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DE PONTANGES.

Il se jeta à ses genoux.

— Ô mon Dieu, pardonnez-moi ! Oh ! je t’aime, hélas ! je t’aime plus que jamais ; pardon si je t’ai affligée, mais ma tête était si troublée, j’ai été si horriblement malheureux depuis un mois ! tant d’émotions…

— Quoi ? dit-elle effrayée, que vous est-il arrivé ?

— J’ai voulu me venger ! pardon…

— Oh ! je te pardonne, si tu m’aimes, si tu me donnes le reste de ta vie.

Lionel était anéanti.

— Oui, s’écria-t-il d’une voix étouffée, mon amour est à toi pour la vie ! Oh ! que je t’aime ! cela est horrible, mais jamais, je te le répète, jamais je ne t’ai plus adorée… Oh ! ne pleure pas, ne doute pas de mon amour, Laurence : quel que soit notre avenir, il faudra croire que je t’aime.

— N’importe, il faudra le dire toujours, reprit Laurence avec grâce. Que j’ai eu peur ! ajouta-t-elle en s’essuyant les yeux, j’ai cru un moment vous avoir perdu.

— Ah ! jamais, jamais ! cela est impossible, rien ne pourra nous séparer… tu m’appartiens !… En disant ces mots, Lionel serrait Laurence dans ses bras avec une sorte de frénésie ; son amour ressemblait à de la haine : un ennemi qu’on aurait séduit à force de beauté vous aimerait ainsi… Laurence le regardait avec effroi.

— Calmez-vous, disait-elle, je vous ai pardonné ; mais qui vous afflige ? est-ce quelque malheur de fortune ? Non, je suis riche, vous le savez… ce ne peut être cela… Un voyage, une promesse ?… mais non, non, rien ne peut nous séparer…

— Oh ! comme tu m’aimes ! s’écria-t-il d’une voix déchirante. Et, malgré lui, ses paroles d’amour, ses caresses étaient d’amers adieux ; sa tendresse était du désespoir. — Oh ! promets-moi, ajouta-t-il, de ne jamais me haïr !

— Moi, te haïr ? quelle idée !… je ne le pourrais pas !

— Ô mon amour !…

On entendit marcher vivement dans le corridor.

— Madame, dit Clorinde en ouvrant la porte, c’est un monsieur qui arrive à cheval ; il demande à parler à M. de Marny