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Eugène Hatin, Histoire politique et littéraire de la presse en France : Introduction (1859)




INTRODUCTION HISTORIQUE




RECHERCHES
SUR
LES ORIGINES ET LES PRÉCÉDENTS DU JOURNAL




Des moyens d’information chez les anciens.
Les Acta diurna des Romains.


Chercher depuis quand le journal existe, c’est, en apparence, chercher depuis quand les hommes sont sociables, tant la vie commune nous semblerait impossible aujourd’hui sans ce merveilleux instrument de communication. Si, en effet, le journal est bien véritablement un pouvoir, il est encore plus une habitude ; c’est « une nécessité sociale, selon l’expression de Royer-Collard, plus encore qu’une institution politique. » Aux nations modernes il faut des journaux, comme aux Romains il fallait les jeux du Cirque : c’est un des besoins de notre existence, et comme un autre pain quotidien dont nous ne saurions plus nous passer.

Mais il en est de cette admirable invention comme de tant d’autres que le temps nous a léguées : on en jouit sans s’inquiéter d’où elles viennent, ni de ce qu’elles ont pu coûter. Nous sommes si bien accoutumés à voir arriver chaque matin cet infatigable messager, qui nous apporte à heure fixe, et quelque temps qu’il fasse, les nouvelles de toutes les parties du monde ; nous trouvons cela si commode, si naturel même, que volontiers nous nous laisserions aller à croire qu’il en a toujours été ainsi. Et pourtant le journal ne remonte guère au-delà de deux cents ans ; c’est même à peine si, chez nous, il compte un siècle de véritable existence.

Ce n’est pas que les généalogistes aient manqué au journal depuis qu’il est devenu une puissance ; il s’est trouvé des flatteurs auxquels le moyen-âge même a paru une origine trop récente pour ce parvenu, et c’est à Rome, en attendant la Grèce, qu’ils ont placé son berceau. Pour nous le journal est fils de l’imprimerie, il est impossible sans elle, il n’existe et ne se comprend que par elle et avec elle.

Cependant le besoin auquel répond la presse périodique est si vrai, il est tel, qu’on peut supposer avec grande apparence de raison que les peuples qui ont successivement exercé l’empire du monde ou marqué sur la terre leur trace civilisatrice ont dû avoir, sinon des journaux, au moins quelque chose qui leur en tînt lieu jusqu’à un certain point. Il serait intéressant de connaître quels étaient chez ces peuples les moyens de publicité, quels étaient leurs moyens de communication, d’information ; malheureusement nous manquons presque absolument de données à cet égard.

Des anciens dominateurs de l’Asie nous ne savons rien, sinon que les Babyloniens, si l’on en croit Josèphe, auraient eu des historiographes chargés d’écrire jour par jour le récit des événements publics, et ce serait d’après ces matériaux qu’au témoignage du même auteur, Bérose aurait composé son histoire de Chaldée.

L’histoire des Grecs est également muette sur ce chapitre ; on sait seulement qu’ils avaient