Traité de Vienne (1815)/Articles 85 à 104

La bibliothèque libre.
Anonyme
Articles 85 à 104 (Italie)
Actes du Congrès de Vienne, publiés d’après un des originaux déposé aux archives du département des affaires étrangèresImprimerie royale (p. 61-71).

Article 85.[modifier]

Les limites des États de S. M. le Roi de Sardaigne, seront :

Du côté de la France, telles qu’elles existaient au 1er janvier 1792, à l’exception des changements portés par le Traité de Paris du 30 mai 1814.

Du côté de la Confédération Helvétique, telles qu’elles existaient au 1er janvier 1792, à l’exception du changement opéré par la cession faite en faveur du Canton de Genève, telle que cette cession se trouve spécifiée dans l’article 80 du présent acte.

Du côté des États de S. M. l’Empereur d’Autriche, telles qu’elles existaient au 1er janvier 1792 ; et la Convention conclue entre LL. MM. l’Impératrice Marie-Thérèse et le Roi de Sardaigne, le 4 octobre 1751, sera maintenue, de part et d’autre, dans toutes ses stipulations.

Du côté des États de Parme et de Plaisance, la limite, pour ce qui concerne les anciens États de S. M. le Roi de Sardaigne, continuera a être telle qu’elle existait au 1er Janvier 1792.

Les limites des ci-devant États de Gênes et des pays nommés fiefs impériaux, réunis aux États de S. M. le Roi de Sardaigne d’après les articles suivants, seront les mêmes qui, le 1er Janvier 1792, séparaient ces pays des États de Parme et de Plaisance, et de ceux de Toscane et de Massa.

L’ile de Capraja ayant appartenu à l’ancienne République de Gênes, est comprise dans la cession des États de Gênes à S. M. le Roi de Sardaigne.

Article 86.[modifier]

Les États qui ont composé la ci-devant République de Gênes, sont réunis à perpétuité aux États de S. M. le Roi de Sardaigne, pour être, comme ceux-ci, possédés par elle en toute souveraineté, propriété et hérédité, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture dans les deux branches de sa maison, savoir : la branche Royale et la branche de Savoie-Carignan.

Article 87.[modifier]

S. M. le Roi de Sardaigne joindra. à ses titres actuels celui de Duc de Gênes.

Article 88.[modifier]

Les Génois jouiront de tous les droits et privilèges spécifiés dans l’acte intitulé : Conditions qui doivent servir de bases à la réunion des États de Gênes à ceux de S. M. Sarde ; et le dit acte, tel qu’il se trouve annexé à ce Traité général, sera considéré comme partie intégrante de celui-ci, et aura la même force et valeur que s’il était textuellement inséré dans l’article présent.

Article 89.[modifier]

Les pays nommés fiefs impériaux, qui avaient été réunis à la ci-devant République Ligurienne, sont réunis définitivement aux États de S. M. le Roi de Sardaigne, de la même manière que le reste des États de Gênes ; et les habitants de ces pays jouiront des mêmes droits et privilèges que ceux des États de Gênes désignés dans l’article précédent.

Article 90.[modifier]

La faculté que les Puissances signataires du Traité de Paris du 30 mai 1814 se sont réservée par l’article 3 dudit Traité, de fortifier tel point de leurs États qu’elles jugeront convenable à leur sûreté, est également réservée sans restriction à S. M. le Roi de Sardaigne.

Article 91.[modifier]

S. M. le Roi de Sardaigne cède au Canton de Genève les districts de la Savoie désignés dans l’article 80 ci-dessus, et aux conditions spécifiées dans l’acte intitulé : Cession par S. M. le Roi de Sardaigne au Canton de Genève. Cet acte sera considéré comme partie intégrante du présent Traité général, auquel il est annexé, et aura la même force et valeur que s’il était textuellement dans l’article présent.

Article 92.[modifier]

Les provinces du Chablais et du Faucigny, et tout le territoire de Savoie au nord d’Ugine, appartenant à S. M. le Roi de Sardaigne, feront partie de la neutralité de la Suisse, telle qu’elle est reconnue et garantie par les Puissances.

