« Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/428 » : différence entre les versions

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Le Citoyen employait ses jours à vagabonder dans les rues, tirant sa moustache, roulant des yeux, acceptant et propageant des nouvelles lugubres ; et il n’avait que deux phrases : » Prenez garde, nous allons être débordés ! » ou bien : » Mais, sacrebleu ! on escamote la République ! » Il était mécontent de tout, et particulièrement de ce que nous n’avions pas repris nos frontières naturelles. Le nom seul de Lamartine lui faisait hausser les épaules. Il ne trouvait pas Ledru-Rollin, suffisant pour le problème », traita Dupont (de l’Eure) de vieille ganache ; Albert, d’idiot ; Louis Blanc, d’utopiste, Blanqui, d’homme extrêmement dangereux ; et, quand Frédéric lui demanda ce qu’il aurait fallu faire, il répondit en lui serrant le bras à le broyer :

— Prendre le Rhin, je vous dis, prendre le Rhin ! fichtre !

Puis il accusa la réaction.

Elle se démasquait. Le sac des châteaux de Neuilly et de Suresne, l’incendie des Batignolles, les troubles de Lyon tous les excès, tous les griefs, on les exagérait à présent, en y ajoutant la circulaire de Ledru-Rollin le cours forcé des billets de Banque, la rente tombée à soixante francs, enfin, comme iniquité suprême, comme dernier coup, comme surcroît d’horreur, l’impôt des quarante-cinq centimes ! — Et, par-dessus tout cela, il y avait encore le Socialisme ! Bien que ces théories, aussi neuves que le jeu d’oie, eussent été depuis quarante ans suffisamment débattues pour emplir des bibliothèques, elles épouvantèrent les bourgeois, comme une grêle d’aérolithes ; et on fut indigné, en vertu de