Vie de Mohammed/Grand combat de Bedr

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Traduction par Adolphe-Noël Desvergers.
Imprimerie royale Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 38-41).

grand combat de Bedr.

C'est par ce combat que Dieu signala le triomphe de sa religion, et voici comment À eut lieu. Une caravane de Koreschïtes revenait de Syrie, escortée par Abou-Sofian, fils de Harb, à la tête de trente guerriers, et le prophète de Dieu avait dirigé contre eux un corps de troupes. Abou-Sofian en ayant en avis, envoya quelqu'un des siens à la Mecque et fit savoir aux Koreïschites l'attaque que méditait contre lui le prophète. Aussitôt ils se hâtèrent de sortir de la ville, et de tous les principaux d'entre eux il ne manqua qu'Abou-Lahab qui envoya à sa place As, fils de Hescham. Le nombre des Kordschites montait à neuf cent cinquante hommes, parmi lesquels il y avait cent cavaliers. Le prophète sortit de Médine le troisième jour du mois de ramadhan, dans In seconde année de l'hégire; il avait avec lui trois cent treize hommes, parmi lesquels on comptait soixante et dix-sept Mohageriens. Les Ansariens formaient le surplus. Il n'y avait en tout que deux cavaliers dont l'un était Micdad, file d'Amrou, de la tribu des Benou-Kenda; et là-dessus il n'y a pas deux avis; quant au second, les uns disent que c'était Zobeir, fils d'Awam: d'autres rapportent que c'était un autre que lui. Les Musulmans avaient encore: soixante-dix chameaux sur les quels ils montaient tour à tour. Le prophète de-Dieu campa à Safra (66), et là on vint lui annoncer que la caravane approchait de Bedr (67) et que les infidèles étaient sortis de la Mecque pour la défendre. À cette nouvelle il se mit en arche et vint camper à Bedr auprès du puits Le plus voisin de l'ennemi. Saad, fils de Moadh, conseille de construire une cabane (68) pour le prophète, ce qui fut fait, et alors le prophète de Dieu s'y assit avec Abou-Bekr.

Les Koreïschites approchaient, et lorsque le prophète les vit il s’écria : « O mon Dieu, les voici qui approchent dans leur orgueil et leur vanité pour accuser ton prophète de mensonge. Viens me secourir, à mon Dieu, ainsi que te me l’a promis. » Dès que les deux troupes furent proches l’une de l’autre, on vit s’avancer au combat, du côté des infidèles. Otba fils de Rabia, Schaïba, son frère, et Walid, fils d’Otba, Le prophète aussitôt ordonna à Obaïda, fils de Harith, fils de Mottalib de s’opposer à Otba. Harman, oncle du prophète, fut envoyé contre Scbaïba, et Ali, fils d’Abou-Taleb, contre Walid, fils d’Otba. Hama tua Sehaîba ; AH, Walid. et tandis qu’Obaïda et Oiba, tous deux blessés, combatiaient encore. Ali et Hama, venant fondre sur Otba, lls téurent et emyportérent Ohaïda qui avait en de pied coupé et qui mourut de cette blessure ; ensuite le combat devint général.

Cependant le prophète et Abau-Bekr étaient lous deux dans la cabane, etle prophète inv oquait le seigneur en disant : « O mon Dieu, si tu fais périr cette tronpe fidèle, tu ne seras a plus adoré sur la terre ; à mon Dieu, accomplis les promesses. » Il ne cessa point de prier ainsi jusqu’à ce que son manteau, étant tombé, Abou-Bekr le replaça, et le prophète fut saisi de tremblement, puis il revint à lui s’écriant : « Réujouis-toi, à Abou-Bekr, car Dieu vient À notre secours. » Alors il sortit de la cabane pour exhorter ses guerriers À combattre, et prenant une poignée de cailloux la lança sur les Koreischites en disant : « Que k confusion couvre leur visage. » Puis à cri aux siens : « Charges-les. » Aussitôt les Koreischites prirent la fuite.

