Tableau de Paris/163

La bibliothèque libre.

CHAPITRE CLXIII.

Du Persifflage.


Le persifflage est une raillerie continue, sous le voile trompeur de l’approbation : on s’en sert pour conduire la victime dans toutes les embuscades qu’on lui dresse ; & l’on amuse ainsi une société entiere, aux dépens de la personne qui ignore qu’on la traduit en ridicule, abusée qu’elle est par les dehors ordinaires de la politesse.

Ce n’est point là de la bonne plaisanterie. La Bruyere a dit : railler heureusement, c’est créer. Mais quel esprit y a-t-il à abuser de la simplicité ou de la confiance d’un homme qui s’offre aux coups sans le savoir, & qui tombe d’autant plus profondément dans le piege, qu’il le soupçonne moins ?

Le persiffleur est un homme froid & fatigant à la longue. Cette maniere de railler est donc pitoyable, parce qu’il n’y a point d’égalité. Chaque société a son railleur & son ton de raillerie ; mais il n’y a rien de si rare qu’une plaisanterie légere, fine, enjouée & raisonnable.