Théorie de la musique (Danhauser, 1889)/III/15
15e Leçon
DE LA TRANSPOSITION.
168. Transposer c’est exécuter ou transcrire un morceau de musique dans un autre ton que celui dans lequel il est écrit.
La transposition a pour but de placer dans une tonalité qui convient à une voix ou à un instrument, un morceau écrit trop haut ou trop bas pour cette voix ou pour cet instrument. Ainsi, un air écrit pour une voix de Soprano, doit être abaissé pour être chanté par une voix de Contralto ; écrit pour une voix de Basse, il doit être élevé pour être chanté par une voix de Ténor.
169. Il va deux moyens de transposer :
- En changeant la position des notes sur la portée. (Employé pour la transposition en écrivant.)
- En changeant la clé. (Employé pour la transposition en lisant.)
TRANSPOSITION EN CHANGEANT LA POSITION DES NOTES. (en écrivant)
170. Cette transposition est la plus facile. Il suffit, pour l’opérer, de copier chaque note du morceau à l’intervalle auquel on veut transposer, soit au-dessus, soit au-dessous.
Il faut préalablement placer à la clé l’armure du ton dans lequel on transpose ; puis, en écrivant, on devra parfois modifier quelques altérations accidentelles. Ces modifications n’offriront pas de difficulté, puisqu’on aura le temps de la réflexion.
Transposer 1 ton au-dessous ce fragment qui est en ut majeur, c’est l’écrire en si majeur.
Il faudra donc :
1o Placer à la clé l’armure du ton de si majeur, soit : si et mi .
2o Copier toutes les notes 1 ton au-dessous, soit :
Transposer 1 ton au-dessus le même fragment en ut, c’est l’écrire en ré majeur.
Il faudra donc :
1o Placer à la clé l’armure du ton de ré majeur, soit : fa et ut .
2o Copier toutes les notes 1 ton au-dessus, soit :
TRANSPOSITION EN CHANGEANT LA CLÉ. (en lisant.)
171. Cette transposition qui exige l’habitude de lire avec toutes les clés
est plus difficile que la précédente.
Pour l’opérer il faut :
1o Trouver la clé dont l’emploi permet de lire dans le ton voulu.
2o Supposer à la clé, l’armure du ton dans lequel on transpose.
3o Connaître d’avance les notes devant lesquelles, par suite du changement d’armure, les altérations accidentelles devront être modifiées.
Examinons tour à tour chacune de ces trois opérations.
172. Clé à employer. Pour trouver la clé au moyen de laquelle on lira dans le ton voulu, il faut chercher celle qui donnera à la note, tonique du morceau écrit, le nom de la tonique du morceau transposé.[1]
Pour transposer ce fragment écrit en ut, une tierce au-dessous, c’est-à-dire en la, il faut choisir la clé qui donnera à l’ut, tonique de ce fragment, le nom de la, tonique du ton dans lequel on transpose. Cette clé est la clé d’ut. sur la 1re ligne, soit :
La pratique des différentes clés rend facile cette opération.
173. Armure du ton dans lequel on transpose. Il suffit de placer mentalement, après la clé, l’armure du ton dans lequel on transpose. Ainsi, dans l’exemple précédent en ut majeur transposé en la majeur, on supposera 3 dièses à la clé. (armure du ton de la majeur.)
174. Notes devant lesquelles les altérations accidentelles devront être modifiées. Connaître d’avance les notes devant lesquelles les altérations accidentelles devront être modifiées, est la véritable difficulté de la transposition ; cependant, il y a des règles précises dont nous allons faire mention, et qui applaniront cette difficulté.
175. Règle 1re — Si le ton dans lequel on transpose prenait plus de dièses ou moins de bémols, (ce qui revient au même), que le morceau écrit, autant il y aurait de dièses en plus ou de bémols eu moins, autant il y aurait de notes prises dans l’ordre des dièses (fa, ut, sol, ré, la, mi, si.) devant lesquelles les altérations accidentelles s’exécuteraient (dans la transposition) 1 demi-ton chromatique au-dessus. Le devenant , le devenant , le devenant , et le devenant .