Cet événement se passa le matin du vendredi, » 17e jour de ramadhan. Abdallah, fils de Macoud, apporta au prophète La tête d’Abou-Djahl, Bis de Heschur, et le prophète se pros crue pour rendre grâce à Dieu. Abou-Djahl fut tué à l’âge de 70 aىs : son nom était Amrou, fils de Hescham, fils de Moghaïra, fils d’Abd-allah, fils d’Omar, fils de Makhzoum. Son frère As, Île de Hescham, fut tué dans le même combat,

Dieu avait envoyé ses anges au secours du prophète. En cet il est dit dans Le Coran : Quand vous avez imploré votre seigneur, il vous a exaucé ; j’envoie mille anges à votre aide (vii, 9). Lorsque Ia nouvelle du combat de Bedr parvint à la Mecque et qu’Abou-Lahab apprit la défaite des siens, il n’y survécut pas sept jours et mourut de douleur. Le nombre des infidèles qui périrent au combat de Bedr Ant de soixante-dix, et le même nombre fut fait captif. Parmi les morts, outre ceux que nous avons nommés, on compta Hantala, fils d’Abou-Sofian, fils de Harb ; Obaïda, fils de Saïd, fils d’As, fils d’Omaïa, tué par Ali, fils d’Abou-Taleb ; Zamaa, fils d’Assouad, tué par Hamza et Ali ; Abou-Bohtori, fils de Hescham, tué par Modjdar, fils de Ziad ; Naoufal, fils de Khowaïled, frère de Khadidja ; c’était l’un des plus méchants d’entre les Koreïschites, et c’était lui qui avait lié ensemble avec une corde Abou-Békr et Talha, fils de Khowaïled, lorsqu’ils embrassèrent l’Islamisme. I fut tué par Ali ; Omair, fils d’Othman, fils d’Omar, de la tribu des Benou-Tamim, tué par Ali ; Maçoud. fils d’Omaia Makhzoumite, tué par Hamza ; Abd-allah, fils de Mondher Makhzoumite, tué par Ali ; Monabbeh, fils de Hadjadj, des Benou-Sahm, tué par Abou-Iasr Ansariens As, fils de Monabbch, tué par Ali : Nabih, fils de Hadjadj et frère de Monabbeh, tué par Hamza et Saad, fils d’Abou-Waccas : Abou-As, fils de Kaïs, de la tribu de Sahm, tué par Ali.

Au nombre des captifs on comptait Abbas, oncle du prophète, et ses deux neveux Okaïl, fils d’Abou-Taleb, et Naoufol, fils de Harith, fils d’Abd-el-Mottalib.

Lorsque le combat fut terminé, le prophète ordonna que les cadavres fussent trainés vers Le puits. Parmi ces corps se trouvaient vingt-quatre des plus redoutables guerriers Koreïschites ; ils furent précipités dans مe puits. Le prophète resta pendant trois jours (69) dans a plaine de Bedr, Le nombre des Musulmans qui périt dans le combat fut de quatorze, six Mohadjériens et huit Ansariens. Revenu à Safra, Mohammed ordonna à Ali de trancher la tête à Nadbr, fils de Harith, qui avait été l’un de ses ennemis les plus ardents (70) ; car lorsque le prophète récitait le Coran, à disait aux Koreïschites : « Mohammed ne vous apporte que des rêveries inventées par les anciens. » Le : prophète fit encore trancher la tête à Okba, fils d’Abou-Moaît, fils d’Omoïa.

Othman, fils d’Affan, était resté, d’après l’ordre du prophête, À Médine, à cause de la maladie de sa femme Rokai (71). fille de Mohammed, et pendant l’absence du prophète, qui fut de dix-neuf jours, elle mourut.



(66) Safra. On Hit dans Je Sirat : « Le prophète do Dieu prit la route «qui de Médine conduit à la Mecque, et parvint à Salra, bourg situé <entre deux montagnes, »

On lit dans le Kitab-Menawit-cl- Hadj, p. 150 : «liomra, Safra el Hos- saciniè forment Je vallée appelée Haler, habitée par les ElZeban. Ces «wois villages sont remplis de jardins ei de plantations de palmiers. «Obïda, fs de Uarith, fs d'Abd-Moltalib, ayant lé rapporté «blessé du combat de Bedr dans la mosquée qui est à Safra, y mourut set y lot enterré.

