Un mystérieux enlèvement/6

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A. Lefrançois (p. 70-105).

CHAPITRE IV

LES RECHERCHES

I. Entrée en scène de Savary. ─ II. Battue du 7 vendémiaire. ─ III. La négociation de Blois ; arrestation de Lemesnager. ─ IV. Arrestation de Leclerc. ─ V. La négociation d’Orléans. ─ VI. Expédition des 15-19 vendémiaire ; coup de théâtre.


I

Savary avait quitté Paris le 3 vendémiaire. Il fit diligence et passa d’abord à Beauvais pour saluer Mme  Clément de Ris ; visite de convenance, et aussi de prudence. Il craignait qu’à Tours les autorités ne lui livrassent qu’une vérité partielle ou une vérité de commande. Il voulait, avant tout contact avec elles, recueillir de la bouche de Mme  Clément de Ris ses premières informations.

Il arriva, le 4, à Beauvais, dit l’objet de sa mission, questionna, et fit buisson creux : « On ne pouvait rien tirer de Mme  Clément de Ris, affolée par la terreur du danger que courait son mari[1]. » Gardons-nous de prendre à la lettre cette affirmation ; le silence de Mme  Clément de Ris était voulu. En possession, depuis la veille, de la lettre apportée par Petit, elle s’était ressaisie : son mari vivait ; sa liberté était affaire d’argent ; elle paierait ; qu’était plaie d’argent en comparaison du malheur redouté ? Mais elle paierait à l’insu de tous. Son cœur lui dictait, pour se taire, des raisons que la raison d’État n’eût pas entendues : la rançon qui libérait le prisonnier ne rachetait pas le crime ; les magistrats ne pouvaient, sans forfaiture, se dérober au devoir d’en poursuivre les auteurs ; divulguer la proposition des brigands était lancer la Justice sur leur piste, et provoquer un conflit où son manque de discrétion mettrait en péril la vie du prisonnier. À la faveur du silence elle espérait rentrer en possession de son mari avant que les pouvoirs publics eussent le temps d’intervenir. Elle se taisait.

Muet aussi restait le chirurgien, gagné par elle à ses raisons. Vainement on le pressait de parler ; il ne savait rien, n’avait rien vu ; qu’eût-il pu voir ? un bandeau lui couvrait les yeux ! Voilà comment Savary quitta Beauvais sans avoir rien appris de ce qu’il comptait apprendre, de ce qu’il apprit à peine arrivé à Tours.

Le secret si bien gardé par Mme  Clément de Ris y était su de tout le monde. Il n’était bruit que du retour de Petit, de la demande de rançon, des négociations entamées pour trouver l’argent ; on citait les prêteurs à qui l’on avait fait appel[2]. Ces bruits étaient-ils fondés ? Les autorités l’ignoraient : elles n’en avaient eu vent que par ouïdire ! La prudence tempérant la vanité, les plus ardents à se proclamer informés, devenaient, pour peu qu’on les questionnât, les plus circonspects à garantir la provenance de leur information.

Les on-dit n’en marchaient pas moins. Bien que demander rançon n’impliquât rien sur la qualité – brigands ou chouans – des ravisseurs, chacun tirait du fait argument en faveur de son sentiment. Le Préfet, par amour-propre de fonctionnaire jaloux du bon renom de son département et du loyalisme de ses administrés, voyait dans l’attentat un simple brigandage : qu’en Vendée, en Bretagne, en Normandie, pays où il suffisait de frapper du pied la terre pour en faire surgir des affidés, les chouans eussent ourdi un complot en vue d’un soulèvement prochain, la chose eût été possible ; en Touraine, où ils comptaient des partisans clairsemés et de foi plus tiède, rien de tel n’était à craindre ; supposé que des chouans eussent trempé dans l’affaire, c’était fait isolé, œuvre d’enfants perdus du parti ou acte de vengeance personnelle. Les partisans de l’opinion adverse objectaient que, si la guerre était close, les faits de chouannerie persistaient ; même ils se multipliaient depuis que les besoins de la guerre extérieure avaient dégarni l’Armée de l’Ouest ; l’espoir d’une revanche renaissait, on la préparait, et les chefs, en cette prévision, tiraient d’où ils pouvaient leurs subsides[3]. Et ils rappelaient maints récents attentats commis non en Vendée, en Bretagne ou en Normandie, mais en pleine région tourangelle. C’était, le 25 floréal (15 mai), à Chambourg, près de Loches, le pillage à main armée de la diligence de Tours, portant 15.000 francs ; c’étaient, le 23 messidor (15 juillet), les citoyens Herbé et Labare, de Château-Lavallière, acquéreurs de biens nationaux, maltraités et volés par des brigands venus de Maine-et-Loire ; c’était, le 15 thermidor (5 août), la diligence du Mans, chargée de 25.000 francs, attaquée par une bande de chouans ; tous faits attestés par des documents officiels. Les rapports des Chefs de l’Armée de l’Ouest témoignaient qu’un mouvement d’importance était à la veille de se produire. Le Général Lacotte signalait (27 thermidor) les agissements de certains chouans réputés soumis[4] ; le Général Bernadotte (7 messidor) appelait l’attention du Ministre de la Guerre sur les envois d’argent faits par Bourmont dans les Deux-Sèvres et le Maine-et-Loire, et (7 fructidor) sur le grand nombre d’émigrés arrivés récemment de Paris dans le Loir-et-Cher, où ils tenaient assises. Le gouvernement s’inquiétait de cet état de choses. Le 26 messidor (18 juillet), le Ministre de la Police dénonçait à son collègue de la Guerre ces révoltés, véritables brigands, conduits uniquement par l’appât du pillage : « C’est en vain, disait-il, qu’on a prétendu les ramener en leur offrant une grâce dont ils ne sont pas dignes, et qui n’est qu’un moyen de se soustraire au supplice, lorsque, forcés dans leur retraite, ils sont dans l’impossibilité de se défendre. Cependant les ennemis de la patrie, les émigrés profitent de cette situation pour rentrer en France. Ils se disent chouans et obtiennent, en cette qualité, des sauf-conduits. » S’étonnera-t-on si Fouché, à la nouvelle de l’enlèvement, n’avait pas hésité à l’attribuer aux chouans[5] ? Que Savary, par suite, ait adopté l’opinion contraire, on ne s’en étonnera pas davantage.

Dès le premier entretien, le Préfet et lui étaient tombés d’accord : il fallait tirer au clair l’histoire de la rançon et s’assurer des dispositions de Mme  Clément de Ris. Savary retourna donc à Beauvais le lendemain (6 vendémiaire). Le chirurgien Petit s’y trouvait : bonne occasion de faire double coup.

Mise en demeure de s’expliquer, Mme  Clément de Ris, cette fois, ne put se dérober. Elle montra la lettre de son mari, dit ses craintes et son dessein. Savary feignit d’entrer dans ses raisons. Il approuva sa prudence, l’encouragea dans sa résolution, offrit ses bons offices et gagna sa confiance. Alors, insensiblement, il la ramena à un examen plus réfléchi de la situation. Il représenta les inconvénients d’un excès de complaisance envers les coupables. Favoriser leur impunité, les aider à braver la loi, exposait le Sénateur dans le présent au mécontentement du Premier Consul, privait dans l’avenir ses enfants d’un si puissant appui, et incitait les brigands, heureux de rencontrer des payeurs si bénévoles, à recommencer un jour leur coup. Ne valait-il pas mieux chercher moyen d’assurer la liberté du prisonnier sans compromettre sa vie, et de conjurer, en facilitant leur capture, une nouvelle tentative des ravisseurs ?

