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qu’est-ce que la guerre?

5. — Modifications dans la réalité.

Ainsi, en se maintenant rigoureusement dans les limites abstraites de la notion de la guerre, l’esprit ne trouve de repos que lorsqu’il en arrive aux extrêmes, par la raison que, conflit de forces abandonnées à elles-mêmes et qui ne suivent d’autres lois que celles de leur nature, la guerre n’est elle-même qu’un extrême. Si donc, partant de son concept abstrait, nous cherchions à déterminer le point absolu vers lequel les fins de la guerre doivent tendre ainsi que les moyens qui y doivent conduire, les influences réciproques constantes que nous rencontrerions nous conduiraient incessamment à des extrêmes qui ne seraient qu’un jeu de notre imagination, et reposeraient à peine sur quelques subtilités logiques. Si l’on voulait enfin, isolant tous les obstacles d’un trait de plume, s’en tenir rigoureusement à la conséquence logique qu’il faut incessamment tendre à l’extrême et s’efforcer de le dépasser, on n’en arriverait qu’à édicter une loi écrite sans application possible dans la pratique.

En supposant même, d’ailleurs, que cet extrême absolu des efforts fût facile à déterminer, il faudrait encore convenir que l’esprit humain aurait peine à se soumettre à toutes ces rêveries de la logique. Dans maintes circonstances, il se produirait une dépense inutile de forces, qui rendrait aussitôt nécessaires des principes de compensation dans la gestion économique de l’État, et, dès lors, il faudrait une force de volonté qui ne serait plus en proportion avec le but à atteindre, et ne serait même pas réalisable, par la raison que la volonté humaine ne puise jamais sa force dans les subtilités de la logique.