D'après Édrisi, Quadil-Safra serait un petit port de la mer Rouge silué au-dessus de El Djar qui, d'après Édrisi et Yakouli, servait autre: Lois de port à Médine, el que Bochart {Geng. sac. lb. 1v, cap. 2) et Asse. maui (L HT, p. 3) ont voulu identifier avec la ville nommée Âyye par Piolemée, et"Eypa par Étienne de Dysance. Safra, d'après Burekhardi, est on viBege situé dans la vallée du même none sur La route de Médine à la Mecque, à environ Irois journées au sud-ouest de Médine : celle place serl de marché aux tribus voisines. Les maisons sont béties sur Ja pente de La monlagne ot dans la vallée qui est étroite, laissant à poine ua espace suifisant pour les bocnges de daftiers qui les bordent des deux côtés. (Voyez Burcklherdt, LIL, p. 14 et suis.) On fi dans le Meracid-ol Htile, p. 403 : Quad) Safra qui dépend de Médinc, est une vallée fortile située sur Ja route des pélerins, à une journée de Dedr, Plusieurs sources y versent leurs eaux qui prennent our cours vors Ianbo.

(67) Bar. On dit dans Je Kiteb-Menausik-elHadj, page 151 : «Bedr, » surnonmé Beür-et Kital, doit son nom à une personno ainsi nommée «qui ÿ creusa un pnits, Cest ici que Jes caravanes des pélerins de Syrie «et d'Égypte se rencontrent; l'endroit où se livra le combat de l'isla. - misme se nomme Ghalib (le victerieux}. Cet emplacement est mainte- <nantnne plantation de palmiers dans laquelle se trouvent deux étangs et eune colline de sable de la plus grande blancheur. Au milieu des pal- «miers s'élève une mosquée appelée Mesdjed-elGhoumare [la mosquée des nuages on Ja dislingue aussi sous le nom de Mesdijed el Arisch (la «mosquée de la cabane). Voyez encore sur Bee, Esverpta ex Jakato ap- Gag. pag. 52: et Büsching, p. 628. On lit dans le Aferaeid-et-Jitila, 1 83 + Bedr est un peut lac entre la Mecque et Médine, au-dessous de la vallée de Safra. Entre Bede et el Djar qui se trouve eur Je rivage même de la mers y a one nuit de chemin,

(68) Malgré l'avis de Reîsle, qui pense que le mot yôays doit être rendu par modicur solier, ou saggestelam , il es beaucoup plus probable qu'on doit le tradnire par exhare. On dit dans Le Sénat erreçoul, fa 141

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ANT Jones gp Dai qe ds & ut gpie AN Jon sai «Le prophle de Dieu élait dans uno cabane, of à le porte de cette «cabane se tenait Saad, fils de Moadk, ceint de son épée et gardant Je «prophète à la tôle d'une troupe d'Ansariens,»

(69) Ce fut, dit Gagnier, p. Bo, pendant Les trois jours passés à Bede après la batslle, que se ît le partage du butin. De grandes diseussions 'élant élevées à ce sujet, Mehomet ft descendre du ciel le verset sul. vant afin qu'il servit de règle dans 1a suite lorsqu'il y aurait des dé pouilles À se partager : eSouvenersous que vous devez la cinquième «part du butin à Dieu, eu prophèle, à ses parents, aux orphelins, aux «pauvres et aux voyageurs: si vous croyes en Dieu et en ce que nous cavons révélé à notre servitour, au jour de la distinction, lorsque les r doux armées en sont venues aux mains. » Coran, B' sourate, 41° verset.

(70) On lit dans M. Reinaud {Traité général des pisrres gravées, t. 1, p.53) que le Nadhe, dont il est question ici, avait habité longlennps la Perse, où à s'était instruit à fond des plus anciennes traditions du pays. Cest là ce qui rendait son autorité si redoutable à Mahomet lorsqu'i l'accusait, ainsi que Je dit Abow'lfèda, de ne débiter que des rêverios inventées par les anciens,

(71) Rokaïa était la Woisième fille que Mahomet avait eue de Ka. didja. Elle arait épousé d'abord Otbo, fs d'Abou-Lahab, qui la répudia. et ensuite élle fut mariée à Oihman qu'elle accompagoa dans sa fuite en Abyssinie, puis dans son retour à Médine. Elle en eut un fils uommé Abdallah qui mourut, à six ans, d’une blessure que lui fهt un coq qui, d’un coup de bec, lui avait crevé l’œil, (Gagnier, p. 61.)