Sonnets (Fuster)/Mysticisme

La bibliothèque libre.
Librairie Nouvelle ; Librairie Universelle (Anthologie Contemporaine. vol. 38) (p. 9).
◄  Retour
Tantale  ►


MYSTICISME



Ils d’un siècle où le beau n’est plus que le réel,
Où jusqu’au fond des pleurs on a jeté des sondes,
D’un siècle où l’analyse, en disséquant les mondes,
A désespéré l’homme et dépeuplé le ciel,

Je garde, ingrat rêveur, le regret éternel
De la vision bleue et des chimères blondes :
Volontaire captif des ténèbres profondes,
La lumière m’est dure et le vrai m’est cruel.

Je cherche des soupirs sous le rire des femmes ;
À travers les yeux clos je touche mieux les âmes ;
Ce sont les cœurs muets qui me parlent tout bas ;

Et j’aime éperdûment, comme au temps de l’Astrée,
Une femme, en secret à jamais adorée,
Qui s’appelle Climène et qui n’existe pas.