Voyage de Marco Polo/Livre 1/Chapitre 8

La bibliothèque libre.

VIII
Comment Marco Polo se rendit agréable au Grand Khan.


Marco se fit bientôt aux manières de la cour de l’empereur des Tartares. Et ayant appris les quatre différentes langues de cette nation, en sorte qu’il pouvait non seulement les lire, mais aussi les écrire, il se fit aimer de tous, mais particulièrement de l’empereur, lequel, afin de faire éclater sa prudence, le chargea d’une affaire dans un pays éloigné et où il ne pouvait pas se rendre en moins de six mois. Il s’en acquitta avec beaucoup de sagesse et s’acquit tout à fait les louanges et les bonnes grâces du prince. Et sachant que l’empereur était curieux des nouveautés, il eut soin de s’informer, dans tous les pays par où il passa, des mœurs et des coutumes des hommes, des différentes espèces et de la nature des animaux, dont il faisait après cela le rapport à l’empereur, et par où il se concilia si bien son amitié que, quoiqu’il n’eût que dix-sept ans, le roi s’en servait dans les plus grandes affaires du royaume, l’envoyant dans les différentes parties de son vaste empire. Après qu’il avait expédié les affaires de sa commission, il employait le reste du temps à observer les propriétés des pays ; il remarquait la situation des provinces et des villes, ce qui se trouvait d’extraordinaire ou qui était arrivé dans les différents lieux par où il passait, et il mettait tout par écrit. Et c’est de cette manière qu’il a procuré à nos Occidentaux la connaissance de ce qui fera la matière du second livre.