Suréna/Au Lecteur

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Œuvres de P. Corneille, Texte établi par Ch. Marty-LaveauxHachettetome VII (p. 460).
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AU LECTEUR.


Le sujet de cette tragédie est tiré de Plutarque et d’Appian Alexandrin[1]. Ils disent tous deux que Suréna[2] étoit le plus noble, le plus riche, le mieux fait, et le plus vaillant des Parthes[3]. Avec ces qualités, il ne pouvoit manquer d’être un des premiers hommes de son siècle ; et si je ne m’abuse, la peinture que j’en ai faite ne l’a point rendu méconnoissable : vous en jugerez.


  1. Voyez la Vie de Crassus de Plutarque. Quant à Appien, s’il a réellement écrit l’histoire de la guerre des Parthes, comme il promet de le faire au chapitre xviii du livre II de ses Guerres civiles, où il mentionne en deux mots la défaite et la mort de Crassus, cette partie de son ouvrage n’est point parvenue jusqu’à nous. Le livre de la Guerre des Parthes qu’on a mis sous son nom est tout simplement un extrait des Vies de Crassus et d’Antoine, de Plutarque.
  2. Voltaire reproche à Corneille de s’être mépris : « Suréna, dit-il, n’est point un nom propre ; c’est un titre d’honneur, un nom de dignité. » Cette critique ne fait que reproduire l’opinion adoptée par tous les modernes sur la foi de Zosime ; mais cette opinion est une erreur. Saint-Martin, dans ses notes sur l’Histoire du bas empire de le Beau (tome III, p. 79), a prouvé, par le témoignage des auteurs arméniens, que Suréna était bien un nom propre.
  3. « Suréna n’estoit point homme de basse ou petite qualité, ains le second des Parthes après le Roy, tant en noblesse qu’en richesse et en réputation ; mais en vaillance, suffisance et expérience au fait des armes, le premier personnage qui fust de son temps entre les Parthes, et au demourant en grandeur et beaulté de corps ne cédant à nul autre. » (Plutarque, Vie de Crassus, chapitre xxi, traduction d’Amyot.) — Un peu plus loin, dans le même chapitre, Plutarque dit que Suréna n’avait pas encore trente ans.