Traité des instruments de martyre et des divers modes de supplice employés par les païens contre les chrétiens/Chapitre IV

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Traduction par un inconnu, sur les originaux italien et latin.
Charles Carrington (p. 69-99).
CHAPITRE IV Des divers Instruments employes pour flageller les Saints Martyrs.

AYANT expose les diverses sortes d entraves et de griffes ainsi que la nature du Cheval de Bois, nous devons maintenant nous occuper de nommer les differentes especes de verges et de fouets.

Car c etait une habitude frequente chez les paiens (comme il est demontre a plusieurs reprises par diverses citations tirees de l Histoire des Saints, en particulier celle de saint Crescentianus, de sainte Regina, vierge et martyre, et de l eveque Bassus), apres avoir lie les chetiens au cheval , de les frapper impitoyablement avec des cordes, des verges, des fouets et autres instruments semblables ; ensuite de les dechirer avec des griffes de fer ou de pareilles inventions ; et enfin de les bruler a l aide de torches, de tisons enflammes ou de plaques de metal rougies au feu.

En consequence, nous nous proposons, en premier lieu, de parler des instruments pour fouetter ; en second lieu des pinces, griffes et etrilles de fer ; et enfin des torches, tisons et plaques brulantes.

Maintenant, quant aux premiers, vous dcvez savoir que ceux-ci etaient en usage chez les anciens sous diverses formes, telles que fouets, verges, courroies, cordes, et gourdins.

DES FOUETS

Plaute, Epidicus, parle des fouets, dans les termes suivants :
Ita non omnes ex cruciatu poterunt eximere Epidicum.
Periphanem emere lora vidi.

Terence aussi, Adelphi :
Nam si molestus pergis esse jam intro abripiere, atque ibi,
Usque ad necem operiere loris.

Cicéron également, Phllippiques :
Cum eum jussu Antonii in convivii servi publici loris caeciderunt.

« Ainsi tous ses amis ne sauveront pas Epidicus ; j’ai vu Periphanes acheter des fouets. »

« Car, si vous continuez à être ennuyeux, vous serez jeté hors des portes, et là fouetté à mort. »

« Alors les esclaves publics les flagellèrent à coups de fouet, un jour de fête, sur les ordres d’Antonin. »

On trouve des passages semblables cités à diverses reprises dans les Actes des Martyrs, ainsi que dans le compte rendu sur saint Asterius et ses compagnons de martyre, de sainte Euphémie, vierge et martyre, et de beaucoup d’autres confesseurs du Christ des deux sexes. Ces fouets en usage chez les anciens étaient des lanières de cuir employées habituellement (comme il est évident d’après les passages cités de Plaute et de Térence) pour les corrections infligées aux esclaves. Aussi cela ne nous doit surprendre en aucune façon si nous trouvons de fréquents exemples, dans

les Histoires des Martyrs, de fidèles adeptes du Christ ayant été
Fig. XII
Un Martyr, fortement lié par des courroies ou lanières, violemment tiré dans toutes les directions, et ainsi déchiré membre par membre.


frappés de coups de fouet, car ils étaient toujours regardés parmi Ies Anciens comme des plébéiens et des misérables de la plus basse condition. Ces mêmes fouets ne servaient pas seulement (comme il est écrit ci-dessus) à lier les Martyrs et à les frapper ; mais même à les mettre en pièces, comme le temoignent les Actes des Saints Martyrs, concernant la passion de Tyrsus, où nous lisons : « Immédiatement son esprit (celui du gouverneur) fut rempli d’une grande colère et il ordonna à certains robustes jeunes hommes au caractère sauvage et féroce de faire leur office. Alors, après l’avoir lié avec des courroies, attachées fortement à ses mains et à ses pieds, ils partirent chacun de leur côté, tirant de toutes leurs forces dans des directions opposées, de sorte que toutes ses jointures et articulations furent brisées et qu’il fut déchiré membre par membre.

