventions et des routines qui s’opposaient en 1820 à toute innovation, même modérée revient en partie à Beyle. »

Les revendications de Stendhal étaient modestes, elles se bornaient, ou presque, à trois principales : il demandait au théâtre de n’user que de la prose, de traiter des sujets nationaux, de renoncer à la règle des unités. La première lui tenait à cœur depuis longtemps déjà, depuis sans doute qu’il s’était découvert inhabile, après tant d’essais infructueux, à bien manier le vers français. Les deux autres, il les rapportait d’Italie dans ses bagages. Nul n’était mieux placé que lui pour les populariser ; nous avons vu comment il s’y prit. Dans un de ces comptes rendus bibliographiques qu’il donnait régulièrement aux revues anglaises, il lui arriva, à propos de sa première plaquette, de parler ainsi de lui-même : « Quoiqu’il ne présente ses idées que sous la forme modeste d’une brochure, son pamphlet n’est pas la production la moins remarquable provoquée par cette querelle prolixe… Le défaut dominant de cet auteur, c’est qu’il a l’air de ne jamais douter de ses raisonnements, il saute avec une rapidité inconcevable des prémisses à la conclusion. Le plus souvent, il saute juste, mais le pied le plus sûr glisse quelquefois[5]. »

Ce n’était pas si mal se connaître. Et la chose était d’autant plus délicate que le romantisme de Stendhal était, lui aussi, chose assez paradoxale. En réalité, l’auteur prolonge autant le xviiie siècle qu’il annonce le xixe, et il est permis d’avancer que par son style et son goût pour une formule bien définie du roman, il demeure classique.

Quand il combat les unités au nom de la vraisemblance, il ne songe pas un seul instant que la tragédie classique peut, sans manquer à cette vraisemblance, ne pas excéder la durée d’un jour puisqu’elle n’entend peindre ordinairement qu’une crise qui se dénoue. C’est qu’il se moque bien de ce paroxysme critique, il veut assister au développement des passions. Prenez garde qu’il n’y a plus là une simple querelle de mots : deux systèmes littéraires sont opposés, et ce qui sépare ces deux conceptions radicalement contraires, c’est ce qui différencie le roman du théâtre. Il est croyable que Stendhal eût peu réussi à la scène, tandis que dans le livre il a laissé ses chefs-d’œuvre d’analyse en nous faisant toucher du doigt précisément comment la passion naît et se développe.

Il n’est pas moins logique envers ses propres goûts quand il affirme que Racine en 1823 écrirait tout autrement qu’il ne faisait en 1670. N’avait-il pas eu pourtant la prétention amusante, quand il s’adonnait autrefois à ciseler sa comédie : Letellier, de se faire un vocabulaire contemporain de Racine et de Corneille ? Il ne persévéra pas, il est vrai, dans cette erreur de jeunesse. Il la combattra même âprement dans Racine et Shakspeare dirigeant ses coups les plus rudes sur cette espèce d’amateur infatué qu’il était lui-même en 1804.

Il ne faut cependant pas imaginer qu’il admire Shakspeare comme une brute. En dépit de sa tendresse pour lui, il ne veut pas qu’on l’imite, et il ne craint pas même d’écrire : « L’esprit français repoussera surtout le galimatias allemand que beaucoup de gens appellent romantique aujourd’hui. »

Découvrant sous sa plume plus d’une déclaration de cette sorte, certains critiques, on le comprend, se sont crus autorisés à prétendre que Stendhal n’était point romantique. Pour excessif qu’il soit ce jugement paraîtra cependant assez fondé à ceux qui assimilent un peu sommairement romantisme et maladie, surtout si l’on songe combien l’auteur de La Chartreuse était encore indemne de cette sensibilité larmoyante que nous voyons poindre déjà dans toute une classe d’auteurs du xviiie siècle et qui donne un avant-goût détestable de nombreuses œuvres publiées dans la première moitié du siècle suivant. Pour tout le domaine des sentiments, Beyle était ainsi vraiment d’un autre âge, n’ayant jamais posé au pâle ténébreux, et n’ayant pas voulu davantage croire au rôle social du poète. Il lui plaisait au contraire de dire avec bien du bon sens : « Je n’ai jamais cru que la société me dût quelque chose. »

C’était en réalité un ami de l’ordre. Il détestait partout la boursouflure, mais, parce qu’il avait un cœur souvent contradictoire, il sut marquer sa tendresse pour ces périodes troublées où la passion se peut donner libre cours. On l’a même vu pousser ce culte extrême de l’énergie et des émotions fortes jusqu’à l’apologie du dérèglement. C’est par là, non moins que par son goût du romanesque et de l’histoire anecdotique, que Stendhal rejoint son époque amie des sentiments portés ci leur paroxysme. Stendhal ainsi ne se laisse jamais facilement enrôler. Luttant depuis 1817 pour le romantisme, il s’écartait résolument à l’heure de la victoire de tous les romantiques français. Ayant combattu pour le drapeau, il n’a jamais cessé d’être un isolé et, suivant le mot si juste de Colomb, « un colonel sans troupe ». Il est aisé de se rendre compte combien ses théories, malgré quelques points de détail communs, sont éloignées de celles de la Préface de Cromwell. Lamartine ne peut reconnaître ses aspirations dans les revendications de Racine et Shakspeare et sa lettre, sous un ton amical, est d’un contradicteur résolu.

Cependant, comme l’a dit excellemment M. Paul Arbelet, sa théorie personnelle a peut-être « une portée plus générale et une vérité plus durable, si elle se réduit à affirmer que les arts doivent évoluer et que la beauté est relative ».

De cet homme, qui demeure plus près du Marivaux de Marianne que du vicomte d’Arlincourt, ou même de son ami Mérimée, ne disons donc pas plus qu’il fut un romantique fourvoyé qu’un classique qui s’ignorait. Aujourd’hui il nous paraît assez sage. Nul doute que si les vers de son ancien compagnon de voyage d’un jour lui eussent remonté à la mémoire durant ses longues journées de rêverie solitaire à Civita-Vecchia, il n’eût murmuré pour son propre compte :

Racine rencontrant Shakspeare sur ma table,
S’endort près de Boileau qui leur a pardonné.

Et pour une fois, peut-être, des alexandrins ne lui eussent point paru un cache-sottise ».

Henri Martineau.
  1. Voir Rome, Naples et Florence, édition du Divan, T. II, p. 49.
  2. Page 116 de la présente édition.
  3. Cf. Pierre Martino, Préface à Racine et Shakspeare, Champion, p. cxxxii.
  4. Mais dès 1818 (voir plus loin p. 170) Stendhal avait écrit : « La dispute est entre M. Dussault et l’Edimburgh-Review, entre Racine et Shakspeare, entre Boileau et lord Byron. »
  5. Doris Gunnel : Stendhal et l’Angleterre, pp. 162–163. Traduit du New-Monthly, 1er avril 1823.