En conséquence, toutes les fois que les Puissances voisines de la Suisse se trouveront en état d’hostilité ouverte ou imminente, les troupes de S. M. le Roi de Sardaigne qui pourraient se trouver dans ces Provinces, se retireront, et pourront à cet effet passer par le Vallais, si cela devient nécessaire ; aucunes autres troupes armées d’aucune autre Puissance ne pourront traverser ni stationner dans les provinces et territoires susdits, sauf celles que la Confédération Suisse jugerait à propos d’y placer ; bien entendu que cet état de choses ne gêne en rien l’administration de ces pays, où les agents civils de S. M. le Roi de Sardaigne pourront aussi employer la garde municipale pour le maintien du bon ordre.

Article 93.[modifier]

Par suite des renonciations stipulées dans le Traité de Paris du 30 mai 1814, les Puissances signataires du présent Traité reconnaissent S. M. l’Empereur d’Autriche, ses héritiers et successeurs, comme souverain légitime des provinces et territoires qui avaient été cédés, soit en tout, soit en partie, par les Traités de Campo-Formio de 1797, de Lunéville de 1801, de Presbourg de 1805, par la Convention additionnelle de Fontainebleau de 1807, et par le Traité de Vienne de 1809, et dans la possession desquels provinces et territoires S. M. I. et R. A. est rentrée par suite de la dernière guerre, tels que 1’lstrie tant Autrichienne que ci-devant Vénitienne, la Dalmatie, les îles ci-devant Vénitiennes de l’Adriatique, les bouches du Cattaro, la ville de Venise, les lagunes, de même que les autres provinces et districts de la terre ferme des États ci-devant vénitiens sur la rive gauche de l’Adige, les Duchés de Milan et de Mantoue, les Principautés de Brixen et de Trente, le Comté de Tyrol, le Vorarlberg, le Frioul Autrichien, le Frioul ci-devant Vénitien, le territoire de Montefalcone, le gouvernement et la ville de Trieste, la Carniole, la Haute-Carinthie, la Croatie à la droite de la Save, Fiume et le littoral hongrois, et le district de Castua.

Article 94.[modifier]

S. M. 1. et R. A. réunira à sa monarchie, pour être possédés par elle et ses successeurs en toute propriété et souveraineté :

1° Outre la partie de la terre ferme des États Vénitiens dont il a été fait mention dans l’article précédent, les autres parties desdits États, ainsi que tout autre territoire qui se trouve situé entre le Tessin, le Pô, et la mer Adriatique ;

2° Les vallées de la Valteline, de Bormio et de Chiavenna ;

3° Les territoires ayant formé la ci-devant république de Raguse.

Article 95.[modifier]

En conséquence des stipulations arrêtées dans les Articles précédents, les frontières des États de S. M. I. et R. A. en Italie seront :

1° Du côté des États de S. M. le Roi de Sardaigne, telles qu’elles étaient au 1er janvier 1792 ;

2° Du côté des États de Parme, Plaisance et Guastalla, le cours du Pô, la ligne de démarcation. suivant le thalweg de ce fleuve ;

3° Du côté des États de Modène, les mêmes qu’elles étaient au 1er janvier 1792 ;

4° Du côté des États du Pape, le cours du Pô jusqu’à l’embouchure du Goro ;

5° Du côté de la Suisse, l’ancienne frontière de la Lombardie, et celle qui sépare les vallées de la Valteline, de Bormio et Chiavenna, des cantons des Grisons et du Tessin. Là où le thalweg du Pô constituera la limite, il est statué que les changements que subira par la suite le cours de ce fleuve, n’auront à l’avenir aucun effet sur la propriété des îles qui s’y trouvent.