Ce moyen, Savary l’avait trouvé. Que Mme  Clément de Ris se hâtât de réunir la somme, mais en pièces d’argent, formant un poids lourd et encombrant ; que, pour détourner tout soupçon, elle la portât elle-même au lieu indiqué. Des agents déguisés y seraient et profiteraient de l’embarras des brigands pour les reconnaître, les épier et préparer leur arrestation. Il ne s’agissait pas de les poursuivre, encore moins d’entrer en lutte avec eux, mais de les suivre, à distance, prudemment, de savoir où ils portaient l’argent, de découvrir leur retraite. Ainsi, plus tard, et le Sénateur une fois libre, on saurait où les prendre, et l’on aurait toute facilité pour s’emparer d’eux. Au surplus, la prudence, l’intérêt du Sénateur commandaient cette façon d’agir. Laisser les brigands partir librement était perdre toute garantie contre eux ; la rançon touchée, ils restaient maîtres de ne pas tenir leur promesse et de garder l’otage.

Savary s’était montré habile et pressant. Vaincue, plus encore que convaincue, par ses arguments, Mme  Clément de Ris se prêta à ce qu’on voulait d’elle.

Ensuite, Savary questionna Petit, qui lui parut « un homme fort adroit ». Il se fit raconter toute l’odyssée du chirurgien, depuis son arrestation au bourg d’Athée jusqu’au moment où, laissé libre à l’orée de la forêt de Loches, il avait entendu à distance l’horloge de Montrésor battre huit heures[6]. Petit dit ce qu’il savait, ce qu’il avait vu, et, à défaut de ce qu’il n’avait pu voir, ce qu’il avait entendu ou induit ; il donna le détail des mets servis au repas dans le souterrain ; il indiqua, d’après ses calculs sur la durée du trajet et ses observations au cours de sa captivité, à quelle distance et dans quelle direction devait se trouver la cachette du Sénateur.

Muni de ces renseignements, qui limitaient à une région plus précise le champ des investigations, Savary prit congé, revint à Tours, et s’empressa de mettre le Préfet et le Général Liébert au courant de ce qu’il venait d’apprendre.

La tournure prise par l’affaire plaçait le Préfet dans une situation délicate. Galant homme, en relations personnelles avec M. et Mme  Clément de Ris, il désirait complaire à cette dernière, dont il comprenait et partageait les appréhensions. D’autre part, il craignait de mécontenter Savary, tout puissant du crédit attaché à ses fonctions d’Aide de Camp et d’envoyé extraordinaire de Bonaparte. Par ailleurs, relevant du Ministre de la Police, il était obligé, – il y allait de sa place, – de prendre et de suivre les instructions de Fouché, et celui-ci le pressait d’agir sans s’inquiéter d’autre chose que des intérêts de la justice : « Les sentiments particuliers de Mme  Clément de Ris pour la sûreté de son mari sont, écrivait-il, très respectables, quoique peut-être cette voie, avec de tels brigands, n’offre qu’un espoir équivoque ; mais la marche des fonctionnaires publics dans cette circonstance doit se régler par d’autres principes et sur le sentiment de la sécurité générale. Leur devoir est de poursuivre les brigands à outrance[7] » (7 vendémiaire).

Le Général Liébert offrait, par ses qualités aussi bien que par ses défauts, un complet contraste avec le Préfet. Ce n’était ni un politique, ni un diplomate. C’était un soldat, plein de droiture, animé des intentions les meilleures, mais d’une ouverture et d’une souplesse d’esprit inférieures à son bon vouloir. Il était capable de toutes les imprudences, y compris celle de voir vrai et de dire ce qu’il voyait, à l’heure où d’autres, plus haut placés, avaient intérêt à ce que la vérité restât cachée. Le Préfet inclinait vers la prudence et la composition ; il était, lui, pour les moyens violents, et rebelle à toute compromission. Avec cela, entêté de ses idées, jaloux de son autorité, et porté à agir parallèlement plutôt que conjointement aux fonctionnaires de l’ordre civil, auxquels il lui pesait d’être subordonné. De plus, l’état de sa santé ne lui permettait pas de suivre personnellement l’affaire. Il émettait des avis, il donnait des ordres, et, retenu chez lui, il se rapportait à ses lieutenants du soin de les exécuter.

Savary vit sans déplaisir cet antagonisme entre le Général et le Préfet. Il s’appliqua à l’entretenir, approuvant l’un quand il réclamait une action énergique, l’autre quand il parlait de temporiser. Il trouvait, à ce double jeu, son avantage. Arbitre du différend, il aurait la haute direction des recherches et recueillerait gloire et profit de les avoir conduites à bonne fin. Cette ambition vaniteuse perce à chaque ligne de ses Mémoires : seul il a vu clair ; seul il a combiné un plan méthodique et habile ; si les résultats n’ont pas répondu à la conception, la faute en est aux instructions contradictoires de Fouché, qui ont tout compromis. – Il suffira de suivre, au jour le jour, les événements, pour distinguer, dans ces affirmations, la part de la suffisance et celle de la vérité.


II

Pendant que Mme  Clément de Ris s’occupait à réunir l’argent de la rançon, Savary et le Préfet, pour donner satisfaction aux impatiences de l’opinion, aux plaintes de Liébert[8], à la mauvaise humeur de Fouché irrité[9] et désireux d’être informé de tout au jour le jour, résolurent d’envoyer, sur les indications fournies par l’interrogatoire de Petit, une nouvelle reconnaissance dans la forêt de Loches. Elle eut lieu le 7 vendémiaire. Le capitaine Folliau la dirigeait, avec ordre de visiter les maisons les plus suspectes.

Il revint sans avoir rien trouvé, si ce n’est, dans le jardin de l’une d’elles, – c’était La Beaupinaie ! – des melons et des artichauts d’une grosseur énorme : dans aucune autre des maisons visitées, on n’avait vu de melons ni d’artichauts. « Ces indices, observait le Préfet, me paraissent d’un grand poids, surtout quand on considère que les personnes de cette maison affichaient une gaieté forcée dans un moment où, en pareilles circonstances, des personnes réellement innocentes semblent bien plus devoir être étonnées que gaies. » En effet, les habitants, pendant toute la durée de la perquisition, se moquaient, sifflaient, avec une sorte de mépris ; une demoiselle inconnue chantait, avec affectation, une chanson républicaine[10] ; la domestique, avec une assurance malhonnête, disait : Cherchez, nous ne craignons rien ; et, s’adressant à un homme de la basse-cour : Va donc ouvrir le poulailler et le toit à cochons ! Allons ! cherchez donc là-dedans, et n’oubliez rien, à tel point qu’on dut la menacer des sévérités de la loi[11]. Pourtant, on n’arrêta personne. Pourquoi ? Mollesse et négligence de la gendarmerie, écrira le Préfet. Mauvaises instructions des autorités civiles, dira Liébert, et surmenage d’un personnel militaire trop restreint : « La gendarmerie est partout sur pied, ce qui fait qu’elle est sur les dents » sic. Là, comme ici, l’on prenait ou l’on affectait de prendre l’effet pour la cause. Le mal, Fouché ne s’y trompa pas, était dans l’antagonisme des uns et des autres. Leurs rivalités les condamnaient à une impuissance que la négociation de Blois allait mettre dans tout son jour.


III

Rarement affaire demandant préparation discrète, unité de vues et de direction, fut abandonnée à la coopération confuse de confidents plus nombreux, intéressés à ne pas s’entendre. Fouché, Savary, Liébert, les Préfets d’Indre-et-Loire et de Loir-et-Cher, Mme  Clément de Ris, chacun s’en mêle et chacun l’emmêle à l’envi ; chacun feint d’entrer dans les vues du voisin, agit en dehors ou à l’encontre de lui, et, finalement, est dupe de ceux qu’il travaille à duper, à cela près que Fouché dupe tout le monde.

