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UNE SAINTE IGNORÉE



I l y a des siècles, dans un monastère de Colmar, vivait une humble sœur converse nommée sœur Agnès.

Très silencieuse, très douce, elle se portait de préférence aux bas emplois de la maison, mais aucun travail ne l’empêchait de méditer la Passion du Sauveur et, à ce souvenir terrible et sacré, les larmes baignaient souvent son visage.

Sa compassion était si vive, si poignante, qu’elle ne pouvait regarder une croix. Devant tous les crucifix, on voyait toujours sœur Agnès fermer les yeux et baisser son voile.

C’était la seule singularité de cette humble vie vouée aux rudes travaux. Cependant, on la signala à l’attention du provincial de l’ordre, quand il fit la visite du monastère.

Le religieux reprit sœur Agnès en plein chapitre.

Un grand crucifix d’un puissant réalisme, était suspendu dans la salle.

Le Dominicain commanda à la sœur d’aller s’agenouiller devant et, voile levé, de le regarder fixement.

La religieuse obéit ; mais, à peine avait-elle fixé les yeux sur le crucifix qu’elle porta les mains à son cœur, et tomba la face contre terre en étouffant un gémissement.

On accourut. On la releva. Mais tous les soins, pour la rappeler à la vie, furent inutiles. Elle n’avait pu regarder, sans mourir, l’image de Jésus crucifié.

On l’ensevelit à l’endroit même où elle avait rendu le dernier soupir, et l’on y éleva un monument.