Revue littéraire, 1858/01

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REVUE LITTERAIRE


Lettres de Pesth sur la Littérature, l’Art, le Théâtre et la vie de Société, par M. Demeter Dudumi.

Depuis quelques années, la plupart des villes de l’Europe se sont transformées. On cherche dans Edimbourg l’ancienne ville décrite par le romancier ; il faut sortir de Munich pour trouver la ville de palais et de monumens du roi Louis ; on rebâtit Paris, L’ancienne capitale de la Hongrie n’a pas voulu rester en arrière. « Si l’un des habitans de Pesth morts il y a vingt-cinq ans, dit M. Demeter Dudumi, pouvait sortir de sa tombe, il regarderait avec des yeux bien étonnés les admirables embellissemens de sa ville. » Dans ses Lettres sur Pesth[1], M. Demeter Dudumi raconte rapidement ces divers travaux, qui datent tous de ces dernières années. La plupart sont dus à des Anglais. Le pont suspendu qui réunit aujourd’hui en une seule les deux villes de Pesth et d’Ofen (ou Bude) est l’ouvrage de M. Adam Clark, ainsi que le beau tunnel pratiqué presque vis-à-vis, sous la citadelle d’Ofen, et que, sauf l’élévation et la longueur, on pourrait comparer à la voie souterraine par laquelle passe l’une des routes de Naples à Pouzzoles, et connue sous le nom de grotte du Pausilippe. Le quai d’Alt-Ofen s’est appelé quelque temps la colonie anglaise, et l’un des plus beaux cafés de Pesth est le café Victoria.

Par le chemin de fer, Pesth n’est plus qu’à quelques heures de Vienne. Il n’y a que les touristes qui vont encore d’une ville à l’autre par le bateau à vapeur, pour visiter les bords du Danube. M. Demeter Dudumi a suivi cette voie : nous ne l’y accompagnerons pas, de peur d’être importuné comme lui par un cicérone trop savant qui nous nommerait tous les châteaux et toutes les ruines. Nous citerons seulement la légende populaire qui donne au nom de Komorn cette fière étymologie : « Komm morgen (viens demain), » répondit le défenseur de la place à l’ennemi qui lui parlait de se rendre.

Le principal objet des Lettres de M. Demeter Dudumi, c’est la littérature, l’art, le théâtre et la vie de société dans la ville de Pesth. La Hongrie a une littérature comme elle a une langue nationale. Forte et énergique, dominée par l’esprit militaire du peuple, cette littérature a eu surtout pour monumens des épopées et des odes ou chants patriotiques. Après de longues années d’engourdissement, une véritable renaissance littéraire s’est déclarée à la fin du règne de Joseph II. Les diètes décrétèrent que la langue hongroise serait enseignée dans toutes les écoles ; on répandit les livres hongrois, on publia des journaux hongrois, et on institua des prix de poésie et de littérature. À la fin du XVIIe siècle, il y avait trois écoles de poésie en Hongrie. Elles eurent à lutter contre l’école française et contre l’école latine. Dans cette lutte, la langue s’épura, grâce surtout aux travaux de Franz Kazinczi, dont M. Demeter Dudumi compare l’influence à celle de Herder en Allemagne. Charles Kisfaludy continua son œuvre en fondant en 1822 le recueil d’Aurora, qui subsista seize ans, et où se produisirent toutes les gloires poétiques de la Hongrie. Czuczor et Voeroesmarty s’illustrèrent dans la poésie épique, le premier par le Combat d’Augsbourg et par la Diète d’Arad, le second par la Conquête de la Hongrie par Arpad ; le Siège d’Erlans et la Forêt enchantée. Bissenyei, Faludy, Rivai, ont composé des odes restées célèbres. À leur suite est venue une jeune phalange de poètes et d’écrivains parmi lesquels il faut citer les noms de Csassar, d’Arany, de Petoefi, et surtout ceux de Lessnyai et de Toth, de Joseph Coetvoos et de Nicolas Josika.

