Revue Musicale de Lyon 1904-03-23/Nouvelles diverses

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Nouvelles Diverses

Mercredi dernier, a été donnée, à l’Opéra-Comique, la première représentation de la Fille de Roland, tragédie lyrique en quatre actes, musique de M. Henri Rabaud.

De l’avis général, cette œuvre, d’un très jeune musicien, est solidement construite, mais elle manque de flamme, de passion.

« M. Rabaud, dit dans l’Écho de Paris, M. Henry Gauthier-Villars, a appris au Conservatoire tout ce qu’on y peut apprendre. Ce n’est pas sa faute s’il existe pas en l’établissement du faubourg Poissonnière la « classe d’étincelle » tant regrettée par Reyer ; quelque feu divin ne messiérait point qui embraserait un peu les compositions correctes de ce jeune talent. Évidemment, ça manque de génie, mais après les frigides et réfrigérants non-sens des mythologies titaniesques d’ennuyeuse mémoire, après les spasmes commercialement convulsifs de la Tosca, comment ne pas être sensible à cette musique écrite avec sincérité et talent, comment ne pas sympathiser avec ce musicien à l’âme, sans conteste, blanche ?

Cette absence de flamme, que ne saurait remplacer l’effort vers une sorte de chaleur convenue, se fait sentir dans maint passage…

M. Rabaud connaît les recettes, admirablement ; il prépare, dose, mélange selon la formule, pour fabriquer de la conviction, mais même quand l’opération réussit, l’émotion ainsi obtenue sent l’artificiel ; c’est bien, c’est beaucoup mieux que du « simili » ; ce n’est pas tout à fait ça… »

La location-vente des pianos.

L’acquéreur d’un piano sous forme de location-vente, c’est-à-dire payable par mensualités, est-il coupable s’il se dessaisit du piano quand il lui plaît et avant complète libération ?

La Cour de Cassation vient d’établir une jurisprudence à cet égard et de répondre : en déclarant qu’il avait là un abus de confiance évident, et la Cour d’Orléans, dans son audience du 26 janvier, a condamné pour ce fait le nommé B… à un an de prison.

Le lundi in albis (11 avril), Pie x célébrera dans la basilique de Saint-Pierre une messe papale solennelle pour fêter le treizième centenaire de saint Grégoire le Grand. Cette messe marquera le triomphe du chant grégorien tel qu’il fut reconstitué par les Bénédictins de Solesmes. Trois chœurs disposés dans l’abside et devant l’autel de la Confession exécuteront en chant liturgique grégorien toutes les parties de la messe. Les moniales bénédictines de Solesmes actuellement réfugiées à l’île de Wight, ont préparé le missel qui servira au Pape en cette solennité. Habiles miniaturistes, les Bénédictines ont exécuté ce missel à la main et sur parchemin. Chaque page est ornée d’enluminures ; caractères et ornements sont dans le style du xiie siècle et la notation dans la tradition grégorienne. Le missel sera offert à Pie x en reconnaissance de ses actes en faveur du chant grégorien. En vue de ce centenaire de saint Grégoire le Grand, un comité s’est formé sous la présidence de Mgr Duchesne, le savant directeur de l’École française à Rome. Ce comité a invité les savants à des réunions où l’on traitera de liturgie scientifique, de littérature et d’archéologie chrétiennes aux vie et viie siècles, de l’art sacré et tout spécialement du chant grégorien. Les cérémonies et les solennités qui auront lieu à cette occasion, dans les vieilles basiliques et dans les catacombes, auront un caractère archaïque. Elles attireront certainement nombre de curieux et d’amateurs.

Le journal de Leipzig, Signale für die musikalische Welt, donne un aperçu rapide du mouvement musical à l’Opéra-Royal de Berlin pendant l’année 1903 : « Cinquante-trois ouvrages ont été représentés. Parmi les compositeurs, Wagner figure pour neuf opéras (Rienzi manque), Mozart et Lortzing chacun pour cinq, Verdi pour trois, Auber et Weber chacun pour deux, Massenet pour deux (Manon et la Navaraise), Meyerbeer pour deux (Robert le Diable et les Huguenots). Gounod pour deux, et les compositeurs suivants pour un seul : d’Albert, Beethoven, Bizet, Blech, Boïledieu, Brüll, Charpentier, Cornelius, Gluck, Humperdinck, Kienzl, Leoncavallo, Mascagni, Reznicek, Saint-Saëns, Schillings, B. Scholz, J. Strauss, R. Strauss, Amb. Thomas. Les nouveautés ont été peu favorablement accueillies : ni Das war ich, de Blech, ni Till Eulenspiegel de Reznicek, ni En 1757, de B. Scholz, n’ont pu se maintenir ; par contre, et semble digne de remarque, Manon parait vouloir entrer dans la faveur du public… »

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