Rig Véda ou Livre des hymnes/Section 5/Lecture 8

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Traduction par Alexandre Langlois.
Bibliothèque Internationale Universelle (p. 400-407).

LECTURE HUITIÈME.
HYMNE I.
Aux Aswins, par Brahmatithi, enfant de Canwa.
(Mètres : Gâyatrî, Vrihatî et Anouchtoubh.)

1. Les blancs rayons de la pieuse (déesse) aux vêtements rouges se font voir au loin : bientôt ses splendeurs s’étendent de tout côté.

2. Ô Aswins, ô (dieux) secourables, vous venez, tels que des héros, sur un char large et solide, que la Prière attelle, et vous vous unissez à l’Aurore.

3. (Ô Dieux), trésor d’abondance, que des hymnes commencent en votre honneur. Je suis comme un coursier qui porte la parole.

4. Enfants de Canwa, nous vous louons pour obtenir votre secours, ô vous, Aswins, qui avez pour les hommes tant d’amour, tant de bonheur, tant de trésors.

5. Venez dans la maison de votre serviteur, ô (Dieux) adorables, qui êtes les maîtres de la magnificence, et qui apportez l’abondance et la fortune.

6. Répandez votre beurre (céleste) sur l’habitation d’un pieux serviteur ; que (cette habitation) soit pourvue d’heureux sacrifices et toujours opulente.

7. Ô Aswins, accourez à (la voix de) nos hymnes avec vos chevaux rapides et impétueux.

8. Avec ces chevaux vous arrivez de la région lointaine, et parcourez les trois mondes, (assistant) à nos triples (libations) le jour et la nuit[1].

9. Ô vous qui connaissez le moment (où l’hymne vous invoque), donnez-nous une abondance féconde en vaches. Fermez (aux autres) les voies de votre munificence.

10. Ô Aswins, apportez-nous une opulence qui soit riche en denrées abondantes, en vaches, en beaux chars, en chevaux, et féconde en héros vaillants.

11. (Ô Dieux) Secourables, maîtres de la magnificence, qui grandissez avec force, portés sur un char d’or, buvez le miel de notre soma.

12. Ô (Dieux), trésor d’abondance, venez dans cette demeure que nous et ces (maîtres) opulents (nous avons préparée pour vous) ; qu’elle soit toujours large et florissante.

13. Ô vous qui appréciez les hommages des peuples, accourez (vers nous) ; et ne vous arrêtez pas chez les autres.

14. Ô superbes Aswins, buvez de cette douce et joyeuse libation, aussi agréable que le miel.

15. Apportez-nous des biens que l’on compte par centaines, par milliers, (des biens) abondants et solides.

16. Ô vaillants Aswins, les sages vous invoquent de tous les côtés. Venez avec vos coursiers.

17. Ô Aswins, les peuples ont préparé pour vous le gazon (sacré) et l’holocauste : ils vous honorent et vous invoquent.

18. Ô Aswins, nous vous offrons aujourd’hui cet hymne. Puisse-t-il arriver jusqu’à vous, et vous attirer (vers notre demeure) !

19. Ô Aswins, jetez les yeux sur nous de dessus votre char, et buvez de cette coupe de miel que nous vous présentons.

20. Ô (Dieux), trésor d’abondance, que ce (soma) vous soit agréable ; et apportez-nous une abondance heureuse pour nos troupeaux, nos enfants, nos vaches.

21. Ô (Dieux), qui connaissez le moment (où l’hymne vous invoque), ouvrez les portes du ciel, pour répandre sur nous les ondes et la fertilité.

22. Ô vaillants (héros), le fils de Tougra jeté dans la mer vous a invoqués, et votre char est arrivé avec vos (coursiers) ailés.

23. Ô (Dieux) Véridiques, Canwa était enfermé dans un palais obscur[2] ; vous l’avez secouru.

24. Venez, et accordez-nous la même protection, ô (Dieux) généreux, que j’appelle avec des hymnes nouveaux.

25. (Sauvez-nous), ô Aswins, comme vous avez sauvé Canwa, Priyamédha qui vous louait, Atri qui vous célébrait.