Bien que plusieurs de ces écrivains se soient aussi essayés dans le genre dramatique, ce sont moins des œuvres originales que des traductions ou des imitations qui sont représentées sur la scène de Pesth. Le théâtre national n’a été inauguré qu’en 1837. On était déjà las des pièces faites à l’imitation de celles de Shakspeare et remplies des traditions nationales. On s’est presque renfermé dans le répertoire de quelques écrivains français. Malheureusement, après avoir épuisé ce qu’il y avait de meilleur, on s’est inspiré de nos vaudevilles et de nos drames du boulevard. Effrayé de cette trop prompte décadence, M. Demeter Dudumi invite les Hongrois qui traduisent pour le théâtre à puiser à une nouvelle source. N’y a-t-il pas le théâtre italien, auquel on n’a encore rien emprunté ? Il vaudrait mieux cependant conseiller aux Hongrois de composer des pièces originales. On commencerait par des essais aussi faibles que le Dioclétien de Szighgoh, ou le Roi Coloman de Bérenyi ; on arriverait peut-être, dans un avenir peu éloigné, à des épopées dramatiques semblables aux anciennes trilogies et comparables à celles de Shakspeare ou de Schiller. Cette rivalité pourrait naître d’autant plus facilement, qu’à côté du théâtre national Pesth possède un théâtre allemand où les chefs-d’œuvre dramatiques de l’Allemagne trouvent souvent de dignes interprètes.

L’académie hongroise (Magyar tudos tarsarag), qui doit présider à ce progrès comme à tous les progrès littéraires, date à peine de trente ans. Le comte Stephan Szechenyi en a posé la première pierre en 1826, et a souscrit pour une somme de 60,000 florins. En 1830, quand le plan des constructions a été adopté, le total des souscriptions s’élevait à 300,000 florins. Le règlement de l’académie a été arrêté en 1836. Aujourd’hui elle possède un revenu de 22, 000 florins, et compte cent soixante-treize membres. Sa bibliothèque, considérablement enrichie par un don de la famille Teleky, renferme cinquante mille volumes. Un prix annuel de 200 ducats est institué pour le meilleur ouvrage écrit en hongrois, et deux de 100 pour les meilleurs mémoires sur les sciences. Déjà l’académie a publié plus de la moitié d’un grand dictionnaire de la langue nationale, une grammaire et plusieurs lexiques. Elle a fait imprimer d’anciens monumens historiques, dix-sept volumes d’ouvrages couronnés, des traductions des classiques. Elle fait enfin paraître un magasin scientifique qui en est à sa treizième année de publication. Indépendamment des prix académiques, la nation a pour le talent de nobles et généreux encouragemens. Après la mort du grand poète Voeroesmarty, la Hongrie a joint à tous les honneurs qu’elle lui avait rendus pendant sa vie une souscription nationale de 60,000 florins en faveur de ses fils.

Le musée national, beau monument avec un péristyle soutenu par huit colonnes corinthiennes, entre lesquelles se trouvent les statues de la Pannonie, du Danube, de la Theiss et autres figures allégoriques, renferme plusieurs collections importantes, entre autres celle des manuscrits, au nombre de plus de deux mille, celles des bois, des minéraux, des monnaies et des objets d’antiquité. Les tableaux sont en petit nombre. Pour la musique hongroise, elle semble avoir fait peu de progrès depuis les chants patriotiques, dont elle formait l’accompagnement. Elle conserve toujours le pouvoir d’exalter les âmes par le prestige des vieux souvenirs, mais l’art a peu ajouté à sa simplicité primitive.

Qu’on nous permette d’entrer avec l’auteur hongrois dans quelques détails qu’il ne faudrait pas se hâter de rejeter comme superficiels : il s’agit de la vie magyare étudiée dans ses distractions de chaque jour. Les concerts sont rares, à Pesth. M. Demeter Dudumi nous apprend que pendant le carême, malgré l’exemple général que donnent les autres pays de l’Europe, il n’y a qu’un petit nombre de réunions musicales. Les hommes se réunissent plutôt au cercle ou dans les cafés. « Le nombre multiplié des cafés et des bains chauds pourrait servir à indiquer l’origine asiatique du peuple hongrois. » Depuis les derniers événemens, les cafés de Pesth ont perdu leur ancienne physionomie ; le Café des Échecs, où Szen battit deux fois les célèbres joueurs Loewenthal et Grimm, le café de Zrinyi, illustré sur la scène par Szigligeti, et celui d’Herrengasse, où se réunissaient les étudians, ont fait place à des cafés modernes et splendides, tels que ceux de la Reine Victoria, de l’Hôtel de l’Europe et de la Promenade, où l’on ne retrouve plus aucune tradition politique.

