Sonnet (Corneille, VI)
LIX
Sonnet.
Ce sonnet, inséré par Granet dans les Œuvres diverses (p. 207), a été publié pour la première fois à la page 90 de la cinquième partie des Poésies choisies de Sercy. La page 91 est occupée par le Sonnet perdu au jeu, que sa date, exactement déterminée, nous a permis de placer plus haut, p. 140.
Usez moins avec moi du droit de tout charmer :
Vous me perdrez bientôt, si vous n’y prenez garde.
J’aime bien à vous voir, quoi qu’enfin j’y hasarde ;
Mais je n’aime pas bien qu’on me force d’aimer.
Cependant mon repos a de quoi s’alarmer :
Je sens je ne sais quoi dès que je vous regarde ;
Je souffre avec chagrin tout ce qui m’en retarde ;
Et c’est déjà sans doute un peu plus qu’estimer[1].
Ne vous y trompez pas : l’honneur de ma défaite
N’assure point d’esclave à la main qui l’a faite ;
Je sais l’art d’échapper aux charmes les plus forts ;
Et quand ils m’ont réduit à ne me plus défendre[2],
Savez-vous, belle Iris, ce que je fais alors ?
Je m’enfuis, de peur de me rendre.