LANIÈRES EMPLOYÉES AUSSI POUR FLAGELLER LES MARTYRS

Le mot lanière on nerf (comme il a été expliqué dans le chapitre précédent) comprend diverses significations. Quelquefois il signifie un lien pour attacher les criminels, sens dans lequel nous en avons déjà traite dans ce livre ; mais d’autres fois il signifie un genre de verges avec lesquelles les chrétiens, enflammes de l’amour du seul vrai Dieu, étaient frappés par les païens. C’est de ce dernier genre qu il nous reste maintenant à parler. On employait généralement le nerf ’un animal, plus souvent celui ’un boeuf. C’est avec ce nerf qu’ont été frappés les plus glorieux soldats du Christ, les saints Ananias, Isidore, Benedicta, vierge et martyre et bien d’autres dont les noms sont écrits dans le Livre de Vie. LANIÈRES ET VERGES

Les lanières et les verges étaient souvent employées pour flageller les fidèles adeptes du Christ. Juvénal parle des verges dans ses Satires, de même saint Cyprien, Suétone (Otho), Eusèbe et d'autres anciens écrivains. Elles étaient plus minces et plus fines que les courroies, plus épaisses que des baguettes, A ce propos, nous trouvons dans les lois de Théodore (Circulation en voiture sur les voies publiques, conducteurs de diligences, courriers) les articles suivants : « Décrété que personne ne se serve d'un bâton pour conduire, mais plutôt d'une baguette, ou tout au moins d'un fouet à l'extrémité duquel est placé un court aiguillon. » Cela est suffisant pour montrer que les fouets étaient en usage parmi les Anciens comme il a été declaré ci-dessus. A part les chrétiens, les personnes de la plus humble condition étaient condamnées à être frappées avec ces instruments, ainsi que le déclare Plaute, Amphytrion ; et même les vierges Vestales, si par négligence elles laissaient éteindre le feu consacré d'une manière impie à Vesta, fausse deesse des Romains, étaient soumises à ce châtiment. Voyez Valérius Maximus et l'historien Tite-Live. Pourtant, pour en revenir aux saints Martyrs de Notre Seigneur Jésus-Christ, nous trouvons qu'un grand nombre de ceux-ci étaient frappés avec des fouets et des bâtons — avec des bâtons, les saints Félix et Alexandre, Privatus et Bassus, évêques, Julius, sénateur, et bien d autres ; avec des fouets, les saints Martyrs Neophytus, Julianus, Tryphon, Sabbatius, et un nombre considérable d'autres dont les noms sont oubliés. Au sujet de ceux-ci, nous trouvons dans le Martyrologe Romain du 20 février, le rapport suivant : « Commémoration des saints Martyrs à Tyr en Phénicie, dont le nombre est connu de Dieu seul. Sous l'empereur Diocletien, et par ordre de Yeturius, maitre des soldats, ceux-ci furent mis a mort par differentes sortes de tortures se succedant 1 une 1 autre. En premier lieu, leurs corps furent declares par les fouets, ensuite ils furent livres a plusieurs sortes de betes sauvages ; mais, grace a la bonte divine, ils ne furent blesses en aucune maniere ; enfin ils furent cruellcment livres au feu et au glaive et conquirent ainsi la couronne du martyre.

Je dois vous dire que les chretiens etaient parfois frappes si longtemps a l'aide de batons et de fouets qu ils mouraient sous les coups. Ainsi perirent ces braves soldats du Christ, saint Sebastien, Julius, senateur, Maximia, vierge et martyre, Eusebe, Sabbatus et bien d autres des deux sexes.