La presse allemande ou hongroise est représentée à Pesth par de nombreux organes. La première feuille politique publiée en allemand fut le Pest-Ofener-Zeitung, qui commença à paraître dans cette ville en 1845 ; le Pester Llyod parut ensuite : organe du commerce, il est celui qui a le plus d’abonnés. Depuis 1855, il paraît à Pesth une nouvelle feuille politique, l’Ungarische-Post. Il faut y joindre une petite feuille, le Localblatt, et deux revues, le Sonntags-Zeitung et le Pester-Sonntags-Blatt. Tous ces écrits sont en allemand ; il n’y a que deux feuilles rédigées en hongrois, ce sont le Buda-Pesti-Harlap et le Pesti-Naplo. M. Demeter Dudumi s’arrête plutôt sur le caractère littéraire que sur le caractère politique de ces diverses publications. Il cite seulement de Paul Gyulai un morceau de critique intéressant sur une maladie morale et littéraire qui, après avoir fait le tour de l’Europe, semble menacer la jeune Hongrie : la mélancolie ou le pessimisme, ce que les Allemands appellent Weltschmerz, « une douleur que tout le monde semble nourrir. » Ce morceau témoigne d’une critique forte et saine.

La vie de société semble assez imparfaite dans la capitale hongroise. Il y manque, comme dans beaucoup de pays aujourd’hui, l’influence salutaire des femmes. Faute de cette direction, les jeunes gens n’y apportent pas assez de politesse ni d’élégance. Le monde est d’ailleurs divisé en deux classes par la langue. Les artistes et les écrivains vivent entre eux. Les savans allemands demeurent souvent des mois entiers à Pesth sans se connaître. « La science a été de tout temps le premier amour d’un Allemand, et le symbole de la science est la chouette, l’oiseau de Minerve et l’ami de la solitude. » On se réunit en famille, on joue aux cartes pendant la fin de l’automne, on fête l’arbre de Noël, on boit du punch à la Saint-Sylvestre, et l’on danse pendant le carnaval. L’esprit de caste disparaît dans ces réunions ; il y règne la même liberté de ton que dans les soirées dansantes des villes de bains. Les danses à figure et à caractère, les danses nationales des tsiganes de viennent de plus en plus rares ; on ne les retrouve qu’aux bals de jeunes gens. Le coasdus se conserve cependant à côté du quadrille. Le Lloyd de Pesth et la Société de Charité des dames donnent presque seuls de grands bals. À Pesth, comme partout aujourd’hui, on danse pour l’amour du prochain et sous la présidence de dames patronesses. Cette société des dames a été fondée en 1817, pendant une famine, par la grande-duchesse Hermine, deuxième femme du grand-duc palatin Joseph. Le 20 mars 1852, une crèche a été établie avec une douzaine de lits. On y paie deux kreuzers par jour pour un enfant de moins d’un an, et trois pour ceux au-dessus de cet âge. Un institut des jeunes aveugles a été créé en 1842, et un établissement des orphelins en 1843.

