Traité élémentaire de la peinture/164

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Traduction par Roland Fréart de Chambray.
Texte établi par Jean-François DetervilleDeterville, Libraire (p. 139-140).


CHAPITRE CXIV.

Comment un Peintre doit mettre en pratique la perspective des couleurs.

Pour bien mettre en pratique cette perspective dans le changement, l’affoiblissement et la dégradation des couleurs, vous prendrez de cent en cent brasses quelques termes fixes dans la campagne, comme sont des arbres, des maisons, des hommes ou quelque autre lieu remarquable ; et si c’est, par exemple, un arbre, vous aurez un verre arrêté bien ferme, et votre œil demeurant ferme dans la même situation, dessinez sur ce verre un arbre, suivant le contour de celui que vous avez devant les yeux, puis retirez-vous en arrière jusqu’à ce que l’arbre naturel vienne presqu’à paroître égal à celui que vous avez dessiné ; après quoi colorez votre dessin de telle sorte, que par sa couleur et par sa forme il ressemble à l’arbre naturel que vous voyez au travers de votre verre, et que tous les deux, en fermant un œil, vous paroissent peints, et également éloignés de votre œil ; continuez cette même règle à l’égard des autres arbres de la seconde et de la troisième distance de cent en cent brasses, d’espace en espace, et que ces études vous servent comme une chose fort utile, à quoi vous devez avoir recours, en travaillant ; cela vous sera d’un grand usage pour les lointains : mais je trouve par l’observation que j’en ai faite, que le second objet diminue de du premier, lequel en seroit éloigne de vingt brasses.