Utilisatrice:Ambre Troizat/Récension bibliographique/Œuvres de Victor Schœlcher

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Victor Schoelcher[modifier]

  1. Victor Schoelcher, Des colonies françaises : Abolition immédiate de l'esclavage
    1. Afin d'échapper à l'ignominie, les gens de couleur…

Contre le préjugé couleur/race, devenir amérindien[modifier]

Afin d'échapper à l'ignominie, les gens de couleur qui ne se piquèrent jamais de réagir contre le mal tout d'imagination dont ils étaient frappés comme leurs mères, firent individuellement de grands efforts, dès le principe, pour se faire déclarer de race indienne ( les Indiens n'étant point en esclavage on n'avait pas eu besoin d'avilir leur sang, et ils ne cessèrent jamais de jouir de tous les privilèges attribués à la race blanche) ; mais les mulâtres, a moins d'employer d'actifs moyens de corruption dans les bureaux de la métropole, ne parvenaient point à obtenir l'honneur d'avoir été portés dans les flancs d'une caraïbesse plutêt que dans ceux d'une négresse.

"J'ai rendu compte au roi, écrivait le ministre au gouverneur de Saint-Domingue, le 27 mai 1771 de la lettre de MM. de Nolivos et Bougars, du 10 avril 1770, contenant leurs réflexions sur la demande qu'ont faite les sieurs ** de lettres patentes qui les déclarent issus de race indienne. Sa Majesté n'a pas jugé a propos de la leur accorder, elle a pensé qu'une pareille grâce tendrait à détruire la différence que la nature a mise entre les blancs et les noirs, et que le préjugé politique a eu soin d'entretenir comme une distance à laquelle les gens de couleur et leurs descendans ne devaient jamais atteindre, parce qu'il importe au bon ordre de ne pas affaiblir l'état d'humiliation attaché à l'espèce noire, dansquelque degré que ce soit; préjugé d'autant plus utile qu'il est dans le cœur même des esclaves , et qu'il contribue au repos de la colonie. Sa Majesté a approuvéen conséquence que vous ayez refusé de solliciter pour les sieurs** la faveur d'être déclarés issus de race indienne, et elle vous recommande de ne favoriser, sous aucun prétexte, les alliances des blancs avec les filles des sang mêlés."

"Sa Majesté vient de révoquer le marquis de ..., capitaine de dragons, pour avoir épousé en France une fille de sang mêlé ! S. M. est déterminée à maintenir à jamais le principe qui doit écarter les gens de couleur et leur postérité de tous les avantages attachés aux blancs.
L'antiquité n'eut pas besoin de pareilles fictions pour maintenir sans danger la servitude, parce que la servitude chez elle était une condition reconnue d'existence sociale, et que le libre cessant de l'être, acceptait son sort comme un fait malheureux, mais normal. L'esclavage des nègres, au contraire, étant un fait exceptionnel avait besoin de les avilir à leur propres yeux pour les contenir. Le préjugé était une chaîne mise à leur esprit, plus solide encore que celles dont on chargeait leurs bras.

En Orient où il y a aussi des esclaves, mais de toutes couleurs, il n'existe pas de préjugés de cette nature. On n'en a pas besoin. S'il s'en trouve dans les états libres de l'Amérique du nord, c'est qu'ils ont eu des esclaves, c'est qu'ils en voient encore au sud qui sont tous exclusivement pris dans une race spéciale. Un moyen infaillible de détruire très vite le préjugé de couleur serait de mettre des blancs en esclavage. Mais si l'on voulait essayer de la recette, nous demanderions comme auteur, que l'on n'employât à l'expérience que des anti-abolitionistes.

La crainte morale que le blanc doit inspirer à son atelier, composé de deux ou trois cents noirs, est encore un des affreux malheurs de l'état de choses fondé aux colonies. La sûreté des maîtres veut qu'aucun membre de leur caste n'ait jamais tort contre un nègre. (Victor Schœlcher.- Des colonies françaises, Abolition immédiate, 1845
)