Toutes ces fondations, en même temps que le mouvement intellectuel, semblent avoir été arrêtées par les derniers événemens. L’aristocratie est retirée dans ses terres : elle n’en sort que l’hiver, pour aller, il est vrai, à Presbourg et à Pesth plutôt qu’à Vienne, afin de conserver la richesse dans le pays ; mais à Pesth même, elle ne fait plus rien pour l’embellissement d’une ville dont elle possède les deux tiers. M. Demeter Dudumi se plaint beaucoup de cette conduite des magnats. « Ils oublient, dit-il, que la devise de leurs pères a toujours été : Aide-toi, le ciel t’aidera ; ils proclament par leur silence qu’ils ne se sentent plus appelés à diriger la vie nationale. Ils succombent moins par la perte de leurs droits que par leur faiblesse et l’oubli d’eux-mêmes. Au lieu d’avoir conscience de leur force et de mettre leur gloire à la montrer, ils ne savent que s’abstenir. Leurs pères leur avaient pourtant légué d’autres traditions. Au XVIIIe siècle, comme au commencement du XIXe, la grande seigneurie donnait l’exemple de toutes les vertus civiques, elle fondait des musées et des bibliothèques, elle encourageait l’agriculture et l’industrie, elle protégeait les arts, véritable rôle de l’aristocratie, aujourd’hui que les chevaliers du glaive doivent devenir les chevaliers de l’esprit, et que l’on ne dit pas le baron Joseph Coetvoos, mais le spirituel poète Coetvoos. Cependant la noblesse semble ne plus lire. Aussi n’est-ce plus à elle que s’adressent nos modernes écrivains. Au lieu de s’élever, la littérature s’abaisse ; elle se fait populaire, et à bon marché. Le Journal du Dimanche a dix mille abonnés, la Bibliothèque du Dimanche qui donne dix volumes pour 2 florins, a aussi des abonnés en grand nombre ; mais qu’y gagnent l’art et la poésie ? »

Nous ne saurions partager entièrement l’opinion exprimée par M. Demeter Dudumi sur les tendances actuelles de la littérature de son pays. La vie intellectuelle sommeille en Hongrie depuis quelques années, nous voulons bien l’admettre avec lui ; mais il y a des repos qui ne sont qu’apparens, et si à Pesth le règne de l’esprit semble suspendu, on aime à croire que cela tient a des conditions qui ne sauraient durer, et après lesquelles tous les progrès retracés par le spirituel écrivain hongrois reprendront leur cours interrompu.


E. DE SUCKAU.


Mémoires du marquis d’Argenson, ministre des affaires étrangères, édités par M. le marquis d’Argenson. — Les Courriers de la Fronde, car Saint-Julien, édités par M. Moreau[2]


Deux documens curieux, et d’un caractère bien différent, sur la société française du XVIIe et du XVIIIe siècle, s’offrent à nous d’une part avec les Mémoires du marquis d’Argenson, de l’autre avec la gazette rimée du poète bourgeois Saint-Julien,

René-Louis de Voyer, marquis d’Argenson, naquit le 18 octobre 1694 ; son père fut lieutenant-général de police au Châtelet de Paris, puis garde-des-sceaux en 1720. Tandis que son frère cadet était rapidement arrivé au ministère de la guerre, René avait parcouru les divers échelons de la carrière administrative, et n’avait pas été aussi heureux. Après avoir pris part, comme plénipotentiaire, aux travaux du congrès de Cambrai, il fut ensuite désigné pour l’ambassade de Lisbonne, puis remplacé avant son départ et enveloppé, en 1740, dans la disgrâce de son ami M. de Chauvelin. M. d’Argenson occupa ces loisirs forcés, partie à la rédaction de ses volumineux Mémoires, partie à « un métier où il y a prodigieusement à gagner ; car personne ne s’en avise : celui d’être parfaitement honnête homme. Joignait à cela une grande application, ajoute-t-il, qui amène nécessairement quelque intelligence, il est impossible que, de degré en degré, l’on ne soit pas recherché pour les premières places. » M. d’Argenson voyait juste, ou peut-être était-il, par ses espérances, conduit à prophétiser ainsi. Peu après il remplaça aux affaires étrangères M. Amelot, dont le bégaiement agaçait la belle duchesse de Châteauroux. Les deux frères se trouvèrent alors ministres en même temps, et ils payèrent brillamment de leur personne à la bataille de Fontenoy, qui inaugura leur administration, et valut au marquis d’Argenson ce billet de Voltaire : .« Ah ! le bel emploi pour votre historien ! Il y a trois cents ans que les rois de France n’ont rien fait de si glorieux : je suis fou de joie. Bonsoir, monseigneur. »

