Vie et opinions de Tristram Shandy/4/64

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Traduction par Joseph-Pierre Frenais.
Chez Jean-François Bastien (Tome troisième. Tome quatrièmep. 178-179).



CHAPITRE LXIV.

Les trous de serrure.


À l’heure même où mon père écrivoit son instruction fraternelle, mon oncle Tobie et le caporal de leur côté disposoient tout pour l’attaque. Comme ils avoient renoncé à faire retourner les culottes d’écarlate, au moins pour le moment, rien ne pouvoit les engager à remettre leur visite plus tard qu’au lendemain matin. La résolution fut prise en conséquence, et le départ fixé à onze heures.

« Allons, ma chère, dit mon père à ma mère, il convient, qu’en bon frère et en bonne sœur, nous nous rendions chez mon frère Tobie, pour protéger et favoriser son attaque. »

Il y avoit déjà quelque temps que le caporal et lui étoient habillés, quand mon père et ma mère arrivèrent ; et l’horloge venant à sonner onze heures, c’étoit le moment de se mettre en marche. Mon père n’eut que le temps de glisser sa lettre d’instruction dans la poche d’habit de mon oncle Tobie, et il se joignit à ma mère pour lui souhaiter un heureux succès.

« Je voudrois, dit ma mère, les voir par le trou de la serrure. — Mais uniquement par curiosité. » —

« Appelez chaque chose par son nom, dit mon père ; — et regardez ensuite par le trou de la serrure tant qu’il vous plaira. »