Statistique et expérience (Simiand)/Conclusion
CONCLUSION
Que ce travail, même ingrat, est cependant nécessaire
Que cet ensemble de précautions pour n’opérer que sur de bonnes abstractions, pour étudier le phénomène se produisant, l’étudier tout entier, tel qu’il se comporte au juste, pour varier l’expérience, éliminer, déterminer ou discuter toutes les dépendances possibles, pour déterminer le type de relation à viser et mettre au point la technique à y adapter le plus efficacement, soient assez complexes et laborieuses, un peu plus complexes et laborieuses que de piquer dans un annuaire statistique ou même seulement dans un ouvrage de seconde ou de troisième main, quelques chiffres qu’on décore du nom de preuve statistique : cela n’est pas douteux.
Et encore avons-nous à peine touché ici à cette dernière part d’un travail statistique complet qui est l’interprétation des résultats obtenus, part dont l’importance n’a pas besoin d’être longuement signalée, mais qui appellerait elle-même des remarques nombreuses de méthode, débordant le cadre du présent essai, et qui, du reste, a souvent à faire état d’éléments ou de considérations non statistiques, autant ou plus que de raisons tirées de ces résultats statistiques ou des conditions de leur obtention.
Mais, sur des conclusions obtenues après toutes ces précautions prises et respectées, pourra-t-on dire encore que la statistique prouve tout et ne prouve rien ?
Qu’on ne trouve pas surtout ce terme trop long ou trop difficile à atteindre. Toutes ces précautions ne sont pas plus complexes ni plus laborieuses certainement, eu égard surtout à la difficulté de la matière, que celles dont s’entoure la moindre expérience de laboratoire avant d’être tenue pour probante.
Tout ce travail, si ingrat qu’il puisse paraître, est nécessaire, en tout cas, à des conclusions
dûment établies ; et il peut finalement
(j’en pourrai, je crois, donner des exemples),
être fécond et payer de la peine qui y aura
été prise, — plus, du moins, que ne le pourront
jamais des emplois de la statistique plus
faciles, mais sans critique, sans fondement, et
sans volonté suffisante de science et de vérité.