26. (Protégez-nous) comme (vous avez protégé) Ansou en le comblant de vos richesses, Agastya en lui accordant des vaches, Sobhari en lui envoyant l’abondance.

27. Ô généreux Aswins, nous vous chantons, et nous vous demandons une protection égale, sinon plus grande.

28. Ô Aswins, faites arrêter (ici) votre char céleste, au siége et aux rênes d’or.

29. Le joug de ce (char) rapide est d’or ; d’or est l’essieu ; d’or sont aussi les deux roues.

30. Ô (Dieux) généreux, venez à nous sur ce (char) de la région lointaine, et accueillez mon hymne.

31. Ô immortels Aswins, vous apportez de la région lointaine les dépouilles abondantes, ravies aux Asouras.

32. Ô charmants Aswins, ô (Dieux) Véridiques, venez à nous avec le bonheur, l’abondance, la richesse.

33. Que vos coursiers ailés, à la forme brillante, vous amènent ici près d’un peuple prodigue de sacrifices.

34. Qu’ils (transportent) votre char accompagné de nos chants et chargé d’heureuses provisions, sans aller en briser la roue.

35. Ô (Dieux) Véridiques, aussi prompts que la pensée, venez sur ce char d’or, avec ces coursiers aux pieds rapides.

36. Ô (Dieux), trésor de générosité, vous goûtez ce (soma) qui vous tient en éveil et que vous recherchez avec empressement[3]. Répondez à nos présents par votre libéralité.

37. Ô Aswins, sachez quels biens nouveaux j’ai reçus. Casou, fils de Tchédi[4], m’a donné cent chameaux et dix mille vaches.

38. Il a soumis à mes lois dix rois tout brillants d’or. Tous les hommes sont aux pieds du fils de Tchédi, et gardent dans leur mémoire les traces de ses pas.

39. Personne n’a marché dans cette voie, qui est celle des Tchédis. On ne saurait trouver un maître plus généreux.


HYMNE II.
À Indra, par Vatsa, enfant de Canwa.
(Mètre : Gâyatrî.)

1. Il est grand, ce puissant Indra qui, tel que le nuage gros de pluie, grandit par les louanges de Vatsa.

2. Que les sages, en apportant les feux de Rita, amènent aussi sa fille[5].

3. Les enfants de Canwa, après avoir, par leurs louanges, formé Indra qui accomplit (les vœux) du sacrifice, chantent la Foudre, sa compagne.

4. Tous les hommes s’inclinent devant sa colère, comme les Ondes devant l’Océan.

5. Toute la force d’Indra apparaît, quand il étend, comme deux vastes boucliers, le Ciel et la Terre.

6. Vritra veut ébranler le monde : Indra lui fend la tête de sa foudre terrible, qui est armée de cent tranchants.

7. En présence des sages nous accomplissons ces rites, dont l’éclat ressemble à celui d’Agni.

8. Les Rites viennent avec empressement briller près du foyer (sacré), et les enfants de Canwa font tomber la pluie des libations saintes.

9. Ô Indra, puissions-nous obtenir une opulence abondante en vaches et en chevaux ! Puissions-nous, pour l’œuvre par laquelle nous t’honorons le premier, (obtenir) de riches offrandes !

10. J’ai excité autour de moi la sage, énergie de Rita, (notre) père. J’ai paru brillant comme un soleil.

11. Comme faisait Canwa, je mêle à mes hymnes l’antique prière, qui donne à Indra toute sa force.

12. (Au milieu des hommes) qui ne t’adressent pas de louanges, et des Richis qui t’ont célébré, (distingue-moi), ô Indra, moi qui t’ai chanté ; et grandis à ma voix.

13. Quand le bruit de sa colère se fait entendre, il déchire les membres de Vritra, et précipite les ondes vers la mer.

14. Ô Indra, tu as lancé sur le brigand Souchna ta foudre qui nous protége. Ô (Dieu) terrible, on célèbre ta libéralité.

15. Indra, armé du tonnerre, n’a de supérieur pour la force ni dans les cieux, ni dans les airs, ni sur les terres.

16. Ô Indra, (l’Asoura) s’endormait au sein de tes grandes Ondes qu’il retenait ; tu l’as tué, et tu as délivré (ses prisonnières).