DE LA BASTONNADE, DE LA DECIMATION ET AUTRES PUNTIONS MILITAIRES

Attendu que nous lisons souvent, dans les Hisloires des Saints, comment les chretiens, et specialement les soldats chretiens, etaient, sous forme d ignominie, condamnes a piocher la terre, frappes a coups de baton et de gourdin, depouilles du ceinturon militaire et enfin decimes, toutes cboses qui etaient des genres de punitions pour les soldats remains coupables de diverses offenses, nous avons resolu de specifier ici quels etaient le nombre et le genre de ces punitions. Elles etaient nombreuses et plus ou moins severes. Car, tandis qifa Tinterieur des murs de la ville, la Loi Portia protegeait les citoyens Remains contre le baton et la hache des magistrals, ceci n etait pas le cas dans les champs et les camps. Car la loi faisait une distinction entre la discipline civile et la discipline militaire et entre la terreur qu il etail necessaire d inspirer a une armee pour la plier a l'obeissance et celle qui etait requise pour gouverner un peuple paisible. Car les ordres d un general au camp etaient sans appel.

Les punitions les plus legeres infligees aux soldats etaient celles qui comprenaient la disgrace et la degradation, telles que : etre demis du service avec ignominie, etre prive de la solde, rendre la lance, changer de quartiers, hiverner en pleine campagne. manger la ration deboul, creuser line tranchee, etre desarme et depouille du ceinturon, manger de 1 orge, etre saigne en ayant une veine ouverte.

Les punitions plus graves etaient celles qui causaient quelque souffrance physique, telles que : etre frappe de coups de baton, etre vendu comme esclave, etre frappe avec un gourdin ou une hache, etre decime, etre crucifie. Xous trouvons des exemples de toutes ces punitions d une maniere authentique et certaine dans Sigonius (Livre I), Sur l'Ancienne Loi Civile des Romains. Pour commencer, le fait d etre demis du service avec igno minie est mentionne et ecrit dans A. Hirtius, dans les termes suivants : « Cesar, parlant du haul de la suggestus (plate-forme) et s adressant a 1 assemblee des Tribuns et des Centurions de toutes les legions, dit : Caius Avienus, puisque vous avez souleve les soldats remains contre la Republique et avez pille les villes provinciales, je vous expulse de mon armee avec ignominie. »

Quant a la privation de la solde, cela est assez bien compris deja, je pense. Je puis ajouter que la phrase « prive de sa solde » etait appliquee (ainsi que le declare Nonius) a ces soldats dont la solde, afin de les fletrir avec disgrace, etait arretee, c est-adire que la somme de monnaie representant leur gain pour un mois ou pour une annec, etait confisquee. Ainsi Varro, cite par le meme auteur, parlant de la vie et des coutumes du peuple remain, ecrit : « Ce qui etait appele du nom de solde etait 1 argent que l'on donnait au soldat chaque annee on deux fois l'an ; quand sa paye etait arretee comme marque de disgrace, on disait qu il etait casse de sa solde. Tite-Live dit encore : « Comme marque de disgrace, il fut decrete que la legion recevrait la solde d une demi-annee au lieu de celle d une annee entiere. »

Maintenant, concernant les autres punitions, telle que celle de rendre la lance, Festus explique la chose ainsi : « La punition de la lance etait celle a laquelle on condamnait un soidat coupahle d une faute militaire. »

Pour ce qui est de changer de quartier dans le camp, Polybius nous dit que : lorsqu on voulail fletrir un soidat avcc disgrace, on ordonnait qu il fut jete hors du camp. En consequence, nous trouvons, dans Tite-Livc, que les hommes qui avaient etc battus çàCannes se plaignaient, disant : Maintenant nous sommes reduits a une condition plus dure encore que celle que les prisonniers revenus de la guerre eurent a supporter dans les temps ante rieurs ; car on ne faisait que changer leurs armes on leur position dans la ligne, ou la place qu ils pouvaient occuper hors du camp, toutes choses qu ils pouvaient recouvrer par quelque exploit fameux pour le bien du pays on bien par leur succes dans une bataille. »

Quant aux quartiers d hiver, lisez Tite-Live (Livre xxvi). « Une disgrace de plus etait infligee dans chaque cas, savoir : qu ils ne pourraient hiverner dans une ville, ni construire de quartiers d hiver a la distance de dix milles d aucune cite. » Au sujet des rations, lememe auteurecrit (Livre xxiv) : « J ordonnerai que Ton me rapporte les noms de tous ceux qui, pensant a la defaile recente, ont dernierement quitte leur poste et, les faisant comparaitre tons devant moi, je leur ferai preter serment de ne jamais manger ou boire autrement que debout, excepte dans les cas de maladie aussi longtemps qu ils resteront au service. »

