Souvenirs de Sainte-Hélène/02

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Texte établi par Vicomte du Couëdic de Kergoualer, Maurice Fleury, E. Paul (p. 7--).


AVANT-PROPOS DE L’AUTEUR


La bataille de Waterloo était perdue. Cette lutte suprême avait décidé du sort de l’Empereur.

Si ses armes avaient triomphé, cette victoire, précédée de son retour magique de l’île d’Elbe, l’aurait élevé plus haut qu’il n’avait jamais été ; mais, avec les Français surtout, il faut le succès.

Vainqueur en tant de batailles, Napoléon vaincu perdait son prestige. Son retour de l’île d’Elbe n’était plus qu’un coup de tête ; lui garder fidélité était taxé de folie ; se débarrasser de lui, au plus vite, fut le cri des partis qui, longtemps comprimés, trouvaient enfin jour à relever la tête. Ce fut aussi celui de beaucoup d’hommes qui lui devaient tout.

Waterloo n’eût peut-être pas tranché la question en faveur des Bourbons, si l’Empereur eût trouvé dans les Chambres l’appui que la gloire des quinze années de son règne lui donnait le droit d’espérer.

Étonné de l’abandon des représentants de la nation, il prit le parti d’abdiquer en faveur de son fils.

Il aurait pu, sans doute, faire un second 18 Brumaire en se rendant maître de quelques députés ; il pouvait aussi se retirer derrière la Loire avec les débris de sa vaillante armée ; mais il pouvait en résulter la guerre civile, et il crut devoir sacrifier son intérêt personnel à celui de la France, ainsi qu’il l’avait fait au traité de Châtillon. Du moment qu’il avait abdiqué, sa ruine entière était inévitable.



NAPOLÉON (vers 1815).