17. Fais disparaître, ô Indra, cet (Asoura) qui couvrait de ténèbres le Ciel et la Terre, ces deux grands compagnons de voyage.

18. Les religieux Bhrigous t’ont (jadis) célébré, ô terrible Indra. (Je te chante aujourd’hui) ; écoute mon invocation.

19. Pour toi, ô Indra, ces vaches brillantes[6] donnent un beurre qui forme l’ambroisie du sacrifice.

20. (D’autres) vaches[7], ô Indra, t’ont soigné comme leur nourrisson ; leur bouche t’a flatté. Elles se sont placées autour de toi pour te parer, comme les rayons autour du soleil.

21. Ô maître de la force, les enfants de Canwa par leur hymne, les libations par leur breuvage, ont augmenté ta grandeur.

22. Ô Indra, ô toi qui portes la foudre, à toi, notre directeur, appartiennent ces hymnes, et ce sacrifice préparé avec tant de soin.

23. Ô Indra, donne-nous ta protection, qui soit pour nous comme une place forte ; que nous obtenions de toi une large abondance en vivres et en vaches ; que nous soyons heureux en enfants et en vaillants serviteurs.

24. (Accorde-nous) ces chevaux rapides qui brillent avec tant de gloire au milieu du peuple de Nahoucha[8].

25. Ô vaillant Indra, quand tu nous favorises, tu élargis les bornes de notre pâturage.

26. Ô Indra, ta puissance éclate, et alors tu domines sur les nations, grand, fort, infini.

27. Les peuples t’offrent des holocaustes pour obtenir ton secours, et par leurs libations ils accroissent ton domaine.

28. Que le sage (Indra) naisse avec la Prière sur le bord des collines et au confluent des rivières[9].

29. De sa (demeure) élevée il voit la mer (des libations), et il s’empresse d’y venir boire.

30. Aussitôt après on voit l’astre qui contient la semence antique et lumineuse, et qui brille du haut du ciel.

31. Ô puissant Indra, les Canwas réunis exaltent ta prudence, ta force et ta vigueur.

32. Ô Indra, accueille mon hymne ; conserve moi ; exauce ma prière.

33. (Dieu) fort qui portes la foudre ; les sages désirent la vie, et nous avons en ton honneur accompli ces cérémonies.

34. Les Canwas ont fait entendre le bruit de leurs louanges, pareil à celui de l’onde qui se précipite. La Prière honore Indra.

35. Tels que les ondes qui (accroissent) la mer, nos hymnes ont augmenté la grandeur d’Indra immortel et invincible.

36. Viens à nous de la région lointaine avec tes deux chevaux. Ô Indra, bois ces libations.

37. Ô (Dieu) vainqueur de Vritra, les hommes, sur leurs siéges de gazon, t’invoquent pour obtenir l’abondance.

38. Comme la roue suit le cheval, le Ciel et la Terre te suivent, et les Libations s’attachent à tes pas.

39. Ô Indra, réjouis-toi de notre sacrifice, et sur les bords du Saryanâvan[10] viens recueillir la prière de ton serviteur.

40. (Le dieu) libéral qui porte la foudre et triomphe de Vritra, qui aime à boire notre soma, croît dans le ciel et fait entendre sa voix.

41. Ô Indra, tu es un maître fort et incomparable ; tu es un Richi né avant tous. Tu aimes à répandre tes bienfaits.

42. Cent chevaux, à la croupe élancée, t’amènent à nos libations et à nos offrandes.

43. Les Canwas, avec leur hymne, ont formé l’antique Prière, qui s’humecte d’un doux et onctueux ghrita.

44. Le mortel qui veut obtenir le secours d’Indra, vient l’honorer avec ses offrandes au milieu du sacrifice.

45. Ô (Dieu) objet de tant de louanges, les deux coursiers chantés par les Priyamédhas t’amènent aux libations de soma.