La journée du 7 avait été employée par le Préfet et par Savary à s’entendre avec les citoyens Bacot et Bruley[12], chargés, tandis que Mme  Clément de Ris irait à Blois de son côté, d’y porter les cinquante mille francs[13]. À la réunion assistait le citoyen Perron, Commissaire du Gouvernement près le Tribunal civil de Tours. Il conseilla l’arrestation de ceux qui se présenteraient pour toucher la rançon. Les amis de Mme  Clément de Ris se récrièrent. Était-ce là ce qu’on avait promis ? Pour un résultat aléatoire, exposerait-on le prisonnier à un danger certain ? Qui viendrait prendre l’argent ? Des comparses, que les chefs sacrifieraient au besoin, et dont la prise n’équivaudrait pas à la perte du Sénateur ! Leurs raisons prévalurent. Il fut décidé qu’on n’arrêterait pas. On se limiterait à une surveillance active, pour voir qui recevait et tâcher de savoir où l’on portait les fonds. À cette fin quatre agents secrets seraient envoyés à Blois. Ces résolutions furent communiquées par le Préfet de Tours à son collègue de Loir-et-Cher. Il les présenta comme l’opinion de Savary, et, oubli involontaire ou omission voulue, ne souffla mot des quatre agents. Le Préfet de Blois, invité par le Ministre de la Police à s’inspirer des instructions venues de Tours et à tirer parti des circonstances, s’entendit aussitôt avec le commissaire de Police et le capitaine de Gendarmerie pour la surveillance de la ville.

L’autorité militaire avait été tenue à l’écart. Le Général Liébert n’eût donc rien su des dispositions prises, si Savary, tenace en son idée de s’emparer des négociateurs à la faveur de la négociation, n’avait eu, pour cela, besoin de son concours. Un conciliabule eut lieu entre eux, le Général Sisclée et le Commandant Boisard. On discuta les moyens, à la fois de tirer le Sénateur des mains des brigands, et de capturer leurs messagers ; la chose devait se faire à l’insu des deux Préfets, et, plus encore, de Mme  Clément de Ris, qui, « si elle s’apercevait que la force armée prenait des mesures, s’arrangerait pour porter les fonds en un autre endroit ». De ce conseil de guerre au petit pied sortit tout un plan de campagne : des gendarmes, déguisés en civils, munis du signalement des ravisseurs, et inconnus des agents venus de Tours, iraient à Blois et seraient postés, les uns à l’Hôtel de la République, où devaient descendre les citoyens porteurs des fonds ; d’autres aux Trois Marchands, « dont l’hôte passait pour un mauvais sujet » ; d’autres dans les maisons voisines ou dans les maisons vis-à-vis ; d’autres enfin au pont et aux portes de la ville. Le commandant Boisard et le chef de bataillon Chevillot les accompagneraient. « Il faut réussir, écrivait Liébert ; sans quoi les mêmes attentats se reproduiront, les brigands se sentant assurés de l’impunité par la certitude que les parents des personnes enlevées se contenteraient toujours de payer et de garder le plus profond silence[14]. » Réussir ? En était-ce le moyen que de lancer contre des gens intéressés à se méfier, attentifs à épier qui les épiait, dans une ville où tous étaient connus de chacun, une armée de gens suspects par cela seul qu’ils n’étaient pas connus ? Aussi bien, pour compromettre le succès, n’était-il pas besoin de la maladresse des militaires ; celle des autorités civiles y suffisait.

Le délai marqué pour le paiement expirait le 10. Le 9, vers midi, l’on vit arriver à Blois, presque en même temps, et par des points différents, les agents du Préfet de Tours, les citoyens porteurs des fonds, et Mme  Clément de Ris accompagnée de son domestique, Métayer. Les premiers furent se loger, sous des noms d’emprunt et des professions supposées, aux auberges où les mandataires des brigands étaient présumés devoir descendre ; les citoyens Bacot et Bruley se firent conduire à l’Hôtel de la Boule d’Or et de la République ; Mme  Clément de Ris, suivant l’indication donnée par la lettre de son mari, se rendit à l’auberge des Trois Marchands, située dans la rue qui, aujourd’hui encore, porte ce nom. C’était, c’est toujours[15], une rue étroite, sombre, comme écrasée sous de hautes maisons, dont la saillie des étages supérieurs ne laisse, entre elles et leurs vis-à-vis, descendre sur la chaussée qu’une clarté obscure. Fort courte, elle se prêtait à une surveillance facile, circonstance favorable à la police, mais non moins avantageuse aux brigands : l’eussent-ils choisie, si elle n’avait été propice à prévenir toute surprise.

Ces trois arrivées simultanées, portées à la connaissance du Préfet, l’amenèrent à conclure que l’affaire était pour le lendemain. Averti de la venue de Mme  Clément de Ris et de ses amis, il ne l’était pas, on l’a vu, de celle des quatre agents. À certains propos tenus par eux, et qui lui furent rapportés, il s’imagina avoir affaire aux brigands, et, par zèle, par espoir de les surprendre avant l’ouverture des négociations, il prescrivit une visite immédiate de toutes les auberges. Voilà donc, partout, les voyageurs interrogés, sommés de décliner leurs noms et qualités, d’exhiber leurs passeports, et, partout aussi, la curiosité aux aguets. Chacun s’émeut, Mme  Clément de Ris plus que personne car cette inquisition ébruite ce qui doit être tenu secret. Elle supplie le Commissaire de ne plus s’occuper d’elle ni de son mari ; elle est décidée à tout sacrifier pour le ravoir : l’intervention du Gouvernement lui fait le plus grand tort. Le Commissaire la rassure : il n’est pas, en tout ceci, question d’elle ni du Sénateur ; la coïncidence, fâcheuse sans doute, ne saurait lui nuire. Elle se laisse ou feint de se laisser convaincre. Mais l’éveil est donné. L’hôte des Trois Marchands a maintes fois hébergé des chouans ; il se sent suspect ; il prend l’alarme, et monte à la chambre de Mme  Clément de Ris. En termes violents il lui reproche de discréditer sa maison, qui passera pour un repaire de brigands. Il parle haut, toutes portes ouvertes ; il veut donner le change aux gens de police, qui, d’en bas, l’écoutent ; il veut aussi, au cas échéant, prévenir les gens attendus qu’ils sont surveillés. Il sort, laissant la malheureuse femme effrayée, moins de ses éclats de voix que de la crainte de voir les brigands renoncer à leur projet, et se venger sur son mari de leur déception.

L’affaire était mal engagée. Quand, à leur arrivée à Blois avec leur monde, dans la nuit du 9 au 10, Boisard et Chevillot apprirent du Commissaire ce qui s’était passé, ils purent se demander si leur mission ne se réduirait pas à signer un procès-verbal de saisie des policiers du Préfet d’Indre-et-Loire par la police du Préfet de Loir-et-Cher[16].

La journée du 10 fut, pour Mme  Clément de Ris, une longue, cruelle et stérile attente. Personne ne se présenta aux Trois Marchands qu’un paysan menant un âne. Il fit donner l’avoine à sa bête, causa avec l’hôte le temps qu’elle mangeait, et s’en alla comme il était venu. Nul ne songea à le questionner, à l’arrêter, à le suivre ; ou, si l’on y songea, nul ne l’osa ; l’aventure de la veille avait rendu circonspect. Cet homme était, on le sut bientôt, le délégué des brigands. Trois de ceux-ci l’attendaient en ville, et, sur son rapport, se hâtèrent de déguerpir.