Pour ce qui est de creuser, nous pouvons avoir recours a Plutarque qui dit dans son Lucullus que c etait une ancienne forme de disgrace militaire que Ton employait pour les coupables et qui consistait, apres les avoir contraints de se depouillerdeleur chemise, a leur faire creuser une tranchee tandis que le reste des soldats regardait.

Quant aux autrespunilionsmcntionnees, voyez encore Tite-Live (Livre xxvii) : « Les cohortes qui avaient perdu leur etendard furent condamnees a manger de 1 orge ; et les centurions de ces memes cohortes dont les etendards avaient ete perdus, furent depouilles de leurs ceinturons et prives de leurs epees ». Polybe aussi parle de l'orge etant emplouée comme aliment au lieu de froment, en signe de disgrace.

Au sujet de la punition qui consistait a faire couler le sang, Aulu-Gelle dit ce qui suit : « C etait une ancienne habitude, comme punition militaire et en signe d ignominie, d ouvrir une veine au coupable pour le saigner. »

Nous trouvons 1 evidence d autres formes de punitions plus severes encore dans les passages que nous allons citer. Tite-Live, ecrivant sur la reforme de la discipline militaire de Scipion devant Numance, dit : Tons les soldats qu il prit hors des rangs, il les fit fouetter : si c etait un citoyen remain, avec des douves ; si c etait un etranger, avec des batons , el dans un autre endroit : « Publius Nasica et Decius Brutus, les deux consuls, firent une revue des troupes a 1 occasion de laqnelle un chatiment ftit inflige, probablement pour produire un excellent effet sur 1 esprit des recrues, devant lesquelles la chose etait executee. Un certain Caius Matienus, qui avait ete accuse devant les tribunaux du peuple d avoir deserte 1 armee en Espagne, fut condamne a la fourche ou pilori, puis battu avec des batons pendant longtemps et enfin vendu comme esclave pour un sesterce. » Ciceron aussi, Philippiques : « Les legions qui abandonnerent le consul, si c etait un consul, meriterent la flagellation. »

Maintenant, selon Polybe, cette punition de la flagellation était appliqueé de la facon suivante : Premierement, le tribun
Fig. XIII
Martyrs liés à un poteau fixé en terre ou à un pilier et battus avec persistance avec des bâtons jusqu’à ce qu’ils meurent.


prenait un bâton et en touchait seulement Ic condamné, après quoi tous ceux qui se trouvaient dans le camp frappaient le coupable avec des bâtons et le lapidaient à coups de pierres, généralement il était tué à l’intérieur du camp. S’il échappait à la mort, son sort n’en était pas meilleur pour cela, car il ne pouvait ni être loge chez ses parents, ni retourner dans sa patrie.

Le plus ancien exemple de décimation est rapporté par Tite-Live comme ayant été donné par Appius Claudius pendant son Consulat. C’était un homme au caractère très dur et très rigide. Pour rapporter les paroles de l’historien : « Appius Claudius, le Consul, réunit une assemblée générale et réprimanda les troupes pour avoir été déloyales à la discipline militaire et avoir déserté les drapeaux — et non sans bonnes raisons. Se toumant vers les soldats qu’il voyait désarmés individuellement, il leur demanda où étaient leurs armes et leurs étendards, faisant la même question aux enseignes qui avaient perdu leurs couleurs (drapeaux), de même qu’aux centurions et aux hommes à double solde qui avaient abandonné leurs rangs. Finalement il les fit battre avec des gourdins jusqu’à la mort. Parmi ce qui restait des différents rangs, on choisit par la voie du sort chaque dixième homme pour le châtier. La façon dont fut exécuté cet ordre est racontée en détail par le même auteur qui écrit au sujet de la punition infligée par Scipion à son armée mutinée à Suero : « Alors se fit entendre la voix du héraut proclamant les noms de ceux qui avaient été condamnés dans le Concile. Ceux-ci furent alors dépouillés et entraînés, tandis qu’en même temps on exhibait tout l’appareil de punition, ils furent ensuite attachés à un poteau et frappés avec des gourdins ou abattus à coups de hache.