46. Chez les Yâdwas j’ai reçu cent présents de Tirindara ; j’en ai reçu mille de Parsou[11].

47. Pour que mes chants fussent efficaces[12], ils m’ont donné trois cents chevaux et dix mille vaches.

48. Le grand (Tirindara) m’a fait don de quatre paires de chameaux, et par sa générosité a élevé jusqu’au ciel la gloire de la race Yâdwa.


HYMNE III.
Aux Marouts, par Pounarvatsa, enfant de Canwa.
(Mètre : Gâyatrî.)

1. Ô Marouts, le sage fait couler trois fois en votre honneur la libation qu’il accompagne de ses chants, et vous régnez alors au sein des nuages.

2. Lorsque, pleins de force et de splendeur, vous faites rouler votre char, les nuages viennent se fendre devant vous.

3. Que les enfants de Prisni s’élancent en faisant entendre les clameurs des vents, et qu’ils nous envoient un lait abondant et fécond.

4. Les Marouts sèment la pluie ; ils ébranlent les montagnes (célestes), quand ils montent sur leur char avec les vents.

5. Alors devant ce char les Ondes s’amoncellent en forme de collines, et donnent à votre vigueur plus de consistance.

6. Nous vous appelons à notre secours la nuit, le jour, dans le cours du sacrifice[13].

7. Les Marouts, avec leurs formes rougeâtres et variées, s’élancent sur leurs chars, en criant du haut du ciel.

8. Avec vigueur ils dégagent la lumière et ouvrent la route du soleil. Ils apparaissent entourés de rayons.

9. Ô grands Marouts, accueillez cette prière, cette louange, cette invocation que je vous adresse.

10. Pour (Indra) armé de la foudre, les enfants de Prisni ont donné l’onde savoureuse qui forme les trois torrents des libations.

11. Ô Marouts, nous désirons l’abondance, et nous vous appelons du ciel : venez à nous.

12. Sages enfants de Roudra, vous êtes grands, vous êtes généreux dans la demeure du sacrifice.

13. Ô Marouts, envoyez-nous du ciel une opulence forte, variée, protectrice.

14. (Dieux) brillants, faites rouler votre char comme sur le haut des collines. Jouissez des libations qui vous sont versées.

15. Que le mortel, par ses prières, demande les bienfaits de cette troupe immortelle.

16. Comme s’ils étaient chargés de rosée, ils répandent la pluie au ciel et sur la terre, puisant à une source toujours intarissable.

17. Les enfants de Prisni, au milieu de nos hymnes, s’élancent avec leurs clameurs, leurs chars et les vents.

18. (Donnez-nous) les secours qui ont sauvé Tourvasa, Yadou, le généreux Canwa. Nous vous prions de nous accorder la richesse.

19. Accompagnées des prières du fils de Canwa, que ces offrandes, ô (Dieux) bienfaisants, soient comme un onctueux ghrita qui augmente votre splendeur.

20. (Ô Dieux) généreux, en quel lieu vous livrez-vous au plaisir, assis sur un gazon choisi ? Quel prêtre vous honore (en ce moment) ?

21. Ce n’est pas le sacrifice (d’un étranger) que vous pouvez protéger, quand, depuis longtemps assis sur le gazon sacré, nous vous (adressons) nos hymnes.

22. C’est à ces (dieux) que nous devons tour à tour les grandes Eaux, les mondes, le soleil, la foudre même.

23. Ils coupent Vritra en morceaux, et aux nuages, qu’ils ont privés de leur roi, ils donnent une force fécondante.

24. Quand Trita[14] combattait, ce sont (les Marouts) qui lui ont donné, pour vaincre Vritra, de la force, de l’activité, et le secours d’Indra.

25. Ces (dieux) brillants et ornés de rayons lumineux ont la foudre dans leurs mains, et sur la tête des aigrettes d’or.

26. Quand vous arrivez de la région lointaine, vous précipitant à travers l’espace des airs, le Ciel pousse des cris de peur comme à la vue d’Ousanas[15].

27. Venez, ô Dieux, recevoir le don de notre sacrifice avec vos coursiers aux pieds d’or.

28. Quand leurs daims emportent le joug rougeâtre de leur char, ils s’en vont, et dans leur marche brillante entraînent les ondes.