À plus forte raison la journée du 11 n’amena pas le messager attendu : toute la ville était sur le qui-vive ; la surveillance avait redoublé. Un incident, survenu la veille, en était cause. Dans la matinée du 10, le Commissaire de Police, par ordre du Préfet, ou, plus vraisemblablement, à l’instigation de Boisard, avait mandé le domestique de Mme  Clément de Ris. Il l’avait questionné et chargé d’examiner avec attention si, parmi les personnes rencontrées en ville ou se présentant aux Trois Marchands, il reconnaîtrait quelqu’un de ceux qui avaient coopéré à l’enlèvement. Vers le soir, le domestique était accouru chez le Commissaire. Il avait vu, sur une place, l’individu qui, le premier, avait envahi les appartements, et qui commandait aux autres. Il donna son signalement. Le Commissaire reconnut un nommé Lemesnager, originaire de Blois, chirurgien à Madon, commune de Candé, chouan amnistié, soumis à la surveillance pour incitation de conscrits à la désertion. Sur-le-champ il prévint Boisard et Chevillot et convoqua les officiers de gendarmerie Buibard, chef d’escadron, et Bodin, capitaine. Devant eux, Métayer renouvela et signa sa déclaration. On convint de garder à vue Lemesnager, et de l’arrêter sitôt Mme  Clément de Ris partie.

Celle-ci passait par les émotions les plus terribles. Tantôt, frémissante, elle s’emportait contre ce Gouvernement dont l’ingérence avait rompu les négociations ; tantôt elle était hantée par le spectre des représailles annoncées, se figurait son mari assassiné et s’abandonnait au désespoir. Le délai fixé était écoulé, et, bien qu’elle sentît le néant d’une plus longue attente, elle restait. Elle ne pouvait se résigner à quitter Blois. La confiance l’y avait amenée ; un vague espoir l’y retenait, et aussi la crainte de trouver à Beauvais la certitude d’une catastrophe que sa raison lui représentait inévitable, que sa tendresse écartait comme impossible.

Abîmée dans ces réflexions, elle attendait, solitaire, – quoi ? elle n’eût pu le dire, – quand un inconnu se présenta aux Trois Marchands et demanda à lui parler. Elle le reçut. Il déclina son nom, Carlos Sourdat[17], ancien officier chouan, et montra un passeport signé du Ministre de la Police. Que se passa-t-il entre eux ? Mme  Clément de Ris ne le fit pas connaître, mais parut rassurée par cette visite. On supposa, au premier moment, que Sourdat lui avait indiqué moyen de renouer ailleurs les pourparlers interrompus à Blois[18]. La vérité est autre. Sourdat avait encouragé Mme  Clément de Ris à bannir toute crainte ; à s’en rapporter à lui ; à aller habiter Tours où elle serait mieux à portée de recevoir des nouvelles ; à s’y tenir tranquille ; et surtout à ne verser, sans son avis, aucun argent aux brigands, ce qu’elle avait promis[19].

Cette intervention brusque, étrange, d’un chouan, se recommandant, par pièce authentique, du Ministre de la Police, parut singulière au Préfet. Elle le parut bien davantage encore quand, peu après, il eut à son tour la visite de Sourdat, l’invitant à subordonner son action aux instructions qu’il recevrait de lui. Ému, froissé, il écrivit au Ministre, et ne put se retenir de marquer sa surprise et sa mauvaise humeur : « Le soir, disait-il, se présenta à moi-même une personne ayant invitation de votre part à tous les Préfets de la seconder dans la recherche de Clément de Ris. Cet agent me dit qu’il repartait pour Paris et qu’il avait la clef de l’affaire. Il ne me donna pas le moindre renseignement à ce sujet. Il a laissé ici un de ses frères et un de ses amis, comme lui ex-chouans à ce qu’il semble, et tous les deux se disent autorisés à faire des recherches sur l’affaire du citoyen Clément de Ris. Je vous représente à ce sujet, citoyen Ministre, que je ne crois pas que votre confiance puisse être plus mal placée que dans des jeunes gens de cette espèce, qui ont fait la guerre à la République et qui s’en glorifient tous les jours, qui profitent du moment où on les emploie pour venir traiter avec une familiarité indécente les autorités constituées, et qui s’avisent de donner des conseils, – vous savez dans quel sens, – ou de trouver mauvaises les mesures que l’on prend pour la sûreté publique. »

Le lendemain[20] de la visite de Sourdat, dans la matinée, Mme  Clément de Ris quitta Blois. Une heure après son départ, ordre était donné d’arrêter Lemesnager. On le trouva chez son père, à une demi-lieue de la ville, en compagnie d’un sieur Marchand. Amenés à la Préfecture, tous deux furent interrogés en présence de Boisard et du capitaine de gendarmerie. Marchand fournit un alibi reconnu exact ; on le laissa libre. Lemesnager, bien que niant toute participation à l’attentat de Beauvais, ne put justifier de l’emploi de son temps du 1er au 10 vendémiaire, date de son retour à Blois ; on le garda. Il fut écroué à la prison de la ville, et l’on donna pour prétexte, – car on ne voulait pas ouvrir l’œil à ses complices, – qu’il était de l’âge de la réquisition[21]. Après quoi, n’ayant plus rien à faire à Blois, Boisard et Chevillot reprirent le chemin de Tours, où leurs gendarmes et les émissaires du Préfet d’Indre-et-Loire les avaient précédés.

Ainsi se termina cette équipée, vraie tragi-comédie, où, de la première à la dernière heure, l’incohérence avait présidé à tout ; où l’on avait vu les gendarmes travestis en civils ; les agents de la force publique mobilisés avec ordre de ne pas saisir ceux contre qui on les mobilisait, et réduits à s’arrêter les uns les autres ; où des chouans, devenus les serviteurs attitrés de la police, recevaient et acceptaient mission de s’employer contre d’autres chouans ; où l’ambition d’accaparer le monopole de la réussite compromet et supprime toutes les chances de réussir, et ne laisse derrière elle qu’un dépit d’avoir échoué se traduisant en récriminations réciproques ; où il n’y eut unanimité que dans les plaintes de ceux qui y furent mêlés, contre les collaborateurs dont ils avaient contrecarré l’action. Il est intéressant, à ce point de vue, de voir quelle était, au lendemain des événements, l’impression des autorités. Divers documents la font connaître.

Le Préfet de Loir-et-Cher écrivait[22] : « L’affaire de la rançon a échoué parce qu’on a employé trop d’agents ; parce que ceux-ci ont eu des opinions contradictoires ; parce que trop de personnes ont été dans le secret, et par les confidences de Mme  Clément de Ris à son hôte, et par les avis qu’elle a peut-être donnés elle-même aux brigands de ne plus se présenter.

