Vie du pape Pie-IX/Les martyrs du Japon

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CHAPITRE XX.

Les Martyrs du Japon.


Détournons un instant nos regards de ces scènes pénibles pour les porter sur un événement glorieux mais qui rappelle un douloureux souvenir.

Au commencement de l’année 1862, Pie IX invita les évêques et les fidèles à venir assister à la canonisation de vingt-six bienheureux, martyrisés au Japon en 1597. Un nombre prodigieux de pèlerins répondirent à l’appel du Souverain-Pontife. Trois cent vingt-trois cardinaux, patriarches et évêques, plus de quatre mille prêtres et cent mille étrangers se réunirent à Rome. La politique fit place à la religion. Pendant dix jours, de l’Ascension à la Pentecôte, il y eut une fête continuelle dans la ville éternelle. Les places publiques s’étaient converties en bivouacs, et chaque fois que Pie IX paraissait il était acclamé par cette foule immense. Le 6 juin, Pie IX prêcha lui-même dans la chapelle Sixtine, en latin et en français, devant un auditoire de quatre mille prêtres sur lequel il produisit une impression profonde. Après la bénédiction pontificale, un prêtre entonna la prière : “Oremus pro Pontifice nostro Pio ; prions pour notre pontife Pie, ” et l’assistance répondit trois fois : “Que Dieu le conserve et le vivifie, et qu’il le rende heureux sur la terre, et qu’il ne le livre pas à ses ennemis.”

Le 8 juin 1862, jour de la Pentecôte, après une messe pontificale eut lieu la cérémonie imposante de la canonisation. Le lendemain, dans un consistoire semi-public, auquel tous les évêques présents à Rome assistèrent, le Pape condamna plusieurs erreurs, toujours anciennes et toujours nouvelles, le panthéisme, le matérialisme et le naturalisme, qui, sous des noms différents, tendent au même but : l’affranchissement du genre humain de l’autorité de Dieu. L’épiscopat répondit au Pape, par la voix du doyen du sacré collège, le cardinal Mattei. Cette réponse affirmait trois grands points : la suprême autorité doctrinale et l’infaillibilité du Pontife romain, la souveraineté temporelle du Saint-Siège, et l’union étroite du monde catholique avec le Pape.

Avant de congédier cette auguste réunion des prélats, Pie IX voulut assembler autour de lui toute la hiérarchie dans une agape qui fut offerte dans la bibliothèque du Vatican. À ce banquet, régna l’allégresse la plus vive jointe à la plus grande dignité.

L’année précédente, Pie IX avait eu la consolation de recevoir dans le sein de l’Église une grande partie de la nation bulgare qui abjura le schisme de Photius.