29. Que ces héros abaissent leurs chars sur les bords du Saryanâvan, dans le pays de Ridjîca[16], où abondent les demeures (du sacrifice), où coulent les flots de la libation.

30. Quand donc, ô Marouts, comptez-vous venir vers le sage qui vous invoque et qui vous prie en vous présentant l’offrande ?

31. Que (peut dire) le (sage) qui fait votre éloge, lorsque (dans le combat) vous avez abandonné Indra ? Qui peut se fier en votre amitié ?

32. Ô fils de Canwa, louez Agni, (et sachez que) notre force est dans les Marouts qui manient la foudre, et portent une armure d’or.

33. J’engage à répandre sur nous des biens toujours nouveaux ces (dieux) généreux, adorables, doués d’une abondance variée.

34. Touchées par eux, les superbes collines s’abaissent. Les montagnes (célestes) sont soumises à leurs lois.

35. Leurs coursiers les transportent rapidement dans les airs, et envoient à leurs serviteurs les richesses dont ils sont chargés.

36. Agni est né le premier (d’entre les dieux), et resplendissant comme le glorieux soleil. Les Marouts apparaissent entourés de rayons.


HYMNE IV.
Aux Aswins, par (Vatsa ?) Sadhwansa, enfant de Canwa.
(Mètres : Ouchnih et Anouchtoubh.)

1. Secourables Aswins, venez à nous avec tous vos secours ; venez sur votre char d’or, et buvez.

2. Ô Aswins (dieux) sages et protecteurs, pleins d’une profonde prudence et couverts d’un vêtement d’or, venez prendre le miel de notre soma sur votre char brillant comme le soleil.

3. À la voix de nos hymnes, venez de l’air qui vous tient dans ses liens[17]. Buvez, ô Aswins, le miel que les Canwas répandent dans le sacrifice.

4. Venez à nous de l’air qui brille autour de vous. (Soyez) heureux dans cette assemblée ; fils de Canwa, je vous offre le miel du soma.

5. Venez à nous, ô Aswins ; (venez) à notre appel pour boire le soma, sages héros dont nos offrandes, nos louanges et nos œuvres augmentent la grandeur.

6. Ô vaillants Aswins, les Richis implorent vos secours protecteurs. Arrivez au bruit de mon hymne.

7. Ô (Dieux) qui donnez le bonheur et favorisez (l’homme pieux) qui vous sert, venez à nous du haut du ciel resplendissant. Écoutez mon invocation, accompagnée de prières et d’hymnes.

8. Ô Aswins, d’autres que nous vous honorent-ils (mieux) avec leurs chants ? Le Richi Vatsa, fils de Canwa, par ses hymnes accroît votre grandeur.

9. Ô Aswins, le sage vous célèbre et vous appelle à son secours. (Dieux) bienfaisants et vainqueurs de Vritra, soyez-nous favorables.

10. Ô Aswins trésors d’abondance, quand votre jeune épouse monte sur votre char, vous courez alors à l’accomplissement de tous vos desseins.

11. Venez donc, ô Aswins, sur votre char aux mille formes. Le poëte Vatsa, fils de poëte, a composé pour vous un hymne aussi doux que le miel.

12. Ô Aswins, ô vous qui soutenez (le monde) et dispensez la richesse, vous qui faites la force des hommes et méritez tous leurs hommages, écoutez mon hymne.

13. Ô Aswins, donnez-nous tous les biens sans réserve. Faites que nous agissions au moment favorable. Ne nous exposez pas au blâme.

14. Ô Véridiques Aswins, que vous soyez dans la région lointaine ou dans une région plus voisine, venez à nous sur votre char aux mille formes.

15. Ô (Dieux) Véridiques, le Richi Vatsa a exalté votre grandeur par ses chants. Donnez-lui une opulence variée dans ses mille formes, aussi douce que le ghrita.

16. Oui, donnez-lui une opulence aussi douce que le ghrita. Ô Aswins, ô maîtres de la bienfaisance, qu’il soit riche celui qui vous chante pour obtenir la fortune !