« On ne peut que respecter le sentiment qui lui faisait contrarier les vues du Gouvernement ; mais il n’en est pas moins résulté un obstacle de plus à l’accomplissement de ces vues. En outre, l’idée d’observer les brigands, de les laisser prendre l’argent, et de les suivre n’importe où ils allassent (telles étaient les instructions données par l’Aide de camp Savary), était inexécutable. Je crois avoir tiré le meilleur parti de la situation où j’étais. »

Le Général Liébert attribuait également aux indiscrétions, ou plutôt au manque de discrétion de Mme  Clément de Ris, l’insuccès de l’entreprise : « Chacun a su[23] quel jour les fonds avaient été réunis, en quelles espèces, quand ils sont partis, par qui ils ont été portés, pour quelle destination... » Faisant sienne l’hypothèse du Préfet de Loir-et-Cher, qu’avant de quitter Blois Mme  Clément de Ris avait probablement prévenu les brigands d’ajourner la recette des cinquante mille francs, il concluait : « Je le répète, la citoyenne Clément de Ris fera tout ce qu’elle pourra pour éluder la surveillance de la force armée, afin de délivrer les fonds pour assurer la vie de son mari, et c’est cette crainte qui fera peut-être échapper les voleurs[24]... »

Quant à Fouché, indulgent au Préfet de Blois, – auquel il savait gré d’une critique témoignant de la duplicité de Savary – il le félicitait, et réservait ses blâmes au Préfet de Tours. Il ne lui pardonnait ni sa condescendance aux désirs de Mme  Clément de Ris, ni sa mollesse à agir, ni sa complaisance à se mettre à la remorque de l’Aide de camp du Premier Consul. Il raillait ce luxe d’agents mis en campagne « pour surveiller une simple remise de fonds, et dont la démonstration hostile avait favorisé la fuite des coupables. ─ Envoyer des émissaires pour surveiller la remise des fonds n’est pas une démonstration hostile, mais une précaution en vue de l’avenir, répliquait le Préfet ; arrêter mettait le Sénateur en péril ; l’essentiel était de savoir où les brigands se cachaient ; il serait facile, après la délivrance du prisonnier, d’aller les y chercher et de s’emparer d’eux, si toutefois alors le commandant Boisard et la gendarmerie apportaient, à seconder le zèle du Préfet, une bonne volonté et une vigueur auxquelles, jusqu’ici, il avait en vain fait appel[25] ».

Fouché n’avait pas attendu cette nouvelle preuve de l’obstacle apporté à la libération du prisonnier par ces divergences de vues, pour chercher ailleurs d’autres auxiliaires. Il les avait trouvés parmi les chouans eux-mêmes. Néanmoins, et pour sauver les apparences, pour cacher son jeu, il prescrivit de continuer les recherches ; de surveiller Mme  Clément de Ris, disposée, selon toutes prévisions, à renouer négociation avec les brigands ; d’arrêter, si l’occasion s’en offrait, toute personne soupçonnée d’avoir trempé dans l’attentat. Cette occasion, le hasard venait de la fournir.


IV

Le 11 vendémiaire, à l’heure même où l’on préparait, à Blois, la mise en arrestation de Lemesnager, un voyageur se présentait à la mairie de Poitiers pour faire viser ses papiers. Il disait s’appeler Leclerc, domestique, originaire de Bazas (Gironde), se rendant à Lille. Effectivement, son passeport était au nom de Leclerc Charles-Marie, mais d’un Leclerc qualifié « ancien capitaine des chouans de Vendée, né à Nogent (Seine), demeurant à Libourne chez son beau-père, et se dirigeant sur Montauban[26] ». Mis en demeure de s’expliquer sur ces discordances, il confessa que le passeport était altéré. Son vrai nom était Armand-Emmanuel Desmarets de Bauzain, ci-devant officier à l’ex-régiment de Poitou, émigré, blessé d’un coup de feu à l’armée de Condé (il portait, en effet, deux cicatrices au bras gauche). Il venait de Paris et retournait chez lui pour avoir de quoi soulager sa misère. Il suppliait qu’on ne le menât pas chez le Juge de paix.

La requête parut bizarre et suffit à le faire conduire où il préférait ne pas aller. Devant le juge, il revint sur ses précédentes déclarations et protesta que Leclerc était bien son nom. Questionné sur l’emploi de son temps, il dit avoir couché la veille à Poitiers, et, précédemment, à Châtellerault, Sorigny, deux nuits à Montbazon, Tours, Amboise, où il avait été hébergé chez M. de Perceval, ancien Grand-Prévôt et Inspecteur Général de la ci-devant Maréchaussée ; Blois enfin, où il avait séjourné à l’hôpital du 1er au 3 vendémiaire, et où, dans la journée du 2 il avait été fort surpris d’entendre le bruit du canon.

« N’avez-vous pas, lui demanda-t-on, eu connaissance de l’affaire Clément de Ris ?

─ Oui, chez le citoyen Perceval, dont la maison est distante à peine de deux ou trois lieues de l’endroit où le crime a été commis.

─ Connaissez-vous Cassenac et Monnet ?

─ Jamais je n’en ai entendu parler.

─ Le 1er vendémiaire, n’étiez-vous pas dans les environs de Tours ?

─ N’allez pas croire, s’écrie-t-il vivement, que je sois de ceux qui ont été chez le Sénateur Clément de Ris ! »

On s’enquiert pourquoi cette réponse : « C’est que, dit-il, je frémis encore du soupçon qu’on semble disposé à m’imputer d’avoir participé à ce crime ! » ; pourquoi il n’a pas fait signer son passeport aux lieux où il a séjourné : « Par crainte précisément d’être pris pour un des ravisseurs » ; et il raconte avoir été plusieurs fois arrêté par les colonnes mobiles qui battaient le pays, et qui, après avoir pris connaissance de son passeport, l’ont laissé aller. « Ce passeport n’est pas en règle, interrompt le magistrat ; on va vous arrêter. » Leclerc se trouble de plus en plus. Ses bagages sont saisis, fouillés ; on y découvre deux pistolets, un pantalon et une veste de hussard semblable à celle des ravisseurs. On l’arrête et l’on en réfère au Ministre, qui répond « de le retenir en tout état de cause, jusqu’à ce qu’une décision soit prise sur le fait de son émigration[27] ».

Trois semaines plus tard (5 brumaire) Leclerc, sur réquisition du Directeur du Jury d’Indre-et-Loire, devait être transféré de Poitiers à Tours, où le mandat d’amener décerné contre lui fut (11 brumaire) converti en mandat d’arrêt.


V

Ni l’arrestation de Leclerc, ni celle de Lemesnager n’apportaient la lumière sur ce que dix jours de recherches n’avaient pu découvrir, le lieu où le Sénateur était séquestré. L’échec de Blois ajoutant aux raisons qu’on avait de craindre pour sa vie, l’anxiété régnait, plus vive que jamais. Une lettre des brigands, datée de Blois le 11 vendémiaire, et rouvrant jour aux pourparlers, la suspendit pour un temps.

Cette lettre, signée Belzébuth, invitait Mme  Clément de Ris à se trouver, à bref délai, à Orléans, auberge des Trois Maures, pour renouer la négociation avortée ; elle lui commandait, sous peine pour elle et les siens de malheurs incalculables, entière discrétion ; si, la première fois, elle ne s’était pas écartée du secret demandé, elle serait d’ores et déjà en possession de son mari[28]. Informé de la chose, Fouché adressa de courtes instructions aux Préfets d’Indre-et-Loire et du Loiret : « Surveillez et concertez-vous », écrivait-il au premier ; « Prenez toutes vos mesures pour arrêter », mandait-il au second, qui mit sur pied toutes les autorités civiles, militaires et policières du département, et fit garder toutes les auberges de la ville et de la banlieue, – en pure perte, on va le voir.

On a peu de renseignements, et parfois ils sont contradictoires, sur cette négociation. Elle fut, en effet, reléguée au second plan et comme étouffée par cette intrigue de la délivrance, dont, il faut le dire, nul, pas même Fouché, ne put se vanter, avec sincérité, d’avoir tenu les fils. Chacun dut, et ce n’est pas le moins piquant de l’affaire, s’en rapporter à la bonne foi de gens en qui sa confiance était médiocre ; le hasard pourvut au reste et y pourvut bien, puisqu’il restitua au prisonnier sa liberté et permit à chacun de se croire pour une part dans ce résultat.

