Recueil des lettres missives de Henri IV/1583/31 juillet ― Ad Rudolphum II, Romanorum imperatorem

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[1583. — 31 juillet.] — IIIme.

Imprimé. — Henrici, Navarrorum regis, epistolæ, etc. Utrecht, 1679, in-12, p. 1.


AD RUDOLPHUM II, ROMANORUM IMPERATOREM[1].

[2] Potentissimo Cæsar, Frater et Consanguinee observantissime, Promulgato in Gallia pacis edicto, incredibili quodam desiderio tenebamur plerosque reges et principes christianos invisendi, qui de Republica Christiana quam optime meriti essent. Sed propter eximiam Cæsareæ vestræ Majestatis virtutem et heroicas. animi dotes, ipsius compellandæ præcipuum studium erat. Hoc igitur ut assequeremur, decreveramus, anno superiore, itineri longinquo et difficili nos committere, cum ecce suborientes, in constituenda pace gallica, dilticultates nova, nos propemodum ad viam illam accinctos detinuerunt, et invitos, et adhuc remorantur. Ex eo factum ut dominum Jacobum Segurium, interiori nostro consilio præfectum, cum ad alios principes plerosque, tum ud Cæsaream vestram Majestatem ablegaverimus, tum ut nostrum in eam studium, benevolentiam et animi propensior em verbis indicaret, quam omni genere officiorum atque obsequiorum declarare voluimus, tum etiam ut de gravissimis negotiis et ad Christianæ Reipublicæ salutem pertinentibus ex mandati sui formula, cum Cæsarea vestra Majestate, nostro nomine, ageret. Quod quoniam illum fideliter et sincere facturum confidimus, et a Majestate vostra pro solita ipsius clementia et rei gravitate benigne auditum ri, epistolæ modum non excedemus, sed Deum Optimum Maximum precamur, ut Cæsaream vestram Majestatem ad Germaniæ totius que orbis Christiani salutem et incolumitatem diutissime sospitem servet.


[HENRICUS.]


  1. Rodolphe d’Autriche, fils aîné de l’empereur Maximilim II et de Marie d’Autriche, fille de Charles-Quint, né à Vienne le 18 juillet 1552, roi de Hongrie en 1572, de Bohême en 1575, élu roi des Romains la même année, succéda, l’année suivante, comme empereur d’Allemagne, à son père, mort le 12 octobre 1576, gouverna trente-sept ans l’empire, et mourut à Prague, le 20 janvier 1612.
  2. À cette lettre sont jointes des instructions en latin, rédigées dans le même sens. Quant aux instructions plus confidentielles, écrites en français, et que les Mémoires de Mornay nous ont conservées, elles ne contiennent rien sur cette visite, et s’étendent, au contraire, sur les avis à donner aux princes de l’empire contre l’agrandissement de la maison d’Autriche. Cette lettre peut donc être considérée comme une sorte de formalité. Du reste, Rodolphe, tout en donnant à des études de science le temps qu’eussent réclamé les affaires de l’Empire, s’occupait des nouvelles de notre pays avec une curiosité que pouvait entretenir sa sœur, veuve de Charles IX, reine douairière de France, alors retirée à Vienne. On voit avec quel soin ils étaient tenus au courant, par les détails si curieux de la correspondance du celèbre ambassadeur Busbec. Voici la traduction de cette lettre :

    À RODOLPHE II,
    EMPEREUR DES ROMAINS.

    « Très-puissant Empereur, mon très-honoré Frère et Cousin, Après que l’édit de pacification eut été promulgué en France, nous fûmes saisi d’un incroyable désir de visiter la plupart des rois et des princes Chrétiens qui ont le mieux mérité de la chrétienté. Mais la haute sagesse de votre majesté impériale, et les héroïques qualités de son esprit, nous faisaient particulièrement désirer de nous entretenir avec elle. Pour cet effet, nous étions décidé, l’année passée, à entreprendre un voyage long et difficile, lorsque tout à coup ont surgi de nouvelles difficultés pour l’établissement de la paix en France. C’est ce qui nous a retenu au moment où nous étions pour ainsi dire prêt à partir, et ce qui nous retient encore bien malgré nous. Tel est le motif qui nous a fait envoyer le sieur Jacques de Ségur, chef de notre conseil privé, vers la plupart des autres princes, ainsi que vers votre majesté impériale, afin qu’il lui témoigne de vive voix quels sont à son égard notre affection, notre zèle et l’inclination de notre cœur, dont nous nous proposons de lui donner des marques par toutes sortes d’attentions et de bons offices ; de plus, afin qu’il traite, d’après ces instructions et en notre nom, avec votre majesté impériale, des affaires de la plus haute importance d’où dépend le salut de la chrétienté. Comme nous sommes persuadé de l’exactitude et du zèle qu’il mettra et s’en acquitter, et que, vu l’importance des affaires, votre majesté l’écoutera favorablement avec sa bonté accoutumée, nous n’excéderons pas les bornes d’une lettre, et nous prierons le Dieu tout-puissant qu’il conserve fort longtemps votre majesté impériale en parfaite santé pour le salut et la conservation de l’Allemagne, ainsi que de tout le monde chrétien.

    HENRY. »