Recherches statistiques sur l’aliénation mentale faites à l’hospice de Bicêtre/I/III/E 1o

La bibliothèque libre.
E.Démence.

Deux formes principales caractérisent la démence : l’une, où l’intelligence est seule atteinte ; l’autre, où la motilité est compromise en même temps.

1o Démence simple.

La démence simple observée 45 fois, a pu être distinguée en trois degrés, en raison de l’état plus ou moins avancé de l’affaiblissement intellectuel. Dans le premier degré, nous avons compris les malades qui n’avaient qu’une perte légère de la mémoire, chez qui la perception des impressions extérieures et internes se faisait faiblement, ceux en un mot dont la plupart des actions de la vie morale ou physique étaient empreintes d’un léger cachet d’affaiblissement, mais qui étaient encore propres, susceptibles d’affection, et conservaient intactes plusieurs de leurs facultés ; dans le second, ont été placés ceux chez lesquels le sentiment de la propreté commençait à s’éteindre, et qui, devenus de plus en plus indifférents au monde extérieur, n’étaient plus guère susceptibles de sentiments affectifs ; enfin dans la troisième, se trouvent les malades dont la mémoire était tout à fait perdue, chez lesquels les impressions étaient nulles et l’intelligence tout à fait abolie.

Premier degré, 16
Second degré, 17
Troisième degré, 12
45

Ceux qui sont arrivés au troisième degré n’ont pas survécu longtemps ; ceux du second degré se sont assez bien maintenus ; ceux du premier, à l’exception de quelques-uns chez lesquels la maladie a fait des progrès, se sont conservés dans un bon état, et plusieurs d’entre eux, comme on le verra à l’article des sorties, ont pu quitter l’hôpital, sinon guéris, du moins dans un état satisfaisant. Il va sans dire que ces trois degrés expriment des époques différentes de cette maladie, dont la marche, essentiellement progressive dans la majorité des cas, est quelquefois interrompue. En effet, des malades arrivés au second degré peuvent voir leur état s’améliorer au point de revenir au premier et de s’y conserver assez longtemps, de même que quelquefois, à cause de la rapidité de l’affection, on dirait que la démence a commencé par le second et même par le troisième degré. Toutes ces délimitations sont, du reste, arbitraires, et l’on se trouve embarrassé toutes les fois qu’il faut scinder ainsi la marche d’une maladie.

Ces déments se sont présentés sous deux états différents, qu’il importe de ne pas négliger dans l’intérêt du pronostic.

12 étaient agités,
33 étaient calmes.

Les premiers, semblables aux maniaques par l’agitation et le désordre des facultés, n’ont pu souvent en être séparés que quelques jours après leur admission, par le retour à un état calme, ou par l’appréciation des renseignements que nous pouvions recueillir auprès des parents. Chez la plupart d’entre eux la terminaison a été funeste, et la mort est survenue au milieu de cette période d’excitation. Rarement ce délire maniaque arrive dans le troisième degré ; on l’observe le plus souvent dans le second.

Quelques déments joignent à leur affaiblissement un délire qui leur donne une physionomie particulière, et le plus souvent, chose remarquable, ce sont des idées d’ambition qui préoccupent ces malheureux.

Délire ambitieux, 12 fois
Délire gai, 1
Délire triste, 2
Sans caractère prédominant, 30

Nous n’avons observé qu’un seul cas d’hallucination.