Boisard et Chevillot rentrés à Tours s’étaient empressés de rendre compte à Liébert de leur mission et du retour de Mme  Clément de Ris à Beauvais. Liébert leur communiqua une lettre, qu’en leur absence le Général Girardon[29] lui avait transmise. Apportée par un inconnu, désireux de garder l’incognito, et qui disait l’avoir trouvée, cette lettre n’était pas moins singulière en sa teneur que par le mystère de son origine. La voici :


Du Quartier Général, 19 août 1800.

  « Mon cher Condé,

» J’ai fait part de vos nouveaux avis à nos camarades. On les a trouvés judicieux et on les suivra de point en point. J’espère qu’avant huit jours nous aurons réussi à nous emparer de ce maudit bonhomme de Maignan[30], que nous avons manqué tant de fois. Mais il paiera tout le mal qu’il nous a fait. On lui[31] enverra sur la somme exigée : 1° ce qui lui revient ; 2° ce qu’il a promis à son beau-frère Lambert, et un présent que nous nous proposons de faire à votre épouse et à la belle Andrée, que j’embrasse de tout mon cœur. L’affaire du père Maignan consommée, nous nous occuperons de quelque expédition au loin. Ensuite nous reviendrons par ici faire les autres que vous savez, et vous continuerez d’avoir toujours votre part au gâteau, et vous n’aurez point affaire à des ingrats. Frisé, que vous nous avez envoyé, nous est fort utile. »

Signé : Un de vos agents.

D’abord la lettre parut suspecte. Puis, on se demanda s’il n’y avait par corrélation entre l’expédition au loin qu’elle annonçait et l’enlèvement de Beauvais. L’hypothèse était permise. Fouché même, à quelques jours de là, prescrira enquête à ce sujet[32]. D’autre part, qui était ce Condé destinataire de la lettre ? Était-il un nom réel sciemment ou inconsciemment altéré, ou une appellation convenue ? Liébert soupçonna qu’il s’agissait peut-être d’un certain Gondé, ex-chouan, émigré non rayé, originaire de Romorantin[33], encore qu’il se dît de Loches, et signalé comme ayant, aux jours complémentaires, sous le nom de Charles que lui avait donné Mme  Arthur[34], quitté le département de la Sarthe. Ce qu’il apprenait, rapproché des circonstances de l’enlèvement, lui fit supposer que Gondé avait pu y participer. Pour s’en assurer il demanda communication des pièces de l’enquête[35]. Le Préfet refusa. Son hostilité ne désarmait pas. Liébert s’appliqua à gagner sa confiance : sa seule ambition, disait-il, était de sauver le Sénateur et d’arrêter du même coup les brigands. Il fit part de ses soupçons contre Gondé. Il raconta qu’ayant su le château de Fontenaille, près Neuvy, fréquenté par d’anciens chefs chouans, il y avait établi une surveillance de jour et de nuit. Il proposa, en prévision d’une reprise des pourparlers et d’un transfert du prisonnier à proximité de Beauvais, de poster à tous les ponts du Cher des gendarmes, chargés d’appréhender l’escorte. Savary appuya la proposition. Rien ne prévalut contre la résistance du Préfet. « On ne peut, répondit-il, arrêter et sauver tout ensemble. »

La responsabilité du Général était dégagée ; il n’insista pas ; il déplorait seulement une inaction qu’on ne comprendrait pas, et qui, militaires et civils, compromettait tout le monde. Qu’on tentât au moins une dernière battue, en forces, avec visites domiciliaires ! L’effort dont elle témoignerait imposerait silence aux critiques dirigées en haut lieu contre la mollesse des autorités d’Indre-et-Loire.

Le Préfet parut ébranlé ; mais il fut d’avis de surseoir jusqu’à ce qu’il eût vu Mme  Clément de Ris. Il savait la visite reçue par elle d’un agent du Ministre ; sans doute, en cette entrevue, des engagements avaient été pris qu’il ne connaissait pas ; avant d’agir, il fallait savoir. Liébert et Savary promirent d’attendre son retour et se retirèrent[36].

Le lendemain donc (14 vendémiaire) le Préfet se rendit à Beauvais, y passa la journée entière, et eut tout loisir d’entendre Mme  Clément de Ris, de pénétrer ses intentions, d’examiner avec elle la conduite à tenir. Elle dit la visite de Sourdat, ses promesses, ses avis, l’engagement pris par elle vis-à-vis de lui, et son regret de l’avoir pris quand, à Beauvais, elle avait trouvé la lettre des brigands. Elle confessa son angoisse. Manquer à sa parole lui aliénait un auxiliaire fort de la confiance de Fouché et qui avait su gagner la sienne ; la tenir exposait elle et les siens à ces incalculables malheurs dont on la menaçait. Où qu’elle se tournât, elle ne voyait que sujets d’alarmes. Le Préfet compatit à son inquiétude et combattit son appréhension. Aux motifs qu’elle voyait de craindre, il opposa les raisons qu’elle avait d’espérer. Il représenta le danger de toute démarche contraire aux désirs du Ministre, et il ne quitta pas Beauvais sans avoir obtenu promesse que Mme  Clément de Ris le préviendrait fidèlement des tentatives faites auprès d’elle par les brigands, et ne poursuivrait avec eux aucune négociation directe[37].

Cette promesse fut-elle une feinte ? Le Préfet du Loiret[38] l’affirme, Carré de Busserolle le répète, et un fait indéniable semble leur donner raison : le 20 vendémiaire arrivèrent à Orléans, porteurs de la rançon convenue, les citoyens Bruley et Guizol, tous deux de l’intimité des Clément de Ris. Mais, par ailleurs, existe une autre preuve, et non moins indéniable, de la bonne foi de Mme  Clément de Ris : c’est le reçu[39] portant restitution, à la date du 14 vendémiaire, des sommes prêtées le 6, en vue de cette rançon, par les frères Gouin d’une part et le citoyen Lhéritier de l’autre, sommes s’élevant ensemble au total de vingt-quatre mille francs. Mme  Clément de Ris avait, pour se libérer, jusqu’au 6 brumaire. Ce remboursement anticipé n’est-il pas signe qu’au 14 vendémiaire son intention était bien de suivre les conseils de Sourdat et de ne pas payer ?

Que conclure de cette contradiction ? Verra-t-on là une nouvelle feinte ? le désir de cacher, par une restitution patente, le dessein d’emprunter ailleurs en secret, et de poursuivre ainsi plus sûrement son idée première ? C’est prêter à la malheureuse, prise entre les suggestions de sa tendresse alarmée et les sollicitations de ses conseillers, une duplicité étrangère à son caractère, une maîtrise de soi peu compatible avec l’affolement de l’heure présente. Nous croyons plutôt que, sincère en son intention au moment où elle s’était engagée vis-à-vis de Sourdat, sincère en sa promesse au Préfet de rester fidèle à cet engagement, quand, ensuite, elle avait vu les heures, les jours s’écouler sans amener la délivrance attendue, dominée par ses craintes, ébranlée dans sa confiance, par un brusque revirement de passion que comprendra toute femme vraiment femme, elle s’était, dans un sursaut de colère, rattachée à son dessein d’agir par elle-même et de rentrer directement en composition avec les brigands. Elle avait cherché, trouvé de nouveaux prêteurs[40]. Ainsi s’expliquerait le voyage à Orléans de Bruley et de Guizol et leur attente à l’auberge des Trois Maures. Attente vaine. Personne ne se présenta, et pour cause. Depuis la veille le Sénateur était libre !


VI

Il était dit qu’en cet étrange drame, du début à la fin, tout serait surprise, le dénouement autant et plus encore peut-être que l’enlèvement.