17. Héros, qui possédez tous les biens et qui triomphez de vos ennemis, accourez à la voix de notre hymne. Rendez-nous fortunés. Donnez-nous toutes les jouissances (de la vie).

18. Les Priyamédhas implorent toute votre protection. Ô Aswins, venez régner dans nos sacrifices au milieu de nos invocations.

19. Ô merveilleux Aswins, venez à nous pour nous apporter le bonheur. Vous êtes avides de nos louanges : Vatsa par ses œuvres, par ses chants, exalte votre gloire.

20. Ô vaillants (Aswins), sauvez-nous par cette même protection que vous avez accordée à Canwa, à Médhâtithi, à Vasa, à Dasavradja[18], (au Richi) dont la vache était stérile[19].

21. Ô vaillants Aswins, sauvez-nous par cette même protection que vous avez accordée à Trasadasyou pour le conserver et l’enrichir. (Donnez-nous) aussi l’abondance.

22. Que nos louanges, nos hymnes et nos prières augmentent votre gloire, ô Aswins (Dieux) sauveurs, que tous les hommes invoquent et qui êtes les ennemis acharnés de Vritra. Soyez-nous favorables.

23. Cependant les trois pas des Aswins nous apparaissent au-dessus de la (vaste) caverne[20]. (Dieux) sages, venez à nous avec les pieds du Sacrifice, pour le bonheur des êtres vivants.


HYMNE V.
Aux Aswins, par (Vatsa ?) Sasacarna.
(Mètres : Gâyatrî, Vrihatî, Cacoubh, Trichtoubh, Anouchtoubh, Virât et Djagatî.)

1. Ô Aswins, venez au secours de Vatsa. Donnez-lui une maison large et paisible. Éloignez ses ennemis.

2. Que vous soyez dans l’air, dans le ciel, ou dans le séjour des cinq (espèces d’êtres), enfants de Manou[21], ô Aswins, soyez nos bienfaiteurs.

3. Ô Aswins, pensez aux fils de Canwa et aux sages qui s’occupent pour nous de l’œuvre (pieuse).

4. Ô Aswins, en votre honneur nous allumons les feux (du sacrifice), et nous chantons l’hymne (saint). (Ô Dieux), trésor d’abondance, (nous vous présentons) ce soma aussi doux que le miel, qui vous excite à triompher de Vritra.

5. Ô Aswins, célèbres par vos prouesses, vous avez un empire sur les eaux, les arbres, les plantes : que cet empire vous conserve !

6. Ô Dieux Véridiques, vous êtes nos patrons ou nos médecins. Vatsa vous honore par ses prières. Venez vers un (serviteur) qui a pour vous des holocaustes.

7. Que le Richi fasse l’éloge fortuné des Aswins. Qu’il verse le soma le plus doux ; qu’il allume le feu (du sacrifice).

8. Ô Aswins, vous arrivez sur un char aux roues rapides. Que mes louanges s’élèvent jusqu’à vous (qui brillez) comme le soleil.

9. Ô Véridiques Aswins, nous nous présentons à vous aujourd’hui avec des hymnes et des prières. N’oubliez pas le fils de Canwa.

10. Ô Aswins, faites pour moi comme vous avez fait quand, dans les demeures du sacrifice, vous avez été invoqués par Cakchîvân[22], par le Richi Vyaswa[23]. par Dîrghatamas[24], par Prithi[25] fils de Véna[26].

11. Venez, et soyez les gardiens de nos maisons, de nos gens[27] de nos animaux[28], de nos personnes. Venez dans notre demeure pour (y conserver) nos fils et nos petits-fils.

12. Ô Aswins, que vous soyez sur le même char qu’Indra, ou dans la même région que Vâyou ; que vous partagiez les plaisirs (du sacrifice) avec les Adityas et les Ribhous, ou que vous vous teniez sur les pas de Vichnou, (venez toujours à nous).

13. Ô Aswins, que je vous invoque aujourd’hui pour obtenir l’abondance, ou dans les combats pour avoir la force de vaincre, le secours des Aswins est ma première ressource.

14. Venez donc, ô Aswins, à ces sacrifices qui sont préparés pour vous. Voici les libations qui vous ont été présentées par Tourvasa et Yadou, et qui vous sont (aujourd’hui) offertes par les Canwas.