Article 96.[modifier]

Les principes généraux adoptés par le Congrès de Vienne pour la navigation des fleuves, seront appliqués à celle du Pô. Des commissaires seront nommés par les États riverains, au plus tard dans le délai de trois mois après la fin du Congrès, pour régler tout ce qui a rapport à l’exécution du présent article.

Article 97.[modifier]

Comme il est indispensable de conserver à l’établissement connu sous le nom de Mont-Napoléon à Milan, les moyens de remplir ses obligations envers ses créanciers, il est convenu que les biens-fonds et autres immeubles de cet établissement situés dans des pays qui, ayant fait partie du ci-devant Royaume d’Italie, ont passé depuis sous la domination de différents Princes d’Italie, de même que les capitaux appartenant audit établissement et placés dans ces différents pays, resteront affectés à la même destination.

Les redevances du Mont-Napoléon non fondées et non liquidées, telles que celles dérivant de l’arriéré de ses charges ou de tout autre accroissement du passif de cet établissement, seront réparties sur les territoires dont se composait le ci-devant Royaume d’Italie ; et cette répartition sera assise sur les bases réunies de la population et du revenu. Les Souverains desdits pays nommeront, dans le terme de trois mois à dater de la fin du Congrès, des commissaires pour s’entendre avec les commissaires autrichiens sur ce qui a rapport à cet objet. Cette Commission se réunira à Milan.

Article 98.[modifier]

S. A. R. l’Archiduc François d’Este, ses héritiers et successeurs, posséderont en toute propriété et souveraineté les Duchés de Modène, de Reggio et de Mirandole, dans la même étendue qu’ils étaient à l’époque du Traité de Campo-Formio. S. A. R. l’Archiduchesse Marie-Béatrix d’Este, ses héritiers et successeurs, posséderont en toute souveraineté et propriété le Duché de Massa et la Principauté de Carrare, ainsi que les fiefs impériaux dans la Lunigiana. Ces derniers pourront servir à des échanges ou autres arrangements de gré à gré avec S. A. I, le Grand-Duc de Toscane, selon la convenance réciproque. Les droits de succession et réversion établis dans les branches des archiducs d’Autriche, relativement aux Duchés de Modène, de Reggio et Mirandole, ainsi que des Principautés de Massa et Carrera, sont conservés.

Article 99.[modifier]

S. M. l’Impératrice Marie-Louise possédera en toute propriété et souveraineté les Duchés de Parme, de Plaisance et de Guastalla, à l’exception des districts enclavés dans les États de S. M. I. et R. A. sur la rive gauche du Pô. La réversibilité de ces pays sera déterminée de commun accord entre les Cours d’Autriche, de Russie, de France, d’Espagne, d’Angleterre et de Prusse, toutefois ayant égard aux droits de réversion de la Maison d’Autriche et de S. M. le Roi de Sardaigne sur lesdits pays.

Article 100.[modifier]

S. A. I. et R. l’archiduc Ferdinand d’Autriche est rétabli, tant pour lui que pour ses héritiers et successeurs, dans tous les droits de souveraineté et propriété sur le Grand-Duché de Toscane et ses dépendances, ainsi que S. A. I. les a possédés antérieurement au Traité de Lunéville.

Les stipulations de l’article 2, du Traité de Vienne du 3 octobre 1735, entre l’Empereur Charles VI et le Roi de France, auxquelles accèdent les autres Puissances, sont pleinement rétablies en faveur de S. A. I. et ses descendants, ainsi que les garanties résultant de ces stipulations.

Il sera en outre réuni audit Grand-Duché, pour être possédés en toute propriété et souveraineté par S. A. I. et R. le Grand-Duc Ferdinand et ses héritiers et descendants :

1° L’État des Présides ;

2° La partie de l’île d’Elbe et de ses appartenances qui était sous la suzeraineté de S. M. le Roi des Deux Siciles avant l’année 1801 ;

