Revue des Romans/Jean de Sismondi

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Revue des Romans.
Recueil d’analyses raisonnées des productions remarquables des plus célèbres romanciers français et étrangers.
Contenant 1100 analyses raisonnées, faisant connaître avec assez d’étendue pour en donner une idée exacte, le sujet, les personnages, l’intrigue et le dénoûment de chaque roman.
1839


SISMONDE DE SISMONDI (J. Ch. Léonard),
historien et publiciste distingué, né à Genève le 9 mai 1773.


JULIA SÉVÉRA, ou l’An 492, 3 vol. in-12, 1822. — Ce drame attachant, où l’auteur a trouvé moyen de placer tant d’actions intéressantes, une peinture si vraie des mœurs du temps, des caractères si variés tracés d’une main ferme et marqués d’une empreinte originale, est un tableau complet des mœurs du Ve siècle. M. de Sismondi s’est proposé de peindre l’état des Gaules à l’époque de l’invasion de Clovis. — L’amour de Florentinus pour Julia Sévéra est le sujet du roman. Tous deux sont dignes d’intérêt par leurs brillantes qualités ; mais le père de Sévéra tient encore secrètement au culte païen : l’évêque de Tours qui le savait, veut rompre toute liaison entre le sénateur Sévérus et Clovis, et empêcher le mariage de Sévéra avec Florentinus, déjà trop puissant à ses yeux par son ascendant sur les Gaulois. Le bonheur des deux amants est retardé longtemps par la politique de l’archevêque, par les intrigues des moines, et par l’enlèvement de Sévéra, qu’on enferme dans un couvent. Florentinus ne parvient qu’après de longs efforts à retrouver et à délivrer celle qu’il aime. Tous les prestiges sont employés par la haine pour armer contre Florentinus la crédulité superstitieuse du peuple, et même celle des barbares. Nouvel Asmodée, l’auteur nous fait pénétrer dans les dortoirs secrets et dans les cachots mystérieux des monastères ; ce qui fait naître de son pinceau une grande variété de tableaux et de portraits, où l’on voit réunis avec autant de plaisir que de surprise, la touche délicate d’un romancier, et le burin ferme d’un historien. On lit avec le plus grand intérêt des tableaux piquants par leur originalité et leur diversité, tels que celui du patrimoine du sénateur gaulois à la fin du Ve siècle ; d’un camp de vétérans, et de ces cachots nommés ergastules, dans lesquels de riches patriciens renfermaient leurs nombreux esclaves, Wisigoths, Vandales, Francs, Allemands et Bourguignons ; le voyage de Florentinus chez les Armoriques ; la description de l’antre sauvage de Lamia, prêtresse de Pan, célébrant la nuit, au milieu d’un désert, les antiques sacrifices ; la peinture du luxe et de la magnificence de l’évêque de Tours Volusianus, etc., etc., etc.