Les accidents placés devant les autres notes ne subiraient aucune modification.
APPLICATION DE CETTE RÈGLE
(BACH) |
Étant donné ce fragment en si majeur, à transposer en sol majeur, après avoir supposé la clé d’ut sur la 1re ligne, puis, 1 dièse à la clé au lieu de 2 bémols : on voit que la différence entre l’armure du ton écrit et l’armure supposée est de 2 bémols en moins et 1 dièse eu plus, (équivalant à 3 altérations ascendantes en plus.[2] En conséquence, les accidents placés devant les 3 premières notes prises dans l’ordre des dièses, c’est à dire fa, ut, sol devront être élevés d’un demi-ton.
En comparant le fragment écrit en si avec le même fragment transposé en sol, on remarquera que tous les accidents, qui, (dans la transposition en sol), sont placés devant les notes fa, ut, sol, sont interprétés 1 demi-ton au-dessus.
170. Règle 2e — Si le ton dans lequel on transpose prenait plus de bémols ou moins de dièses, (ce qui revient au même), que le morceau écrit, autant il y aurait de bémols en plus ou de dièses en moins, autant il y aurait de notes prises dans l’ordre des bémols (si, mi, la, ré, sol, ut, fa) devant lesquelles les altérations accidentelles s’exécuteraient (dans la transposition) 1 demi-ton chromatique au-dessous. Le devenant , le devenant , le devenant , et le devenant .
Les accidents placés devant les autres notes ne subiraient aucune modification.
APPLICATION DE CETTE RÈGLE.
(CHERUBINI) |
Étant donné ce fragment en sol majeur, à transposer en fa majeur, après avoir supposé la clé d’ut sur la 4e ligne, puis, 1 bémol à la clé au lieu de 1 dièse : on voit que la différence entre l’armure du ton écrit et l’armure supposée est de 1 dièse en moins et 1 bémol en plus, (équivalant à 2 altérations descendantes en plus.) En conséquence, les accidents placés devant les 2 premières notes prises dans l’ordre des c’est à dire devant si et mi, devront être abaissés d’un demi-ton.
En comparant le fragment écrit en sol avec le même fragment transposé en fa, on remarquera que tous les accidents qui, (dans la transposition en fa), sont placés devant les notes si et mi, sont interprétés 1 demi-ton au-dessous.[3]
REMARQUE. — On remarquera que ces deux règles se corroborent, la seconde n’étant que la proposition inverse de la première. Des causes exactement inverses devant absolument produire des effets exactement inverses.
Transposez en changeant la position des notes (§ 170) et dans les tons de sol majeur — si majeur — mi majeur et ré majeur, les fragments ci-dessous.
Transposez en changeant la clé (§ 171 et suivants) et dans les tons de ré majeur — ut majeur — la majeur et ré majeur, le fragment ci-dessous.
Transposez en changeant la clé et dans les tons de ré mineur — si mineur — sol mineur et fa mineur, le fragment suivant.
- ↑ Dans ce changement de clés, la clé sert à indiquer le nom de la note, mais n’exprime pas toujours sa hauteur dans l’échelle musicale.
- ↑ Deux bémols en moins et un dièse en plus équivalent à 3 altérations ascendantes en plus : car, si dans une modulation de si majeur en sol majeur, on changerait l’armure de la clé, il faudrait avant le fa (armure du ton de sol) placer deux bécarres pour annihiler le si et le mi (armure du ton de si , voir § 166). Or, le bécarre élevant une note bémolisée est un véritable accident ascendant.
- ↑ Pour la transposition de 1 demi-ton chromatique et pour une difficulté qu’elle amène quelquefois, voir la note (j) à la fin du volume.