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Thresor de la langue françoise/Affronter

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Affronter, act. acut. Est composé de ad et fronter verbe inusité, et signifie assaillir front à front, se mettre front à front et teste à teste devant aucun pour contester à luy, Frontem fronti opponere, Aggredi audacter, conserere frontem, contra confidenter stare. Et parce que la honte a son siege au front et que tels qui affrontent aucun semblent en estre privez, et eshontez, on dit affronter aucun, pour decevoir impudemment aucun, Perfricta fronte aliquem fraude petere.

Un affronteur et abuseur, Planus, plani, priore corr. Impostor, Supplantator simplicitatis.

Affrontailles, f. penac. pluriel. Car n’est usité au nombre singulier, et est mot usité és designations des abboutissans d’un heritage soit urbain soit rural, quand ledit heritage de l’un des deux bouts affronte à plusieurs heritages appartenans à divers Seigneurs, car tel abboutissant est appelé en pluriel Affrontailles, c’est à dire touchant du large et estendue de son front, à maints heritages qui ne sont à mesme Seigneur, ains à plusieurs et divers, selon ce on dict, une piece de terre (et au semblable de tout autre heritage) tenant d’une part à tel, d’autre à tel, (qui sont les flancs d’iceluy heritage) abboutissant d’un bout à tel, d’autre à plusieurs affrontailles, ou aux affrontailles de plusieurs. Ce mot est procedé de ce qu’en telles designations d’abboutissans les Latins disent In fronte ; comme se void és designations des sepulchres des anciens Romains, lesquels voulans prescrire combien de lieu de leur champ, ou tels sepulchres estoient eslevez, estoit fait religieux (ainsi qu’ils parloient) faisoient graver en une pierre servant au frontispice, tels mots ou semblables : In fronte pedes duodecim, Qui estoit l’abboutissant joignant le grand chemin Royal ou passant et traverscoin, que le François dit le bout d’enhaut (si quelqu’un neantmoins ne veut ce bout d’enhaut, ou par haut, estre prins pour le bout du champ qui est tourné au nort et à la bise, pour cause de l’elevation du nort sur nostre hemisphere, tout ainsi qu’au contraire il vueille prendre ces mots d’embas, ou par bas, pour le contrebout dudit champ qui est tourné au Sud pour la depression d’iceluy sous nostre hemisphere, tout ainsi qu’en Languedoc et païs adjacens, on dit d’aure et de marin pour les deux) In agro, ou bien a retro pedes duodecim, Qui estoit l’abboutissant d’embas, resultans les deux tenans, de la largeur prescripte esdits deux abboutissans. Mais neantmoins le François n’en use ainsi precisement que le Latin pour le seul bout du champ qui affronte au chemin, ains pour tout abboutissant soit d’enhaut ou d’embas qui affronte à plusieurs. Et ne se faut arrester à ce qu’és prescriptions des largeur et longueur de tels sepulchres, (estant chacun d’iceux eslevé dans le champ appartenant au Seigneur, qui ainsi le faisoit construire, et partant tenant des deux parts ou costez, et abboutissant des deux bouts à luy mesmes) n’estoit par ces mots, In fronte, et in agro, ou a retro, designé ce que la Loy, Forma Censuali. ff. de censib. dit en ces mots, quos duos proximos vicinos habeat, ains la seule quantité du champ, qui par telle construction de sepulchre, et illation d’un mort devenoit religieuse ; car ledit mot Affrontailles a esté prins et tiré de là. Aussi le Languedoc, et ceux des païs adjacens, disent, confrontar une piece de terre, pource que le François dit, la mettre par tenans et abboutissans.