Le crucifiement, comme punition militaire, est également mentionné par Tite-Live. Les déserteurs qui passaient à l’ennemi, étaient plus sévèrement châtiés que les simples déserteurs. Ceux qui etaienl de race latine etaient décapites, tandis que les coupables remains etaient crucifies. »

Telles etaient done les diverses sortes de punitions militaires. Qu elles aient continue a etre en usage jusqu a la fin de la periode republicaine est un fait dont 1 evidence a ete suffisamment demontree par Suetone quand il dit, parlant d Auguste : II decima toutes les cohortes qui avaient pris la fuite et fit nourrir d orge les survivants, les centurions qui avaient abandonne leur poste, de meme que les manipules, dans le meme cas, furent punis de mort. Pour d autres offenses, il infligeait diverses punilionsignominieuses-- telles que de les faire restertoute la journee debout devant le Pretoire ou a la tete du quartier, tantot portant simplement la tunique et depouilles du ceinturon, tantot tenant une hampe on une motte de terre. Tout cela dit pour les punitions militaires. Maintcnant, pour ce qui rcgarde les soldats Chretiens qui conquirent la couronne du martyre par les mains des paiens, on doit remarquer (comme il est rapporte dans diverses histoires) comment ceux-ci etaient quelquefois condamnes a crcuser la terre, ou a etre decimes ; d autres fois, et tres frequemment, a etre battus avec des fouets ou des batons, ou depouilles, c est-a-dire prives de leur ceinture militaire.

Pour ce qui est des soldats Chretiens etant condamnes a creuser la terre, 1 histoire de saint Marcellus, Pape, en rend temoignage, car il y est ecrit a ce sujet : Le jour oil Maximien revint des pays d Afrique dans la ville de Rome, voulant plaire a Diocletien et en meme temps accomplir son desir de batir des Thermes ou des Bains, qui devait porter son nom, il commenca, dans sa haine pour les Chretiens, par condamner tous les soldats de cette croyance, soil remains, soit e trangers, aux travaux forces, et, en divers endroits, il les forc,a, les uns a transporter des pierres, les autres a creuser le sable. On peut trouverle meme fait rapporte dans les Actes de sainte Severa, vierge romaine. La decimation estaussi attestee par les histoires des plus saints martyrs du Christ, saint Maurice et ses compagnons, ou il est ecrit : Que le sort fatal livre a la mort chaque dixieme homme et la decimation etait-elle autre chose que de mettre ainsi a mort chaque dixieme soldat ? Lisex plus loin, si vous le voulex, a ce sujet, 1 historien romain Tacite : Chaque dixieme homme de la cohorte disgraciee fut choisi par le sort et fotiette jusqu a la mort ; et encore : Comme chaque dixieme homme de 1 armee qui a ete vaincue est frappe jusqu a la mort, des homines braves sont quelquefois eux-memes choisis par le sort de temps a autre .

La seconde punition, savoir le fouet, marque une partie de la passion de presque tous ces soldats Chretiens martyrs qui trouverent agreable et heureux d etre debarrasses de cette courte et pauvre vie pour I amour du Christ.

Une chose que nous voudrions faire rcmarquer an lecleur, c est que non seulement les soldats Chretiens etaient frappes par le baton, mais aussi d autres fideles serviteurs du Christ, car les lois des remains decretaient que quiconqtie s avouerait rempli de la grace de Dieu, serait frappe avec le baton comme punition.