Le 14 vendémiaire au soir, comme il revenait de Beauvais, le Préfet reçut, au débotté, la visite de Savary et de Boisard, dépêchés par le Général Liébert. Ils venaient chercher sa décision au sujet de la battue mise en question la veille. Le Préfet hésitait toujours. Il craignait, par une imprudence, de contrarier l’entreprise concertée entre Sourdat et le Ministre. Savary et Boisard insistèrent : l’opinion publique finirait par imputer aux autorités du département une complicité tacite avec les ravisseurs ; l’impatience du Premier Consul tournait à l’irritation ; ce que le Préfet se refusait à faire, d’autres l’entreprendraient ; déjà, sur avis que le prisonnier était séquestré au vieux château de Palluau, le Préfet de l’Indre se disposait à en fouiller les ruines, les souterrains et les cachots[41] ; lui laisserait-on le monopole d’un zèle qui, même infructueux, n’en accuserait que davantage l’apathie des autorités tourangelles ? Mieux que toute autre cette raison vainquit la résistance du Préfet.

On convint qu’une colonne, composée de gendarmes à pied et à cheval, des sous-officiers du train d’artillerie, de vétérans, de gardes forestiers, partirait dans la nuit pour se trouver, au jour levant, à l’entrée de la forêt de Loches. Tous les officiers et le chirurgien Petit en feraient partie ; Liébert la dirigerait en personne : « J’augure beaucoup, écrivait-il, de cette opération, si elle n’est pas dérangée. Les militaires iront et marcheront, pour sauver les jours du Sénateur, avec cette bonne foi et cette belle loyauté qui caractérise et a toujours caractérisé leurs actions[42]. » C’était la réplique aux précédentes insinuations du Préfet contre les militaires[43].

On partit en quatre détachements : l’un visiterait La Beaupinaie, où le prisonnier passait pour avoir été conduit le jour de l’enlèvement ; deux autres battraient la rive droite de l’Indre, celui-ci entre Loches et Châtillon, celui-là jusqu’au château de Chailloux et à Montrésor ; le quatrième, sous la direction de Boisard, remonterait vers Montrichard, Saint-Aignan et Palluau.

Un accroc marqua le début de l’opération. Le Général Liébert, malade, ne put aller personnellement au delà de Loches. Il rentra à Tours, où Savary était resté. L’expédition se fit sans lui et se poursuivit durant les journées du 16, du 17, et la matinée du 18.

Le 18 au soir, sur les dix heures, le Sous-Préfet Lemaître, le commandant Boisard et le lieutenant Gaultron, las de longues et vaines chevauchées, rentraient à Loches, escortés de quelques gendarmes, quand, aux abords de la sous-préfecture, ils furent rejoints par quatre cavaliers, marchant à vive allure, et venant du côté de la forêt. Tant de hâte éveilla leurs soupçons. Ils sommèrent les cavaliers de s’arrêter, de dire où ils allaient, d’où ils venaient. « Nous allons chez le Sous-Préfet, répondirent-ils, et nous arrivons de Montrichard. Invités à descendre de cheval et à suivre les représentants de la loi, ils obéirent et accompagnèrent ceux-ci à la sous-préfecture. »

On les requit d’exhiber leurs papiers. Ils montrèrent des passeports signés la veille à Tours, aux noms de Carlos Sourdat, Arthur Guillot de La Poterie, Robert Couteau, Charles Salaberry, négociants. Cette qualification cadrait mal avec leur mise, leurs armes, le train dont ils allaient. On leur en fit la remarque. Ils ne cherchèrent pas à s’en prévaloir plus longtemps et se déclarèrent agents du Ministre de la Police, envoyés de Paris pour coopérer aux recherches et hâter la délivrance du citoyen Clément de Ris. Inexacte, l’affirmation eût été si hardie qu’on n’osa pas la supposer fausse ; elle était si extraordinaire qu’on hésitait à la croire vraie. Ils devinèrent les doutes de ceux qui les interrogeaient, et, pour les lever, montrèrent une lettre de Fouché, datée du 15 vendémiaire, à l’adresse du Sénateur, et produisirent une commission du Ministre ainsi libellée : « Le Ministre de la Police charge le citoyen X... (le nom en blanc) de se rendre à Tours pour y découvrir les brigands qui ont enlevé le Sénateur Clément de Ris. Lorsqu’il sera parvenu à les découvrir, il est autorisé à les faire arrêter et à les faire conduire à la prison de Tours. Lorsqu’il aura délivré le Sénateur, il le conduira à son épouse et les invitera à se rendre sans délai à Paris pour y donner tous les renseignements nécessaires au Ministre de la Police. Il leur recommandera le secret le plus absolu sur ces renseignements. Les Préfets et les commandants militaires sont invités à seconder les efforts du citoyen X... »

Cette commission était signée de Fouché et revêtue du timbre de la Police générale. C’était la même qui, lors de la visite de Carlos Sourdat, avait si fort ému le Préfet de Loir-et-Cher[44]. Les cavaliers ajoutèrent qu’il fallait désormais s’abstenir de recherches ostensibles, car elles empêchaient toute découverte.

Devant une réquisition en si bonne forme, il fallait s’incliner. Le lieutenant dressa procès-verbal de l’incident et les cavaliers furent laissés libres de continuer leur route. Parole de gendarme est suspecte : craignant d’être suivis, ils dirent vouloir passer la nuit à Loches ; ils en repartiraient le lendemain après avoir revu le Sous-Préfet. Cette déclaration acheva d’inspirer confiance en leur véracité, et ils prirent congé pour se rendre à une auberge qu’ils désignèrent.

Le lendemain [45], sitôt levé, le Sous-Préfet s’enquit des voyageurs dont il attendait la visite et, sans doute aussi, quelques indications complémentaires : ils avaient quitté Loches au milieu de la nuit ! Se croyant joué, il mande Boisard et le lieutenant. Tous trois sont d’accord pour surseoir à toutes recherches, envoyer des estafettes dans toutes les directions à la recherche des cavaliers, et attendre.

Au bout de quelques heures, une des estafettes revient et dit, – coup de théâtre ! – avoir rencontré, près de Bléré, les individus de la veille, et, avec eux, le Sénateur, qui se rendait chez lui... Le lieutenant saute à cheval, et, accompagné des gendarmes Vernier, Chartier, Delorme, et Dubois brigadier, part pour Beauvais. Il y arrive sur les cinq heures, trouve le Sénateur au milieu de sa famille et de ses libérateurs, et reçoit sa déclaration[46] en présence du Préfet et des autorités venues pour le féliciter.

La nouvelle de la délivrance avait été connue à Tours, vers trois heures, par un billet qu’apportait le fils aîné de Clément de Ris. Ce billet, envoyé de Bléré par le Sénateur, annonçait aux siens que, quelques braves, qu’il ne nommait pas, l’avaient délivré des mains des brigands au moment où ceux-ci le changeaient de cachot[47]. Au reçu de cet avis, le Préfet, amenant avec lui le Directeur du Jury et le Président du Tribunal, était parti pour Beauvais, pendant que Savary, par exprès spécial[48], informait le Premier Consul de l’événement.