3° La suzeraineté et souveraineté de la Principauté de Piombino et ses dépendances. Le Prince Ludovisi Buoncompagni conservera, pour lui et ses successeurs légitimes, toutes les propriétés ; que sa famille possédait dans la Principauté de Piombino, dans l’île d’Elbe et ses dépendances, avant l’occupation de ces pays par les troupes françaises en 1799, y compris les mines, usines et salines. Le prince Ludovisi conservera également le droit de pêche, et jouira d’une exemption de droits parfaite, tant pour l’exportation des produits de ses mines, usines, salines et domaines que pour l’importation des bois et autres objets nécessaires pour l’exploitation on des mines. Il sera de plus indemnisé par S. A. I. le Grand-Duc de Toscane, de tous les revenus que sa famille tirait des droits régaliens avant l’année 1801. En cas qu’il survint des difficultés dans l’évaluation de cette indemnité, les parties intéressées s’en rapporteront à la décision des Cours de Vienne et de Sardaigne.

4° Les ci-devant fiefs impériaux de Vernio, Montauto et Monte Santa-Maria, enclavés dans les États Toscans.

Article 101.[modifier]

La Principauté de Lucques sera possédée en toute souveraineté par S M. l’Infante Marie-Louise et ses descendants en ligne directe et masculine. Cette Principauté est érigée en Duché, et conservera une forme de gouvernement basée sur les principes de celle qu’elle avait reçue en 1805. Il sera ajouté aux revenus de la Principauté de Lucques, une rente de cinq cent mille francs, que S. M. l’Empereur d’Autriche, et S. A. 1. le Grand-Duc de Toscane s’engagent à payer régulièrement, aussi longtemps que les circonstances ne permettront pas de procurer à S. M. l’Infante Marie Louise et à son fils et ses descendants, un autre établissement. Cette rente sera spécialement hypothéquée sur les seigneuries, en Bohème, connues sous le nom de Bavaro-.Palatines qui, dans le cas de réversion du Duché de Lucques au Grand-Duché de Toscane, seront affranchies de cette charge, et rentreront dans le domaine particulier de S. M. Impériale et Royale Apostolique.

Article 102.[modifier]

Le Duché de Lucques sera réversible au Grand-Duc de Toscane, soit dans le cas qu’il devînt vacant par la mort de S. M. l’Infante Marie-Louise, ou de son fils don Carlos et de leurs descendants mâles et directs, soit dans celui que l’Infante MarieLouise ou ses héritiers directs obtinssent un autre établissement ou succédassent à une autre branche de leur dynastie.

Toutefois, le cas de réversion échéant, le Grand-Duc de Toscane s’engage à céder, dès qu’il entrera en possession de la Principauté de Lucques, au Duc de Modène, les territoires suivants : 1° les districts toscans de Fivizano, Pletra-Santa et Barga ; et 2° les districts Lucquois de Castiglione et Gallicano, enclavés dans les États de Modéne, ainsi que ceux de Minucciano et Monte-Ignose, contigus au pays de Massa.

Article 103.[modifier]

Les Marelles, avec Camerino et leurs dépendances, ainsi que le Duché de Bénévent et la Principauté de Ponte-Corvo, sont rendus au Saint-Siége. Le Saint-Siége rentrera en possession des légations de Ravenne, de Bologne et de Ferrare, à l’exception de la partie du Ferrarois, située sur la rive gauche du Pô. S. M.I. et R.A. et ses successeurs auront droit de garnison dans les places de Ferrare et Commacho. Les habitants des pays qui rentrent sous la domination du Saint-Siége par suite des stipulations du Congrès, jouiront des effets de l’article 16 du Traité de Paris du 30 mai 1814.

Toutes les acquisitions faites par les particuliers en vertu d’un titre reconnu légal par les lois actuellement existantes, sont maintenues, et les dispositions propres à garantir la dette publique et le payement des pensions seront fixées par une convention particulière entre la Cour de Rome et celle de Vienne.

Article 104.[modifier]

S. M. le Roi Ferdinand IV est rétabli, tant pour lui que pour ses héritiers et successeurs, sur le trône de Naples, et reconnu par les Puissances comme Roi du Royaume des Deux-Siciles.