Enfin on pcut trouver d autres preuves du meme fait dans les Actes de saint Hesychius, de saint Marcellus, centurion, des saints Eudoxius, Zeno, Macarius et leurs compagnons an nonibre de cent quatre, et de beaucoup d autres. En particulier, nous lisons dans les Actes du dit saint Marcellus comment la ceinture militaire, si souvent mentionnee, n etait ni plus ni moins que le ceinturon ordinaire du soldat ou plutol le baudrier auquel etait attache le sabre, car nous y trouvons ecrit : Dans la ville de Tingitana,tandisque Fortunatus etait procurateur etcommandeur des troupes, le jour de naissance de Tempereur arriva. De sorte que, tandis que tous se livraient aux rejouissances et offraient des sacrifices, un nomme Marcellus, centurion de la legion de Trajan,

jugeant les dites réjouissances profanes, rejeta son ceinturon militaire devant les étendards de la légion qui se trouvait là en ce moment et témoigna à haute voix, disant : « Je suis soldat de Jésus-Christ, le roi éternel. »

II rejeta de même son bâton de Centurion et ses armes et déclara : « A partir de ce jour, je cesse de me battre pour vos empereurs. Mais les soldats, étonnes d'entendre de telles paroles, le saisirent et rapportèrent la chose à Astasianus Fortunatus, commandant de la légion, qui ordonna qu'il fût mis en prison. Bientôt, lorsque la fête fut terminée, celui-ci s'assit au conseil du Concile, et ordonna d'amener Marcellus, le Centurion ; ceci étant fait, Astasianus Fortunatus, le commandant, s'adressa à lui en ces termes : « Quelle était votre intention lorsque, au défi de la discipline militaire, vous avez défait votre ceinturon et rejeté au loin votre baudrier et votre bâton ? » puis plusieurs lignes plus loin : « Ce soldat, rejetant son ceinturon, s'est ouvertement déclaré chrétien et, publiquement, devant tout le peuple, a blasphémé contre les dieux et contre César. C'est pourquoi nous vous avons rapporté ce fait, afin que tout ce que décidera votre sagesse soit dûment exécuté. »

Telles furent les paroles adressées par ses geôliers, concernant le saint Marcellus, à Agricolaus, le juge auquel il avait été envoyé pour être condamné. Maintenant, quand nous lisons au commencement de ce récit comment Marcellus rejeta son ceinturon et, encore plus loin, comment, étant dénoncé au commandant, il rejeta son baudrier et comment encore, lorsque les soldats exposèrent le cas et l'accusèrent devant Agricolaus, il rejeta de nouveau son ceinturon, il est pleinement clair qu il s'agit ici d'une seule et même chose. De fait, un baudrier, — si nous pouvons en croire l'autorité de Varro, sur la Langue latine, était un ceinturon de cuir décoré de clous ou de bossettes et porté en sautoir de l'épaule droite à la hanche gauche. Ainsi Quintilien écrit : Ce ceinturon, qui est porte en sautoir de 1 epaule droite a la hanche gauche, comme un baudrier, ne doit etre ni trop serre ni trop lache.

Nous voudrions ici faire observer au lecteur un point, savoir que la Constance des soldats Chretiens etait telle, et tel aussi leur desir brulant de souffrir pour Tamour du Christ que c est une chose tres frequente de trouver mentionne le fait que, volontairement et au mepris des empereurs paiens et autres officiers superieurs, ils rejetaient leur ceinturon. Ainsi, nous lisons sur saint Hesychius : Maintenant, c etaitun soklat et,ayant entendu lire 1 ordre de Maximianus, decretant que quiconque refuserait de sacrifier aux idoles, devait rejeter son ceinturon, soudain, et de son propre mouvement, il deboucla le sien ; et encore sur saint Eudoxius et ses saints companions : Eudoxius defit immediatement son ceinturon ct le lanca a la figure du commandant. Get acte semblant a ses compagnonr. un appel direct et une emulation, le nombre entier de ceux qui se trouvaient alentour, cent quatre en tout, defirent aussi leur ceinturon et le lancerent a sa figure.

Tout cela dit sur les peines et les punitions infligees aux soldats Chretiens.