  1. Mémoires de Savary.
  2. Lettres du Général Liébert au Ministre de la Guerre (7-10 vendémiaire). Archives du Ministère de la Guerre : Armée de l’Ouest.
  3. « En toute la région de la Basse-Loire, la guerre civile a laissé un résidu de gens vivant de meurtres et de rapine. À tout instant un déserteur audacieux, un vagabond entreprenant s’associe quelques hommes de son espèce. À huit ou dix ils tombent à l’improviste sur un village, forcent une habitation, pillent une recette, attaquent une diligence, rançonnent un propriétaire. La terreur qu’ils inspirent est telle que les habitants n’osent les signaler et faciliter l’action de la Justice. Les préfets, en vain, multiplient les moyens de rigueur, les moyens d’indulgence, rien n’y fait. Quelques bandes vont vagabonder plus loin, et on en retrouve jusqu’aux environs de Sancerre et de Nevers. » Vandal.
  4. Entre autres Chandelier et Arthur de La Poterie, qui sera un des chouans libérateurs de Clément de Ris.
  5. A. de Beauchamp (Mémoires inédits) affirme positivement que le but des ravisseurs avait été de « se procurer cinquante mille francs pour recommencer la guerre imminente ».
  6. Voir page 54.
  7. Durant cette première phase de l’affaire, Fouché, quoi qu’on en ait dit, ne prêcha pas ouvertement la composition avec les brigands.
    Le Journal des Débats (16 vendémiaire) ayant insinué que les membres du Sénat conservateur s’étaient cotisés pour fournir la rançon de leur collègue, reçut du Ministre cette note, insérée le 19 : « Il est faux que le Sénat ait envoyé à Mme  Clément de Ris la somme exigée par les brigands qui ont enlevé son mari. Une mère, une épouse peuvent et doivent tout faire en pareil cas. Mais jamais une autorité constituée ne doit descendre à une pareille composition. »
  8. « Le chef de brigade Savary n’a pas été peu surpris, écrit-il, de voir que cette affaire se traitait sans le concours de l’autorité militaire. Il m’en parla et témoigna sa surprise au Préfet en lui disant qu’il ne pouvait ainsi s’isoler du corps auquel il tenait. » Archives historiques du Ministère de la Guerre.
  9. Il était urgent, selon lui, de « rompre les complots de la chouannerie » et de mettre en arrestation « les hommes dont l’audace et les menées secrètes menaçaient de rallumer le feu de la guerre civile ». Archives nationales, F7 6265.
  10. C’était, dira plus tard Mme  Lacroix, une de ses cousines qui cherchait à endormir un petit enfant. Dossier d’Angers.
  11. Rapport du capitaine Folliau. Dossier d’Angers.
  12. Rectifions ici une inadvertance de M. Robert de Prugnes, qui cite, comme porteurs de la rançon, MM. Bacot, Bruley et de la Bellangerie.
    La Bellangerie était le nom de la propriété habitée, durant la belle saison, par Bruley, et sise près de Vouvray.
  13. Seize mille francs furent fournis par des amis, dont Bruley ; six mille par les frères Gouin, banquiers ; dix mille par le citoyen Petit, notaire ; dix-huit mille par le citoyen Lhéritier, le tout en espèces d’or et d’argent, remboursables, pour les deux premiers emprunts, dans le délai d’un mois, et, pour le troisième, à réquisition. Les reçus, signés de Mme  Clément de Ris, sont datés du 6 vendémiaire. Voir aux annexes.
  14. Archives historiques du Ministère de la Guerre.
  15. Cette rue a subsisté telle qu’elle était, à une maison près, qui a fait récemment place à un marché couvert.
  16. Archives historiques du Ministère de la Guerre. Armée de l’Ouest.
  17. Fils de François Sourdat, de Troyes, lequel s’était offert pour défendre Louis XVI, et qui, après l’attentat de nivôse, devait être arrêté par mesure de sûreté, Carlos Sourdat était l’ancien Aide de Camp de Bourmont et le frère de Bernard Sourdat, dont il a été parlé plus haut. Il fut, sous Louis XVIII, créé Lieutenant-Colonel.
  18. Lettre du Préfet de Loir-et-Cher au Ministre de la Police (12 vendémiaire).
  19. Lettre du Préfet d’Indre-et-Loire au même (17 vendémiaire).
  20. Le 12 vendémiaire.
  21. Lettre de Liébert au Ministre de la Guerre (13 vendémiaire). Archives historiques de la Guerre.
  22. Lettre au Ministre de la Police, – 12 vendémiaire.
  23. « L’enlèvement du Sénateur Clément de Ris a excité une douleur générale. Une lettre de Tours, en date du 9 vendémiaire, annonce que ses ravisseurs demandent 2000 louis d’or et que sa malheureuse épouse tient cette somme prête. » Rapport de police.
  24. Lettres au Ministre de la Guerre (12-13 vendémiaire). Archives historiques de la Guerre.
  25. Correspondance échangée entre le Préfet d’Indre-et-Loire et le Ministre de la Police (11-15 vendémiaire).
  26. Taille : 1 mètre 75, nez effilé, visage maigre, yeux bleus, cheveux blonds, âgé d’environ 30 ans.
  27. Interrogatoire de Leclerc à Poitiers. – Signé Bourgeois, maire ; Caillot, juge de paix.
  28. Dossier d’Angers.
  29. Général de brigade, commandant la subdivision territoriale de Maine-et-Loire, dont Angers était le siège.
  30. Voir page 63.
  31. Lui ne saurait désigner Maignan. Il s’agit évidemment d’un tiers connu des deux correspondants ; ou peut-être (supposition autorisée par la mention du cadeau pour votre épouse, et par les mots vous aurez toujours part au gâteau) du destinataire lui-même.
  32. Le 4 brumaire.
  33. Voir pages 15, 66, 148 et suivantes.
  34. Mme  Arthur Guillot de La Poterie (voir page 73 et note 1).
  35. Cette demande fut faite par l’entremise de Savary, qui, sur le refus du Préfet de communiquer les pièces, revint prendre Liébert et le ramena avec lui à la Préfecture.
  36. Archives historiques de la Guerre. Armée de l’Ouest.
  37. Lettres du Préfet d’Indre-et-Loire au Ministre de la Police (15-17 vendémiaire).
  38. Lettre du Préfet du Loiret au Ministre de la Police (22 vendémiaire).
  39. Voir aux Annexes.
  40. Qui ? nous l’ignorons. – Aucune pièce, ni aux Archives, ni parmi les papiers privés de Clément de Ris, ne renseigne sur ce point.
  41. Cette expédition eut lieu du 16 au 17 vendémiaire, et, bien que nulle en ses résultats, valut au Préfet de l’Indre les félicitations du Ministre.
  42. Lettre de Liébert au Ministre de la Guerre (15 vendémiaire). Archives historiques de la Guerre.
  43. Voir page 91.
  44. Voir page 87.
  45. 19 vendémiaire.
  46. Archives nationales (dossier Clément de Ris) et Archives historiques de la Guerre (correspondance de Liébert).
  47. Lettre du Préfet d’Indre-et-Loire au Ministre de la Police (19 vendémiaire). « Le Sénateur, ajoutait le Préfet, aura trouvé à Beauvais une garde que j’y avais envoyée pour la sûreté de sa famille. » Il a été parlé (page 62 note 3) de cette surveillance, qualifiée par Carré de Busserolle de jonglerie de Fouché « à la fois directeur, machiniste en chef et souffleur » de ce qu’il appelle une comédie, ou, si l’on préfère, une parade ! Gardons le mot de comédie pour la mise en scène de la délivrance. Quant à la surveillance du domicile du Sénateur, elle était chose naturelle ; l’hypothèse d’un chantage des brigands n’avait rien que de vraisemblable, l’événement le prouva. Au reste Carré de Busserolle se contredit lui-même. Il dit (pages 26-27) qu’en toute cette affaire le Préfet d’Indre-et-Loire avait agi de fort bonne foi, et, neuf pages plus loin (page 35) il l’appelle le compère de Fouché.
  48. Cet agent, nommé Pillet, était en outre porteur de dépêches pour différents personnages. N’ayant pas trouvé le Premier Consul à Paris, il porta le message à la Malmaison (voir aux Annexes).