15. Ô (Dieux) sages et Véridiques, vous possédez de loin ou de près un remède (contre nos maux). C’est ainsi que (vous avez sauvé) la maison de Vimada[29]. Sauvez aussi celle de Vatsa.

16. Je m’éveille avec l’Hymne saint que je présente aux Aswins. Ô divine (Aurore), tu as donné aux mortels le signal de la prière et de l’offrande.

17. Ô pieuse Aurore, ô noble déesse, éveille les Aswins. Appelle tous les autres (dieux) au sacrifice, et provoque les abondantes Libations qui donnent l’ivresse.

18. Aurore, quand tu viens avec la lumière et que tu brilles avec le soleil, alors le char des Aswins arrive à la maison (du sacrifice), où les prêtres doivent accomplir leurs œuvres.

19. Au moment où la Libation brillante donne son lait, pareille à la mamelle de la vache, quand les ministres saints prononcent la prière, ô Aswins, (venez).

20. Ô (Dieux) sages, (venez) pour faire éclater votre force, votre puissance, votre courage, votre grandeur, votre générosité.

21. Quand vous siégez au foyer d’(Agni), notre père, entourés de nos prières et de nos holocaustes, (montrez-vous) dignes de nos louanges.


HYMNE VI.
Aux Aswins, par Pragatha, enfant de Canwa.
(Mètres : Anouchtoubh, Vrihatî, Vankti et Trichtoubh.)

1. Ô Aswins, que vous soyez sur notre large terre, ou dans la région resplendissante du ciel, ou bien encore au sein de l’Océan (aérien), venez de là dans la maison que nous avons préparée.

2. Vous avez béni le sacrifice de Manou. Faites de même pour le fils de Canwa. J’invoque Vrihaspati, tous les dieux, Indra et Vichnou, les Aswins à la course rapide.

3. J’invoque ces Aswins, ces héros vaillants que je captive par mes offrandes. Parmi les dieux, ce sont là nos amis les plus chers.

4. Vos sacrifices l’emportent sur tous les autres, donnant l’abondance à celui qui en est privé. Ô (Dieux) sages, qui aimez à boire le miel du soma, (je vous invoque) en vous présentant de pures offrandes.

5. Ô Aswins, trésor d’abondance, que vous soyez à l’occident ou à l’orient, je vous invoque. (Faites pour nous) comme pour Drouhyou, Anou, Tourvasa, Yadou. Ainsi venez à moi.

6. Ô Aswins, source de tous les biens, que vous soyez dans l’air, ou entre le ciel et la terre, ou que vous montiez sur votre char, (attirés) par les offrandes, venez (vers nous).


HYMNE VII.
À Agni, par Vatsa.
(Mètres : Gâyatrî et Trichtoubh.)

1. Ô Agni, tu es le gardien de nos rites. Tu es un Déva au milieu des mortels. Tu es dans les sacrifices l’objet de nos louanges.

2. Ô victorieux Agni, tu es dans nos cérémonies le héros de nos chants et le porteur de nos offrandes.

3. Ô Agni, possesseur de tous les biens, repousse nos ennemis ; (repousse) nos adversaires sans foi.

4. Ô possesseur de tous les biens, ce n’est pas au sacrifice d’un mortel, ton ennemi, que nous t’invitons à venir.

5. Mortels et sages, nous t’adressons tous nos hommages, (Dieu) immortel et possesseur de tous les biens.

6. Sages et mortels, nous appelons par nos chants à notre secours Agni, dieu et sage.

7. Ô Agni, que Vatsa par sa voix suppliante attire ton attention de la région supérieure.

8. Maître présent en plusieurs lieux, tu vois en même temps tous les hommes. Nous t’invoquons dans les combats.

9. Nous désirons la force et l’abondance, et au milieu des combats nous implorons le secours d’Agni, qui possède tant de richesses variées.

10. Tu siéges dans les sacrifices, pontife antique et vénérable, objet constant de nos louanges. Agni, charme ton propre corps (avec nos libations), et accorde-nous le bonheur.