BATONS ET SCORPION S

Les batons avec lesquels on frappait les prisonniers sont souvent mentionnes dans diverses pieces de Plaute, par Valerius Maximus, par Ciceron, ainsi que par Prudentius dans son Hymne a saint Remain.

Les batons, parmi les Anciens, etaient de plusieurs sortes les uns en bois d orme, comme le dit Plaute dans Asinaria :

Ipsos, qni tibi snbuectabant rure hue virgas ulmeas... Et un peu plus loin dans la meme piece :

Mihi tibique interminalus st nos futuros nlmeos

Les memes individus qui avaient 1 habitude de vous apporter de la campagne votre provision de bois d orme. II jura que vous et moi nous sentirions bientot I efFet du bois d orme.

Plaute aussi nous montre que les Anciens avaient 1 habitude de corriger frequemment leurs esclaves a 1 aide de batons de bois d orme.

D autres encore etaient de bouleau, arbre dont Pline nous a laisse une description en ces termes : Cet arbre Gallic (bouleau) est excessivement mince et poli, et devient un instrument terrible lorsqu il est employe comme baton par les magistrals. Sa flexibilite le rend egalement propre a laire des cercles aussi bien qu a tresser des paniers.

D autres encore etaient de chene, d autres de frene et d autres de saule. Les batons de la premiere sorte sont nommes dans les Actes de saint Actius, centurion, ceux de la troisieme par Prudentius dans son Hymne a saint Piomain, dans ces lignes : Cum purr torqiieretur jussii Prsesidis Impacta quoties corpus attigerat sal Li-Term i rubebant sanguine uda vimina.

Done le garden fut torture par les ordres du Gouverneur ; chaque fois que le saule frappait son corps, les baguettes devenaient humides et rouges de sang .

En confirmation de quoi nous pouvons de plus citer dans l'Epidicus de Plaute :

Lictorcs duo, duo viminei fasces virgarum. Page:Gallonio - Traité des instruments de martyre.djvu/119 Page:Gallonio - Traité des instruments de martyre.djvu/120 Page:Gallonio - Traité des instruments de martyre.djvu/121 Page:Gallonio - Traité des instruments de martyre.djvu/122
Fig. XIV
A. — Martyr lié à quatre pieux et frappé avec des bâtons.
B. — Martyr lié nu sur des piques de fer et violemment frappé avec des bâtons.
C. — Martyr ayant les mains et les pieds liés et également frappés avec des bâtons.
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Fig. XV
A. — Martyr recevant des soufflets, des coups de pied, et ayant le visage meurtri à coups de poing.
B. — Martyr étant lapidé.
C. — Martyr dont le visage et la mâchoire sont meurtris avec une pierre.
D. — Martyr écrasé sous une énorme pierre.
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de carnage votre terre natale qui était dans le calme et la paix. Alors ils attachèrent un fer à l'extrémité d'un long roseau et lui ordonnèrent d'en piquer le saint homme. Mais elle cria : « Loin de moi la pensée de faire cette chose, j'aimerais mieux transpercer mon propre coeur de cet instrument que de faire la plus petite égratignure à son saint corps ! Elle manifesta ainsi une constance virile et se montra plus forte que ses meurtriers ne l'avaient cru possible.

Mais alors ils accablèrent le saint sous une telle avalanche de pierres que sa tête seulement demeura visible, tout le reste de son corps étant enterré sous un monceau de pavés. Et, quand l'un des bandits vit que la tête seule remuait, il ordonna a l'un des licteurs de prendre la plus grosse pierre qu'il pourrait porter et de la jeter sur lui : Et lorsque ce fut fait et que sa tête fut écrasée sous le poids de la pierre, il rendit au Christ son âme précieuse. »

Tout cela dit étant en rapport avec ce que disent à ce sujet les Actes des Saints.

II ne nous reste plus maintenant, après avoir dûment exposé les sortes de tortures des saints martyrs dont il a été traité dans le quatrième chapitre, qu'à procéder au cinquième, avec la bénédiction de Dieu.