Voulez-vous demeurer belles et jeunes ?/4

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IV
Du Régime alimentaire et de l’Hygiène

Nous avons déjà dit quelques mots du régime alimentaire qu’il fallait suivre pour obtenir et conserver le calme de l’esprit. Parlons, maintenant, de celui qu’il faut suivre pour obtenir et conserver le calme du corps, pour demeurer jeune, pour ignorer la vieillesse.

La Beauté et la Jeunesse n’existent pas sans la Santé ; l’on peut même dire que c’est la santé qui fait la jeunesse et la beauté : la maladie fane la jeunesse, tandis que la santé fait la vieillesse aimable, indulgente, souriante. L’on voit des vieillards infiniment plus gais, infiniment plus jeunes que leurs petits enfants, et l’on dit qu’ils ont une « verte » vieillesse.

Soyez sûrs que ceux-là ne doivent cette éternelle jeunesse qu’à un régime alimentaire et à une hygiène sévères.

La base du régime est : ne pas trop manger, et ne manger que des aliments sains.

L’on recommande de ne faire qu’un repas vraiment substantiel — à midi, — et le soir de se contenter d’un potage. De cette façon, la digestion s’opère aisément grâce aux exercices de l’après-midi, et ne trouble pas le sommeil.

Choisissez vos aliments : la quantité ne remplace pas la qualité.

Consultez ce tableau : il exprime le nombre de calories que produisent 100 grammes d’une substance :

Salade 10 calories.
Légumes frais 40
Cait 60
Pommes de terre 80
Viande 90
Poisson 110
Œufs 150
Pain 250
Riz 340
Sucre 380
Chocolat 410
Beurre 750

Un homme dans la force de l’âge a besoin d’absorber, chaque jour, 3.000 calories environ, et il importe, bien entendu, de les répartir, et selon les quantités voulues, sur différents aliments de manière à contrarier leurs défauts et exalter leurs vertus. Il ne faudrait pas, par exemple, demander ces 3.000 calories à un seul élément échauffant.

Voici dans quelles proportions nous conseillons de les rechercher pour le déjeuner. Nous répétons qu’à midi l’on doit se lester de 2.500 calories, et, le soir, n’en recevoir que 500.

Pain 1.500 calories.
Hors-d’œuvre 100
Viande ou poisson 300
Légumes 150
Fromage 100
Vin 350

Ce qui représente environ un poids de 2 à 3 kilogrammes de nourriture et boisson.

Mais, cette ration peut être sensiblement diminuée Pour une’ personne qui n’a pas grand effort — physique ou intellectuel — à fournir.

Les aliments les plus complets, c’est-à-dire ceux qui contiennent, dans les proportions voulues, les diverses substances, et qui, par là, peuvent être considérés comme les plus sains, sont le lait, les œufs et le pain. Celui qui développe le plus de calories, qui est le meilleur fortifiant (mais qui ne pourrait être employé seul) est le sucre. Le poisson (qui ne pourrait être employé seul non plus, car il ne constitue pas un aliment complet) doit à la grande quantité de phosphore qu’il contient, la faculté d’être un excellent reconstituant, surtout pour les enfants.

Dans une autre brochure : Voulez-vous vous soigner vous-mêmes ? nous avons indiqué les vertus des c simples », c’est-à-dire des plantes qui poussent naturellement, sans être cultivées, et comment elles permettent de combattre les maladies et indispositions. On peut également les combattre en choisissant les légumes et les fruits :

Raisin : Quand on se porte bien, il faut avaler seulement la pulpe ; quand le ventre est relâché, il faut avaler la pulpe et la peau, et rejeter les pépins ; quand on est constipé, on avale les pépins avec la pulpe, et on rejette la peau.

Figue : Elle combat la phtisie.

Pomme : Elle combat les spasmes.

Pêche : Elle combat le diabète.

Cerise : Elle combat l’hystérie.

Fraise : Elle fortifie le système nerveux.

Laitue : Elle est rafraîchissante, et combat les inflammations d’intestins.

Pomme de terre : Elle combat l’entérite.

Céleri : Il combat la goutte.

Tomate : Elle donne, au contraire, la goutte.

Oseille : Elle facilite la digestion.

Epinard : C’est un excellent laxatif ; on l’appelle le « balai de l’intestin ».

Il y a, on le sait, quatre tempéraments : bilieux, nerveux, sanguin, lymphatique.

Aux bilieux, il faut des viandes rouges, saignantes, et le régime végétal. Mais, ni matières grasses, ni farineux. Pas de café, pas d’alcool. Beaucoup de laitue et de tomate.

Aux nerveux, il faut, également, le régime végétal et du poisson. Bien entendu, pas d’excitants. Beaucoup de tisanes calmantes.

Aux sanguins, il faut des viandes blanches, du lait, des fruits à peine mûrs. Peu d’alcool, pas d’épices.

Aux lymphatiques, il faut des viandes noires, des légumes amers, des vins capiteux. Pas de crudités.

