Revue des Romans/Agricol-Hippolyte de Lapierre de Châteauneuf

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Revue des Romans.
Recueil d’analyses raisonnées des productions remarquables des plus célèbres romanciers français et étrangers.
Contenant 1100 analyses raisonnées, faisant connaître avec assez d’étendue pour en donner une idée exacte, le sujet, les personnages, l’intrigue et le dénoûment de chaque roman.
1839
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CHÂTEAUNEUF (A. H. de la Pierre de), né à Avignon en 1766.


LES DIVORCES ANGLAIS, ou Procès en adultère jugés par le ban du roi et la cour ecclésiastique d’Angleterre, 3 vol. in-12, 1821-22. — Ce livre, plus scandaleux que curieux, offre le tableau des plus mauvaises mœurs, sans correctif, et sans que le lecteur puisse en tirer aucune conséquence au profit de la morale. Quoiqu’un procès célèbre nous ait fait connaître toute l’ingénuité de la justice anglaise, il était impossible de s’en faire une idée, avant la lecture des Divorces anglais, nous qui ne sommes point habitués en France aux infamies légales, qui ne pouvons concevoir comment des magistrats graves et honnêtes ont la patience et le courage de fouiller si profondément dans la fange pour y chercher la vérité. Aussi l’étonnement des Français qui ne sont point familiarisés avec les mœurs anglaises, a été grand quand ils ont lu l’ouvrage publié par M. de Châteauneuf. Que l’Angleterre ait ses Messalines, ses Faustines et ses Julies, c’est le sort de toutes les vieilles nations ; qu’une duchesse se passionne pour son cocher ; que de très-grandes dames préfèrent un joli jockey ou un grand laquais à un lord peu galant et souvent peu aimable, c’est ce qu’on trouverait sur d’autres rives que celles de la Tamise ; mais que dans le sanctuaire de la justice on parle un langage, on se complaise dans des détails qui révolteraient dans un roman libertin ; que le juge provoque des descriptions plus qu’érotiques, et ordonne à des témoins de joindre la pantomime à des discours déjà trop obscènes ; qu’une jeune demoiselle soit interrogée sur ce qu’elle a vu par le trou de la serrure, qu’on la force à s’expliquer en termes exempts d’ambiguïté, et qu’on exige d’elle une exactitude physiologique ; que des hommes, des femmes viennent révéler les turpitudes de leurs frères, de leurs sœurs, de leurs parents, et que, pour prouver la criminal conversation, ils animent par une impudente prosopopée et fassent parler les lits, les sophas et tous les meubles favorables à la débauche, voilà ce que, dans notre Paris, tout corrompu qu’il est, nous ne connaissions pas encore ; voilà ce que M. de Châteauneuf nous a révélé dans un style plus que naïf. Dans le premier volume, on voit figurer les noms les plus imposants ; le second et le troisième volume ne contiennent que les aventures scandaleuses d’une chanteuse, d’une comédienne, de la veuve d’un miroitier et de quelques autres personnes des classes infimes de la société.

Nous connaissons encore de cet auteur : Les Favorites du roi de France, 2 vol. in-12, 1826.