L’un des principaux événemens diplomatiques qui signalèrent le ministère de M. d’Argenson fut le congrès de Bréda, par lequel on essaya de conclure une paix qu’il fallait cimenter avec ses alliés, comme disait le marquis, avant de la négocier avec ses ennemis. Le gouvernement français avait été alors vivement occupé des prétentions du prince Charles-Édouard, comme aussi des troubles de l’Italie, où un parti rêvait déjà la formation d’une république italienne. Les complications qui surgirent en Espagne amenèrent bientôt la chute de M. d’Argenson, que le roi abandonna complètement après lui avoir accordé la plus entière confiance : il donna sa démission par ordre, le 10 janvier 1747, et fut remplacé par le marquis de Puisieux, qui adopta un système entièrement opposé à celui de son prédécesseur. M. d’Argenson fut le dernier des ministres français qui poursuivit les vues de Richelieu et de Mazarin pour l’abaissement de la maison d’Autriche. Après lui, la cour de Versailles devint l’alliée de l’empereur et l’ennemie du roi de Prusse. Le ministre disgracié rentra dans la vie privée ; mais il ne fut pas seulement éloigné des affaires, il fut exilé, ce qui l’affecta au plus haut point. Il n’obtint qu’à la fin de sa vie la permission de venir se faire traiter à Paris, et y mourut le 22 août 1764, un peu trop délaissé par son heureux frère, demeuré secrétaire d’état de la guerre.

La vie politique, à proprement parler, ne fut qu’un épisode dans l’existence du marquis d’Argenson. Il était très intimement lié avec Voltaire et toute la coterie des beaux-esprits philosophes, qui étaient alors si fort tenus en honneur à Paris et dans toute l’Europe. L’éditeur de ces Mémoires consacre à M. d’Argenson une longue et très intéressante notice. Sans prétendre entrer ici dans un examen approfondi de ce curieux ouvrage, je ne puis que le signaler comme digne de l’intérêt des gens du monde et de l’attention des hommes sérieux.

Les Courriers de la Fronde nous font encore remonter cent ans en arrière pour nous conduire au milieu de cette société élégante et ferrailleuse où l’on était ami le matin et ennemi le soir, sans toujours bien savoir pourquoi et souvent par simple esprit de mode. Saint-Julien, poète-bourgeois de Paris, nous a laissé une très curieuse gazette rimée des événemens accomplis depuis mai 1648 jusqu’en avril 1649 : c’est une chronique piquante et qu’on doit lire avec Loret, dont l’édition paraît aussi en ce moment. Ces histoires burlesques, il faut bien se servir de ce mot, sont des témoignages utiles à entendre et surtout instructifs. L’historien burlesque, comme Saint-Julien, comme Loret, comme tous ceux qui rimaillèrent alors en ce sens, est l’écho et bien souvent l’organe d’un parti ou d’un homme. « Il a écrit, dit M. Moreau, en présence des événemens, sous l’influence des sentimens et des idées qui prévalaient alors, et qu’il a traduits à sa manière : il a été l’instrument de toutes les rivalités, de toutes les jalousies, il s’est prêté à toutes les passions comme à toutes les haines ; mais il y a tout un côté des mœurs publiques qu’il enlumine de couleurs éclatantes et qu’il éclaire d’une chaude lumière. C’est dans ces vers surtout qu’on voit bien la foule qui grouillait sur le Pont-Neuf, autour du cheval de bronze ou devant la Samaritaine, dès que le moindre bruit se répandait dans Paris, et qui vociférait au Palais et jusque sous les piliers de la Grand’Salle dans les jours d’émeute. » Saint-Julien et Loret font merveilleusement connaître cette singulière phase de notre histoire révolutionnaire, avec laquelle, grâce aux nombreuses publications contemporaines, nous sommes presque aussi familiarisés qu’avec la nôtre.

Ed. de Barthelemy

  1. Pester Briefe ueber Literatur, Kunst, Theater und Gesellschaftliches Leben, von Demeter Dudumi, Pesth 1856.
  2. Bibliothèque elzévirienne de P. Janet.