Il faut, aussi, tenir compte du climat : dans les pays chauds le régime végétal s’impose, tandis que dans les pays froids c’est le régime animal.

Il faut… il faut beaucoup de choses ! mais, ne vous effrayez pas ! vous les accomplissez sans vous en apercevoir ! il faut manger aux mêmes heures, il faut manger doucement, il faut prendre le temps de mastiquer consciencieusement, il faut boire par petites gorgées, il faut… Bah ! si l’estomac est bon, mangez donc à votre convenance, sans vous soucier de rien. C’est encore le meilleur moyen de se bien porter ! Il y a des gens qui se rendent malades à force de ne vouloir pas l’être, qui perdent leur belle humeur à force de surveiller leur santé. Dans les villes, on abuse un peu trop des médecins, on se laisse un peu trop tenter par les spécialités pharmaceutiques, un peu trop fasciner par les nombreux articles intéressés des journaux, on finit par se Prendre au piège, et on se détraque l’estomac. Tandis qu’à la campagne, où l’on n’entend pas sans cesse parler de ces belles découvertes médicales, l’on ignore entérite, dysenterie, dyspepsie, gastralgie, etc… Quand, Par hasard, ça ne va pas, on avale un bon petit verre de « gnôle », et le tour est joué !

Après l’alimentation il nous faut parler de l’hygiène ; après l’intérieur, l’extérieur.

La principale préoccupation doit être d’assurer la normale transpiration du corps : il ne faut pas laisser les pores s’encrasser, se boucher, il ne faut pas laisser la peau se durcir, il faut la maintenir constamment Roupie. De l’eau ! de l’eau ! de l’eau ! vous n’en userez jamais trop ! Mais, pas d’eau froide ; beaucoup de personnes assurent qu’elle est excellente, qu’elle raffermit les chairs, mais elle resserre, aussi, les tissus, gênant Par là la transpiration ; en outre, son contact est pénible, désagréable, il procure peut-être un coup de fouet qui réveille le paresseux, mais il surprend, il suffoque les nerfs, et peut amener des tremblements qu’on a beaucoup de peine à calmer. Les sensations trop brutales sont aussi mauvaises pour le corps que le sont pour l’esprit lies émotions trop violentes. Les unes et les autres impriment des traces plus ou moins durables.

J’en, dirai autant de l’eau très chaude, laquelle, sans Provoquer une sensation aussi douloureuse, surprend l’économie générale, accélère la transpiration et la circulation, en un mot désorganise la vie normale. L’eau trop chaude présente, encore, l’inconvénient de rougir peau, et de la rendre plus sensible aux diverses variations de la température.

N’employez donc que de l’eau tiède, de l’eau à la température du corps. Il faut, quand on pénètre dans le bain, n’éprouver ni sensation de froid ni sensation de chaud, et l’on doit avoir soin d’entretenir le bain à cette température.

Pour les mêmes raisons, je ne suis pas partisan des douches fortement projetées : elles amènent une accélération de la circulation qui se traduit, souvent, par des battements de cœur pénibles, sinon dangereux. Il ne faut pas croire que l’excitation — d’ailleurs légère — qu’elles causent ne laisse pas de traces : la somme de force dépensée en quelques instants est naturellement prise sur la provision, c’est-à-dire que l’excitation est infailliblement suivie d’une dépression.

Dussé-je me faire longuement conspuer, je déconseillerai les bains froids, les bains de pleine eau aux femmes. Pour les hommes, passe ; pour elles, non.

Elles sont plus délicates, elles sont — ne l’oubliez jamais — les esclaves de l’appareil compliqué et fragile de la maternité, elles sont sujettes à toutes sortes d’indispositions, de maladies inconnues des heureux hommes. C’est pourquoi je n’admire nullement les exploits des nageuses, des championnes de tennis, courses à pied et autres exercices violents, c’est pourquoi je les considère comme de vulgaires encouragements à la stérilité. Car, ne l’oubliez pas non plus, la maternité rend belle la femme la plus laide,’elle la rend sympathique, elle la fait resplendir de fierté, elle l’illumine, elle l’élève au rang des véritables femmes, elle transforme la poupée de luxe en mère adorable et respectable. Napoléon, à qui l’on demandait quelle était la plus belle femme, répondit :

— Celle qui a le plus d’enfants !

Sans doute, la femme ne doit pas dédaigner tous les exercices physiques, mais elle doit se contenter de ceux qui sont faits pour elle et non de ceux qui sont faits pour l’homme. C’est ainsi que je considère comme criminelle, une femme qui ne veut pas être une « véritable » femme, celle qui monte à cheval à califourchon. L’exercice du cheval n’est déjà pas très recommandable à cause des secousses brutales et répétées qu’il imprime au corps, mais à califourchon ! En vérité, c’est un exercice abortif ou préventif.

En revanche, nous ne saurions trop recommander la marche, qui développe les muscles et facilite la digestion, active la circulation, aide la respiration, qui constitue le meilleur des apéritifs et des digestifs ! Elle combat, en outre l’obésité, entretient la souplesse des jointures. Toute personne doit, faire au moins deux heures de marche par jour, une heure le matin, une heure l’après-midi.