  1. J’ai forcé un peu le sens de cette phrase, qui dans le texte ne semble signifier que « pendant trois jours et trois nuits. »
  2. Cette même légende est ailleurs racontée comme devant être rapportée à Atri. Voy. pages 73 et 114.
  3. Le soma est appelé mriga : c’est comme un gibier que poursuivent les prêtres. On dit encore qu’un Asoura est appelé de ce nom : cet Asoura est tué, et sert à former la libation, nommée par cette raison mriga.
  4. Tchédi est, dans les poëmes épiques, le nom d’une contrée, le Chandail. Le mot Tchêdya, qui est dans le texte, peut aussi bien signifier : roi de Tchédi.
  5. Je suppose que la fille de Rita ou du sacrifice, c’est la Louange ; c’est l’Hymne.
  6. Ce sont sans doute les libations.
  7. Ces autres vaches sont les hymnes et les prières.
  8. Je dois regarder ici Nahoucha comme le nom d’un roi antique. Cependant le lecteur verra s’il faut conserver à ce mot le sens que j’ai indiqué page 300, col. 1, note 1.
  9. Ce sont les lieux choisis pour le sacrifice.
  10. C’est un lac, dit-on, sur les bords duquel les sacrifices ont lieu. Voy. page 92.
  11. Ce sont les noms de deux princes, enfants d’Yadou.
  12. Voy. page 399, col. 2, note 3.
  13. Je crois que cette locution (prayati adware), que nous avons déjà vue, fait allusion ici au sacrifice de la moitié du jour, de midi.
  14. Nom d’un Râdjarchi, qui est le dieu Agni. Voyez page 74, etc., etc.
  15. Ce vers renferme le mot Ousanâ pour Ousanasâ. Voy. page 319, col. 1, note 2. Je pense que ce personnage, appelé Ousan, peut être confondu avec Ousanas, et que, sous un autre nom, c’est Vritra ou l’obscurité. Ce mot, venant de la racine vas qui a le sens de désirer, exprime l’avidité que le poëte prête aux Asouras, qui veulent ravir l’eau et la lumière.
  16. Le commentaire met ce pays dans le Couroukchétra.
  17. Le texte porte le mot nahouch, que le commentaire regarde comme synonyme de manouchya (homme). Pour le sens que je donne au mot nahouch, voy. page 300, col. 1, note 1. Dans le vers suivant, le mot antarikchât, au lieu de nahouchah, est accompagné du mot divah, que je regarde aussi comme une épithète. Il me semblerait que la différence qui existe entre ces deux expressions est que la première désigne le ciel pendant la nuit ; la seconde, le ciel pendant le jour.
  18. Ce mot est peut-être une épithète : possesseur de dix pâturages.
  19. Ce Richi s’appelle Sayou. Voy. page 110, etc.
  20. Le monde pendant la nuit est comparé à une caverne obscure (gouhâ). La lumière qui arrive découvre la surface concave du ciel, où l’on voit les trois pas des Aswins, qui sont, comme ceux de Vichnou, les trois points où se trouvent ces dieux au moment des trois sacrifices du matin, de midi, du soir. Le commentateur, au lieu des trois pas, traduit les trois roues des Aswins.
  21. Voy. page 45, col. 1, la fin de la note 1.
  22. Voy. page 50, col. 1, note 2.
  23. Nom d’un Richi.
  24. Voy. page 142, col. 1, note 4.
  25. Voy. page 110.
  26. Ce nom est connu dans les Pourânas comme appartenant à l’histoire la plus ancienne de l’Inde. Mais je ne crois pas qu’il y ait identité entre le Véna des Pourânas et le Véna ici mentionné, malgré le rapprochement fait par le commentaire entre Prithi et Prithivî. Le personnage, fils de Véna, dans les Pourânas, s’appelle Prithou. Voy. Vichnou-Pourêna, page 101 ; Harivansa, page 9, t. I.
  27. Je rends le mot paraspâh d’une manière tout à fait opposée au sens du commentateur.
  28. Le mot djagat, qui ordinairement se traduit par monde, a le sens de être marchant.
  29. Voy, pages 73, 110, etc., etc.