Depuis quelque temps, il est fort question de marcher sur la pointe des pieds ; pourquoi toujours se révolter contre la nature ? Si Dieu avait voulu que nous marchions sur la pointe des pieds, il nous les aurait faits en conséquence ! Marchons donc naturellement. Au reste, avec leurs hauts talons, les femmes marchent, sans le vouloir, soir la pointe.

La marche fatigue et repose à la fois, elle dépense la somme d’efforts dont il importe die se débarrasser chaque jour, et, en même temps, elle reconstitue une nouvelle provision d’énergie. Elle apaise les nerfs, elle les détend, elle calme les soucis, elle dissipe les inquiétudes. Elle est et tonique et lénitive : n’est-ce pas »a panacée universelle ? Elle met de l’ordre dans les idées, et beaucoup de personnes ne peuvent prendre de graves décisions qu’en marchant.

Que votre appartement ne soit pas trop chauffe : il ne faut pas étouffer, il faut respirer à l’aise ; mais qu’on n’y gèle pas non plus ! Ne suivez pas la mode qui consiste à laisser les fenêtres ouvertes pas les plus grands froids : c’est un excellent moyen de contracter des rhumes, des bronchites, des pleurésies, des pneumonies, dont on meurt fort bien. Il ne faut rien exagérer. Quand je vois des mères qui, par snobisme — il n’y a pas d’autre mot, — font marcher leurs enfants pieds nus dans la neige, j’ai toujours envie de les traiter d’assassins. Et j’estime un peu fous ceux qui, le jour de Noël, traversent la Seine à la nage.

Je recommanderai de ne pas coucher dans unie alcôve, un cabinet, une pièce trop petite. Il faut qu’autour du dormeur l’air puisse se renouveler aisément, sous peine de ne plus respirer que de l’acide carbonique. Les lits bretons si jolis, si pittoresques à l’œil, sont d’une hygiène déplorable, et les plus riches tentures du monde sont malsaines dès qu’elles contrarient l’aération.

Pour devenir très vieux — encore une vérité de La Palice ! — il faut se ménager. L’homme reçoit à sa naissance une certaine provision de vie : s’il l’use tout de suite tant pis pour lui ! Qui va piano va sano. Il ne faut pas abuser de la vie, il ne faut pas se livrer étourdiment à toutes les jouissances qu’on rencontre sur son Chemin, pas plus à l’alcool qu’aux émotions violentes, Pas plus au travail intensif qu’à… la paresse intensive, car la paresse fatigue à sa façon. Mesurons chaque effort, donnons l’effort voulu, ne donnons pas un effort trop grand. À quoi bon gaspiller inutilement les forces ? à quoi bon jeter l’argent par les fenêtres ?

Un écrivain anglais, Mme Nora Vynne, a dit : « L’âge est un mal volontaire qui n’est pas du tout inévitable. Ce n’est pas une question de dates et d’anniversaires, c’est une affaire de tendances naturelles et de dispositions. Peu importe l’âge du corps, du moment où l’intelligence, les émotions et les instincts restent jeunes. La jeunesse n’est pas une période de la vie, mais une qualité, un trait de caractère, un état d’âme. La vieillesse n’est pas autre chose qu’une des formes de l’égoïsme ». Cette pensée est aussi jolie que vraie : on peut, si on le veut, ne pas vieillir.

Vous ne voulez pas mourir ? ne craignez pas la mort ! La mort prend ceux qui ont peur d’elle, c’est-à-dire ceux qui ne lui offrent aucune résistance, qui lui présentent un corps affaibli par les excès et un cœur déprimé par la lâcheté. Ce n’est pas parce que l’on a soixante ans qu’on doit mourir : la mort fauche à tous les âges. À soixante ans, il faut se dire : « Je peux vivre encore quarante ans ! Mais oui ! je peux atteindre cent ans ! je vais continuer de faire le bien autour de moi, j’aiderai mes enfants et mes petits-enfants, je sourirai à tout le monde, je garderai et amuserai les petits, grâce à eux, je demeurerai jeune ! » N’ayez pas d’ennemis, ne craignez personne, et vous vivrez vieux.

Les remords tuent aussi vite que la maladie. Au reste, les remords sont la maladie de l’esprit, ils le tourmentent, le tenaillent, le cisaillent, ils le butent, le rendent hargneux, méchant, mécontent de lui-même, mécontent d’autrui, sévère, injuste. « La mort, a écrit Stahl, est un vrai suicide, plutôt un meurtre que l’âme exerce sur son corps par ignorance ou par imprudence. »

Je crois volontiers que l’esprit préside aux opérations du corps : soignez donc l’esprit autant — et même plus — que le corps, pratiquez l’hygiène spirituelle comme l’hygiène physique, éloignez les maladies spirituelles comme les maladies physiques. Et vous deviendrez centenaires !